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Du même auteur :">. Du même auteur :
Dictionnaire de physique du XXI siècle, 200 pages.
Chronologie des inventions de la préhistoire au XX siècle inclus : 530 pages.
L’ORGINE DEL’ATOME. L’ORIGINE DE L’UNIVERS L‘ORIGINE DE LA VIE.
L’ORIGINE DUBLUFF QUANTIQUE. L’ORIGINE DUMONDE MODERN
L’ORIGINE DES CIVILISATUIONS
Souvenir de nos deux longues vies
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Introduction
Un sujet comme celui de ce livre ne peut être inventé aussi je me suis référé aux sources les plus sérieuses pour traiter les paragraphes les uns après les autres.
Mais les découvertes archéologiques et des papyrus ont fait évoluer les connaissances de sorte qu’on se trouve parfois devant une réalité contraire à ce qui était précédemment admis.
Mes références furent L’Encyclopaedia Universalis, la Grande Encyclopédie Larousse, les revues le Monde de la Bible, les
livres : Le Berceau de la civilisation, Time Edition, également le livre “La civilisation égyptienne” édité en 1994 chez Payot.et L'Encyclopédie Imago, Enfin d’une façon globale toutes les informations que l’on peut trouver sur Google.
Ce livre est l’histoire des civilisations, au sens le plus stricte du terme. C’est pourquoi les noms des personnage sont inscris en entier comme leurs dates de naissance et de décès.
J’ai considéré les religions comme un élément de civilisation. Je me suis attardé sur la Palestine dont la bible se veut à la fois historique et la base de leur religion. Ultérieurement les recherches archéologiques et les écrits ont prouvé que les récits historiques de la Bible n’étaient pas conformes à la réalité. .
Vous constaterez aussi que des légendes comme le déferlement des barbares sur Rome sont à rectifier.
En commençant votre lecture vous remarquerez qu’on ne pouvait trouver une origine plus élémentaire que l’instinct des animaux les plus primitifs, jusqu’aux singes. Ne croyez pas que l’homme descend du singe. Non il est un singe, avec une minuscule modification du cerveau.
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L’instinct animal
Le cerveau d'un animal adulte mémorise, d’une part le fonctionnement automatique des organes vitaux relatifs à la respiration, la circulation sanguine, la digestion. D’autre part contrôle le comportement de l'individu en fonction des messages qu'il reçoit de deux origines :
Les messages externes relatifs à la vue, l'ouïe, l'odorat, le toucher et le goût perçus par les organes correspondants et interprétés par la mémoire animale (innée et acquise), perpétuellement modifiée par l'expérience.
Les messages internes relatifs à la faim, à la soif, au sommeil et au sexe qui déclenchent respectivement le besoin de trouver de la nourriture, un point d'eau, un gîte, un partenaire, et contribuent à la connaissance de l'environnement géographique, familial et social de l'individu.
De nombreux comportements résultent d'un mélange complexe de messages internes et externes :
- La maternité libère des hormones qui engendrent l'instinct maternel. La mère, parmi d'autres enfants, reconnaît les siens en fonction de multiples messages sensoriels externes : visuels (apparence physique), odorants, sonores, tactiles etc.
- →Le sexe peut déterminer la fidélité d'un couple que l'instinct familial
lie avec ses enfants. L'extension d'un lien entre plusieurs familles crée l’instinct grégaire qui groupe une communauté sous l'autorité d’un chef.
→Instinctivement, l'araignée tisse sa toile ; les abeilles, les fourmis et les termites édifient leur habitat. Les nouveau-nés des mammifères trouvent seuls la mamelle de leur mère, etc.
Les comportements instinctifs sont mémorisés dans les gènes, lesquels, lors du développement embryonnaire, induisent les
structures cérébrales capables de les restituer automatiquement.
Le cerveau de l'animal interprète chaque message sensoriel selon un processus mémorisé qui déclenche un comportement stéréotypé. Par exemple, la vue d'un fruit inconnu peut déclencher le besoin de le manger mais son goût sera agréable ou détestable. Lors d'une nouvelle rencontre, en fonction de cette expérience, l'animal mangera ou laissera le fruit. Si celui-ci est abondant dans son environnement, l'animal
le mémorisera définitivement comme bon ou
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mauvais et cette information se cumulera dans les gènes de ses descendants, chaque génération enrichissant les connaissances des suivantes. C'est ce que certains appellent la collaboration entre l'inné génétique et les acquis de la vie.
L’Inné est inscrit dans le génome de l'embryon et se retrouve dans les structures cérébrales de l’adulte. Il engendre tous les mécanismes du comportement instinctif.
L’acquis résulte d’une expérience mémorisée provisoirement, soit
seule, soit associée à un élément de l’inné qu’elle modifie.
Si, au cours de multiples générations, les individus d’un groupe furent tous soumis à la même expérience répétitive aboutissant toujours au même résultat, celle-ci laissa son empreinte dans le code génétique des descendants en devenant un élément de l'inné. Il y eut interaction entre l'expérimental et l'inné.
Toute espèce animale possède sa mémoire innée modifiée par les acquisd’expériences à répétition.
Face à une situation déterminée, la mémoire innée restitue le réflexe instinctif mémorisé, éventuellement modifié par les acquis des expériences précédentes, le comportement physique qui en résulte inclut les mouvements de toutes les parties du corps, y compris les manifestations sonores.
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L'inné et l'acquis ne sont pas stockés dans des compartiments étanches du cerveau, mais sont en interaction constante. Ils agissent l'un avec l'autre pour créer, au fil des expériences, de nouveaux acquis indispensables à la survie de toute espèce, par exemple pour échapper à de nouveaux prédateurs ou faire face à une situation inhabituelle.
Après une phase d'exploration, les animaux se déplacent dans leur environnement pour y retrouver un point d'eau et les lieux
riches en nourriture, pour y chercher un partenaire sexuel, fuir des prédateurs, trouver une aire de repos... L'élaboration des parcours liés à de telles activités suppose un point fixe, un gîte, que l'animal quitte et qu'il devra savoir retrouver.
La disposition relative des différents lieux de l'environnement et la mise en place des trajets pour les relier constituent ce que Tolman appelle une "carte cognitive". Un animal possédant une telle mémoire de son
environnement est capable, à partir d'une position quelconque, de retrouver un lieu de son espace vital. Comportement physique.
Comportement animal
Selon Tolma, la gestion des rapports sociaux dans lesquels sont engagés de nombreuses espèces animales fait appel à des processus de mémorisation comparables à ceux qui régissent leur orientation géographique. Les lieux seraient des individus faisant partie d'un groupe dans lequel chacun, par rapport aux autres, aurait intégré des rapports de filiation et de hiérarchie.
Les animaux capables de mémoriser leur
environnement géographique, leur niveau hiérarchique familial et social, possèdent dans leur mémoire innée corrélativement l'instinct de propriété et de survie qui les pousse à défendre
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leur territoire, leur famille et leur clan, comme ils défendraient la proie qu'ils n'ont pas envie de se voir voler.
Les chimpanzés, les plus évolués de la gente animale, partagent 99 % de leur patrimoine génétique avec l'Homme. Ils vivent en groupes bisexués d'une quarantaine d'individus dont la protection est assurée par les mâles adultes hiérarchisés, l'animal le plus âgé étant souvent le dominant.
Les chimpanzés se nourrissent de fruits, de feuilles, d'insectes,
de lézards, d'oiseaux et de leurs œufs. Ils utilisent un bâton pour attraper les fruits trop hauts d'accès ; ils cassent les coques dures avec un caillou. Ils utilisent des brindilles pour attraper des fourmis, du miel... Si l'eau est rare, pour boire, ils mâchonnent des feuilles ou des herbes à l’occasion ils les plongent dans des cavités remplies d'eau de pluie.
S'il n'a pas le temps de fuir, le chimpanzé peut lancer une pierre dans la direction d'un
assaillant ou ramasser un bâton pour se défendre et tuer, par exemple, un serpent. Il dispose d'un répertoire sonore pour alerter ses congénères de la présence d'un prédateur ou manifester sa peur, ou encore intimider son agresseur. Dans d'autres circonstances, l'intonation des cris assure simplement la cohésion du groupe ou de la famille. Un grognement particulier est émis par un chimpanzé lorsqu'il découvre une nourriture favorite qu'il est prêt à partager ; ce cri
provoque l'arrivée des autres membres du clan.
Les jeunes apprennent en imitant leurs parents, lesquels possèdent un modèle mental de ce qui doit être un comportement correct et savent influencer la manière de faire de leur progéniture dans ce sens.
Chez diverses espèces animales, les parents fournissent souvent aux jeunes des opportunités pour mieux apprendre. Ainsi, les panthères apportent des proies encore vivantes à leurs enfants pour qu'ils puissent s'entraîner à les
tuer et à les manger.
On a pu voir des mouettes s'emparer d'une pierre et la laisser tomber pour casser un bivalve à coquille dure ; des loutres de mer brisent la carcasse d'un oursin, placé sur leur ventre, à l’aide d'un caillou.
Les ruches, les fourmilières, les termitières sont des exemples d'un comportement collectif extrêmement complexe résultant d'un plan divisé en diverses tâches mais globalement mémorisé par tous les individus dont seuls certains sont
aptes à réaliser une tâche particulière contribuant à assurer collectivement l'ensemble des actes indispensables à la vie de la colonie.
Les troupes de singes, les groupements de phoques, de manchots... sont également régis par des mécanismes biologiques, physiologiques... qui
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unissent leurs membres et règlent leur activité sociale. Les prédateurs, comme les loups, les lions pratiquent la chasse collective. Les castors construisent en commun des barrages et des canaux. Certains cormorans et pélicans, dans un vol simultané, se disposant en demi-cercle et battant des ailes, poussent les poissons vers des eaux peu profondes où ils les capturent.
Une bête sauvage identifie l'un de ses prédateurs à son cri ou à son odeur. Ce message sonore ou odorant restitue
automatiquement l'image précédemment enregistrée de celui qui l'a émis. Elle informe ses congénères du danger en poussant un cri spécifique, en fonction d'un réflexe programmé.
D'une façon générale, on peut affirmer que tout animal est incapable d'avoir une image mentale d'une chose (au sens le plus large du terme) ou d'une situation sans y avoir été précédemment confronté. Mais face à la première déjà vue ou à la seconde déjà vécue, sa mémoire innée,
actualisée par l'expérience, sous l'action d'un simple message sensoriel qui lui aurait été associé, restituera l'image correspondante et le réflexe qui convient : manger tel fruit de préférence à tel autre, fuir tel fauve, attaquer telle proie, défendre son territoire, se cacher de l’orage, s'éloigner du feu ; parmi les bruits et les senteurs de la forêt, reconnaître les cris et les odeurs des prédateurs, d’une proie, d'un congénère, d'un partenaire sexuel.
Etre
démuni d'imagination implique un manque de raisonnement et signifie, par ailleurs, que seul un message sensoriel engendre une action instinctive innée ou une poussée hormonale qui, à son tour, provoque un besoin qui incite à l'action. Ainsi, voir un fruit peut engendrer le besoin de le manger. A l'inverse, un message hormonal provoque chez l'animal le besoin d'entreprendre l'action pour le satisfaire : la faim engendre la recherche d'une
proie. Hors d'une incitation spécifique, l'animal ne connaît aucun besoin et, comme il n'a pas d'imagination, il ne peut éprouver de désir. Il ne vit que dans le concret.
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ANIMAUX DOMESTIQUES OU DRESSÉS :
Les animaux domestiques obéissent aux mêmes lois hormonales et sensorielles que ceux de leur espèce restée sauvages, même si la domestication a développé, au cours des millénaires passés au contact de l'homme, certaines de leurs aptitudes innées. Pour vous en convaincre, voici quelques exemples.
LE CHIEN
Ses ancêtres, les loups, vivaient en bandes hiérarchisées. Le dominant avait priorité dans tous les actes de la vie (chasse, nourriture, reproduction) mais le statut de chef pouvait être remis en question si celui-ci faiblissait ; un autre plus puissant prenait sa place. Leur univers était un espace collectif où se situait la tanière ; ses limites étaient marquées par des jets d'urine.
Le chien conserve sa notion ancestrale d'environnement : la maison est sa tanière, le dominant
son maître, la meute les autres membres de la famille, l'environnement immédiat du domicile son territoire qu'il marque de jets d'urine signifiant que nul étranger n'y est admis sous peine d'agression. Cette zone d'agression est "transportable". La voiture ou tout simplement la proximité du maître devient le territoire à défendre.
A l'extérieur, la rue, le square constituent des zones d’activité : promenade, rencontres, qu'il partage avec ses
congénères. Ici, uriner ne marque pas une zone interdite mais simplement son environnement social ou son chemin qu'il réactualise à chaque passage.
Les chiens ont hérité de leurs ancêtres le sens de la défense du maître, leur aptitude à chasser, à retrouver le gibier. C'est une vieille tendance sauvage qui pousse les chiens de berger à rassembler un troupeau. Autrefois, lorsqu'ils étaient encore sauvages, ils en faisaient autant pour que le clan puisse dévorer le maximum de
proies en un minimum de temps.
Les chiens, face à une situation déjà vécue à laquelle ils ont associé la suite qui en résulte immédiatement, sont capables d’en anticiper les conséquences par des cris, des attitudes, des regards qui témoignent de leur joie ou de leur crainte. Un chien que son maître promène régulièrement s'agite de satisfaction à la vue d'une laisse. Un autre, souvent fouetté, s'éloigne en voyant une lanière. Mais leur comportement réciproque serait le même qu'on
leur montre une laisse ou une lanière. Plus généralement, un chien jappe de plaisir, hurle de frayeur ou d'angoisse, crie de douleur, gronde de colère, baisse la queue de honte ou frétille de joie.
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Les chiens, à force d'entendre la sonorité d'un mot associé à une action et/ou à une chose, les enregistrent ensemble. Si leur cerveau est stimulé par ce même message sonore, instinctivement il restitue l'image mentale correspondante.
Si vous donnez des ordres brefs, autoritaires et répétitifs à votre chien
: "Viens ; marche ; arrête" ; si vous lui jetez une balle et lui ordonnez : "Cherche
ou rapporte", il exécutera (généralement ?) ce que vous lui ordonnez.
Les animaux sont capables de lier un message sensoriel à un événement qui, dans un futur immédiat, lui est habituellement associé.
LE CHAT
Pour confirmer que les animaux "de compagnie" conservent les caractéristiques innées de leur race d'origine, adoptez un chat dont les ancêtres vivaient pourtant depuis des millénaires en compagnie de l'homme. Vous constaterez que, conformément à son espèce sauvage, il reste un animal solitaire, indépendant et vagabond qui ne connaît pas de maître et dont il est utile de se méfier.
LE CHIMPANZÉ
Plusieurs expériences de dressage ont été réalisées : un chimpanzé à qui vous présentez un fruit qu'il aime éprouvera le besoin de le manger. Si vous le lui donnez après qu'il ait appuyé sur une touche "jaune" - que vous lui aurez désignée en prononçant le nom du fruit -, après plusieurs séances, il finira peut-être par associer ce mot, non pas au symbole d'un quelconque langage comme les instigateurs de ces expériences voudraient nous faire croire, mais à un
autre objet, la couleur de la touche mémorisée. Devant un clavier de plusieurs touches de couleurs différentes dont l'une correspond au fruit en question, ce message visuel pourra déclencher chez lui le besoin de manger ce fruit ; cela le poussera à appuyer sur la touche correspondante.
Ce réflexe conditionné résulte d'un phénomène universel concernant le dressage des animaux et leur possibilité de novation. En effet, devant une situation inhabituelle, la mémoire innée de
l'animal lui impose une action stéréotypée plus ou moins bien adaptée. Ce résultat sera bon ou mauvais mais
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contribuera à modifier son comportement ultérieur devant une situation identique. L'expérience se renouvellera jusqu'à la bonne option si celle-ci est compatible avec les capacités de l'espèce animale considérée.
Parce que, dans leur sommeil, certains animaux ont des périodes agitées, on dit qu'ils rêvent. En réalité, des décharges hormonales et/ou électriques intempestives excitent des zones musculaires sans que leur cerveau reconstitue une
quelconque image
Les Hommes
LES PRÉ-HUMAINS
Dans la savane boisée de l’Afrique, il y a environ 7 millions d'années AJC les primates (mammifères aux pouces opposables et aux orbites sur la face) donnent naissance aux grands singes (orang-outang, gorilles, chimpanzés et aux prés humains.
L’homme ne descend pas du singe il en est un avec une légère modification
du cerveau.
Les Préhumains avaient un plan morpho-organique identique à celui des chimpanzés qui vivaient il y a environ 6 à 5 millions d'années AJC. De ce fait, les deux espèces avaient un squelette et des structures cérébrales du type animal quasiment semblables. On ne peut donc différencier les fossiles des Préhumains de ceux des chimpanzés. Il ne manque donc pas un chaînon comme on le prétend souvent, mais une impossibilité d'identifier séparément les os fossilisés de chaque espèce
LES HOMMES
AUSTRALOPITHÈQUES (4 M – 1,6 Av JC)
Les Préhumains comme leurs cousins, les chimpanzés étaient des mammifères bipèdes aux pouces opposables et aux orbites sur la face avec une
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structure cérébrales légèrement modifiée par rapport au type animal.
De générations en générations ces Pré-Humais du fait de leur nouveau cerveau si peu modifié qu’il fut développèrent un nouveau plan morpho- organique, qui progressivement fut, il y a 4 millions d’années, celui des Australopithèques lequel différencie leur squelette de celui des Préhumains et développa chez eux une structure cérébrale double :
- L’une
correspondant à une mémoire animale innée riche du passé de leurs précurseurs ;
- L’autre, toute nouvelle, relative à une mémoire psychique vide de souvenirs mais capable d'en acquérir.
L’adjonction de cette mémoire psychique encore vierge ne changea rien immédiatement au comportement des Australopithèques, tant au niveau individuel que collectif. Il n’y eut pas rupture entre le mode de vie de l’animal Préhumain et celui de
ces "hominidés archaïques" qui conservèrent longtemps des structures familiales et sociales, un langage de cris et de grognements, des habitudes végétariennes, le respect instinctif du chef, la connaissance de leur territoire, la peur de l’orage, tout ceci à la manière de leurs cousins chimpanzés.
Pour comprendre la lente évolution intellectuelle des Australopithèques, il faut savoir qu'actuellement, l'environnement dans lequel grandit un enfant a une importance
déterminante pour la mise en place des connexions cérébrales qui sont à l'origine de l'habileté manuelle et des connaissances intellectuelles de l’adulte.
Le cerveau est un organe dynamique dont l'élaboration puis la structuration progressive repose sur un plan génétique préétabli, mais également sur une organisation et une coordination qui se mettent en place grâce à l'usage qu'on en fait.
De nombreux exemples confirment que les différences intellectuelles entre
les individus doivent leur origine à l'éducation qu'ils reçoivent et non à une quelconque différence de leur structure cérébrale.
Les Noirs de la brousse sont génétiquement à égalité quant à leurs facultés intellectuelles avec les Blancs ; leur différence résulte de leur isolement dans un monde et une civilisation qui leur sont propres, où ils ne peuvent apprendre que ce que sait leur entourage.
De très jeunes enfants adoptés par les membres d'un autre groupe humain que
le leur, à l'âge adulte, montreront les mêmes comportements et les mêmes connaissances que les individus du groupe dans lequel ils auront
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grandi.
Un jeune enfant d'une tribu d'Afrique équatoriale ou d'une peuplade d'Amérique du Sud, enlevé de sa forêt natale pour être élevé dans le cadre de notre civilisation, parviendra à suivre les mêmes études que ses condisciples.
A l'inverse, des enfants séquestrés par leurs parents et n'ayant de contact avec quiconque, souvent, ne savent pas parler. Dépassé le temps de la mise en place des connexions cérébrales, il deviendra difficile, sinon impossible, de
les rééduquer.
Au cours de l'Histoire, on a retrouvé plusieurs dizaines d'enfants sauvages. Abandonnés sans doute très tôt après leur naissance, ceux-ci grandirent et vécurent en bonne intelligence avec des animaux sauvages dont ils adoptèrent les comportements et les cris. L'un de ces cas le mieux documenté est celui de deux fillettes indiennes trouvées, le 4 novembre 1920, en compagnie de loups :
"Lorsqu'on les découvrit, leur capacité phonatoire était nulle. Aucun son articulé ne sortait de leur bouche, rien que des grognements..."
Ils se servirent de galets comme premiers outils, puis progressivement ils les aménagèrent pour obtenir une partie tranchante.
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A l'image des enfants qui développent différemment leurs connaissances en fonction de leur environnement et de l'éducation qu'ils reçoivent, les Australopithèques qui venaient d'acquérir un nouveau système cérébral restèrent longtemps des animaux car leur mémoire psychique ne put rapidement s'enrichir des réalités de leur environnement.
En revanche, (tableau ci-dessus) progressivement, lorsque ces nouveaux hominidés se trouvèrent face à une situation
nouvelle, leur mémoire animale leur imposa un réflexe stéréotypé dont leur mémoire psychique enregistra le résultat, de sorte qu'au fil du temps, par activation de la pensée conceptuelle, les Australopithèques en vinrent, non pas à modifier un comportement automatique par un autre tout aussi mécanique, mais à choisir entre plusieurs options enregistrées dans leur mémoire psychique, la meilleure façon de conduire une action. Ils apprirent à réfléchir.
Ils eurent un comportement intellectuel.
A la vue d'un fruit, d'une baie, d'une graine, en fonction de son aspect global, ces premiers hominidés, instinctivement, comme les chimpanzés, reconnaissaient ceux qui étaient ou non comestibles, mais en les cueillant, ils en eurent une perception tactile ; en les mangeant, ils en définirent le goût. Peu à peu, chaque message sensoriel déclenchant un réflexe en interaction avec la mémoire psychique, engendra chez
eux une image mentale, une pensée qui, de l'aspect général d'un objet, en dissocia progressivement les différents critères universels : couleur, forme, consistance, texture, poids, goût qui ne furent, au début, que des juxtapositions comparatives telles que : (un) fruit (sucré comme le) miel, (une) noix (dure comme un caillou),... Cette exploration sensorielle fut à l'origine des fonctions cognitives des premiers humains, c’est-à-dire de leur comportement
intellectuel.
