Les mathématiciens du XX ème siècle.

Si le XIX ème siècle fut celui de la révolution industrielle le vingtième fut, dans l'indifférence du peuple, celui des mathématiciens.

La relativité restreinte :

Maxwell (1831 - 1879) réalise, en 1873 d'importantes recherches dans quatre domaines la vision de la couleur, la théorie moléculaire, l'électricité et le magnétisme. Il unifie les deux derniers par une théorie unique, l'électromagnétisme.

Cette théorie de Maxwell et les équations qui portent son nom permettent de décrire la propagation des ondes lumineuses dans le vide et d'en prédire un spectre de fréquences théoriquement illimité.

Hendrik Antoon Lorentz (1853 - 1928 ) est célèbre pour ses travaux qui portèrent sur l'électromagnétisme. Il a laissé également son nom aux transformations de Lorentz qui sont à la base de la théorie de la relativité restreinte. Elles ont été présentées par Lorentz dans le but d'expliquer les résultats de l'expérience de Michelson-Morley par une contraction réelle des longueurs dans le sens du mouvement, ce qui n'est d'ailleurs pas compatible avec l'interprétation moderne de la théorie de la relativité restreinte qui affirme seulement que la mesure d'une distance ou d'une durée dépend du référentiel dans lequel se fait cette mesure et n'a donc pas de caractère absolu. La théorie de Lorentz implique également l'existence d'un référentiel absolu, le seul où les lois de l'électromagnétisme seraient applicables et d'un milieu, l'éther, qui servirait de support à la propagation des ondes électromagnétiques et qui serait fixe dans ce référentiel absolu.

Les transformations de Lorentz sont des transformations linéaires des coordonnées d'un point dans l'espace-temps de Minkowski, à quatre dimensions (trois d'espace et une de temps) et relativiste. On peut noter que la terminologie subit quelques variations : suivant que la théorie dans laquelle on travaille a trait ou non à la physique quantique, les termes transformations de Lorentz désignent des transformations qui peuvent être différentes.

Dans le cadre de la relativité restreinte, les transformations de Lorentz correspondent à la loi de changement de référentiel galiléen, sans translation dans l'espace ni dans le temps, sous laquelle les équations de la physique doivent être préservées, ainsi que la vitesse de la lumière, qui est la même dans tout référentiel galiléen. C'est en particulier pour faire en sorte que les équations de Maxwell s'écrivent à l'identique dans tout référentiel galiléen que Hendrik Antoon Lorentz a introduit mathématiquement cette loi avant qu' Albert Einstein n'en réalise toute la portée physique. L'ensemble de ces transformations des coordonnées, aussi appelées transformations de Lorentz propres et orthochrones, est composé des transformations spécifiques à la relativité restreinte et des rotations dans l'espace à trois dimensions.

Dans le cadre de la relativité restreinte (qui reste valable aussi en relativité générale), une quantité est dite invariante de Lorentz, on dit aussi scalaire de Lorentz, lorsqu'elle n'est pas modifiée sous l'application d'une transformation de Lorentz. Cela revient à dire que sa valeur est la même dans tous les référentiels galiléens.

Lorentz recherchait des règles qui maintiendraient l'invariance des équations de Maxwell lors du passage d'un référentiel à un autre.

En 1887, Edward Williams Morley (1838 - 1923) passa à la postérité lorsqu'il réalisa l'expérience avec Albert Abraham Michelson. Aucun des deux ne parvint à tirer la conclusion que leur expérience réfutait l'hypothèse de l'éther. Cependant, d'autres scientifiques le firent et le débat créé par leur expérience conduisit finalement aux travaux d'Einstein sur la théorie de la relativité. Morley travailla aussi avec Dayton Miller sur d'autres expérimentations concernant l'éther après cette expérience avec Michelson.

Morley travailla également sur la composition en oxygène de l'atmosphère terrestre, sur la dilatation thermique et la vitesse de la lumière dans un champ magnétique. Ses travaux sur la détermination du rapport entre la masse de l'oxygène et celle de l'hydrogène lui valurent la médaille Davy en 1907.

En 1878, Albert Abraham Michelson (1852 - 1931) réussit sa première mesure de la vitesse de la lumière.

Expérimentateur de génie, Michelson construisit un interféromètre devenu célèbre pour avoir tenté de mesurer la vitesse de la terre par rapport à l'éther, milieu hypothétique permettant la propagation de la lumière, vue comme onde. Ces travaux lui valurent le prix Rumford en 1888.

La résolution de son interféromètre de 1881 étant trop proche de l'écart qu'il voulait mesurer, ce n'est que suite à son association avec Edward Morley en 1887 que les problèmes de l'existence de l'éther et de l'invariance de la vitesse de la lumière furent posés, résolus en 1905 par la théorie de la relativité restreinte.