Si le chimpanzé, par simple réflexe, se cache da la foudre, fuit un fauve, s’éloigne du feu,... les Australopithèques, devant de telles situations, progressivement conçurent, par la pensée, l'idée du danger. Nous ne savons pas jusqu'à quel degré leur psychisme parvint à créer les images mentales de ces abstractions. On peut seulement imaginer que, chez eux, la réflexion motrice de la pensée régula, au fil du temps, leurs réflexes sans modifier
profondément les automatismes de leur comportement et de leur langage. C'est ainsi qu'à l'aide d'une gamme de cris et de grognements inarticulés, ils se constituèrent un vocabulaire rudimentaire de "sons" leur permettant de communiquer entre eux.
On ne retrouva pas d'outils en pierre taillée sur les sites antérieurs à
2,6 MA contenant des fossiles d'Australopithèques. Cela signifie que ces premiers hominidés n'utilisaient que des
bâtons, des galets, des silex,... à
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l'état brut, ce qui résultait d'un double handicap :
-Comme les chimpanzés, ils ne pouvaient opposer leur pouce qu'à l'index, ce qui réduisait leur habileté manuelle :
-Leur faculté d'imagination n'avait pas atteint un développement suffisant.
Alfred Binet (1857-1911), dans son livre “Etude expérimentale de l’intelligence" (1903), précisait :
Au circuit court et rigide qui met en œuvre l’instinct animal, même s’il est modifié par l’expérience, pour atteindre ses buts on oppose les circuits longs et raisonnés qu’élabore l’intelligence humaine pour parvenir au sien.
A l’immédiateté de la perception animale qui fournit des images du réel comme par impression, on oppose la capacité qu’a l’intelligence humaine) d’imaginer des objets abstraits...
L’imagination représente la fonction par laquelle l’homme se distingue de l’animal.
Ce qui se résume comme ci-dessous :
Tout animal ne réagissant efficacement que face à une situation qu’il a déjà
vécue, on affirme qu'il n'a pas d'imagination.
L’homme pourvu d’imagination cette faculté caractérise son intelligence
LES HOMO HABILIS (2,9 M – 1,6 M Av JC)
Parmi les Australopithèques, certains groupes, il y a environ 2,9 MA, Av JC par mutation progressive donnèrent naissance à des Homo-habilis, dont le plan morpho-organique était différent de celui de leurs précurseurs. Ces nouveaux hommes archaïques étaient relativement semblables à nous. Ils possédaient déjà :
- Une double structure cérébrale définitivement constituée dans laquelle le psychisme pouvait contrôler efficacement l'instinct animal.
- Un cerveau d'un volume de quelque 600 à 800 cm3 dans lequel les bosses du langage (aires de Broca) étaient déjà nettement irriguées et développées.
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- Un larynx positionné assez bas dans la gorge et une langue assez mobile pour leur permettre une locution mieux articulée.
- Une main à la capacité préhensible quasiment parfaite du fait que leur pouce s'opposait facilement aux autres doigts.
- Une nouvelle physiologie les obligeant à consommer de la viande.
- Ils soignent leurs malades et enterrent leurs morts.
Selon Yves Coppens, paléontologue, académicien (section Sciences de
l’Univers) :
"Il y eut un saut morphologique entre les Australopithèques et les Homo-habilis, lié à une grande activité cérébrale (mémoire psychique définitivement structurée).
En dépit de ce saut morphologique, il y eut entre les deux espèces une continuité des acquis innés, tant dans leur mémoire animale que psychique. Cependant, les Homo-habilis, en dépit de leur morphologie archaïque, possédaient en puissance toutes les caractéristiques physiques et intellectuelles de l'Homme moderne mais il fallut une longue évolution de quelques deux millions d'années pour qu'elles parviennent à leur plénitude. C'est cette lente évolution
des Homo- habilis, peuplades nomades de cueilleurs-chasseurs, que je me propose de vous décrire :
Si la cueillette était une activité individuelle, la poursuite du gibier devint une affaire réclamant la participation d'une grande partie de la tribu pour rabattre, cerner et tuer les animaux. Le rôle du chef s'en trouva renforcé. Il devait choisir le lieu, définir la stratégie, attribuer à chacun sa mission, diriger les opérations, arbitrer la répartition du gibier, ...
Les
Homo-habilis prirent conscience de la pérennité des choses qui continuaient d'exister alors qu'elles disparaissaient de la vue. Leur imagination, liée à une meilleure habileté manuelle, leur permit de modifier certains matériaux (bois, pierre, os), non pour en faire occasionnellement des objets mais dans la conscience de fabriquer quelque chose de permanent pouvant servir en maintes occasions.
Parallèlement, l'imagination développa chez eux l'envie d'agir, non
plus pour satisfaire un besoin, mais pour anticiper le plaisir de manger, de boire, d'accomplir l'acte sexuel, d'aller à la chasse,... Chacun prit conscience de lui- même par rapport aux autres, se reconnut comme membre d'une famille, d'une tribu.
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Ces nouvelles connaissances furent, pour les Homo Habilis, le moteur de la pensée et du langage. Au fil du temps, ceux-ci se constituèrent un vocabulaire de sons quelque peu articulés, quasiment identiques pour toutes les populations d'Afrique australe et orientale, seules régions où, il y a 2,6 à
2,3 MA, elles étaient en nombre relativement important. Si des tribus inventaient de nouveaux mots, lors de rencontres, les acquis des unes profitant aux autres ; elles
enrichirent mutuellement leurs connaissances.
Au cours de cette période, les Homo-habilis inconsciemment, furent perpétuellement à la recherche d'un équilibre entre sollicitations animales et psychiques, entre inné et acquis, entre messages physiologiques et sensoriels, entre décisions volontaires et réactions instinctives, de telle sorte que la moindre impulsion interne ou externe relançant les mécanismes de réflexe et de réflexion, il en résulta une amélioration de leurs
facultés manuelles et intellectuelles.
C'est aussi au cours de cette période que les Homo-habilis virent se modifier, plus ou moins selon les régions, des détails de leur morphologie. Voilà un peu plus de 2,1 millions d'années, des tribus, par maturation progressive, plus rapidement que d'autres, avaient évolué en un nouveau type de population dont les fossiles légèrement différents des Homo-habilis, furent attribués aux Homo-erectus.
En
réalité, au cours des millénaires, en Afrique orientale, par croisement génétique car ils étaient interféconds entre eux, beaucoup d'Homo-habilis acquirent les caractéristiques morphologiques des premiers Homo-erectus
Ces Homo habilis améliorèrent la fabrication des outils simples taillés généralement sur une seule face pour obtenir des éclats tranchants, qui leur permettaient de découper des morceaux de viande ou de casser des os.
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LES HOMO ERECTUS (1,7(M -100.000) Av JC
Parmi les Homo-Habilis certains groupes vers 1,7 MA par mutation donnèrent naissance aux Homo-erectus
Il n'y eut pas rupture mais continuité des améliorations de leur comportement et de leurs connaissances. De sorte que par exemple dès
750.000 avant notre ère en plus des cavernes ils construisirent des huttes et utilisèrent le feu sans le maitriser.
Grâce à un larynx positionné plus bas dans le cou, une langue plus mobile, mais l'os hyoïde mal placé, Ils
améliorèrent leur articulation des "sons". Ainsi se constitua un "protolangage" dans lequel les "phonèmes", sans accord grammatical, se succédaient en un ordre suffisamment structuré pour que nos ancêtres s'expriment dans une forme narrative archaïque.
De même, le développement de leur psychisme dans la permanence de celui de leurs ancêtres permit aux Homo-erectus de regarder leur environnement avec un esprit toujours plus curieux.
Ainsi l'alternance des jours et des nuits, les rythmes des saisons, les phases lunaires, les arcs-en-ciel, s'imposèrent davantage comme les manifestations de forces vivantes, au même titre que le tonnerre, la foudre, les feux de forêts, les tremblements de terre, les éruptions volcaniques qui, depuis longtemps, effrayaient les animaux.
De nombreux ethnologues, dont Edward-Brunet Tylor, anthropologue, dans son livre “La civilisation primitive” (1871), analysant les
mythes et les légendes de certaines peuplades d'Afrique, y découvrirent la survivance de coutumes et de croyances des sociétés révolues. Ils en déduisirent le cheminement de l'évolution culturelle de l'humanité dont ils ont situé l'origine dans le fait que les primitifs auraient considéré les rivières, les forêts... comme des êtres vivants à l'image des animaux.
Il est évident qu'aucun témoignage archéologique ne nous renseigne sur les pensées de nos lointains
ancêtres, mais il est logique d'admettre qu’ils laissèrent des souvenirs chez les ethnies dont l'origine se perd dans la nuit des temps. Ainsi, ce passé s'éclairant à la lumière du présent récent des peuples primitifs comme ceux d'Afrique, on peut imaginer comment les Homo- erectus interprétaient ce qu'ils voyaient.
A longueur de journée, ils constataient que la nature était "peuplée" de mouvements : les sources et les rivières coulaient, le vent
courbait les arbres, les nuages glissaient dans le ciel, le soleil et la lune se déplaçaient, les hommes et les animaux remuaient, marchaient, couraient, alors que les pierres, les rochers, les montagnes, les branches mortes tombées des arbres sur le sol, les
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cadavres des hommes et des animaux étaient immobiles. Les Homo-erectus, sans se poser de questions, constatèrent que le mouvement était lié à la vie et l'immobilité à la mort.
De cette constatation, on peut penser qu'ils en déduisirent, comme les animistes d'Afrique, que tout ce qui remuait possédait une force vivante qui animait leur environnement immédiat que nous appelons nature, et celui plus lointain, le ciel, comprenant le soleil, la
lune, l'orage et ses manifestations lumineuses et sonores. Le reflet de leur image dans l'eau, la vision en rêve de l'un des leurs dont ils avaient abandonné le cadavre aux bêtes sauvages, leur imposèrent l'idée que les forces vivantes qui animaient déjà la nature et le ciel devaient aussi habiter leur propre corps et celui des "fantômes". Ne pensez surtout pas que nos lointains ancêtres raisonnèrent comme je le fais ; chez eux, ce ne furent, à
cette époque, que des intuitions instinctives. Même aujourd'hui, n'allez surtout pas demander aux animistes d'Afrique d'expliquer leur croyance
; pour eux, "l'esprit de la nature" est une réalité évidente.
Les Homo-erectus, sans se poser de question, admettaient la nature telle qu’elle leur apparaissait, c’est-à-dire globalement, sans que cela résulta d’une analyse, mais comme une puissance mystérieuse à la fois bienfaisante et destructrice,
attirante et terrifiante, salutaire et mortelle...
Progressivement, les Homo-erectus, de plus en plus conscients de la notion du chef qui organisait les activités de la tribu et menait les hommes les plus forts au combat rapproché avec le gros gibier, en arrivèrent à la comparaison selon laquelle les manifestations bienfaisantes ou maléfiques des forces vivantes de leur environnement résultaient de la volonté d'un maître suprême qui commandait au soleil, à la
lune, aux nuages, à la pluie, au vent,... et auquel les animaux, les plantes, les rivières,... devaient se soumettre, comme eux-mêmes obéissaient à leur chef. On peut admettre que les Homo-erectus, à partir de ces conceptions primitives, croyaient en un “maître suprême”, lequel :
- Communiquait personnellement avec eux à travers leurs rêves ;
- Manifestait ses sentiments vis-à-vis de l'attitude de la tribu, à travers des phénomènes naturels : la pluie régulière indiquait sa satisfaction alors que les éclairs traduisaient sa colère, le tonnerre sa réprobation.
L'Homo-erectus, instinctivement, selon un processus inné, expliqua les mystères de la nature et de la vie comme résultant de l'action de “Forces vivantes” (divinités)
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Les Homo erectus étaient nettement plus grands que leurs prédécesseurs, ils pesaient plus de 50 kg et possédaient un cerveau d’un volume supérieur à 800 cm3, leur faciès était gracile et leurs dents réduites. Leurs bras et jambes avaient des proportions similaires à celle des hommes d’aujourd’hui.
Les Homo erectus mangeaient des fruits et des racines, mais aussi des charognes. Ils chassaient de petits animaux et de plus gros, comme les éléphants.
Vers 400.000 ans avant notre ère, les Homo erectus maîtrisèrent le feu. Ce fut l'une des premières preuves de leur humanité. En effet, l'homme fut le seul animal qui a non seulement domestiqué le feu, mais qui a aussi été capable de le reproduire à volonté. Avec l’apparition des premiers foyers aménagés, se développa vraisemblablement autour du feu une vie sociale plus organisée. Le feu fut un formidable moteur d’hominisation. A l’aide de torches il s’éclaira et prolongea le jour aux dépens de la nuit ; il permit à l’homme de pénétrer dans les cavernes. Il réchauffa et allongea l’été aux dépens de l’hiver ; il permit à l’homme d’envahir les zones tempérées froides de la planète. Il permit de cuire la nourriture. Il améliora la fabrication des outils en permettant de durcir au feu la pointe des épieux. Mais c’est surtout un facteur de convivialité.
Maîtriser le feu, veut dire le reproduire à volonté. Plusieurs possibilités s’offraient à l’Homo erectus. La “friction semble être la plus simple : Cette méthode ne nécessite que deux morceaux de bois. Le frottement de l'un sur l'autre génère un tas de sciure échauffé. Ce "nid" de chaleur va générer quelques braises... qui permettront d'allumer des brindilles sèches... Le
principal problème consiste à bien choisir les essences de bois en fonction du but recherché. Cette méthode a laissé peu de traces anciennes.
La Percussion : contrairement à une idée reçue, nos ancêtres ne frottaient pas 2 silex pour allumer un feu... cela ne sert à rien ! Tout simplement parce que percuter 2 silex ensemble ne produit que des étincelles qui ne s'éjectent pas... et donc sans aucune chance d'allumer une quelconque brindille.
Trois éléments sont nécessaires pour allumer un feu par percussion : du silex, un minerai de fer (de la pyrite ou de la marcassite) et un initiateur (un végétal amadou ou un champignon). La percussion du silex sur le minerai de fer (comme avec un briquet) éjecte des étincelles sur l'initiateur et durent pendant
2 secondes. C'est un temps suffisant pour provoquer des braises qui seront entretenues avec des herbes sèches.
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Ils améliorèrent les techniques de taille, ils ont réalisé les premiers bifaces et hachereaux, Les outils façonnés par Homo erectus révèlent l'existence de comportements nouveaux dans la lignée humaine : l'élaboration d'outils symétriques et une forte adaptation des outils aux conditions locales et aux besoins humains.
Ces pierres sont les répliques de celles découvertes sur un site
africain. Les marques laissent supposer qu'elles étaient utilisées comme lances, il y 500000 ans avant notre ère.
Alors que les Australopithèques et les Homo habilis restaient implantés sur leur territoire, africains,
certains Homo erectus à la recherche du gibier se laissèrent emporter de loin en loin dans diverses directions. Certains émigrèrent vers le Niger, le Mali, la
Mauritanie, et le Sahara. D’autres en remontant le long de la côte orientale et la vallée du Nil, émigrèrent vers le Proche Orient puis l’Europe, l’Asie jusqu’en Chine
1ère MIGRATION
Il y a environ 1 MA, Alors que les Australopithèques et les Homo habilis restèrent implantés sur leur territoire africain, certains Homo erectus à la recherche du gibier se laissèrent emporter de loin en loin dans diverses directions des groupes d'Homo-erectus de la Rift- Valley se dispersèrent :
- Vers le Maghreb, l’Ouest africain, le long de la lisière nord de la forêt équatoriale et vers la pointe sud de ce continent.
- Certains par la vallée du Nil et le Sinaï, se rendirent au Moyen et Extrême - Orient, en Europe et aux Indes.
Ces nomades cueilleurs et chasseurs emportèrent avec eux :
- Leurs mœurs familiales et tribales, le respect du chef, leurs méthodes de
fabrication d'objets en pierre, en os et en bois ;
- Leur protolangage de sons mal articulés, offrant la possibilité d'une locution semi-narrative, quoique dépourvue de règles grammaticales ;
- Leur conception d'un environnement rempli de forces vivantes sous les ordres d'un maître suprême.
Les descendants de ces Homo-erectus partis d'Afrique se retrouvèrent dans des régions qu'ils
furent les premiers à parcourir. De génération en
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génération, ils continuèrent à y développer leur potentiel morphologique et intellectuel, sans autre influence que les spécificités locales relatives au climat, à la géographie, à la flore et à la faune qu'ils intégrèrent dans leur mode de vie et dans leur langage.
Selon la carte ci-dessous les Homo-Erectus envahirent toute
l’Afrique, l’Europe, le Moyen Orient, L'Extrême-Orient
LES NEANDERTALIENS (350.000 à 30.000 Av JC)
Parmi les Homo-erectus d’Afrique, du Moyen et Extrême Orient, de l’Inde et de l’Europe certains groupes vers 350.000 ans Av JC par mutation donnèrent naissance aux Néandertaliens.
Ces Homo-erectus évolués restaient des cueilleurs et chasseurs qui faisaient cuire leurs aliments. Par ailleurs ils n’avaient guère amélioré le mode de vie de leurs précurseurs ni modifié le concept ancestral des forces vivantes de la nature dominées par un maître suprême.
En revanche,
ces populations avaient vu se parfaire leur morphologie comme la position définitive de l’os hyoïde situé sous la base de la langue, juste au-dessus du larynx ce qui leur permit d’avoir une prononciation comme la nôtre.
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Les Néandertaliens auraient conçu une préparation spécifique du nucléus : le bloc est aménagé de façon à obtenir deux surfaces convexes sécantes. L'une est la surface de plans de frappe, l'autre est la surface de débitage. Cette dernière est aménagée de façon à présenter des convexités qui détermineront la forme et les dimensions du futur éclat Levallois.
Ces éclats dits “Levallois” ont un plan de fracturation parallèle au plan d'intersection des deux surfaces du nucléus.
A noter, de nombreux fossiles ont été trouvés dans une posture et dans un lieu qui démontrent que ces hominidés inhumaient leurs morts.
Par ailleurs leur vocabulaire de base hérité de leurs ancêtres partis d'Afrique, avaient acquis séparément un langage propre à chaque région. On peut donc conclure que, globalement, il s'était formé quatre peuples qui, il y a environ
200.000 ans, parlaient chacun une langue différente issue de leur vocabulaire originel d’Afrique.
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HOMO-SAPIENS (200.000 AJC jusqu’à présent)
Selon Gaspard Guipert, chercheur associé au Centre européen de recherche et d'enseignement de géosciences de l'environnement pense qu’il y eut continuité entre les néandertaliens et les Homo-Sapiens et qu’il n’y a pas eu de seconde sortie mais un renfort des positions acquises
Marie-Hélène Moncel, du département de Préhistoire du Muséum d’Histoire Naturelle : confirme que les Néandertaliens par mutation donnèrent naissance aux Homo-sapiens.
Plus tard, vers les années 100.000 avant notre ère, la totalité des Homo-erectus était devenue en Afrique et partout ailleurs des Homo-sapiens identique à l’homme moderne.
Ces hommes, nos véritables ancêtres, vécurent en tribus de quelques centaines de couples avec enfants, sous l'autorité d'un chef. Ils fabriquaient des bifaces finement taillés utilisés pour confectionner des hachereaux, des épieux. Ils façonnaient de longues pierres dentelées en forme de lame pour couper les chairs et des racloirs pour décharner les peaux. Ils travaillaient les os pour en faire des hameçons, des harpons, etc...
Progressivement, ce peuple, dont les ancêtres avaient acquis la conviction que les forces vivantes de leur environnement immédiat (la nature) et lointain (le ciel) étaient commandées par un Maître suprême, en vinrent à penser que leur propre chef respecté pour sa force et admiré pour ces exploits, pouvait communiquer avec cette sorte de dieu. On peut même imaginer que le chef de tribu, avant d'emmener ses hommes à la chasse, prit l'habitude de les réunir afin qu'ensemble, ils implorent ce Maître suprême pour qu'il leur
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procure un abondant gibier.
Le souvenir de certains personnages aux actes de bravoure exceptionnels se perpétua de génération en génération et la valeur de leurs exploits s'amplifia avec le temps pour devenir les aventures d'un héros, puis une histoire mythique.
Par ailleurs, en quelques millénaires, les Homo-sapiens enrichirent leur vocabulaire et acquirent, sans pourtant y introduire de verbes ni d'articles, un langage quasi narratif leur permettant de discuter
entre eux, de se raconter leurs exploits, de commenter leurs mésaventures, de se transmettre des méthodes de fabrication d'objets...
A la suite d’amélioration intellectuelle et d'une meilleure habileté manuelle, ces nomades cueilleurs-chasseurs s’ils avaient conservé le mode de vie et les mœurs familiales et tribales de leurs précurseurs il en avaient modifié l’habitat qui devient peu à peu permanent. Sa vie sociale s’organise dans les villages. Pour fabriquer les abris, il
utilise différents matériaux, en fonction des régions. Par exemple, en Europe centrale, vers, 15 000 ans Av JC, il construit des campements en ossements de mammouth
C’est vers 30.000 ans AJC que les Homo sapiens chauffaient le silex avant de le travailler avec des percuteurs en bois de cervidés. Ces bois leurs servaie nt également à fabriquer des harpons. Ils inventèrent le javelot et le propulseur.
Ils développèrent des outils, des objets et des armes en matières dures (pointes de sagaies à base fendue en ivoire ou en bois de renne), grandes lames retouchées épaisses, multiplication des colorants, premières œuvres d’art (Grotte Chauvet), grottes ornées de mains négatives plaques à incisions gravées. Ils travaillaient l’os de mammouth pour en faire de statuette.
Ils torsadaient les fibres végétales, comme certaines herbes, joncs, racines, pour en faire des files et des cordes qu’ils tressaient pour confectionner des paniers. Ils les utilisaient également comme mèche pour alimenter par capillarité leurs lampes à graisse animale.
Vers 17 000 ans avant notre ère les Homo-sapiens diversifièrent leur outillage d’os et d’ivoire : harpons, flèches, sagaies, arcs.et propulseurs. Profusion d’objets décorés : récipients et lampes à graisse, objets de parure, plaquettes gravées : bas- reliefs évolution vers le schématisme en matière de décoration. Amélioration de l’habitat sous
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roche et campement. Multiplication des sanctuaires
Datant d’environ 14000 ans avant notre ère, on retrouva des lames de faucille en silex et des outils de broyage, polissage de la pierre, premiers villages occupés de manière permanente+
Entre 10800 et 8200 AJC, on constate les premières expériences de sédentarisation. C’est aussi l’époque où les hommes du levant récoltaient le blé sauvage et utilisaient des meules pour le moudre en farine. L’homme à cette époque laissa de nombreux témoignages de ses moyens d’éclairage : torches enduites de résine, et lampes à graisse dans laquelle trempait une tresse ou une torsade végétale.
Il faudra attendre les années 6000 avant notre ère pour trouver les premiers métiers rudimentaires à tisser le lin
Ils utilisaient des matières animales, poils, tendons, nerf, peaux découpées en lanières. Ils assemblaient des peaux au moyen de coutures pour s’en faire des vêtements
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L'homo sapiens était un véritable artiste (Lascaux)
Entre 60 000 et 50 000 ans Av JC, l’Homo sapiens, après une traversée
en haute mer sur de simples radeaux atteint l’Australie.t
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Entre 30 000 ans et 15 000 ans avant notre ère Les Homme-Sapiens passèrent en l'Amérique par le détroit de Béring.
UN VRAI HOMO SAPIENS
En 1991 on a découvert tout équipé un homo sapiens qui vivait il y a 4.500 ans
Ci-contre la reconstitution, dans le Château musée de Bélesta (Pyrénées- Orientales) d’Ötzi, nom donné à un être humain momifié naturellement (congelé et déshydraté) qui vivait il y a, environ, 4500 ans. Il fut découvert par des randonneurs le 19.07.1991 à 3200 mètres d’altitude dans le glacier Hauslabjoch dans les Alpes de l’Otztal.
On a retrouvé, dans la poche de sa ceinture et à ses côtés, un arc en if en fibre d'écorce torsadée, 14 flèches dans leur carquois (certaines incomplètes), une hache à lame de cuivre, un couteau à lame de silex emmanchée, dans un fourreau en tissu d'ortie et quelques champignons (polypores du bouleau) enfilés sur une lanière de cuir, probablement à usage médicinal. Le corps était encore enveloppé dans une partie de ses vêtements formant trois couches successives : un pagne, une veste en cuir, une cape en fibres végétales. Il portait un bonnet en peau d'ours brun. Les semelles de ses chaussures étaient en peau de cerf, à l'intérieur, des herbes tressées servaient de doublure et d'isolant thermique. Il avait également une hotte munie d'une armature formée d'une longue tige de noisetier, deux récipients
cylindriques en écorce de bouleau, un petit sac comprenant un nécessaire à feu (amadou, silex…) et un petit sac de cuir contenant de petits outils de silex (grattoir, perçoir, lame pointue). Deux de ses flèches, son poignard et sa cape
sont couverts de sang appartenant à 4 individus différents
.
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AUTRES PEUPLES D’AFRIQUE
LES PEUPLES DU SAHARA
LES HOMO ERECTUS qui avaient occupé l’Afrique étaient
devenus des Homo Sapiens.
On a trouvé des fossiles d'hominidés au Maghreb, mais aucun au Sahara. Pourtant, divers vestiges témoignent de l'occupation de cette région par des tribus nomades qui, du fait d'un climat devenu, à partir des années
3500 AJC, de plus en plus aride, ne devinrent jamais complètement sédentaires mais néanmoins acquirent un niveau intellectuel et cultuel qu'il est intéressant d'analyser avant d’étudier l'évolution des populations de la Vallée du Nil.
La vaste barrière de l’Atlas s’étend du Maroc Occidental, jusqu’à l’Aurès en Tunisie. Son versant nord descend vers la Méditerranée et le versant sud s’étale vers le Sahara. Au centre du Sahara s’élève le massif du Hoggar, le plateau du Djada et le Tibesti. Le Hoggar se prolonge vers le sud par deux
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épis : l’Adrar-des-Iforas et l’Aïr.
Alors qu'en Europe, entre 4 MA et 17.000 ans AJC, les périodes glacières et inter-glacières s'alternaient, le Sahara, avec la même périodicité, connaissait un climat doux et humide puis chaud et sec. Dans le premier cas, des rivières descendaient des massifs montagneux (Oued de Tafissasset, de Tamanrasset, ...) jusqu'aux grands lacs des plaines. Dans le second cas, le Sahara connut des épisodes plus arides qu'aujourd'hui. Il y a 17.000 ans, le Sahara était couvert de lacs
et d'une végétation du type savane, voire de forêts claires
Aucun fossile d'hominidé ne fut retrouvé au Sahara ; en revanche, des galets aménagés, vieux d'un million à six cent mille ans, attribués aux Homo- erectus venus d'Afrique orientale ou australe, ont été retrouvés dans l’Adrar- des-lforas (Mali), dans les régions de Reggane, du Ténéré,... dans l'Adrar mauritanien.
Des bifaces (coup de poing) et hachereaux datés d'environ 300.000ans AJC et
attribués aux Néandertaliens furent retrouvés dans les vallées ou au creux des dunes, avec des fossiles d'éléphants, de rhinocéros, de zèbres, d'hippopotames, de bubales, ... Les principaux sites sont : le Grand Erg oriental, l'Erg Er Raoui, l'Erg Iguidi, El-Atchane, l'Erg occidental, la Vallée de Tafissasset, l'Adrar mauritanien... On en retrouva aussi en Libye.
Les Homo-sapiens laissèrent des bifaces, des lames, des disques et des pointes
retouchées dans le Djebel-Béchar, dans la vallée de l'Oued Saoura, dans le Hoggar, le Ténéré (Niger), l'Adrar Bous, dans le Désert de Fezzan, les monts du Tibesti (Tchad), l'Adrar mauritanien.
La découverte de "cendrières" importantes, datées de quelque
50.000.ans AJC, témoignent d'une sédentarisation partielle des premiers pasteurs nomades chasseurs-cueilleurs-pêcheurs.
Vers 17.500 ans AJC, du fait de la glaciation d'une partie de l'Europe, le
faible niveau des mers permit l'échange des populations entre l'Afrique et l'Espagne, par Gibraltar. Sur les deux continents, on remarque, à cette époque, des outils de pierre et d'os de même aspect. Après la fermeture du détroit par les eaux de la Méditerranée (vers 15.500 ans AJC), certains outils prirent, en Afrique, une forme particulière inconnue en Europe, dite pointe à "pédoncule". Ce faciès fut qualifié d'atérien, du nom de Birr-el-Ater, en
Algérie, où il fut identifié pour la première fois. On retrouva cet outillage jusqu'aux limites méridionales du Sahara et dans la zone des graminées sauvages actuelles.
A partir de 15.000 AJC, l’outillage lithique s'affina et d'autres faciès
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apparurent, comme le capsien, du nom de Capsa (aujourd'hui Gafsa), en Tunisie, où ce matériel fut trouvé pour la première fois. Il comprenait des lames dures et des pointes de flèche, ce qui implique que les populations de cette époque chassaient avec des arcs et des javelots.
Les Hommes du capsien, descendants des Homo-sapiens du Maghreb, en plus de leurs armes, laissèrent d’énormes cendrières où les coquilles d'escargots sont innombrables. Des fragments de
poteries datées de quelque
7.600 ans AJC, furent découvertes dans le Massif du Hoggar et de l'Aïr. On en déduit que ces populations étaient des pasteurs semi-nomades. On retrouve leurs traces jusqu'aux limites méridionales de l'Atlas, aux abords des "chotts" (fonds d'anciens lacs), comme le Chott-ech-Gherghi, dans la région d'Ouargla, le Tidikelt (groupes d'Oasis) et à Ouadane, dans le désert de Mauritanie d'Aoulata.
Époque bubaline (7.000 à 5.500 ans AJC) : On pense que les pasteurs nomades (de race blanche nord-africaine), venus des plateaux à l'Ouest du Nil, poussant devant eux des troupeaux de chèvres, moutons et bovins, s'établirent dans les vallées verdoyantes des massifs montagneux du Sahara. Dans les rivières et les lacs, ils pêchaient à la senne, à la ligne et au harpon, procédaient au ramassage des moules d'eau douce et chassaient le gros gibier. Ils avaient domestiqué des bovins et des ovins et avaient apprivoisé l'ancêtre du chien. Dans leurs campements, ils construisaient des huttes à pieux complétées de roseaux et d'herbes séchées.
Ces nouveaux venus se mêlèrent aux autochtones avec lesquels ils avaient en commun le physique et les bases linguistiques. Les deux ethnies constituèrent rapidement une même population de pasteurs- chasseurs semi- nomades, divisée en tribus. Leur présence dans différents sites du Hoggar, du Tassili n'Ajjer et de l'Ennédi est matérialisée par des tas d'immondices comprenant des arêtes de poissons, des coquilles de moules, des débris de tortues et de crocodiles, des ossements d'antilopes
et d'hippopotames...
Parmi des débris alimentaires, on a retrouvé des pointes de flèches pour tuer le gibier, des haches de pierre polie pour le défrichage et le travail du bois, des lames pour débiter les animaux tués ou pour couper les herbes et les graminées sauvages, des grattoirs et des poinçons pour façonner les peaux, des meules et des broyeurs en pierre pour écraser le grain, un morceau de sac tressé (Ti n'Hanakatan, dans le Hoggar) ; des tessons de poteries et des
parures : bracelets et pendeloques de pierre et d'os, ainsi que des colliers e n coquilles d'œufs d'autruche.
Des analyses des restes d'animaux par le Carbone permirent de dater les plus vieux de ces éléments aux environs de 6.000 ans AJC. Ce qui n'exclut pas que des sites non conservés ou non encore mis au jour pourraient être
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antérieurs.
En plus de ces témoignages archéologiques, ces peuples nous laissèrent de nombreuses gravures
(Sud Oranais, Tassili n'Ajjer, Fezzan et en Libye...) sur lesquelles, parmi les personnages apparemment de race
blanche, on distingue des hommes nus portant un simple petit pagne de
ceinture et armés d'un arc, et des femmes vêtues d'une large robe (en peau de bête)
descendant aux
chevilles. Les bovidés sont figurés dans un état domestique et plus particulièrement les chiens qui semblent garder le troupeau.
Des gravures énigmatiques représentant des personnages en position d'imploration en relation avec un bubale ou un bélier, parfois un lion, suggèrent un lien rituel entre l'homme et ces animaux parfois ornés de sphéroïde ou divers autres attributs ésotériques. N'étaient-ils pas les symboles vivants des "forces vivantes" de la nature que l'homme
vénérait et dont il implorait les faveurs ?
Un grand nombre de spécialistes de la Préhistoire africaine pensent que cette civilisation, qui honorait le bélier à sphéroïde, fut influencée par des pasteurs égyptiens qui, eux-mêmes, se plaçaient sous la protection d'un bélier qui préfigurait celui du dieu AMON.
Localisées dans diverses régions, d'autres tribus de nomades, apparemment plus chasseurs que pasteurs, laissèrent derrière elles, au cours de cette même époque (7.000 à
5.000 ans AJC), des dessins et gravures rupestres représentant des animaux sauvages : hippopotames, rhinocéros, girafes, autruches, antilopes, bovidés, ânes, éléphants, lièvres et poissons. Certains de ces sites furent retrouvés dans l'Algérois, dans le Constantinois, au Maroc jusqu’au Rio-de-Oro ; d'autres dans l'Adrar mauritanien, à El- Ghaltaoniya.
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Époque des "Têtes rondes" (5.500 à 4.500 ans AJC) : les artistes de l'époque précédente n'avaient pas pratiqué la peinture, sinon pour recouvrir, parfois, leurs gravures d'ocre rouge. En revanche, à Tassili- n'Ajjer, on a retrouvé, sur des parois d'abris sous roche, des peintures plus récentes représentant des humains à tête ronde symbolisée par un cercle souvent orné de décors géométriques.
Femmes de la cour de roi, Dessin du site de Tan-Zoumaîtak
La population, parmi laquelle figuraient ces artistes peintres, a été qualifiée de "Têtes rondes". Des œuvres identiques furent découvertes au Tibesti et dans l'Ennedi (Tchad). Les plus anciennes de ces peintures monochromes ; ultérieurement, elles se chargèrent de détails corporels ou de scarifications le plus souvent en blanc. L'ocre était employé pour peindre de petits sujets. Pour les plus grands, les artistes utilisaient également du jaune, du blanc, du gris bleu,
...
La faune représentée est sensiblement identique à celle de l'époque précédente, mais les mouflons et les bubales sont les plus nombreux.
Dans quelques peintures, plusieurs personnages portent des masques symboliques, dont certains révèlent un profil incontestablement négroïde. Ce qui semble affirmer qu'à cette époque, le Sahara était occupé par deux ethnies
- L’une du type blanc nord-africain ;
- L’autre négroïde, descendant des Proto-bantous.
Ces deux populations ne se mêlèrent pas, comme on le constate encore aujourd'hui. Peut-être n'occupaient-elles pas en même temps les sites qui leur furent alternativement communs ?
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Dans certains abris, des peintures centrales représentent un grand personnage et, autour, des femmes, les bras dirigés vers lui en signe d'imploration. Est-ce la figuration d'un chef incarnant la puissance des "forces vivantes" de la nature ?
Il est possible que les Homo-sapiens, qui avaient imaginé leur chef
capable d'intercéder le "maître suprême" de la nature, en aient fait progressivement le représentant sur terre de ce
dernier et l'aient honoré comme tel.
D'autres peintures représentent des scènes de chasse où les hommes sont armés d'arcs, d'épieux ou bâtons de jet. Aucune ne nous renseigne sur les rites funéraires de ces peuples. Du fait qu'on n'ait retrouvé aucun fossile, il semblerait que les cadavres étaient laissés à même le sol, à la merci
des bêtes sauvages.
Quant à leur mode de nutrition, on peut imaginer qu'il comprenait les produits de la chasse, de la pêche et de la cueillette auxquels il faut ajouter le lait des vaches, la chair des
troupeaux semi-domestiques et le produit des graminées sauvages abondantes à cette époque, comme aujourd'hui, dans la steppe soudanaise où elles font encore l'objet d'un ramassage intensif.
Vers 5.000 ans AJC, l'augmentation importante de la sécheresse diminua
progressivement les ressources naturelles du Sahara et provoqua le retrait des populations négroïdes vers la lisière nord de la forêt équatoriale, alors que les Blancs nord-africains restèrent dans les vallées encore verdoyantes des massifs montagneux.
Période bovidienne (4.500 à 2.800 AJC) : Des peintures dans les sites de Jabbaren, de Tassili-n'Ajjer..., datées de cette époque, représentent de grands troupeaux de bœufs se rendant au pâturage ou rassemblés autour de huttes près desquelles des veaux sont attachés au moyen de cordes et où des femmes traient des vaches.
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Des scènes représentent des bœufs mis à mort et dépecés. Certains ethnologues croient y voir des personnages
consommant de la chair crue et apparentent ce rituel à un sacrifice pour apaiser les "forces
vivantes" de la nature qui auraient été offensées par les actes cruels de la chasse. Ces pasteurs sont aussi représentés avec des moutons, des chèvres et
des ânes, en compagnie de chiens utilisés à
la garde des troupeaux
A proximité d'abris, on a trouvé des alignements de grosses pierres disposées en arcs de cercles et barrant un couloir entre des falaises. Certains suggèrent que ces espaces servaient de parcs à bestiaux où les animaux étaient enfermés, la nuit, pour être protégés des fauves.
Des scènes de chasse (Tassili n'Ajjer) représentent des hommes à pied, armés d'arcs et de lances ; d’autres, en pirogue, attaquent un hippopotame. Cette dernière figure
témoigne la persistance, dans cette région, de rivières actives. Quant aux animaux sauvages, on retrouve des représentations d'éléphants, de rhinocéros, d'antilopes, de gazelles, d'oryctéropes, de lions, d'autruches...
Le bœuf, selon ces peintures, était utilisé comme animal de bât. On y voit un homme guidant l'animal, un enfant marchant devant une femme suivant derrière. Celle-ci, pour le voyage, avait une coiffure savamment élaborée et disposait de superbes
vêtements et bijoux. Sur certaines peintures, on voit des dignitaires habillés de vêtements d'apparat et des hommes en armes marchant en troupe. Ce qui laisse imaginer une société hiérarchisée composée d'un roi, de sa cour, de guerriers, ...
Des scènes nous montrent la vie courante du peuple : des femmes assises devant une hutte, un jeune enfant dans les bras, d'autres debout devant une marmite, d'autres encore faisant la moisson de graminées sauvages, une femme en
coiffant une autre, des enfants dormant à l'abri d'une couverture, des hommes la hache levée pour fendre du bois, des personnes, des deux sexes, assises en rond pour bavarder et d'autres s'accouplant...
On retrouve aussi des motifs symboliques où le bœuf et un serpent
occupent une place témoignant d'un culte qui se retrouveraient chez certains
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clans actuels.
Les peintures bovidiennes sont présentes principalement dans les sites sous roche de Tassili n'Ajjer, Acacous, Tibesti, Ennedi, Djebel- Ouénat et, plus rarement, au Hoggar, Tanezrouf, Zemmour et Ksour.
Les gravures sont partout présentes dans les sites précédents où il y a des rochers pour les recevoir, mais aussi à Fezzan, au Adrar- des-lforas, en Mauritanie, au Sud-Marocain, au Rio-de-Oro...
Les pasteurs bovidiens, dans le Tassili n'Ajjer, au Hoggar, réalisèrent aussi des reliefs en ronde-bosse, sortes d'idoles à face humaine ou divers animaux (bœufs, béliers, lièvres...).
Sans ces peintures et gravures qui nous renseignent sur les activités pastorales de ces peuples, sur leur vie familiale et sociale, et nous suggèrent certaines de leurs conceptions "mystiques", nous ne saurions rien d'eux, si ce n'est les maigres renseignements que nous aurions pu
déduire des quelques éléments archéologiques découverts sur les lieux.
Dans les régions de Tichitt et d'Oualata, on a retrouvé des traces de huttes allongées, groupées en villages et des vestiges de fortifications. On y a aussi découvert de belles et fines céramiques.
Le matériel recueilli près des abris à peintures comprend des palettes, des godets, des broyeurs, des fragments d'ocre, des armes et outils : pointes de flèche, haches, meules en pierre, poinçons en os, débris
de poteries, des objets de parure (anneaux de bras, bagues, pendeloques en schiste ou en coquilles d'œuf d'autruche, perles...).
Les résidus alimentaires et les cendres de foyers enfouis dans les abris à peintures ont permis d'établir que la période bovidienne s'échelonnait de
4.500 à 2.800 ans AJC. Malheureusement, aucune méthode ne permet de préciser si les types humains représentés correspondent à la cohabitation ou à l'occupation successive d'un site par
différentes ethnies ayant le même mode de vie et les mêmes préoccupations sociales et mystiques.
Aucun fossile humain n'ayant été retrouvé sur ces lieux, il fut impossible d'établir une quelconque chronologie. Cependant, beaucoup d'ethnologues considèrent comme probable la succession dans le temps, sur un même site, de différentes peuplades. Trois semblent être représentées sur les peintures de l’époque bovidienne. Ce qui ne veut pas dire qu'elles cohabitèrent mais
occupèrent séparément diverses zones selon les besoins de chasse ou de pâturages, à moins qu'en se rencontrant, elles se soient affrontées, comme en témoignent des scènes de guerre.
- Le type blanc nord-africain est prépondérant. Il se caractérise par une peau
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cuivrée, des cheveux longs et lissés. Ils ne seraient autres que les descendants des Homo-sapiens de l'Est africain et du Maghreb et les ancêtres des Peuls qui, aujourd'hui, se répartissent entre le Sénégal et le Tchad.
- Le type négroïde est assez courant. Il correspond sûrement aux descendants de certains groupes (Bantous) de l'époque précédente des "Têtes rondes" qui seraient restés sur place sans se mêler aux autres et qui, vers 2.500 AJC, lors de la sécheresse, regagnèrent la lisière nord de la forêt tropicale.
- Le type europoïde est peu présent. Il correspondrait à des populations du Maghreb qui, à une époque plus tardive, peut-être vers 3.000 ans AJC, auraient rejoint le Sahara.
Durant cette longue période de 4.500 à 2.800 ans AJC, les peuples du Nil, qui avaient acquis un degré de civilisation avancé, eurent des échanges réciproques avec les pasteurs bovidiens, comme ils en avaient eu avec leurs prédécesseurs. En effet, en Nubie, partie septentrionale du Soudan, on a retrouvé des gravures sur roches et des motifs sur poteries de style bovidien,
Période du galop
volant (2.000 à 600 ans AJC) : Des guerriers du type europoïde venus de Libye, montés sur des chars traînés par des destriers et protégés par des boucliers ronds, attaquèrent à coup de javelot les pasteurs bovidiens qui, depuis la
période de plus grande sécheresse vers 3.500 ans AJC, s'étaient réfugiés dans les massifs
montagneux où la flore comptait encore de nombreuses espèces, comme le pin d'Alep, le cyprès, le micocoulier, le genévrier, l'olivier,
l'aulne,
le frêne... et où les hautes vallées humides et verdoyantes étaient encore peuplées d'une faune relativement abondante.
Sous la double pression du climat de plus en plus sec et de ces envahisseurs, Les pasteurs "bovidiens" qui, pour se défendre, n'avaient que des arcs, se
dispersèrent vers le Sud-Ouest africain où ils furent à l'origine du peuple peul.
Les envahisseurs, au cours du temps, à mesure que proliférèrent leurs descendants, se divisèrent en
plusieurs tribus ; les unes restèrent sur le terrain conquis, les autres poursuivirent leur progression. Les dessins et les gravures qu'ils laissèrent permettent de reconstituer leur cheminement à travers le Sahara. Partant de la côte libyenne (Cyrénaïque), ils franchirent le Tassili-
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n'Ajjer, contournèrent le Tanezrouf et gagnèrent l'Adrar-des-lforas et le Mali, dans la région de Gao. En Mauritanie, dans l'Adrar, à El-Ghallaouiya, des gravures rupestres représentent des chasseurs et des chars...
Plus tard, certaines tribus se déployèrent, d'une part, vers la Mauritanie, le Rio-de-Oron, le Maroc et l’Oranais ; d'autre part, vers Koura, l'Aïr (Niger) et le Tibesti (Tchad).