Il contribua au développement de la technique de la synthèse d'ouverture, imaginée par Hippolyte Fizeau, pour déterminer le diamètre apparent des étoiles par des méthodes interférométriques

En 1887, Michelson - Morley réalisèrent l'expérience qui porte leurs noms. Celle-ci était conçue pour mesurer la vitesse de la lumière dans son support supposé (l'éther) et en se basant sur la loi classique d'addition des vitesses. Il est apparu que la Terre sur son orbite avec une vitesse d'environ 30 km/s était le laboratoire idéal pour déceler une variation de la vitesse de la lumière sur des parcours identiques en longueur mais qui devaient être différents en temps selon qu'ils seraient dans le sens du mouvement ou perpendiculairement au vent d'éther. Or, les temps ce révélèrent égaux.


Illustration de l'expérience de Michelson-Morley :

On construit l'appareil de telle sorte que les miroirs M1 et M2 soient à égale distance, D, de la lame séparatrice.

Régulièrement refaite à chaque fois qu'un progrès technique permet de gagner en précision, avec toujours le même résultat).



L'interprétation de ce résultat a conduit les physiciens à conclure que l'éther (hypothétique) n'existe pas. Cela montre aussi que la vitesse de la lumière est la même dans toutes les directions.

C'est dans l'histoire de la physique une des plus importantes et une des plus célèbres expériences, elle valut à Michelson le prix Nobel de physique en 1907.

En 1902, V Henri Poincaré (1854 - 1912) publie La Science et l'hypothèse. Même si ce livre est plus un ouvrage d'épistémologie que de physique, il appelle à ne pas considérer comme trop réels de nombreux artéfacts de la physique de son époque : le temps absolu, l'espace absolu, l'importance de l'éther. Einstein s'était particulièrement penché sur ce livre [1], et les idées contenues font du livre un précurseur de la relativité restreinte.

En 1905, Poincaré pose les équations des transformations de Lorentz, et les présente à l'Académie des sciences de Paris le 5 juin 1905. Ces transformations vérifient l'invariance de Lorentz, Ces transformations sont celles qui s'appliquent en relativité restreinte, et on emploie encore aujourd'hui les équations telles que les a écrites Poincaré. Mais pour expliquer l'origine physique de ces transformations, Poincaré a recours à des contractions physiques de l'espace et du temps, conservant en références un éther et un temps absolu. C'est Einstein qui s'emploie à montrer qu'on retrouve les mêmes transformations en partant simplement du principe de relativité, éliminant les notions de référentiels ou horloge absolu, et faisant des différences de longueur des effets de la perspective dans un espace-temps en quatre dimensions, et non des contractions réelles.

Poincaré a également proposé certaines idées sur la gravité, se faisant précurseur de la relativité générale, notamment la propagation de la gravitation à la vitesse de la lumière, et indiqua la possibilité d'existence des ondes gravitationnelles qu'il appelait ondes gravifiques . La nouvelle loi était invariante par les transformations de Lorentz. Sa faiblesse était de trop rechercher l'analogie avec les lois de l'électromagnétisme. Paul Langevin note que Poincaré a trouvé plusieurs solutions possibles qui présentent toutes ce caractère commun que la gravitation se propage avec la vitesse de la lumière, du corps attirant au corps attiré, et que la loi nouvelle permet de représenter les mouvements des astres mieux encore que la loi ordinaire puisqu'elle atténue les divergences existant encore entre celle-ci et les faits, dans le mouvement du périhélie de Mercure, par exemple.

Si les physiciens de l'époque étaient parfaitement au courant des travaux de Poincaré, le grand public l'a ensuite presque oublié, alors que le nom d'Einstein est aujourd'hui quasiment connu de tous. Récemment, quelques voix ont cherché à rappeler le rôle de Poincaré, mais d'autres sont allés plus loin, cherchant à faire de Poincaré l'auteur de la théorie de la relativité. Cette controverse sur la paternité de la relativité est d'autant plus délicate que les conflits politiques se mêlent aux questions de lecture des articles de physique.

Albert Einstein (1879 - 1955) après des études primaire et secondaires, en 1896, entre,à l'École polytechnique fédérale de Zurich et obtient son diplôme en 1900. Il lit beaucoup et approfondit presque exhaustivement d'excellents livres de référence, comme ceux de Boltzmann, de Helmholtz et de Nernst. Son ami Michele Besso l'initie aux idées de la Mécanique de Ernst Mach.

Selon plusieurs biographies, de 1900 à 1902 sera un temps de précarité pour Einstein qui postulera à de nombreux postes sans être accepté. La misère d'Einstein préoccupa énormément son père qui essaya en vain de l'aider à trouver un emploi. Albert se résigna à oublier l'université pour chercher un travail administratif.

Il publie en 1901 son premier article scientifique dans les Annalen der Physik sur la capillarité.