Les gravures et les peintures que ces envahisseurs laissèrent sur les
rochers du Sahara représentent des guerriers montés sur des chars, à deux roues, tirés par des chevaux, dans des scènes de guerre et de chasse. On y voit des personnages armés de javelots et de boucliers habillés de tuniques serrées à la taille et évasées à la base, qui leur donnent un aspect bitriangulaire.
Quant aux chevaux, ils sont figurés les pattes allongées vers l'avant et vers l'arrière, comme s'ils volaient, d'où le style "galop volant" que l'on
retrouve en Crète préhellénique, comme d'ailleurs l'aspect bitriangulaire des personnages. Ce qui laisse à penser que ces populations auraient été des Crétois précurseurs des "peuples de la mer" qui, de Libye, vers 1650 AJC, attaquèrent les Égyptiens.
Parmi les animaux domestiques représentés sur les peintures, en plus du cheval, on retrouve le bœuf, parfois attelé à un char, la chèvre, le mouton et le chien ; ce dernier dressé pour la garde du bétail, la chasse
et la guerre.
Les animaux sauvages, peints ou gravés, sont quasiment les mêmes que précédemment, à l'exception de l'hippopotame, ce qui confirme la disparition
des plans d'eau et le ralentissement du débit ou l'assèchement intermittent des rivières.
Période de la cavalerie (à partir de 1.000 AJC) : Jusque vers 600 ans AJC, malgré la sécheresse, les chars pouvaient encore parcourir certaines routes du désert. Mais progressivement, ces véhicules devinrent inutilisables dans les dunes asséchées et sablonneuses. Les hommes à "char" devinrent d'habiles cavaliers armés de javelots et de couteaux. On voit en eux les ancêtres des Touareg.
Cette civilisation "cavalière" se répartissait au Hoggar, dans le Tassili- n'Ajjer, au Fezzan, en Aïr, dans l'Adrar-des-lforas, en Mauritanie. Au Tibesti, le chameau arriva plus tard. Les personnages des peintures gardent le style bitriangulaire que l'on retrouve également en Crète et portent les mêmes armes
: javelots et couteaux.
Sur les peintures apparaissent les premiers textes en caractères libyco- berbères dont la forme moderne est le
tifinar, alphabet des Touareg.
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Peu à peu, les peintures et les gravures représentent des chameaux, d'abord faiblement associés au cheval, puis de plus en plus nombreux.
A la même époque, apparaît un rite pour conjurer le mauvais sort : sur le sol des passages dangereux, les hommes gravaient le contour de leurs pieds avec une inscription en libyco-berbère. On retrouve cette pratique en Afrique du Sud et au Proche-Orient.
C'est parce que les peuples qui évoluèrent successivement au Sahara nous ont laissé des
gravures, des dessins et des peintures rupestres que les ethnologues ont reconstitué leur histoire qui les mena de l'état de cueilleurs- chasseurs, à celui de pasteurs nomades puis semi- sédentaires, de l'état de peuples pacifiques à celui de guerriers, de l'état d'hommes sans croyance à celui de sujets d'un roi incarnant le “Maître suprême” des forces vivantes de la nature...
PEUPLES D'AFRIQUE CENTRALE
Selon la théorie de nombreux ethnologues, dont Joseph Greenberg, de l'Université de Stanford, pour des raisons vraisemblablement climatiques, une ethnie négroïde se serait diversifiée, il y aurait quelque 500.000 ans AJC, à partir des Néandertaliens de la Rift-Valley qui migrèrent à l'Ouest, le long de la lisière nord de la forêt équatoriale, et se répandirent progressivement dans les montagnes du Congo, du Soudan, du Tchad, du Cameroun, jusqu'aux confins du Niger. Ce sont eux qui, à l'époque des "têtes rondes", auraient occupé une partie du Sahara, dont ils furent chassés. Leurs descendants constituèrent le peuple Bantou qui, aujourd'hui, vit au Sud d'une ligne coupant le continent d'Ouest en Est, de Douala à l'Embouchure de la rivière Tana, dans l'Océan Indien, en passant par le Nord du Lac Victoria.
LES PEUPLES D’AFRIQUE DU SUD
De la Rhodésie au Cap, jusqu'à la Namibie, on a retrouvé :
- Des gravures rupestres, tout particulièrement sur des rochers, des galets ou des dalles, représentant des animaux isolés : éléphants, rhinocéros, girafes, biches, élans du Cap (grosses antilopes de la même famille que le bubale), lions... et fréquemment des dessins abstraits.
- Des peintures ornant des abris sous roche et des grottes des régions montagneuses, en des lieux peu accessibles de l'État d'Orange, du Basutoland, du Swaziland, du Drakensberg, du Transvaal, du Mozambique, du Sud-Ouest africain (Brandberg, Erongo).
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- Des objets : pierres polies, céramiques, flèches et os travaillés...
Les peintures représentent la même faune que les gravures, mais on y découvre, en plus, l'autruche, le babouin, le zèbre, le serpent, des poissons et de nombreuses figurations humaines associées à des animaux, principalement l'élan du Cap (bubale). Il y a, dans ces représentations, un certain symbolisme liant l'homme à la nature et aux astres : soleil, lune, étoiles..., ce qui confirme que les populations avaient le souci de se concilier les "forces vivantes" de leur
environnement immédiat (nature) et lointain (cosmique). Quel est l'âge de ces gravures et peintures ?
Certaines gravures représentant des animaux isolés dateraient de quelque 30.000 ans AJC. Les peintures représentant des humains remonteraient à quelque 3.000 ans AJC. Selon l'avis d'Anne Solomon, de l'Université du Cap, celles des grottes de Namibie seraient datées de quelque
7.000 ans AJC.
Les personnages à face négroïde représentés nus, armés d'arcs et de
masses, ont un corps court et épais présentant des détails anatomiques spécifiques de la race des Bochimans.
Ils ont, par exemple, la protubérance fessière propre aux deux sexes, mais surtout accusée chez les femmes. Les hommes ont la verge horizontale. Leur peau, comme celle des Bochimans actuels, devait être jaune-brun.
P. Underhill, de l'Université de Stanford, et M. Hammer, de l'Université d'Arizona, par comparaison du patrimoine génétique des différents
peuples de la planète, confirmèrent que les Bochimans sont les descendants directs des Néandertaliens qui, au cours, des millénaires, auraient acquis un type physique particulier et un langage archaïque, le "Khoisan" aux consonnes injectives (claquement de la langue).
Les Boskopoïdes, il y a 10.000 ans, occupaient tout le Sud de l'Afrique, entre le Botswana et la Namibie, principalement les régions giboyeuses et bien irriguées où ils trouvaient sans trop de mal leur
subsistance, si bien que, jusqu'à une période récente, leurs descendants restèrent des nomades chasseurs- cueilleurs. Les hommes chassaient. Les femmes récoltaient les plantes comestibles (baies, fruits, noix, feuilles, racines...).
Les Boskopoïdes adressaient au soleil, à la lune et aux étoiles des incantations afin d'obtenir le succès à la chasse. Ils relataient les aventures d'êtres surnaturels...
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L’Egypte
PREHISTORIQUE
Si je différencie ce pays de l'Afrique, c'est qu'il constitue une unité géographique isolée entre deux déserts et que l'histoire de son peuple forme un lien ininterrompu entre l'origine de l'humanité et le début de notre ère, ce qui ne se retrouve nulle part ailleurs. Certainement pas au Sahara où plusieurs ethnies se sont succédées, ni en Babylonie où les invasions renouvelèrent les populations.
L'Égypte tient son unité du Nil. Ce long fleuve de 6.000 km prend
sa source dans le Lac Victoria et descend rapidement vers la plaine soudanaise où il traverse une immense zone marécageuse de 750 km. Puis il reçoit deux affluents, le Sobat et, à la hauteur de Khartoum, le "fleuve Bleu", issu du LacTana, en Éthiopie.
Après Khartoum, le Nil s'engage dans un long canyon. Pendant cette traversée, une multitude de cours d'eau le chargent de limon arraché au sol éthiopien. Jusqu'à Assouan, le fleuve roule de cataracte en cataracte, six
au total, numérotées dans l'ordre inverse du courant, la sixième étant la plus près de la source. Avant d'atteindre la cinquième, il reçoit un dernier affluent, l'Atbara.
En aval de la première cataracte, il coule entre les rives d'un oasis toute en longueur de quelque 20 à 25 kilomètres de large cerné entre deux déserts. Une fois l'an, en août et septembre, le Nil en crue inonde cette vallée et lui apporte le limon indispensable à son agriculture.
En aval de
Memphis, débute la Basse-Égypte où l'estuaire du fleuve se déploie en éventail jusqu'à la Méditerranée.
A l'Ouest du Nil, le désert libyque est constitué de plateaux sablonneux et caillouteux entre lesquels des oasis forment comme une ligne parallèle au fleuve : Au Nord de ce désert, on trouve les dépressions de Sattara, de Ouadi- el-Natroum et du Fayoum.
A l'Est du Nil, le désert arabique comprend, en bordure de la Mer Rouge, une longue chaîne montagneuse percée d'un
lacis de voies de pénétration (ouadis) qui, pour, les pharaons, se révéla un univers minéral riche et varié : carrières de gneiss, de schiste, de granit, de diorite, de porphyre..., mines de méthystes, de galène, d'or...
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L'ouadi Hammamat fut, au temps des pharaons, une voie de passage entre la ville de Coptas et la rive de la Mer Rouge, d'où partaient les bateaux égyptiens vers le pays de Punt dont la situation géographique n'a jamais été localisée. Certains le placent dans l'actuelle province soudanaise du Kessala ; d'autres en Éthiopie, à la hauteur du Détroit de Bad el Mandeb ; d'autres encore dans la corne de l'Afrique (Somalie).
La péninsule du Sinaï, partie arabique de l'Égypte,
est une région désertique où les pharaons exploitèrent des mines de cuivre, de turquoise...
L'Égypte ancienne, malgré ses 850 kilomètres d'étendue en longueur, n'occupait qu'une superficie cultivable de 25.000 kilomètres carrés, moins que la Belgique qui couvre 30.500 kilomètres carrés. L'Égypte se divise naturellement en deux parties. La plus grande, le Delta, est une vaste terre d'alluvions, sillonnée par les bras du Nil et soumise, en hiver, à un régime de
pluies régulier. La plus petite partie est constituée par l'étroite vallée du fleuve quasiment privée de pluie, qui s'étend de Memphis à la première cataracte.
Les premiers Égyptiens n'étaient autres que des autochtones issus successivement des Australopithèques, des Homo-habilis et des Homo- erectus. Ces derniers, en évoluant sur place, devinrent des Néandertaliens africains qui vivaient en tribus sous l'autorité d'un chef et avaient
acquis un niveau convenable d'aptitudes manuelles, de connaissances intellectuelles et de conception mystique relative aux "forces vivantes" de la nature et à leur “Maître Suprême”. Ces peuples, il y a environ 100.000 ans, étaient devenus des Homo-sapiens qui avaient encore amélioré leurs performances manuelles et intellectuelles et parlaient un langage du type Chamite articulé et quasi narratif. Certains de leurs fossiles, vieux de 80.000 à 50.000 ans, ont été mis au
jour dans la Vallée du Nil Bleu, à Singa ; en Nubie, à Kom-Ombo ; en Haute-Égypte, à Quinnat Nallet.
Dès 17.000 ans AJC, le réchauffement général de la température entraîna progressivement la désertification des zones mal irriguées dont les habitants durent combler la réduction de la flore par l'agriculture et de la faune par l'élevage. A l'Ouest de Kom-Ombo, dans le Ouadi Koub-baniya, on a recueilli des grains d'orge semi-domestique associés à des mortiers et des meules
archaïques.
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Au Sud des oasis de Kharga et de Dakla, de nombreux sites attestent un nomadisme devenu pastoral. Vers 8.000 ans AJC, les eaux de pluie stagnaient dans les dépressions et maintenaient une certaine humidité qui préservait une maigre végétation. On retrouve ici des conditions climatiques similaires à celles que connurent les pasteurs du Sahara à la même époque. En revanche, les tribus semi-sédentaires qui parcouraient les deux rives du Nil, du delta à la Nubie, échappèrent à la sécheresse. Il
en fut de même dans le massif arabique où la chasse resta longtemps encore fructueuse si l'on en croit les dessins rupestres découverts à l'Est d'Assouan représentant diverses espèces animales
: éléphants, lions, gazelles...
Tout au long des rivages humides de la Haute-Égypte, et particulièrement dans la zone marécageuse du delta, poussait à profusion un grand roseau de six mètres de haut, le papyrus, dont les buissons ombragés abritaient une faune diversifiée : bœufs
sauvages, urus, sangliers, porcs, hippopotames, crocodiles, serpents et des oiseaux de toutes plumes et dans les eaux, des poissons aux innombrables variétés.
Très tôt, les tribus de ces régions utilisèrent le papyrus pour la fabrication de huttes et la confection de divers objets : paniers, nasses, cordes, nattes... Des faisceaux de ces roseaux assemblés furent à l'origine des premiers radeaux. A 30 km au Nord de Khartoum, sur le site de Saggai, daté entre 7.000 et 6.000 ans AJC,
furent retrouvées des poteries à décor, des outils de quartz et des traces d'habitations témoignant de l'existence de zones de travail artisanal.
Dans le désert occidental, on a décelé des indices, vieux d'environ .7.000 ans AJC, attestant une production de nourriture basée sur l'élevage. Les zones humides des ouadis étaient, en effet, exploitées par les populations pour y mener paître les animaux et pour y chasser. C'est ainsi que vers les années
7.000 AJC, les Egyptiens savaient domestiquer le bœuf, le porc, le mouton et l’oie. Ils cultivaient le blé, l’orge, le millet, du sorgho, des légumineuses (lentilles, fèves, oignon, pois chiches) ils avaient développé l’arboriculture (grenadier, figuier, jujubier). Ils utilisaient le papyrus pour la fabrication de huttes et la confection de divers objets : paniers, nasses, corde, nattes etc. Des
faisceaux de ces roseaux assemblés furent à l’origine des premiers radeaux. Au nord de Khartoum, daté de cette époque, furent retrouvées des poteries à décor, des outils de quartz et des traces d’habitations témoignant de l’existence de zones de travail artisanal.
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Vers les années 5.000 AJC, sur les rives du Nil, du delta à la Nubie, Ces tribus formaient des unités territoriales avec des villages et une capitale siège du gouvernement et centre d’activités artisanales. Si la transformation des produits agricoles était le fait des femmes au même titre que le filage, le tissage et la vannerie, en revanche les hommes assuraient le travail
du bois, la construction de huttes, la fabrication : de poteries (tour de potier) et d’objets en pierre : pilons, meules, disques, et palettes, comme d’ailleurs, la fabrication des armes et la confection des bijoux : perles en amazonite, anneaux d’ivoire etc. et des lampes à graisse.
A Shaheinab, datées de 5.000 ans AJC, on a mis au jour des poteries remarquablement décorées de gros points incisés en lignes ondulées ou en divers autres motifs, des outillages de pierre, des pointes de harpon en os, des hameçons en coquillages.
A Badai et à Hierakonpolis, datées de 4.000 ans AJC on retrouva des traces de huttes faites de poteaux et de torchis ou de briques crues, groupées en village et des indices selon lesquels les habitants pratiquaient le tissage du lin et la vannerie, avaient inventé une sorte de faïence d’un bleu clair, sculptaient des vases dans la pierre dure ou dans l’albâtre, enterraient leurs morts avec des provisions et des objets divers, comme des figurines d’argile.
Durant la période des basses eaux, les paysans cultivaient le blé, l’orge et le lin. Ils aménageaient les rives, creusaient des canaux et des bassins, élevaient des digues pour maîtriser l’épandage des eaux lors de la crue et pour créer des réserves d’eau pour la saison sèche. Tout naturellement, les paysans calèrent le cycle des saisons au rythme des crues du Nil, et en déduisirent la division de l’année en trois parties : Akhet (inondation), Peret (semence) et Shemou (chaleur = moisson).
Durant environ trois mois, la vallée était un grand lac. Dès la décrue, les paysans grattaient le sol avec un araire (de bois) attelé à deux vaches, parfois des ânes, même à des hommes. Dans les traces, ils jetaient les semences et lors d’un second passage les recouvraient. La récolte se faisait à la faucille (silex tranchant et manche en bois) en coupant le sommet de la tige. Le chaume laissé sur place servait de pâture aux animaux.
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PÉRIODE PRÉDYNASTIQUE (4.600-3.000 AJC)
Il y a 4.600 ans AJC, du fait d'une aridité croissante, les tribus semi- nomades des plateaux rejoignirent les rives du Nil, le long desquelles les villages se multiplièrent et devinrent des centres aux activités diverses : fabrication d'objets utilitaires et métiers d'arts : perles émaillées, verres moulés, vases de pierre dure, rondes bosses en ivoire ou en argile représentant oiseaux, poissons, bovidés et figurines de femmes et d'hommes nus, objets rituels plus ou moins
magiques en hommage aux "forces vivantes" de la nature ou à leur "Maître suprême".
Dans la région de Khartoum (Soudan), à Kadada, furent retrouvées de nombreuses tombes datées d'environ 4.600 ans AJC, pourvues d'objets divers : récipients en coquilles d'œufs d'autruche, figurines de terre cuite, haches de pierre polie, pilons et meules, disques et palettes, perles en amazonite, anneaux d'ivoire, objets en os, récipients à décor
incisé, jarres destinées aux inhumations d'enfants. On y observa également des indices témoignant de l'apparition d'espèces animales domestiques : ovins, chèvres, moutons...
La présence de tombes laisse à penser qu’à cette époque, les hommes avaient pris conscience que la mort n’était pas sans lendemain et marquait le commencement d’une vie dans l’au-delà, sans que l’on puisse préciser
quelles furent l’origine et la motivation de cette conception. On imagine qu’elle
résulta de la simple observation de la nature qui meurt en hiver pour renaître au printemps, ou des rêves à travers lesquels revivent les morts !
Sur un site daté de 4.000 ans AJC, à Nabta, au Sud de l'Égypte, non loin du Soudan, des témoignages archéologiques prouvent que les pasteurs, en plus de l'élevage, pratiquaient la culture de l'orge. Leurs huttes étaient associées à
des silos et à des puits où l'on trouva des céramiques ornées de motifs et des outils de
pierre.
Dans la vallée, durant l'époque des basses eaux, les paysans cultivaient le blé, l'orge et le lin. Ils aménageaient les rives, creusaient des canaux et des bassins, élevaient des digues pour maîtriser l'épandage des eaux lors de la crue et pour créer des réserves d'eau pour les périodes sèches.
Vers 4.000 ans AJC, des groupes de paysans quittèrent leur vallée devenue trop étroite et s'implantèrent les uns au Sud, entre la première et la deuxième cataracte,
en se mêlant aux populations nubiennes ; les autres, plus au Nord, dans la partie large de la vallée.
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Du fait de l'aridité croissante, les "ouadis" du massif, à l'Est du Nil, furent abandonnés mais les hommes y retournèrent régulièrement pour exploiter les richesses minières.
A cette époque, les villages abritaient des populations qui vivaient en théocratie, selon la tradition ancestrale, sous l'autorité civile et religieuse d'un chef représentant terrestre d'un "dieu maître suprême" des "forces vivantes" de la nature,
lequel, à travers les rêves, communiquait avec les hommes ou leur manifestait ses sentiments par l’intermédiaire des phénomènes naturels : la pluie régulière indiquait sa satisfaction alors que les éclairs traduisaient sa colère, le tonnerre, sa réprobation.
Progressivement, ces villages subirent la prédominance pacifique ou belliqueuse d'un voisin plus fort, et se rallièrent à son chef qui devint le souverain d'une principauté. Ces unions modifièrent la répartition des
divinités ; généralement le vainqueur imposait son dieu au vaincu.
Dès cette époque, les souverains des principautés s'entouraient de dignitaires ayant en charge respectivement la sécurité, l'administration et le culte. Ceux qui exerçaient cette dernière fonction le faisaient au nom de leur souverain représentant terrestre du "Maître suprême" des forces vivantes de la nature. Chaque principauté avait sa propre représentation symbolique de sa divinité.
Parmi celles qui passèrent à la postérité, on peut citer : la vache (HATHOR), le taureau (APIS), le bélier (KHNOUM), le cobra (NEKHBET), le crocodile (SOBEB), le chacal (ANUBIS), l'ibis (THOT), la virilité (MIN).
Près de Lykopolis, et non loin d'Abydos, sur les terrasses qui, il y a
4.000 ans AJC, dominaient les marécages de la vallée du Nil, on retrouva des traces de huttes groupées en villages et des indices selon lesquels les habitants pratiquaient le tissage du lin et la
vannerie, avaient inventé une
sorte de faïence d'un bleu clair, peignaient des traits blancs sur des poteries rouges lissées, sculptaient des vases dans la pierre dure ou dans l'albâtre, enterraient leurs morts avec des provisions et des objets divers, comme des
figurines d'argile peinte.
Des prêtres d'une principauté en vinrent à imaginer que le "Maître suprême" n’était autre que le ciel (HORUS) et, voyant les faucons planer au- dessus de
leurs têtes, prirent cet oiseau comme symbole, dont le soleil et la lune étaient les yeux. Leur souverain devint le représentant terrestre d'HORUS, puis HORUS lui-même. Dans le delta, un souverain nommé OSIRIS bénéficia d'une telle renommée qu'après sa mort, son nom devint celui du "Maître suprême".
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Dans d'autres principautés, les hommes, présumant que la vie dépendait du dieu soleil, adoptèrent cet astre comme divinité et, selon le lieu, lui donnèrent un nom différent : KHEPI, RE, ATOUM, ... Pour d'autres, par déduction, si le soleil était le "Maître suprême", l'air devait être son souffle, l'eau sa sueur, la lumière son regard.
D'autres hommes imaginèrent que le dieu soleil naviguait dans une barque au-dessus du ciel, de l'aurore au
crépuscule. D'autres encore virent le ciel comme une déesse courbée au-dessus de la terre.
Progressivement, à une époque indéterminée, au cours du lll ème millénaire AJC, les hommes attribuèrent aux diverses divinités (Forces vivantes de la nature) et à leur chef (le “Maître Suprême”) des mœurs et des habitudes de vie sensiblement identiques aux leurs, de sorte qu’ils constituèrent un panthéon organisé.
Vers 3.600 ans AJC, les différentes principautés du Nil se groupèrent en deux
royaumes, conformément à la dualité géographique des pays.
Dans le delta, les principautés se rassemblèrent sous l'autorité du roi de Bouto et la protection de la déesse cobra (OUADJYT), alors qu'OSIRIS était attesté comme dieu de Busiris.
Les traits essentiels de la culture du peuple de ce royaume résidaient dans sa forte implantation sédentaire, la simplicité de son univers funéraire et dans le fait que ces pasteurs-agriculteurs entretenaient déjà des échanges
commerciaux avec leurs voisins du Sinaï et du Proche-Orient, comme en témoignent des poteries égyptiennes de cette époque retrouvées en Canaan.
Dans la zone humide du Fayoum et de Maadi (Le Caire), on a retrouvé, datés d'environ 3.600 ans AJC, des outils de pierre polie, des traces de huttes groupées en villages et divers indices permettant de conclure que les habitants y pratiquaient l'élevage de bœufs, moutons, chèvres..., avaient domestiqué le chien, cultivaient le blé et l'orge,
semaient et tissaient le lin, utilisaient la houe pour ameublir le sol, la faucille en silex pour couper les céréales, la meule et le pilon de pierre pour en broyer les grains. Lors des semailles, les graines étaient jetées à même le sol et enfoncées par le piétinement répété des sabots des bovins et ovins
.
- Dans la vallée, les populations acceptèrent comme souverain le roi de Badari, dont le dieu faucon HORUS était le protecteur, alors que la ville de El-Kab, plus au Sud, honorait la déesse vautour.
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Les historiens donnèrent aux hommes de cette région le nom de Badariens. Certaines de leurs nécropoles, comme à Nagadi, creusées en lisière du désert, révélèrent une variété d'équipements funéraires traduisant une hiérarchie sociale développée : poteries décorées de motifs géométriques, d'animaux et de plantes, vases de pierre, statuettes en ivoire.
Les sites spécifiques de ce royaume sont constitués de petits villages construits en bordure de la plaine alluviale sur les
promontoires des anciennes terrasses du Nil. Ainsi, les habitants bénéficiaient de la crue annuelle pour leurs cultures, sans en subir eux-mêmes les dommages.
LA CIVILISATION BADARIENNE
Dès 3.500 ans AJC, certains villages étaient devenus des centres administratifs et gouvernementaux aux diverses activités : religieuses, artisanales, commerciales.
Dans les campagnes, les cultivateurs badariens, grâce à des cuvettes et des rigoles, exploitaient les crues du Nil. Lors de la montée des eaux, ces dispositifs en régulaient l'épandage sur les terres à fertiliser et permettaient à des bassins de se remplir pour constituer des réserves nécessaires à l'irrigation durant
la période sèche.
Ces paysans, tout naturellement, calèrent le cycle des saisons au rythme des crues du Nil, et en déduisirent la division de l'année en trois parties :
Akhet = inondation du 19 juillet au 15 novembre
Peret = émergence = semence du 16 novembre au 15 mars
Shemou = chaleur = moisson et impôt du 16 mars au 18 juillet
Durant environ trois mois, la vallée du Nil était un grand lac. Dès la décrue, les paysans grattaient le sol avec un araire attelé à deux vaches, parfois des ânes, même à des hommes. Dans les traces, ils jetaient les semences de blé ou d'orge et un second passage les recouvrait. La récolte se faisait à la faucille en coupant le sommet de la tige. Le battage et le broyage des épis donnaient une farine pour la pâte à pain. Celle-ci, levée au soleil ou au levain de bière, était cuite. Le
chaume laissé sur place servait de pâture aux animaux.
Toute la production de céréales était monopole d'État. Les récoltes étaient estimées par l'administration qui laissait environ dix pour cent au cultivateur pour son usage et les semences de la saison suivante.
Par ailleurs, des "pâtons" de farine d'orge recuit étaient mis à fermenter dans l'eau. Le liquide, après décantation et filtrage, donnait la bière conservée dans des jarres. L'écume recueillie
et séchée constituait la levure nécessaire à
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la panification. Le pain et la bière étaient les éléments de base de toute la société égyptienne et le restèrent tout au long de son histoire.
La culture du lin se faisait en alternance avec celle des céréales. Semé après la récolte du blé et de l'orge, sur les terres hors d'eau, le lin mûrissait pendant la période de la crue (août et septembre) et se récoltait avant les semailles des céréales. Après rouissage, peignage, filage et tissage, les Égyptiens obtenaient une étoffe
servant à la confection de tous les vêtements des vivants et des morts.
A défaut d'olivier, les Égyptiens avaient découvert les vertus des graines de ricin, de lin et de sésame desquels ils tiraient une huile qu'ils utilisaient pour la cuisine et les lampes à mèche.
Au miel sauvage récolté depuis des millénaires, succéda une production domestique. Le dattier avait servi très tôt comme bois de construction et ses feuilles, frondes et fibres pour la vannerie et la fabrication
des cordes. Ses fruits étaient consommés crus, séchés ou en pâte. Les figues et les jujubes étaient aussi très appréciées.
La présence de vignobles est attestée de longue date dans le delta et dans les oasis de l'Ouest. Les Égyptiens mangeaient le raisin mais surtout en faisaient du vin.
Les Égyptiens glissaient sur le Nil dans des bachots en roseau tressé mais aussi sur des bateaux en bois pourvus d'avirons si l'on en croit des peintures de vases en terre de cette
époque. Ils y chassaient le gibier d'eau. Ils y piégeaient les oies, les canards et les grues qu'ils engraissaient dans des cages.
A Badari, en Haute-Égypte, on a retrouvé des objets en cuivre martelé, des tissus de lin, des céramiques émaillées. A Gergeh, en Basse-Égypte, furent découverts des vestiges de silos à grain, des caveaux rectangulaires, des statuettes, des poteries rose-jaune lissées portant des peintures exécutées au trait blanc, représentant des scènes de la vie,
des paysages, des animaux sauvages, également des vases sculptés dans la pierre dure et des armes d'apparat faites d'une large lame de silex légèrement courbée, équipée d'un manche d'or ou d'ivoire sculpté, tel le fameux couteau de Gebel-el-Arak (Musée du Louvre).
Des fosses où reposaient des restes humains et des objets usuels divers témoignent que les Égyptiens, il y a quelque 3.500 ans AJC, entouraient leurs
morts du nécessaire pour vivre une nouvelle existence
dans l'au-delà souterrain. Ce qui constitue une continuité évolutive de la spiritualité de ce peuple.
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Des feuilles de schiste découpées en silhouettes animales (taureaux, gazelles...) ou humaines (guerriers, chasseurs...) comportant souvent un godet central, furent, pour certains archéologues qui les découvrirent, considérées comme des "palettes à fard" ; d'autres prétendirent qu'il s'agissait d'objets votifs déposés dans les temples archaïques.
De la même époque, on a retrouvé en Nubie des traces vertes laissées par le broyage de la malachite dont les artistes
usaient en les mélangeant au sulfure de plomb pour obtenir diverses nuances de noir, de gris ou de bleu.
Des dessins rituels datés de 3.500 ans AJC représentant des animaux, des plantes ou le soleil, comme ceux retrouvés en Haute- Égypte (Badari, El- Amrah, Tassa) et en Basse-Égypte (Mérinde) auraient désigné les monarques
et les dieux dont ils étaient les représentants sur terre.
Datés de 3.300 ans AJC, à Sohag, au Nord d'Abydos en Haute- Égypte, furent mis au jour, dans des
tombes, plus de 300 tablettes, tessons de poteries
et os gravés d'hiéroglyphes primitifs (document n° 8, page 57) qui témoignent que les hommes ayant vécu quelque peu antérieurement à cette date possédaient déjà un système de transmission du langage car rien n'arrive spontanément.
Par ailleurs, les spécialistes pensent que les Égyptiens, après avoir utilisé le papyrus pour en faire des radeaux, des
huttes, des vanneries, des nattes..., vers la fin du IVe millénaire, tirèrent de ce roseau de fines lanières calibrées aux dimensions d'un cadre dans lequel ils croisaient des lanières sur plusieurs
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couches et les martelaient jusqu'à leur amalgame complet. Puis, après pressage Papyrus par un objet très lourd, ils obtenaient une feuille qu'ils devaient encore polir avec une pierre ronde et en ébarber les bords
avant qu'elle puisse être utilisée par les scribes pour y tracer des hiéroglyphes. Au début, ceux-ci représentaient simplement l'objet qu'ils voulaient
mémoriser, à des fins d'inventaire pour contrôler la production des paysans et des artisans ou à transcrire
des formules rituelles pour honorer le roi et le dieu dont il était le représentant. De toute façon, ce mode d'écriture se développa rapidement et parvint à
exprimer des abstractions par un concept astucieux d'homophonie (voir page
111)
.
- Hiéroglyphes primitifs
Avec l'écriture, ce fut le début d'une administration dont les scribes devinrent le pilier principal. Ils durent tout consigner : l'arpentage des terres cultivées, l'évaluation des récoltes, le recensement du bétail, l'enregistrement des contrats, la rédaction des annales royales...
Vers 3.200 ans AJC, les habitants du delta pratiquaient la navigation côtière en direction du Liban (Byblos) et de la Crète où on a retrouvé des vases en pierre dure d'Égypte qui
attestent leurs rapports commerciaux avec le monde de la Méditerranée.
Sur le site de Menshet-Abou-Omar, à l'Est du delta, une riche nécropole attribuée à un roi et datée de 3.300 ans AJC, livra des poteries typiques de l'époque de Nagada : des couteaux en silex, des bijoux en or et en cornaline, des palettes de pierre dure.
Une nécropole archaïque d'Abydos, en Haute-Égypte, livra un riche mobilier daté de 3.200 ans AJC, attribué au roi de la principauté, nommé
SCORPION
1er du fait que cet animal sacré figurait sur divers objets en ivoire.
Un peu plus au Sud, à Hiérakonpolis, on retrouva des fragments de tête de massue en calcaire portant le signe du scorpion et le dessin d'un roi coiffé
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de la couronne de Haute-Égypte, tenant à la main une houe dans un décor de canaux. Ce roi, arbitrairement appelé SCORPION Ile, aurait régné peu avant la période dynastique.
C'est aussi l'époque où apparurent les premiers outils, armes et objets divers en cuivre et où la navigation commerciale sur le Nil prit son essor ; une poterie datée d'environ 3.100 ans AJC représente un radeau de bottes de papyrus entrecroisées avec un mât et une petite voile de lin plus large que
haute.
La navigation sur le fleuve était facile, du fait que les vents dominants soufflaient du Nord, en sens inverse du courant. Dès lors, les bateliers pouvaient se laisser glisser au fil de l'eau puis hisser la voile dès qu'ils voulaient remonter le courant
.
Depuis l'origine, le fond de la population, tout au long de la vallée du Nil, avait le type évolué des Homo-sapiens de l'Afrique occidentale. Cependant, la morphologie des Égyptiens ne fut pas
constante du Nord au Sud. Ceux de la Haute-Égypte s'apparentaient aux Soudanais et ceux de la Basse- Égypte aux Africains du Maghreb, à quelques détails près. Aujourd'hui, d'Assouan à Alexandrie, cette diversité de traits demeure. La vallée du Nil apparaît comme un lieu de confluence où s'est formé un peuple original qui parlait une langue d'origine "chamite" et possédait une riche tradition orale dont des bribes se retrouvent dans des sentences, des mythes et
des légendes repris dans des textes ultérieurs.
Remarque :
Les dynasties : Sous le règne de PTOLEMEE III (246-221 AJC), MANETHON, prêtre-savant, divisa l'histoire de l'Égypte en trente dynasties dont il précisa la durée. C'est cette chronologie que les historiens modernes ont adoptée.
Pharaon : Ce titre ne fut attesté dans les textes égyptiens qu'à partir de
1370 AJC et, longtemps encore après, les scribes ne s'en servirent que rarement, préférant les termes : Roi ou Seigneur. L'expression Pharaon fut
généralisée seulement vers 950 AJC. A notre époque, on utilise fréquemment ce titre pour désigner tous les souverains égyptiens.
Les dates sont approximatives, particulièrement les plus anciennes, ainsi que celles des périodes troubles dites intermédiaires. Pour les Pharaons, on précise seulement la période de leur règne.
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L’EMPIRE EGYPTIEN.
PREMIERE DYNASTIE
Une palette de schiste trouvée à Hierakonpolis, en Haute- Égypte, datée d'environ 3000 ans AJC, présente sur deux faces des dessins et des hiéroglyphes en méplat interprétés comme attestant l'unification des deux Égypte par le Roi NARMER, descendant d'HORUS, dieu faucon, dont le nom en hiéroglyphes, est gravé sur les deux faces en haut, entre deux têtes de la déesse HATHOR, aux oreilles et cornes de vache.
-
Tiare de Haute Egypte
Document A : NARMER, représenté avec les attributs du pouvoir : barbe postiche, tiare de Haute-Égypte et queue d'animal attachée au pagne, assomme un Lybien qu'il tient par les cheveux. Derrière le Roi, on voit, à gauche, son porte-sandale et, à droite, l'image d’HORUS (faucon royal) jugulant six mille ennemis,
nombre écrit à l'aide de six fleurs de lotus. En bas, sont représentés deux ennemis vaincus.
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Couronne de Basse Egypte
Document B : On voit, en haut, la marche triomphale de NARMER coiffé, cette fois, de la couronne de Basse-Égypte conquise, et précédé des porteurs de l'emblème du Faucon royal (HORUS). En-dessous, deux panthères fabuleuses en
laisse. Tout en bas, un taureau attaquant un ennemi.
HORUS le dieu qui accompagne le roi.
Les dessins de ces palettes attestent d'un art accompli et témoignent d'une civilisation résultant d'un long apprentissage trouvant son apogée à l’époque de l'HORUS-NAMER qui, ayant envahi le Delta et investi Bouto, coiffa la couronne de Basse-Égypte, puis établit sa capitale à This où l'on retrouva son tombeau.
L'HORUS (le Roi) MENES, successeur du précédent, mit en
chantier, à la jonction des "deux terres" (royaumes) unifiées, une nouvelle ville, Memphis, à la fois capitale et centre religieux du dieu Soleil, ATOUM. C'est dans son temple que les Pharaons seront couronnés.
Les HORUS : NAMER, MENES et leurs successeurs immédiats DJER, DJEJ (Document n° 10), ANDJIB, SMERKHET, QAA, ... ne firent pas sortir l'Égypte de la Préhistoire, comme on le voit trop souvent écrit. Car, comme je l'ai plusieurs fois précisé, les
connaissances dont font preuve les peuples à une époque déterminée résultent de l'accumulation, au cours des millénaires, des acquis des générations précédentes. Mais ces Rois furent les premiers à contrôler, en maîtres absolus, un pays aussi vaste que les deux Égyptes réunies
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qu'ils divisèrent en districts administratifs ou nomes, vraisemblablement selon le précédent découpage des principautés.
Partout, des ouvriers avec des houes
terrassaient, avec des paniers transportaient des alluvions, du sable, de la chaux, de l’argile, ... Dans le Delta, ils endiguaient des bras du Nil et asséchaient des marais. En Moyenne et Haute- Égypte, pour maîtriser les crues du fleuve et
irriguer de vastes étendus, ils creusaient des canaux et dressaient des digues.
Les premières villes prirent leur essor : Kom-Ombo, El-Kaba, Narada,
Stèle de DJET - Roi-serpent
Document n° 10
Abydos, This, Badai, Memphis, Bouton... Les objets découverts dans les nécropoles (Abydos, Saqqarah, Hellman) des
souverains et des dignitaires de cette première dynastie témoignent des progrès des arts (sculpture, gravure, poterie, bijouterie) et de l'expression
graphique. Si la palette de NARMER (document n° 9), la stèle de DJET
(document n° 10) et les empreintes des sceaux d'ANKJIB présentant des inscriptions parfaites nous sont parvenus, c'est qu'elles étaient
faites en matière imputrescible ; cela ne fut pas le cas des papyrus périssables dont les hiéroglyphes devaient être d’un tracé tout aussi remarquable.
Les spécialistes précisent qu'à cette époque, l'écriture avait dépassé le stade purement figuratif. Certains dessins correspondaient non plus à ce qu'ils représentaient mais à la consonance du mot. Dès cette époque, l’écriture permettait l'organisation d'un pouvoir centralisé. Les scribes transmettaient les ordres du
Roi aux gouverneurs des nomes, lesquels, en retour, lui adressaient le compte rendu de leur bonne exécution.
Il ème Dynastie (2780-2635 AJC)
Dans le désert d'Abydos, des fouilles mirent au jour de grandes stèles portant les noms et la titulature des HORUS défunts, successeurs de ceux de la première dynastie et marquant l'emplacement de leur tombe bâtie entièrement en briques crues, selon un plan rectiligne simple dont les murs diminuaient d'épaisseurs vers le haut pour assurer plus de stabilité à la construction. Les noms des HORUS défunts étaient inscrits en hiéroglyphes conformément à la stèle du roi DJET (document
n° 10).
Près de Saqqarah, de grands mastabas furent datés et identifiés par de
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nombreux scellés et objets comme étant les véritables tombes des Pharaons qui avaient leur cénotaphe à Abydos. A Saqqarah, ils étaient unis, non plus à HORUS mais au dieu local SETH.
L’attribution de ces deux lieux aux mêmes rois défunts peut se comprendre si l'on connaît la conception religieuse égyptienne de la double personnalité du roi, à la fois homme et dieu, à moins que ce soit en qualité de double roi de la Haute-Égypte, sous le signe de HORUS et de la Basse-Égypte sous celui
de SETH. A moins encore qu'il y eut à nouveau partition de l'Égypte
en deux royaumes : l'un dans la Haute Vallée sous la couronne d'HORUS, et l'autre dans le delta sous la bannière du dieu SETH. Quoi qu'il en fût, les historiens ont retenu comme Rois de la Ilème Dynastie NETEP,
NINETCHER, dont les tombes furent découvertes à Saqqarah, et
KHASEKHEMOUY (2660- 2635 AJC).
Des restes humains retrouvés dans des sépultures à Saqqarah attestent que, vers 2700
AJC, se pratiquait la momification des cadavres royaux. On ne sait rien du mode de vie des Pharaons de cette époque car des temples et des palais construits de montants de bois, de cloisons en sparteries, pisé et briques crues, il ne subsiste que quelques traces.
Cependant, divers vestiges permirent aux Historiens d'affirmer que, sous le règne de KHASEKHEMOUY, les dieux HORUS du Sud (Hierakon- polis) et SETH du Delta étaient réconciliés. Les deux terres unies formaient un seul
état dont la paix intérieure était confortée par un contrôle rigoureux des frontières de Nubie au Sud, de Lybie au Nord- Ouest et du Sinaï à l'Est, où déjà les Égyptiens exploitaient les mines de cuivre pour leurs ateliers métallurgiques. Le pays était fortement organisé autour du Roi qui avait su déléguer son pouvoir civil aux gouverneurs de nome et confier le culte des dieux à un clergé qui officiait en son nom. Parmi les prêtres, certains firent preuve de beaucoup d'imagination
pour intégrer les croyances, les mythes et les légendes accumulés au cours des millénaires par leurs ancêtres en un seul récit racontant la genèse du Monde. A titre d'exemple, voici les affabulations des théologiens d'Héliopolis telles qu'elles furent reconstituées par des récits cent fois recopiés, dont voici l'une des versions
:
Le dieu Solaire ATOUM fit sortir l'Égypte du chaos liquide de l'océan primitif et la gouverna un premier temps selon l'ordre
cosmique qu'il avait établi. Un jour, fatigué de mâter les révoltes des hommes, il décida de se retirer au ciel dans l'éternité de son périple solaire et confia la royauté terrestre à ses descendants : SHOU, GEB, OSIRIS et HORUS, puis aux enfants de ce dernier, finalement aux Pharaons dont le premier avait été NAMER, successeur d'HORUS, et HORUS lui-même comme ses successeurs.
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En léguant son pouvoir, ATOUM n'avait pas abandonné l'Égypte. Il continuait à la surveiller de loin et à agir sur elle par personne interposée, c'est- à-dire le Pharaon qu'il choisissait et dont il contrôlait les actes. Pour ce faire, ATOUM engendrait le futur Roi en prenant l'aspect du mari de la femme qui devait devenir la mère de Pharaon. Le choix de cette dernière et, à travers elle, celui du futur souverain, dépendait de son seul pouvoir impénétrable (mystère
de l'incarnation) et en aucun cas des règles humaines.
Le dieu ATOUM contrôlait le souverain qu'il avait choisi, sous forme d'inspirations divines qui le traversaient chaque fois qu'il agissait dans l'exercice de ses fonctions. Dans ce cas, ses paroles et ses écrits étaient des ordres divins, des décrets royaux. Il pouvait aussi communiquer avec Pharaon par des rêves, des signes prodigieux, des présages décryptés par les prêtres.
L'autorité de Pharaon reposait
sur son caractère de vecteur de la volonté divine. Ses actes étaient intrinsèquement justes parce qu'il les décidait à la lumière du discernement divin.
Pour les Égyptiens, le dieu ATOUM, en sortant le pays du chaos, avait créé l'alternance des jours et des nuits, des inondations et des décrues du Nil, et avait confié à Pharaon la mission d'assurer la pérennité de l'équilibre des "forces vivantes" de la nature. Toute défaillance compromettant ce
bel ordonnancement aurait replongé le monde dans le chaos originel. Tout au long de leur histoire, les Égyptiens eurent l'obsession d'un tel retour dont seul Pharaon, allié de dieu, pouvait les protéger.
Le clergé n'était autre que l'ensemble des serviteurs particuliers du Roi et, à travers lui, d'ATOUM dont il était le représentant terrestre.
Au palais : il assurait le service alimentaire et les ablutions de sa personne divinisée ainsi que la conservation et l'entretien des insignes, des parures et des vêtements royaux. Certains prêtres avaient, près du souverain, les fonctions de scribes et de conseillers ou étaient préposés à l'organisation des fêtes habituelles du nouvel an ou exceptionnelles de jubilé destinées à renouveler la force divine de Pharaon.