En 1902, Philipp Eduard Anton von Lenard (1862- 1947) observe que l'énergie des électrons émis par un métal qu'éclaire un rayon lumineux est indépendant de l'intensité de celui-ci, mais qu'aucun électron n'est émis au dessous d'une certaine fréquence du rayonnement.

En 1902, Albert Einstein est embauché à l'Office des brevets de Berne, ce qui lui permet de vivre correctement tout en travaillant ses théories. Durant cette période, il fonde avec Maurice Solovine et Conrad Habicht, cercle de discussions l'Académie Olympia.

1905 est l'année miracle celle où Einstein publie plusieurs articles dans la revue Annalen der Physik.dont Max Planck est l'un des responsables.

Le premier article, publié en mars, expose un point de vue révolutionnaire sur la nature corpusculaire de la lumière.

A partir de l'effet photoélectrique découvert par Hertz en 1887, de la nature électromagnétique de la lumière proposé par Maxwell et celle d'une lumière comportant des grains d'énergie toujours égaux à un multiple de (h), Einstein donne une nouvelle version :

La lumière est un champ électromagnétique oscillant, se déplaçant à la vitesse (c) et emportant son énergie sous le forme de grains ou quanta (ΔE = photon) qui s'expriment en fonction de la fréquence d'oscillation (f = (ΔE / h).

Il conclut en énonçant que la lumière se comporte à la fois comme une onde et à la fois comme un flux de particules. Il mit alors fin à un débat vieux de plus d'un siècle sur la nature de la lumière.

Lors de la propagation d'un rayon lumineux à partir d'un point, l'énergie n'est pas distribuée dans des espaces de plus en plus grands, mais elle est constituée d'un nombre infini de quanta d'énergie localisés en des points de l'espace, qui se déplacent sans se dissocier et qui ne peuvent être absorbés et produits que d'un coup.

Einstein propose pour d'écrire l'effet photoélectrique :

Un rayon lumineux qui pénètre un métal transmet totalement ou partiellement son énergie ((f . h = ΔE) à un électron d'un de ses atomes. Cet électron acquiert une énergie cinétique égale à (Emax = h. f - T) où (T) est le travail nécessaire pour extraire l'électron du métal.

Il ajoute : l'énergie d'un rayon de lumière ne se disperse pas dans l'espace mais reste liée à un certain nombre de quanta d'énergie qui se dispersent

Le deuxième article sur le mouvement brownien est publié deux mois plus tard, en mai, Einstein y explique que les molécules tirent leur énergie cinétique de la chaleur. Cet article est encore plus fondamental du fait qu'il donnait une preuve théorique (vérifiée expérimentalement par Jean Perrin en 1912) de l'existence des atomes et des molécules. Le mouvement brownien a été expliqué au même moment qu'Einstein par Marian Smoluchowski, et aussi par Louis Bachelier en 1900.

Le troisième article est le plus important, car il représente la rupture intuitive d'Einstein avec la physique newtonienne. Dans ce texte intitulé l'électrodynamique des corps en mouvement. Einstein s'attaque au postulat d'un espace et d'un temps absolus, tels que définis par la mécanique de Newton, et à l'existence de l'éther, milieu interstellaire inerte qui devait soutenir la lumière comme l'eau ou l'air soutiennent les ondes sonores dans leurs déplacements. Cet article, publié en juin, amène à deux conclusions : l'éther n'existe pas, et le temps et l'espace sont relatifs.

Le nouvel absolu qu'Einstein édifie est maintenant détaché de la nature quantitative de ces deux notions l'espace et le temps mais à la conservation de leur relation à travers les différents référentiels d'études. Les conséquences de cette vision révolutionnaire de la physique, qui découle de l'idée qu'Einstein avait de la matière : les lois de la physiques sont les mêmes dans tous les systèmes de référence qui ne subissent pas d'accélération relative de l'un à l'autre.

Le quatrième article, publié en septembre, sous le titre interrogatif L'inertie d'un corps dépend-elle de son contenu en énergie? en donne cette réponse célèbre : celle de la formule d'équivalence masse-énergie. (E = m.c2)

La vitesse de la lumière dans le vide (c) est une vitesse limite infranchissable pour le mouvement de tous corps et signaux. Cette vitesse limite (c) est la même dans tous les référentiels, c'est une vitesse absolue.

Einstein considère que les lois de transformation des composantes des champs électriques, magnétique et des phases des ondes électromagnétiques restent valides quand l'on change de référentiel dans le cadre des transformations de Lorentz

Einstein y développe aussi les théories de la dilatation du temps et la contraction des longueurs.

Einstein rassemble ces quatre articles sous l'intitulé : Relativité restreinte.

La publication des articles de 1905 a projeté Einstein dans le monde universitaire. En 1908, il sera maître de conférence à l'université de Berne et en 1909 il est professeur à Zurich.