Dans les temples, au nom du Roi, le clergé satisfaisait au culte quotidien de la statue divine : toilette, onctions, habillement, libation, fumigation d'encens, présentation d'offrandes alimentaires... Périodiquement, à l'occasion des fêtes, il procédait, en grand apparat, à la sortie en procession de la statue divine, généralement en compagnie du roi.
Ainsi, le souverain et ATOUM et tous les dieux secondaires des nomes
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et des villages étaient honorés dans un même culte. Ils se confondaient en une seule et même entité servie avec une dévotion identique par les membres d'un clergé unique qui, en contrepartie de sa fonction, bénéficiait de certains privilèges matériels.
Les Princes, fils du Roi, occupaient généralement de hautes fonctions religieuses, administratives ou militaires. Lors des fêtes, ils pouvaient conduire la procession à la place de Pharaon. Les princesses, filles du Roi, étaient parfois
associées au culte des dieux.
Dans l'ordre décroissant de notoriété, il y avait les prêtres au service du souverain ou des temples, puis les hauts fonctionnaires des administrations centrales ou locales, suivis de leurs subalternes : scribes, arpenteurs, contrôleurs... sans oublier les architectes, les sculpteurs, les peintres et les décorateurs des temples, des palais et des tombes, ainsi que les chefs et les hommes des milices des villes et les soldats et officiers des armées
royales.
Au bas de l'échelle sociale, il y avait les serviteurs employés aux petites tâches manuelles ou aux travaux dans les cuisines ou les ateliers de Pharaon, des temples ou des notables. Les hommes de peine, groupés en équipes qui, sous l'autorité d’un chef, s'activaient sur les chantiers, dans les mines, dans les carrières, sur les bateaux comme rameurs, sur les quais comme débardeurs...Chacun recevait un salaire en nature proportionnel à son échelon
hiérarchique.
Le paysan remettait quatre-vingt-dix pour cent du produit de son travail à l'entrepôt d'état ou à celui du temple, en cas de concession. Le surplus lui était attribué en partie pour salaire mais aussi pour assurer la production de l'année suivante.
La morale de la société égyptienne reposait sur les grands principes de charité, d'humilité, d'amour, de justice, de concorde et de paix, en vue de réaliser le dessein du dieu et, par conséquent, celui de Pharaon, afin d'éviter le retour au chaos primordial.
Le mariage égyptien ne donnait lieu à aucune cérémonie religieuse ni formalité administrative, pas même à une fête familiale. Les deux époux étaient réputés unis le jour où ils commençaient à vivre ensemble sous le même
toit. Une fois mariés, la jeune fille prenait le titre de "maîtresse de maison". Toute la vie du couple tournait dès lors autour des enfants et du foyer. Dans les familles modestes, l'épouse, en plus des tâches habituelles de cuisine, d'entretien, de confection d'habits..., fabriquait le pain, la bière, la levure... Les paysannes aidaient leur mari dans les champs, filaient et tissaient le lin.
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Les femmes étaient habillées d’une pièce de tissus serrée en dessous des seins. Alors que les hommes portaient une pièce de tissu plus courte serrée à la ceinture
Les hommes assuraient les travaux agricoles des labours aux moissons. Les artisans travaillaient le cuir, le bois les métaux…Les maçons utilisaient un mélange de chaux, argile sable et eau.
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Chez les gens aisés, la femme se contentait de diriger ses serviteurs, d'organiser des banquets, de faire de la musique...
La règle générale pour le peuple était la monogamie ; seuls les pharaons et les princes (enfants royaux) eurent parfois plusieurs épouses. Quel que fut son état, la femme était respectée, libre et autonome. Après le mariage, elle conservait son nom et ses biens. Le divorce pouvait être consenti par accord mutuel ou par un acte autoritaire du mari ou sur l'initiative
de la femme. Après la séparation, chacun pouvait se remarier à sa guise.
Si l'inceste est attesté chez certains pharaons, ce type d'union était lié au statut particulier et symbolique des couples royaux, mais il fut souvent entretenu par les historiens à cause d'une ambiguïté du vocabulaire. En effet, "senet" désignait à la fois la sœur et la "bien aimée". L'épouse appelait volontiers son mari "mon frère".
Le clergé, les
fonctionnaires, toutes les classes de la population citadine, agricole, artisanale et ouvrière travaillaient pour Pharaon et sa cour. Cependant, les historiens affirment que, parmi les Égyptiens, sauf ceux qui purgeaient des peines, il n'y avait pas d'esclaves mais des tenanciers libres, des serviteurs, des manouvriers ; tous pouvaient détenir des biens et en disposer à
leur gré.
Dans un pays sans monnaie, où toutes les productions appartenaient à l'état ou au temple, il
est difficile d'imaginer comment se réglaient les transactions. On sait toutefois que le gouvernement laissait une partie de leur production aux paysans et que les fonctionnaires et les ouvriers recevaient leur salaire en nature par l'intermédiaire des magasins du roi ou du temple, de sorte que tous les besoins se résolvaient en échange de denrées alimentaires, d'objets utilitaires, de matériaux divers ou de prestations de services...
Les peintures d'une tombe de Saqqarah
de la dynastie suivante nous renseignent sur ce qui devait se passer antérieurement. On y voit des
marchands de poissons, d'onguents, de gâteaux, de légumes, de parures, d'hameçons... discutant avec des clients qui, en échange, proposaient divers objets : deux petits vases, une cuillère, une paire de sandales, un éventail, un coupon de tissu....
L'armée était formée de miliciens équipés de frondes et d'arcs. Son rôle était triple : assurer la police intérieure,
entreprendre des expéditions en Nubie et au Sinaï pour en ramener les produits rares qui manquaient sur le territoire égyptien, et défendre le pays contre ses envahisseurs éventuels.
Pour poursuivre les travaux entrepris par leurs prédécesseurs, les Rois de la deuxième dynastie mobilisèrent un nombre important d'ouvriers qui, le long de la vallée du Nil, remblayèrent les dépressions, nivelèrent les terrasses, creusèrent des canaux irriguant des étendues de plus en plus vastes,
permettant
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d'accroître la culture céréalière traditionnelle, et de développer les vignobles, les potagers et les vergers (figuiers dattiers, grenadiers, ricins...)
Aux constructions faites de poteaux, clayonnages, vanneries et pisé,
se substituèrent progressivement des murs de briques crues. Cette amélioration concerna les huttes des paysans, les demeures du roi et des dignitaires, ainsi que les édicules (temples archaïques) et les mastabas. De ces derniers, seuls subsistent quelques
vestiges à Negada, Abydos et Saqqarah
La pierre fut utilisée pour la première fois pour construire les escaliers menant aux tombeaux royaux et pour rendre inviolables les chambres funéraires. Celles-ci étaient entourées de plusieurs magasins contenant le matériel et les provisions destinées à accompagner les rois défunts dans l'au- delà. Les murs des structures extérieures en briques crues étaient décorés de bas-reliefs représentant des scènes de la vie des défunts, soit en famille,
soit lors de banquets, de parties de chasse, soit dans le cadre de fonctions officielles.
lll ème Dynastie (2635-2561 AJC) :
Son fondateur NEBKA (2635- 2617 AJC), comme ses prédécesseurs, régna à Memphis. Cette ville, du fait de son rôle de capitale, avait attiré les meilleurs scribes, les plus habiles artistes et un grand nombre d'artisa ns aux multiples activités et particulièrement le travail du métal. Ceci lui valut une prospérité à la fois culturelle et économique.
Le nouveau souverain réorganisa ses services financiers en substituant des inventaires biannuels rigoureux des productions agricoles et
artisanales aux évaluations arbitraires précédentes.
DJOSER (2617-2599 AJC) fit progresser la civilisation égyptienne en choisissant IMNOTEP, grand prêtre d'Héliopolis, pour en faire son vizir. Il plaça sous sa direction les différents organes de l'administration centrale :
La maison des champs, qui veillait sur les domaines et les récoltes, la maison des eaux, qui coordonnait l'irrigation ; la maison blanche, sorte de ministère des finances,
contrôlait les magasins de stockage, assurait les salaires des fonctionnaires, l'intendance de l'armée, les donations aux temples... et conservait les archives royales.
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Les directives des différentes administrations centrales étaient répercutées aux 42 gouverneurs de nome. Chacun devait contrôler la production des denrées agricoles, le travail des artisans, le rendement des mines et carrières, assurer le transport et la conservation dans les entrepôts des produits comestibles et des divers matériaux, tant usuels que précieux, rendre compte de l'entretien des canaux, réactualiser les registres cadastraux, régler les litiges
Pharaon était propriétaire
de toute terre et de tout bien. S'il en concédait une part à l'un de ses sujets, plus généralement à un temple, ce n'était qu'à titre de tenure, faculté d'en jouir. Il pouvait à chaque instant révoquer sa donation. Les personnes elles-mêmes lui appartenaient. Les territoires étrangers étaient aussi sa propriété. Comme la péninsule du Sinaï dont il exploitait les ressources minières (cuivre et turquoise).
Selon l'idéologie égyptienne, Pharaon devait
maintenir le pays en conformité avec MAAT, déesse de justice et vérité. De ce fait, le vizir, premier juge après le Roi, s'appelait "Prêtre de MAAT" et portait l'image de la divinité sur sa poitrine. Parmi les dignitaires du royaume, il resta le plus important durant toute l'histoire de l'Égypte.
Maât symbolise l'équilibre établi par le Créateur, la justice qui permet d'agir selon le droit, l'ordre
conforme aux lois, la vérité, la droiture et la confiance. Maât est la mère de Rê dont elle est aussi la fille et l'épouse, elle est aussi la sœur mystique de pharaon, elle veille à l’équilibre du monde Maât est associée à Osiris, lors du jugement d’un défunt.
Dans les croyances des Égyptiens, Osiris règne sur le monde des morts. Quand quelqu'un meurt, il doit
comparaitre devant Osiris, afin d'être jugé. Un tribunal des morts est constitué par Anubis, le dieu de l'embaumement, Maât, la déesse de la justice, et présidé par Osiris.
Anubis place le cœur du mort dans une balance. Sur l'autre plateau, on pose une plume d'autruche, qui symbolise la justice de Maât. Le cœur ne doit pas être plus lourd que la plume, sans quoi, il est dévoré par le monstre qui veille au pied de la
balance. Si le cœur est pur, il reste en équilibre avec la plume, et Osiris accueille le mort dans l'autre monde, les champs d'Ialou, qui sont une sorte de Paradis.
A toutes les époques, les scribes, du fait de leur savoir, eurent un rôle primordial dans l'administration égyptienne mais, sous le règne de cette dynastie, leur fonction fut certainement plus prestigieuse qu'en d'autres temps, si l'on en croit le nombre de représentations dont ils furent l'objet :
statues de grande taille, figurines en bois, ivoire ou pierre, représentations gravées ou peintes retrouvées dans les tombes, dont les fameux scribes accroupis.
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IMHOTEP, vizir, scribe, prêtre et architecte, pour rendre éternel le tombeau royal, construisit à Saqqarah, sur la hauteur qui domine Memphis, la première pyramide à degrés entièrement en pierre, formant une sorte d'escalier, pour permettre la montée majestueuse du Bà (âme) de Pharaon vers le ciel, afin qu'il se joigne à ATOUM. La pyramide et le temple funéraire (lieu de repos du Bà du roi défunt) constituaient le centre d'un immense complexe de quinze hectares
entouré d'une enceinte incluant une cour pour la célébration publique du "heb-sed", jubilé du Roi consistant en sa réintronisassions et la réincarnation d'ATOUM en sa personne. Il s'y trouvait également divers bâtiments administratifs et des magasins nécessaires à la vie matérielle des prêtres.
La fête-Sed célébrait les trente ans de règne d'un pharaon. Cette tradition débuta avec les premières dynasties. Elle avait pour but de reconstituer les force d’un pharaon fatigué et se renouvelait en suite tous les 3 ans. Les prêtres faisaient construire une chapelle où cette fête se déroulait, animée par des musiciens, danseurs, en présence, des dignitaires, princes et observée de loin par une foule considérable. On estime que l'espérance de vie en Egypte ancienne se situe entre 25 et 35.
Certains textes écrits par IMHOTEP, maintes fois recopiés, nous sont parvenus. Il s'agit de recueils de morale, de traités de médecine...
Les autres souverains de cette dynastie : SEKHEMKHEP (2599- 2594
AJC), SANAKHT (2594-2589 AJC) firent aussi édifier des pyramides à degrés, respectivement à Saqqarah et à Zaouiet-el-Aryan, mais elles ne furent
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pas achevées. Quant à HOUNI (2583-2561 AJC), dernier Roi de la lignée, il édifia sa pyramide à Meïdoum, à l'entrée du Fayoum, et construisit une forteresse sur l'île Eléphantine, un peu au Nord de la première cataracte.
IVème Dynastie (2561-2450 AJC)
Pharaon SNEFROU (2561-2538 AJC) est considéré comme le modèle idéal de la théocratie égyptienne, tant par ses concepts religieux que par ses capacités à gouverner au nom du dieu ATOUM et par sa propre culture, du fait aussi des expéditions qu'il mena vers le Sinaï pour en ramener cuivre et turquoise, vers le pays de Pount (Somalie) riche en produits précieux comme
la myrrhe et l'encens, et vers la Nubie d'où il ramena or et diorite.
Les arbres qui poussaient en Egypte :
palmiers, tamaris, sycomores et acacias, étaient impropres à la construction de navires d'une certaine importance, aussi le monarque créa avec le Liban des échanges commerciaux qui lui permirent d'importer sapins et cèdres, bois indispensables à la marine mais aussi nécessaires pour fabriquer des sarcophages et les mobiliers des palais et des temples.
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Il y avait aussi des bateaux pourvus de rameurs sur chaque bord et d'un ou plusieurs hommes manœuvrant les avirons de gouverne. Pour le commerce avec la Somalie un port fut édifié sur la Mer Rouge au site Ouadi al Jarrf. Des fouilles réalisées depuis 2011 révélèrent une cité importante qui s'étalait sur 5 km entre le littoral et les premiers reliefs. On y retrouva des céramiques, des ancres de pierre.
Selon des peintures de cette époque, les bateaux en bois, à partir d'une quille centrale, étaient faits d'une véritable marqueterie de planches de petite dimension jointes bord à bord. Ceux réservés au transport de charges pesantes étaient tirés par des hommes ; les barques pour le transport des marchandises sur de courtes distances étaient manœuvrés par un ou plusieurs rameurs et un aviron de gouverne. Les bateaux les plus importants étaient équipés d'un mât en bois de conifère
au sommet duquel était attachée la vergue portant une voile composée de plusieurs laizes de toile de lin cousues entre elles. Ces bateaux étaient aussi pourvus de rameurs sur chaque bord et d'un ou plusieurs hommes manœuvrant les avirons de gouverne.
SNEFROU fit transformer la pyramide à degrés édifiée par HOUNI en pyramide véritable, c'est-à-dire à arêtes vives. Pour son compte, il fit construire, à Dahchour, au Sud de Saqqarah, une pyramide du type "rhomboïdale" dont
les parois de la chambre se fissurèrent et s'effondrèrent. Celle-ci étant inutilisable, Pharaon s'en fit construire une autre à proximité. Les arêtes de cette véritable pyramide cumulant en un point unique figurant les rayons du soleil, permettaient à Pharaon de se joindre, après sa mort, à l'astre lui-même. C'est sous son règne que se généralisa la momification des Rois, de leur famille et des dignitaires.
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Les six successeurs de SNEFROU perpétuèrent, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur (Sinaï et Nubie) la même politique et édifièrent leur pyramide. Il faut toutefois citer KHEPHREN qui fit édifier le grand Sphinx à Gizeh. Et la pyramide du roi KHEOPS, exceptionnelle par ses proportions : 147 mètres de hauteur et 230 de côté, est formée d'énormes blocs de pierre empilés les uns sur les autres, liés par un
mortier au plâtre. A la sortie de la carrière, distante de quelques centaines de mètres, les blocs de pierre furent halés sur des rondins de bois par des hommes. Si la construction dura les 25 ans du règne de Pharaon, un calcul révèle qu'il fallut environ 15.000 ouvriers pour la réaliser.
KHEPHREN le grand Sphinx
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La pyramide du roi KHEOPS
Comme toutes les autres pyramides, celle-ci faisait partie d'un complexe monumental comprenant le temple funéraire, la chaussée, le caveau de la barque destinée au voyage du Roi défunt dans l'au-delà et de petites pyramides et leur chapelle pour les membres de la famille royale.
La chambre funéraire de- la pyramide comportait des peintures relatant la vie de Pharaon et de son peuple. Certaines scènes représentent le Roi dialoguant avec les dieux, ses
frères, ou leur adressant des offrandes, des louanges, des prières.
Le Roi Khéops construisit également des temples, en particulier il entama la construction du temple d'Hathor à Dendérah et on a retrouvé dans les fondations du temple de Bastet à Bubastis des éléments d'un monument à son nom.
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Le temple d'Hathor à Dendérah
C'est sous ce règne fastueux pour l'architecture et la royauté que les nécropoles des dignitaires se développèrent de manière significative autour du complexe funéraire royal. Cette tendance déjà amorcée sous les règnes précédents et notamment celui de son père Snéfrou n'avait jamais pris une telle ampleur ce qui démontrerait qu'à l'époque du Roi Khéops la constitution de l'état était achevée et touchai presque déjà à son apogée. Le privilège de pouvoir se faire inhumer aux côtés de son maître représentait alors la meilleure manière d'afficher sa réussite dans ce qu'était la société égyptienne d'alors. Le roi était au centre de tout et dominait de son écrasant monument une vaste nécropole qui était conçue à l'image de la cour. Plus la sépulture d'un dignitaire était en vue de la pyramide royale plus son rang était élevé. De nombreux mastabas livrèrent des témoignages (statues et textes) de ces courtisans qui, dans leur mort souhaitaient poursuivre leur service au plus proche de leur souverain.
A Saqqarah, sur le mur d'une sépulture d'un de ces fonctionnaires, on retrouva une scène de marché. On y voit des commerçant, assis devant leur échoppe, proposant leurs produits : poissons, tissus, fruits, légumes. Les acheteurs sont de sexe masculin et portent de petits sacs en bandoulière destinés à transporter leurs achats et les biens qu'ils souhaitaient échanger contre les produits du marché. Un acheteur tente d'échanger un éventail contre une coupe. Ailleurs on tente de troquer une cruche contre un poisson. Plus loin un marchand de
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légumes s'adresse à un client : « donne-moi ce que tu as apporté et je te donnerai de beaux légumes.»
A l'écart, une scène différente : un vendeur déroule une longue pièce de tissu devant un acheteur et lui dit « ce drap en échange de six shats » L'acheteur n'avait sur lui ni pièce de cette valeur ni or mais connaissant la valeur de ce drap il pouvait estimer son équivalence pour l'échanger contre un autre objet.
Le troc était l'affaire de tous. Chacun du vizir au paysan, selon son rang, recevait un salaire en nature dont il pouvait troquer une partie pour acquérir des surplus près des divers autres professionnels :
Les paysans assuraient pour le roi la culture des céréales, du lin, des lentilles, des légumes, des vignes et des arbres fruitiers, l'élevage des volailles, des bovins, des ovins, des ânes et des porcs. En plus des travaux de la terre, ils faisaient du pain, de la bière, certains filaient et tissaient le lin, d'autres péchaient ou réalisaient des objets de vannerie, tous entretenaient les canaux et les berges du territoire dont ils avaient la charge.
Les orfèvres, les potiers, les vanniers, les fileurs et tisseurs étaient au service du Roi comme ceux qui travaillaient la pierre, le bois ou le cuir.
Dans les mines les travailleurs du Roi tiraient le cuivre du minerai, récoltaient l'or, les turquoises et autres pierres précieuses.
Les fonctionnaires du Roi : vizir, gouverneurs des nomes, scribes, architectes, médecins, devaient assurer le bon fonctionnement de tous les rouages de la nation.
Les prêtres des temples et des chapelles des tombes royales officiaient au nom du Roi.
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L'armée du Roi assurait le maintien de l'ordre public, gardait les frontières et assurait des expéditions pour en ramener les produits indispensables aux activités du pays.
On prétend que lors du règne du roi Kheops (2551 - 2528), les égyptiens connaissaient des conditions matérielles de vie optimales qui ne furent pas dépassées dans la suite de leur histoire.
Vème Dynastie (2450-2321 AJC)
Elle connut le début d'une nouvelle période de climat aride, comparable à celui que l'Égypte connaît aujourd'hui.
OUSERKAF (2450-2444 AJC) fut le premier Roi de cette dynastie. Alors que ses prédécesseurs se disaient égaux et frères d'ATOUM (symbole du Soleil couchant), lui se proclama "fils charnel de RÉ" (Soleil de Midi), lieutenant du créateur, par-là investi du pouvoir cosmique, gérant des crues du Nil, du rendement des champs, de la vie du peuple, de l'équilibre du monde qu'il protégeait contre son retour au chaos primordial.
Parmi les phases solaires du "levant"
(KHEPRI), du midi (RÉ) et du couchant (ATOUM), le nouveau Pharaon, sur le conseil des théologiens, choisit la forme RÉ, la plus glorieuse, mais en réalité les trois ne constituaient qu'une seule divinité sous différents aspects. En sa qualité de fils charnel de RÉ, le Roi immortel après sa mort devait ressusciter sous la forme d'une divinité pour se joindre à son père, auquel il fit construire', à Abousir, un temple constitué d'une plate-forme (représentant la Colline
primordiale) surmontée d'un obélisque à l'image de la pierre (Benben) au sommet de laquelle, à l'origine du monde, RÉ (le Soleil) s'était posé (page 176). Autour de ce temple, s'étendait une vaste esplanade à ciel ouvert, avec un autel pour y célébrer le culte. A côté du temple s'élevait une représentation de la grande barque dans laquelle le dieu Solaire naviguait chaque jour dans le ciel, d'un point de l'horizon à l'autre. Les murs des divers couloirs de
l'édifice étaient ornés de bas- reliefs représentant les divers aspects des saisons.
L'obélisque constitua dès lors l'emblème exhibant vers le ciel la présence rayonnante de RÉ, dieu solaire dont aucune figure ne pouvait rendre l'image. Après Abousir, des obélisques furent progressivement édifiés sur l'esplanade de divers temples.
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Dès l'époque prédynastique, le peuple égyptien croyait en une sorte de continuité entre le monde terrestre des vivants et celui, souterrain, des morts Dès la première dynastie, les Rois bénéficièrent du privilège d'échapper, après leur mort, à la terre pour monter au ciel se joindre aux dieux. Maintenant, Pharaon était dieu ici- bas et le restait dans l'au-delà.
En contrepartie de ce dogme de la résurrection divine du Roi, les prêtres d'Abydos, à partir du récit d'OSIRIS
tué par son frère SETH (page 188) et ressuscité par la magie de sa femme ISIS, introduisirent la croyance qu'après la mort, tout humain ayant vécu en accord avec MAAT, déesse de l'ordre, de la justice et de la vérité, accédait à la vie éternelle, non plus sous terre, mais dans une nouvelle existence paradisiaque. De ce fait, OSIRIS devint le dieu populaire des morts et leur juge. Il s'en suivit, pour toutes les classes de la population, un cérémonial funéraire lié à la
momification assurée par des
OUSERKAF fit édifier sa pyramide et son complexe funéraire à
Saqqarah, non loin d'Abousir.
SAHOURE (2444-2433 AJC), pour protéger sa frontière de l'Ouest, affronta les Lybiens. Pour se procurer les matériaux qui manquaient à l'Égypte, il entreprit des expéditions terrestres au Sinaï et en Nubie et établit des liaisons maritimes avec les villes des côtes du Levant,
principalement Byblos.
Un bas-relief de son temple funéraire représente une flotte égyptienne
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revenant du Levant, chargée de soldats et de prisonniers, les bras levés pour saluer Pharaon qui les attendait sur le rivage. En effet, en plus de la navigation fluviale indispensable à l'économie du pays, les Égyptiens pratiquèrent de bonne heure (page 57) le cabotage le long des côtes du Proche-Orient.
SAHOURE, comme ses trois successeurs, fit construire son complexe funéraire à Abousir : KEFERIRKARE (2433-2414 AJC), RENEFEREF (2414-2408 AJC) et NEOUSERRE (2408-2384 AJC).
Dans
la pyramide de NEFERIRKARE (Document, la plus grande, on retrouva de nombreux papyrus décrivant le fonctionnement de son temple funéraire (voir page 178). Parmi ces documents, il y avait un décret exemptant le clergé du temple d'Abydos des services civils (corvées) et militaires, ainsi que des redevances dues au souverain. Jusqu'à cette date, les prêtres de tous les temples n'étaient que des fonctionnaires soumis aux mêmes obligations que les autres sujets du royaume.
A
Abousir, les complexes funéraires sont représentatifs de ce que les Pharaons se faisaient construire en prévision de leur mort. On y trouve, sur le haut du plateau, la pyramide, le tombeau de sa momie et, y attenant, le temple où les prêtres célébraient le culte du souverain devenu dieu. A proximité, se trouvaient les bâtiments administratifs du clergé. Un peu en contrebas, les mastabas des dignitaires qui, après leur mort comme de leur vivant, formaient la cour de Pharaon. Par une chaussée,
le temple d'en haut était relié au temple d'en bas qui, à la mort du souverain, recevait son cadavre. Le jour des funérailles, la momie royale et la procession des prêtres, des notables et des proches parents montaient au temple d'en haut, près de la pyramide. Celle -ci était construite selon la conception de la nature divine du Roi. Elle était à la fois la colline primordiale sur laquelle RÉ avait accompli la création, le symbole des rayons du soleil et l'escalier qui
montait au ciel. La momie du souverain, une fois placée dans la chambre funéraire, accomplissait alors son retour dans la colline primordiale d'où elle retrouvait les forces nécessaires à sa résurrection divine, sa montée au ciel et son union avec le soleil pour, chaque jour à l'aube, renaître avec l'astre se levant à l'horizon du ciel.
Pour la construction des temples funéraires furent employées les meilleures pierres : basalte pour les dallages, granit rose ou bleuté
pour les soubassements des principaux murs, pour les colonnes, les seuils, les jambages et linteaux des portes. Des bas-reliefs couvraient les parois des salles principales.
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Quant aux trois derniers Rois de cette dynastie, DJERKARE (2377-
2350 AJC) et OUNAS (2350-2321 AJC), ils établirent leur complexe funéraire à Saqqarah. Dans la pyramide de OUNAS, les murs de la chambre
funéraire et du couloir d'accès, pour la première fois, furent couverts de longues colonnes de hiéroglyphes, inscriptions religieuses et magiques connues sous l'appellation de "textes des pyramides" constituant les premières grandes compositions littéraires
universelles. Il s'agissait de formules devant aider pour l'éternité, par la puissance des mots écrits, le Roi défunt à triompher
de tous les obstacles de l'au-delà
On y trouve des allusions à diverses croyances : la légende d'OSIRIS (page 188) et celle de la barque solaire qui, chaque soir, emmenait le Roi défunt dans l'autre monde parcourir le royaume des morts sur le Nil d'en bas où de multiples dangers le menaçaient, également l'odyssée de Pharaon qui,
au-delà de la mort, se terminait en une véritable apothéose auprès de RÉ. On retrouva des textes semblables dans les pyramides des Rois de la dynastie suivante.
D'abord destinées au seul souverain, ces formules démocratisées par la magie du culte d'OSIRIS furent attribuées par les prêtres aux morts subalternes. On en retrouva sur les murs des chapelles, des tombes et des mastabas des officiers et hauts fonctionnaires.
Dans les chambres des pyramides, dans les temples et sur
les murs des divers monuments des complexes funéraires, comme les colonnes et les pylônes (murailles percées d'une porte), on retrouva des peintures, des gravures et des sculptures représentant d'autres aspects de la mythologie égyptienne relatifs aux dieux secondaires personnifiant les différentes "forces vivantes" de la nature, les unes fastes auxquelles les hommes devaient témoigner leur reconnaissance, comme la vache nourricière et féconde, le sycomore à l'ombre
bienveillante, le soleil qui, chaque matin, recréait la vie ; les autres néfastes, que chacun devait se concilier comme la lionne, le serpent.
Vl ème Dynastie (2321-2148 AJC) :
Durant cette période, toutes les pyramides furent construites à Saqqarah et ornées, à quelques variantes et adjonctions près, des mêmes textes que ceux relevés précédemment.
Sous TÉTI (2321-2289 AJC), le favoritisme en vigueur à la cour permit
le développement d'une noblesse de fonction autoritaire et orgueilleuse qui, ayant obtenu l'hérédité de ses charges, constitua un danger pour le pouvoir central.
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La gestion des nomes précédemment assurée par des dignitaires nommés par Pharaon revint à des familles établies dans leur domaine en qualité de propriétaires fonciers.
Les prêtres, de leur côté, virent leur influence grandir. Ceux d'Héliopolis, parce qu'ils avaient fait de Pharaon le fils du dieu RÉ dont ils assuraient le culte ; ceux de Memphis, parce que leur temple était dédié à PTAH, dieu créateur de tout ce que la terre produisait ; ceux d'Abydos, parce que le temple d'OSIRIS
devint un lieu de pèlerinage pour tous les Égyptiens qui recherchaient sa protection afin d'obtenir la vie éternelle... La classe cléricale, par la richesse qu'elle tirait du prestige des dieux dont elle assurait le culte, constitua progressivement une puissance dans l'état.
Par ailleurs, le royaume de Koush (Nubie), au-delà de la troisième cataracte, par sa puissance, constituait pour l'Égypte une menace, bien que les pharaons précédents aient édifié, en aval de la deuxième cataracte, un ensemble impressionnant de forteresses. A Buhen, à Mirgissa et Semma, furent retrouvés des vestiges de fortifications en briques crues avec des fossés, des remparts et des tours à créneaux et meurtrières
A l'Est de l'estuaire, les Bédouins du Sinaï et leurs troupeaux multiplièrent les incursions dévastatrices dans les cultures du Delta. L'armée de Pharaon dut les poursuivre jusqu'en pays de Canaan (Palestine).
A la mort de TÉTI, un usurpateur, OUSERKARE monta sur le trône pour une courte période qui laissa peu de trace dans l'Histoire de l'Égypte
.
PEPI 1er (2289-2247 AJC), le souverain et ses proches contractèrent des alliances matrimoniales avec les membres des familles des gouverneurs des nomes, de sorte que le sang divin de Pharaon se mêlant au leur, ces dignitaires prétendirent au partage du pouvoir. Une véritable féodalité se développa, dont la puissance s'accrut de la faiblesse du pouvoir royal.
Par ailleurs, Pharaon exempta les prêtres de la chapelle funéraire de sa mère, la Reine IPOUT, de toute forme d'obligations et de taxes. A sa mort, sa veuve ANKHESEN assura la régence avant que MERENRE 1er (2247-2241 AJC) monta sur le trône et décéda,
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laissant la succession à son frère
.
PEPI II (2241-2147 AJC) monta sur le trône encore enfant. Sa mère ANKHNESMÉRYRÉ, pendant une courte période, fit office de régente. Dans les premières années de son règne, il sut maintenir un certain équilibre entre le pouvoir central et celui des gouverneurs des nomes, ce qui lui permit de mener à bien des expéditions au Sinaï et dans le pays de Pount.
Le souverain étendit l'exemption des services obligatoires et des taxes à tous ceux qui intervenaient dans le temple du dieu MIN, à Coptos, y compris les travailleurs manuels. Il se développa dès lors une indépendance croissante des "Terres des dieux" par rapport au pouvoir royal. Les temples furent peu à peu de plus en plus dégagés du contrôle du Roi et leur domaine propre ne dépendit que du Grand- Prêtre, sans rien devoir à personne.
En donnant leur indépendance aux temples, Pharaon espérait s'assurer leur appui face à une féodalisation des pouvoirs locaux. En réalité, cet abandon de souveraineté ne fit qu’affaiblir son prestige et son pouvoir.
Face à Pharaon vieillissant et sans autorité, les gouverneurs, devenus maîtres dans leur nome, firent sécession avec les autorités centrales.
Les paysans se révoltèrent contre l’administration, tant locale que nationale, qui leur imposait des prélèvements toujours plus lourds et de multiples astreintes de corvées, entre autres pour construire la pyramide de Pharaon et les mastabas géantes des dignitaires. Cette crise interne fut accentuée par une série de mauvaises récoltes dues à de longues périodes de sécheresse, mais aussi à la mauvaise organisation d'un pouvoir défaillant. Le peuple, angoissé par la misère, la famine, la crainte du retour au chaos originel, privé de l'équilibre social habituel, perdit ses notions de morale traditionnelles. Le vol et le pillage devinrent la loi du plus fort. Profitant de cette anarchie et de cette révolte, les Sémites nomades de l'Est intensifièrent leurs raids dévastateurs dans le Delta et menacèrent la sécurité des expéditions dans les mines et carrières
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du Sinaï.
Pharaon, qui avait fait édifier son complexe funéraire dans la partie sud du plateau de Saqqarah, décéda en 2148 AJC, laissant le pouvoir à son épouse
NITOCRIS qui figura dans les annales royales mais laissa peu de trace dans l'Histoire de l'Égypte. On sait seulement qu'elle aurait achevé la pyramide de MYKERINOS, roi de la IVème Dynastie.
1ère PÉRIODE INTERMÉDIAIRE (2145-2022 AJC)
Les structures administratives s'étaient effondrées. L'ordre et la prospérité avaient cédé la place à l'anarchie. Les mœurs se relâchèrent et les hommes en profitèrent pour prendre plusieurs épouses. Des nomades sémites venus du Proche-Orient s'étaient infiltrés dans le Delta. Au dernier Pharaon de la Vlème dynastie, avait succédé une suite de roitelets locaux constituant les Villèle et Villèle dynasties (2140- 2130 AJC), dont Memphis était la résidence. Certains de ces roitelets firent construire leur complexe funéraire à Saqqarah.
De ces royautés multiples émergèrent deux lignées de Pharaon.
Il y eut, d'une part, les Rois intronisés par les prêtres d'Héracleopolis, dont KHETI 1er qui rassembla sous son autorité les nomes de Basse- Égypte et établit, à l'Est de son territoire, un vaste dispositif contre les nomades sémites.
Les Rois de la IXème Dynastie (2130-2090 AJC), fondée par AKHTHOES 1er et de la Xème Dynastie (2090-2022 AJC) restèrent maîtres de la Moyenne-Égypte, d'Abydos à la Mer, sauf l'Est du Delta occupé par des tribus sémites.
Dans la
nécropole d'Hefat (Moalla), entre Thèbes et El-Kab, la tombe d’ANKHTYFY, prince du nome de Nekken, contient des inscriptions relatant la biographie du défunt : Par la grâce d’un oracle, il aurait été choisi par NEFERKARE, pharaon de la IXème dynastie, pour rétablir dans le nome d’Edfou, voisin du sien, l’ordre disparu dans la tourmente de l’époque. Ce qu’il fit efficacement, plaçant, en outre, sous son contrôle, le nome d’Eléphantine. Durant la famine qui suivit, il réussit non seulement
à nourrir sa province mais
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encore à envoyer des grains jusqu’à Dendara, au Nord de Thèbes.
Il y eut, d'autre part, MONTOUHOTEP 1er, intronisé vers 2130
AJC par les prêtres de Thèbes comme fils du dieu MONTOU et premier Pharaon de la Xlème Dynastie (2130-2085 AJC), laquelle régna sur la Haute- Égypte de la première cataracte jusqu'aux environs d'Abydos. MONTOU était un dieu local qui, à cette occasion, devint le premier grand dieu de Thèbes.
Les successeurs de MONTOUHOTEP 1er furent : ANTEF 1er,
Même et lll ème, qui régnèrent de 2085 à 2059 AJC. Pour se garder des Lybiens, ils fortifièrent les oasis de l'Ouest. Au cours de leur règne, ils ne cessèrent de harceler dans la région de This et d'Abydos, les forces des Rois d'Héracleopolis.
En cas de vacance du pouvoir, aucune règle ne déterminait la légitimité d'un nouveau souverain. La seule doctrine était celle de l'engendrement divin (page 63) qui permettait à tout chef issu d'un complot de se faire
reconnaître par le Grand-Prêtre d'un temple comme le fils du dieu dont il assurait le culte, ceci afin que le pouvoir céleste uni à celui de la terre, préservât l'Égypte du retour au chaos primordial.
Réunification : Le Roi thébain, MONTOUHOTEP II (2059-2009
AJC), fils d'ENTEF III, s'empara d'Abydos, d'Assiout, puis de tout le Delta. Pour assurer la sécurité de l'Égypte qu'il venait de réunifier, il fit une campagne d'intimidation en Nubie. Pour mener activement la réfection des temples que les événements avaient quelque peu dégradés, il entreprit de nombreuses expéditions aux mines et carrières du désert arabique, de Nubie et du Sinaï. Ce souverain réunificateur de l'Égypte fit édifier, sur la rive gauche
du
Nil, dans l'immense cirque de Deir-el-Bahari, un complexe funéraire adossé à la falaise, d'un nouveau style, composé de deux terrasses rectangulaires en pierre de taille, décalées l'une de l'autre et surmontées d'une pyramide centrale. Chaque terrasse était entourée de colonnes et ses côtés recouverts de bas- reliefs. Derrière ce monument, après une cour péristyle (entourée de colonnes), un couloir pénétrant dans la montagne aboutissait à la chambre sépulcrale.
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MOYEN EMPIRE (2009-1650 AJC)
Les deux derniers Pharaons de la Xlème Dynastie : MONTOUHOTEP III (2009-1997 AJC) et MOUTOUHOPET IV (1997-1991 AJC), poursuivirent la politique de leur prédécesseur et rétablirent sur toute l'Égypte une théocratie centralisée et forte.
La Xllème Dynastie
Fut fondée par AMMENEMES 1er (1991-1962 AJC), intronisé fils d'AMON par les prêtres de Thèbes. Ce dieu, dont le nom signifie "le caché", était une divinité locale d'origine inconnue. Il se substitua à MONTOU comme dieu dynastique et sa gloire grandit en même temps que celle de Thèbes. Quant à MONTOU, il resta honoré comme dieu guerrier.
Le nouveau Pharaon transféra sa capitale à Liche située à la charnière de la Haute et de la Basse-Égypte et remplaça les seigneurs
héréditaires locaux par des gouverneurs révocables dépendant directement du pouvoir central représenté dès lors par deux vizirs : l'un résidant à Thèbes pour la Haute-Vallée
; le second à Memphis, pour le Delta.
A l'Ouest, Pharaon se battit contre les troupes libyennes établies dans les collines du littoral et les steppes de la région du lac Mariout. Au Sud, il occupa la Nubie septentrionale. Il renforça la forteresse de Semna et consolida ses positions sur la ligne des
oasis. A l'Est du Delta, il fit construire le "mur du Régent" pour contrôler le passage entre l'Égypte et le Sinaï.
Pour les Égyptiens de cette époque, les guerres n'avaient pas pour but d'accroître leur territoire mais découlaient de luttes défensives ou d'expéditions commerciales pour se procurer les matières indispensables à leur économie. Les Égyptiens, grâce à l'or de Nubie et à leur armée, se concilièrent des villes étrangères qui devinrent des
sortes de comptoirs. Ce fut le cas de Byblos dont les relations s'intensifièrent jusqu'à l'égyptianisation des princes locaux. Plus généralement, des relations commerciales pacifiques se multiplièrent avec les villes du Proche- Orient et, à travers elles, avec les peuples de la Mer Égée. Par ailleurs, de nombreuses peuplades, principalement sémites, migrèrent en Égypte, contribuant à y accroître la main-d'œuvre qui lui faisait défaut.
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AMMENEMES 1er favorisa d’importantes mutations sociales qui ouvrirent le pays à une théocratie plus souple et à l'émergence d'une classe moyenne comprenant scribes, artistes, ouvriers spécialisés. Les paysans purent accéder à la propriété.
Les agriculteurs égyptiens importèrent du Proche-Orient le "shadouf', bras à balancier lesté, à une extrémité, d'un contrepoids et muni, à l'autre, d'un sac de cuir. Grâce à ce moyen, les paysans
purent élever l'eau d'un point bas sur un point haut, ce qui leur permit de gagner des terres cultivables sur les terrasses désertiques. Irrigués à l'année, ces terrains devinrent producteurs de fourrages, de légumes...
Si le souverain choisissait et nommait les prêtres des rangs les plus élevés, si en son nom, ceux-ci célébraient les offices et assuraient le culte des dieux, si le domaine royal dotait régulièrement les temples, le clergé n'en disposait pas moins d'une
certaine autonomie. Il était exempt de corvée, de taxes et gérait à sa guise les biens et les ressources des temples.
Les prêtres d'OSIRIS, qui avaient ouvert au peuple les portes de la vie éternelle, virent affluer à Abydos des foules de pèlerins apportant des dons et des ex-voto. Partout dans le pays, pour les gens qui en avaient les moyens, s'étaient généralisées la momification et les inscriptions sacrées et magiques sur les sarcophages, qui assuraient au mort son bien-être
dans l'au-delà. Les historiens parlent de la "démocratisation" des croyances funéraires.
De son côté, Pharaon, s'il restait le souverain immortel responsable de la prospérité et de la sécurité de son peuple, ne tenait toutefois plus son pouvoir d'un seul dieu mais de deux AMON-RÉ, unis en un même, alliance à la fois idéologique et politique car, à l'image de l’union des deux Egypte, correspondait celle des cultes : AMON de Thèbes lié à RÉ d'Héliopolis.
Il
faut signaler qu’au sein d'une même métropole, les théologiens
regroupèrent leurs divinités locales en triades ou plus. (Père, mère, fils)
- A Karnac, dans le complexe religieux à la gloire d'AMON (tête et corne de bélier), les prêtres avaient édifié des temples à son épouse MOUT (déesse vautour) et à leur fils KHONSOU (dieu lunaire). Ils constituèrent une triade : père, mère et fils.
- A Matarich, près d'Héliopolis, les prêtres du temple à la gloire de RÉ, dieu solaire, au cours des siècles, avaient procédé au regroupement de leurs divinités en un nouveau récit : après que RÉ se fut élevé au- dessus de la colline primordiale jusqu'au sommet de la pierre Békhen, par sa propre volonté, tira de sa substance un premier couple : SH O U (l'atmosphère) et TEFNOUT (l'humidité) qui procréa : GEB (la terre) et NO UT (le ciel), d'où sortirent deux nouveaux couples : OSIRIS-ISIS et SETH-NEPHTYS..
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A côté des dieux des métropoles, toute localité, quelle que fut son importance, possédait sa divinité honorée par ses habitants et par eux seuls. Chaque famille avait aussi sa divinité symbolisée sous une forme animale, humaine ou mixte, héritée d'un très lointain passé, laquelle avait ses propres vertus et constituait un intermédiaire capable d'intercéder auprès d'un dieu de rang supérieur. Chaque dieu et divinité avait ses mythes perpétués par la tradition orale. Certains
donnèrent lieu à des écrits qui furent retrouvés ; d'autres restent ignorés.
Pour les Égyptiens, il n'y avait pas concurrence entre les dieux. Chacun représentait un aspect du monde. Chacun était indispensable. Leurs pouvoirs se recouvraient pour assurer l'équilibre de l'univers afin qu'il ne retourne pas au chaos primordial
.
Pour défendre l'Égypte des menaces extérieures et assurer la sécurité des expéditions en terre étrangère, Pharaon développa son
armée dans laquelle, à côté des recrues par conscription et des militaires de carrière, il introduisit des mercenaires Lybiens et Nubiens.
Il n'hésita pas à employer comme fonctionnaires des étrangers, sans doute descendants d'anciens esclaves ; même dans la haute administration, on releva des noms d'origine sémitique.
L'Égypte ayant retrouvé son unité et sa prospérité, Pharaon prévoyant, pour éviter toute contestation à sa mort, associa au pouvoir son fils aîné,
SESOSTRIS 1er (1962-1926 AJC), lequel en accédant au trône après l'assassinat de son père, ne changea rien aux options politiques précédentes, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du royaume.
La pyramide du père et du fils furent construites à Licht, au sud de
Saqqarah.
Les deux souverains suivants : AMMÉNÉMÈS II (1926-1894 AJC) et SESOSTRIS II (1894-1878 AJC), conservèrent à l'Égypte la paix intérieure et extérieure. Cette période de sécurité fut favorable à
tous les domaines d'expression artistique, tant plastique que littéraire.
La pyramide du premier de ces deux souverains fut édifiée à Dahchour
; celle du second à El-Lahoun, à l'entrée du Fayoum.
Sous SESOSTRIS III (1878-1843 AJC), le projet de percer une voie d'eau mettant en communication la Mer Rouge et la Méditerranée, envisagée par ses prédécesseurs, fut mis en chantier. Il s'agissait de creuser deux canaux, l'un reliant la Mer Rouge au grand lac Amer et
l'autre unissant ce lac à la
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branche du Nil. Par ailleurs, des travaux d'assèchement des marais du Fayoum furent entrepris.
Pharaon, à la suite de plusieurs campagnes en Nubie, en fixa la frontière à Semneh, au sud de la deuxième cataracte, et la verrouilla en aval par un système de huit nouvelles forteresses massives partiellement creusées dans les falaises.
Au Proche-Orient, il entreprit des expéditions qui le conduisirent à Jérusalem, Sechem, Ougarit... Il renforça les relations commerciales pacifiques que
ses prédécesseurs avaient liées avec les ports chypriotes et crétois, et en créa de nouvelles avec Babylone qui connaissait une grande prospérité. Il conserva avec Byblos les relations traditionnelles qui faisaient de cette cité une sœur de l'Égypte.
Comme ses prédécesseurs, il fit exploiter les mines de galène des montagnes du désert arabique dominant la Mer Rouge, les carrières d'améthyste et de diorite de Nubie, les mines d'or de ce dit pays et celles de l'Ouadi-Farnakir,
l'albâtre d'Hetnoub, les turquoises et le cuivre du Sinaï.
Il entreprit des expéditions maritimes au pays de Pount (Somalie) et au Liban, pour en ramener des produits nécessaires à l'économie égyptienne. Il édifia son complexe funéraire à Dahchour.
AMMENEMES IIIe (1843-1796 AJC), grâce à une importante main- d'œuvre sémitique, termina l'aménagement du Fayoum dont le creusement d'un lac pour y emmagasiner les eaux des inondations et
les récupérer lors de la sécheresse. Près de la Haoura, il fit construire sa pyramide et un palais immense aux multiples salles. Pour satisfaire aux besoins, les mines et les carrières furent intensivement exploitées : diorite et or de Nubie, granit d'Assouan, pierre de l'Ouadi-Hamamat, calcaire de Toura, turquoise et cuivre du Sinaï.
La Nubie était devenue une sorte de colonie dont les chefs étaient soumis au paiement régulier d'impôts en nature. Mais craignant une rébellion
armée, Pharaon renforça les garnisons des lignes de fortifications édifiées au niveau de la deuxième cataracte (Bouhen, Mirgissa) et plus au sud (Semna, Koumma) et interdit aux bateaux nubiens de descendre le Nil au-delà de cette frontière.
Il fit édifier deux pyramides, l'une à Dahchour, l'autre à Haoura, dans le Fayoum, avec un temple funéraire.
AMMENEMES IVe (1796-1787 AJC) et sa grande épouse SKEMIO- PHRIS qui lui succéda (1787-1784 AJC) furent
des souverains peu brillants, sans énergie qui contribuèrent à faire déchoir le pouvoir royal.
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Durant cette Xllème Dynastie, les pyramides eurent des dimensions plus modestes que les massives constructions des temps précédents, ceci du fait de l'utilisation de matériaux plus légers (calcaire, chaux, briques d'argile crue). La statuaire devint plus réaliste et peut-être aussi plus austère. On constate le triomphe de la joaillerie (pectoraux, colliers, diadèmes, bagues). L'expression écrite fut tout autant florissante : hymnes royaux, contes et romans. Les textes révèlent une
langue harmonieuse au vocabulaire varié et riche, à la syntaxe rigoureuse et équilibrée.
Jusqu'en 1800 AJC, tous les fonctionnaires investis par le Roi étaient placés sous l'autorité immédiate des vizirs. Mais cette belle organisation, en même temps que la prospérité du pays, sombra dans l'anarchie des Xlllème et XlVème Dynasties (1784-1650 AJC). Ce fut à nouveau le morcellement des pouvoirs entre de multiples principautés et la panique des habitants du Delta qui subirent la
famine et l’invasion des Hyksos (1650 AJC).
Il faut savoir que, dès 1900 AJC, les premières vagues aryennes formées de Mèdes et de Perses, avaient submergé le plateau iranien à l'Ouest du Zagros, alors que d'autres peuples des rives de la Mer Caspienne avaient envahi le pays de Mitanni (Hourrite), région montagneuse aux sources de l'Euphrate. En 1750 AJC, Babylone fut à son tour envahie par des peuples aryens du Nord, les Karsites, qui y installèrent une nouvelle dynastie.
Les populations sémitiques refoulées par ces envahisseurs fuirent et tentèrent de s'établir plus au Sud, au pays de Canaan, suivies par des bandes dispersées de peuplades diverses dont des Hourrites. Certains groupes se réfugièrent dans le Delta oriental où ils occupèrent Avaris. Avec le temps, ceux-ci s'organisèrent en un état sous l'autorité d'un chef, Hyksos (Roi-Pasteur) dont le nom devint celui de son peuple. Dans le même temps, partout au Proche-Orient, on assista à des
guerres de conquêtes territoriales engagées par des chefs qui s'efforcèrent d'assurer leur prédominance sur des territoires de plus en plus vastes.
Vers 1650 AJC, le chef Hyksos, SALITIS, grâce à ses troupes bien organisées et supérieurement équipées d'armes en bronze (dagues et épées), d'arc et de chars attelés à des chevaux rapides, avec la complicité de gouverneurs égyptiens félons et de nomades à majorité Amorrites qui s'étaient progressivement introduites dans le
Delta, s'empara de Memphis où il se fit couronné Roi d'Égypte et dont il fit sa capitale.
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DEUXIÈME PÉRIODE INTERMÉDIAIRE (1650-1550 AJC)
Leur pays étant resté longtemps sans véritable Pharaon, les Égyptiens acceptèrent SALITIS comme Roi en vertu de leur croyance ancestrale selon laquelle le pays ne pouvait se passer d'un souverain, même étranger, seul intermédiaire entre les dieux et les hommes.
Le nouveau Pharaon, conscient de cette situation, pour se concilier la population, fit construire un temple au dieu SETH en qui il voyait une réplique de son propre dieu sémitique BAAL.
Les XVème et XVIème Dynasties furent
hyksos (1650-1539 AJC) et leur capitale Avaris.
A la mort de SALITIS, YAKOUB-HER lui succéda. Sous son gouvernement et les suivants, les Hyksos honorèrent les dieux égyptiens SETH-BAAL et RÉ et adoptèrent les coutumes civiles et funéraires de l'Égypte. Une pyramide du site de Dahchour fut attribuée à l'un de leurs Rois, AMENY (l'Asiatique).
Malgré leur puissante armée, les Hyksos ne contrôlèrent efficacement que le Delta et la Moyenne Vallée du Nil jusqu'à Cusaé et
Meir. Les Pharaons de la XVIIème Dynastie, fondée vers 1650 par ANTEF V durant l'occupation, restèrent maîtres de la Haute Vallée du Sud jusqu'à Cusaé, au Nord de Thèbes. Quant à la colonie nubienne, elle avait repris son indépendance sous l'administration d'un roi noir qui régna à Bouhem, un peu au Nord de la deuxième cataracte, et étendit son pouvoir jusqu'à la première cataracte.
Depuis 1650 AJC, les Rois de Thèbes de la XVIIIème Dynastie qui contrôlait la
Haute-Égypte grâce à l'appui de mercenaires, ne cessèrent de harceler les troupes Hyksos. Leur dernier souverain, SEKE- NENRE, mourut sur le champ de bataille. Son frère KAMES (1541-1539 AJC) poursuivit la guerre de libération. Les troupes hyksos malgré l'alliance de leur roi avec celui du pays Koush (Nubie), furent progressivement chassées de la Vallée du Nil. Vers 1538 AJC, Avaris, leur capitale du Delta, fut prise par l'armée égyptienne d'AHMOSIS 1er (1539-1514 AJC),
laquelle poursuivit l’ennemi jusqu'en pays de Canaan. Dans leur fuite, les hyksos avaient abandonné leurs chevaux à partir desquels les Égyptiens créèrent leurs propres haras.
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NOUVEL EMPIRE (1550-1069 AJC)
La XVIIIème Dynastie fut instaurée par AHMOSIS (1539-1514 AJC) lequel pourchassa les Koush jusqu'au-delà de la troisième cataracte et rétablit la suzeraineté de l'Égypte jusqu'à Toskeh en aval d'Abou-Simbel. Puis, à l'Est du Delta, il détruisit les derniers bastions Hyksos.
Parce qu'il était originaire de Thèbes, Pharaon choisit cette ville pour capitale. Il remplaça à la tête des nomes la vieille noblesse par des fonctionnaires et leurs terres devinrent propriété du Roi. Il rétablit deux postes de vizir, l'un à Thèbes, l'autre à Héliopolis. Pour les besoins de la reconstruction, les mines et les carrières furent à nouveau exploitées : calcaire albâtre, turquoise et cuivre ... Il renoua les relations commerciales avec les Phéniciens, avec Byblos et
les marchands des îles de la Mer Égée. L'Égypte avait retrouvé la paix et la prospérité intérieure mais, pour rayonner à l'extérieur, Pharaon, qui avait pris conscience de la puissance économique et militaire de ses voisins du Proche-Orient, mit sur pied une armée de métier commandée par un prince de la couronne qui, en plus d'une infanterie équipée de lances, de haches et de dagues pour le corps à corps, comptait des archers à pied ou montés sur des chars tirés par des
chevaux.
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Sur décision de Pharaon, l'élevage des chevaux et leur dressage furent l'affaire exclusive des écuries royales nouvellement organisées à partir principalement des chevaux laissés par les Hyksos. De ce fait, les paysans, pour leurs travaux agricoles, continuèrent à se contenter, et pour longtemps encore, des vaches au joug attaché sur leurs cornes.
Il faut citer également que vers les années 1.500 AJC, les fours à minerai de cuivre archaïques furent équipés de soufflets en peau de chèvres. Le métal liquide coulait dans la fosse du four de coulée, où il s'accumulait. Ce cuivre brut était refondu dans un creuset, sur un feu ouvert de charbon de bois, et enfin coulé dans des moules. Les produits comme les armes et les outils étaient durcis par martelage.
Les Egyptiens importèrent l'étain de Syrie et fabriquèrent du bronze, alliage de cuivre et d'étain, d'un meilleur usage et d'une fonte plus facile que le cuivre pur. Les ouvriers fondeurs étaient parvenus à une telle maîtrise qu'ils coulaient des pièces de bronze grandes et lourdes comme les portes des temples.
Sur le plan religieux, en plus du prestige du dieu AMON, les prêtres d'OSIRIS s'inspirant des textes royaux des pyramides et des sarcophages, rédigèrent pour le peuple le "Livre des Morts", appelé plus exactement "sortie de jour" car déposé dans les tombes des humains réputés justes (page 182) par la magie des mots, il permettait aux défunts d'errer dans le monde des vivants.
La Reine AHMES-NEFERTARI eut un rôle religieux important durant le règne de son
époux AHMOSIS. Elle fut en effet la première à assumer la fonction sacerdotale d'épouse du dieu et prophète d’AMON. A la mort de son mari, elle devint régente jusqu'à la majorité de son fils.
AMENOPHIS 1er (1514-1493 AJC) poursuivit l'organisation du royaume entreprise par son père. Il plaça la colonie nubienne jusqu'à la deuxième cataracte sous l'autorité d'un haut-commissaire permanent, le Vice- Roi de Kouch. Ce qui permit une meilleure
exploitation des richesses du pays, principalement de son or, toujours indispensable pour mener à terme des négociations difficiles.
A El-Kâb, il édifia un temple et, à Karnak, une chapelle pour la barque d'AMON. A Dra-Abou-Noga, dans la nécropole thébaine, il se fit édifier une pyramide.
THOUTMOSIS 1er (1493-1481 AJC), dès le début de son règne, après avoir maté une révolte en Nubie, fixa la frontière méridionale de la colonie à
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la hauteur de la troisième cataracte. Il entreprit des expéditions en Palestine et en Syrie, jusqu'à Karkémich, et à l'Euphrate et y laissa des garnisons aux points stratégiques. Dès lors, il ne s'agissait plus de simples expéditions commerciales mais de créer un véritable empire.
Il fit de Memphis une base militaire et un port fluvial tourné vers le Nord, alors que Thèbes restait la ville dynastique et un centre religieux. Il embellit le temple d'AMON de Karnak en y
édifiant une salle hypostyle devant le sanctuaire de la barque et en érigeant une paire d'obélisques devant le quatrième pylône (muraille percée d'une porte). Il édifia autour de ce complexe une enceinte de briques crues. Cet ensemble à la gloire d'AMON atteste le rayonnement de ce dieu et les nombreuses annexes attenant au temple prouvent l'importance de son clergé.
Plutôt que d'édifier un complexe funéraire avec une pyramide, Pharaon se fit creuser une tombe dans la
falaise du cirque où commence le défilé que nous appelons "Vallée des Rois", lieu dominé par une cime culminant en forme de pyramide et fit construire un temple dans la plaine de Thèbes. Non loin de là, fut créé le village de Deir-el- Medina pour y loger les carriers, décorateurs et tous les ouvriers qui travaillaient à l'aménagement des tombes.
Dès cette époque, le Roi possédait plusieurs femmes dont une seule à la fois portait le titre de "grande épouse".
THOUTMOSIS
II (1481-1478 AJC) mena des campagnes victorieuses au Proche-Orient au terme desquelles son empire s'étendit à l'Est jusqu'à l'Euphrate et au Nord-Ouest jusqu'à l'Oronte
A son décès, son héritier étant encore enfant, son épouse HATCHEP- SOUT régna de 1478 à 1457 AJC en qualité de Roi, selon le choix d'AMON légitimé par un oracle. Lors des représentations officielles, elle portait les attributs de sa souveraineté : la double couronne et la barbe postiche.
Sans
abandonner les conquêtes précédentes, elle organisa une expédition au pays de Pount (Somalie) et en ramena à Thèbes un riche butin : or, ivoire, bois précieux, plumes d'autruches, peaux de bêtes sauvages, myrrhe, encens...
Elle poursuivit la restauration des monuments de Thèbes : le temple de MONTOU devenu dieu de la guerre. Dans le complexe de Karnak, elle fit édifier une paire d'obélisques et une chapelle en quartzite rouge pour abriter la barque de procession d'AMON
Elle
accorda au clergé du temple de Karnak un certain pouvoir temporel en nommant vizir de Haute-Égypte le grand prêtre HAPOUSENEB. A cette époque, les dieux et leur clergé prirent une place de plus en plus grande dans
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la vie publique et coûtèrent de plus en plus cher au trésor royal.
Certains temples des époques précédentes, construits en briques crues, s'étaient effondrés ; ceux en pierres calcaires avaient été démolis pour fabriquer de la chaux. Sur ces vestiges, la Reine se fit bâtir par son architecte SENENMOUT un temple funéraire à Deir-el-Bahari. Ce sanctuaire rupestre était précédé de trois terrasses en gradins bordées de colonnes et reliées par des rampes dans le prolongement d'une
longue chaussée. La terrasse supérieure était constituée d'une cour à colonnade conduisant au sanctuaire creusé dans la falaise qui surplombait l'ensemble.
Bien que l'empire ait conservé son intégralité, les Rois de Mitanni, de Canaan, de Phénicie et le Prince de Kadesh, sur l'Oronte, face à une femme, se coalisèrent, en prévision de rompre leurs liens avec l'Égypte. Mais la Reine décéda en 1457 AJC.
THOUTMOSIS III (1458-1426 AJC), vexé d'une trop longue
tutelle, s'empressa d'effacer le nom de la régente sur un grand nombre des monuments qu'elle avait fait construire et le remplaça par le sien.
Grand stratège, Pharaon brisa à Megiddo au Proche-Orient la coalition rebelle des palestiniens soutenue par les syriens, De victoire en victoire, il rétablit les frontières de son empire, des rives de la Méditerranée à l'Euphrate, et assujettit les cités à lui payer l'impôt et à entretenir ses garnisons laissées aux endroits
stratégiques. Il éleva l'Égypte au rang d’un grand empire.
En Nubie, ses troupes poursuivirent la reconquête de la colonie et atteignirent Napata, près de la quatrième cataracte. Le Vice-Roi égyptien reçut l'ordre de veiller à l'exploitation systématique de toutes les ressources locales dont particulièrement celle des mines d'or.
Pour le peuple, ces victoires étaient celles d'AMON qui, par ses oracles, guidait le souverain et lui permettait de faire affluer vers
le temple de Karnak de nombreuses richesses.
Afin de répondre au développement commercial de l'Égypte dont les ports, jusque-là, étaient principalement fluviaux donc prévus pour des bateaux à fond plat (Napata, Abou-Simbel en Nubie..., Memphis), Pharaon fit aménager un port maritime dans l'Ile de Pharos (60 ha de bassins) et des chantiers pour construire de grands navires à quille mieux conçus pour la navigation maritime.
Comme ses prédécesseurs, Pharaon, avec l'aide des
captifs qu'il avait ramenés de ses campagnes, embellit le complexe religieux de Karnak. Il y fit construire un sanctuaire pour la barque d'AMON, édifier un pylône, ériger des obélisques et circonscrire l'aire sacrée d'un nouveau mur d'enceinte. Il porta
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aussi ses efforts de restauration sur tous les temples d'Égypte et de Nubie.
Il fit édifier son temple funéraire à Deir-el-Bahari et sa tombe dans un hypogée de la "Vallée des Rois".
AMENOPHIS II (1426-1401 AJC), fils du précédent Pharaon, dut mener une expédition en Proche-Orient contre une coalition de chefs de la région de Takhsy, entre l'Oronte et l'Euphrate.
THOUTMOSIS IV (1401-1391 AJC), fils du précédent Pharaon, après une expédition militaire
contre le Mitanni, conclut avec son Roi ARTATAMA un traité de paix.
Il développa la diplomatie internationale instaurée par son père, au Nord, avec le royaume de Mitanni et les Hittites, en Asie Mineure avec la Grèce achéenne et les îles de Méditerranée, à l'Ouest avec les Assyriens (Babylone). La diplomatie se substituant aux expéditions guerrières fut à l'origine d'une longue période de paix.
Thèbes, la capitale égyptienne, était devenue une ville cosmopolite d'une
richesse fabuleuse où se brassaient les affaires, les idées et les peuples de tout le Proche Orient.
Memphis, carrefour stratégique entre les deux Égyptes, était un port fluvial commercial et militaire, un centre de culture, d'art et d'activités intellectuelles (bibliothèque) mais aussi, et peut-être avant tout, un centre religieux où l'on célébrait les cultes de PTAH, du taureau APIS, de la déesse de l'Amour, HATHOR.
Dans ces villes et d'autres, les anciens
esclaves et les nouveaux émigrés sémites habitaient des quartiers à part, où ils menaient une vie communautaire et honoraient leurs divinités ancestrales. Au contact de ces étrangers, les Égyptiens enrichirent leur langue de mots sémitiques et leur mythologie de divinités comme BAÂL, ANAT, ASHTART... Si le plus grand nombre de ces étrangers étaient de simples manœuvres, certains étaient commerçants et d'autres fonctionnaires dans les administrations royales.
THOUTMOSIS IV avait
épousé une princesse méditerranéenne, mère du futur Roi. Pour son temple et son tombeau, il choisit les mêmes lieux que son père.
AMENOPHIS III (1391-1353 AJC) eut une épouse principale, la Reine TIYI, qu'il associa étroitement aux manifestations officielles, civiles et religieuses. Il affirma, comme son père, sa préférence à la diplomatie plutôt qu'à la guerre, en consolidant ses relations avec le Roi de Mitanni dont il épousa l'une des filles et, plus tard, celle du Roi de
Babylone
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.
Thèbes, sa capitale, devint encore plus que précédemment le centre vers lequel convergèrent toutes les entreprises économiques, politiques et
culturelles du Proche-Orient. Temples, palais et villas luxueuses s'étendaient le long du Nil. Sur la rive droite, se trouvait le vaste complexe religieux de Karnak dédié à AMON. Non loin de là, un peu plus au Sud, Pharaon, pour sa propre gloire divinisée, à la place d'une ancienne petite chapelle, se fit bâtir, à Louqsor, un élégant
temple relié à celui de Karnak par une allée, de trois
kilomètres, bordée de sphinx
Le jour de la fête d'Opet, AMON quittait son temple de Karnak et, par ce chemin, gagnait en une procession solennelle son "Harem du Sud" (Louqsor). La foule admirative regardait défiler les barques sacrées précédées des musiciens jouant du tambour et de la flûte.
Au Sud de Médinet-Habou, à Malgatta, le roi se fit aménager un palais avec un immense lac artificiel
Grand
administrateur, Pharaon contrôla les ports phéniciens, chypriotes, crétois... et plaça sous sa protection le commerce des îles de la Mer Égée. Il réorganisa l'administration des villes-citées de son empire qu'il soumit à l'impôt. A l'intérieur de l'Égypte, il renforça les administrations centrales et provinciales, sans hésiter à nommer à de hautes fonctions jusqu'en son palais, des étrangers descendants d'esclaves ou anciens esclaves eux-mêmes, généralement des
sémites. Il développa l'armée : infanterie, charrerie, marine et y inclut de nombreux mercenaires originaires de toutes les contrées de son empire.
Sur le plan religieux : dans sa colonie de Nubie, Pharaon renforça le culte d'AMON en y implantant des sanctuaires à Bouhen, la capitale, à Kalabcha, à Sedeinga et à Soleb.
Il faut savoir que l'or de Nubie était indispensable à l'Égypte pour maintenir au Proche-Orient un tissu d'accords politiques et économiques.
- Dans les villes du Proche-Orient, il établit des alliances entre les dieux égyptiens et les divinités locales, comme il en existait entre lui-même et les Rois de ses diverses possessions.
- Si, à cette époque, AMON, dieu de Thèbes, capitale de l'Égypte, tenait une place prépondérante dans la religion officielle, chaque grande ville n'en honorait pas moins son propre dieu pour lequel ses théologiens avaient imaginé un système cosmologique le plaçant à l'origine du monde. Ainsi à
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Memph le démiurge était le dieu PTAH qui, par la pensée et le verbe créateur, avait donné la vie à tous les autres dieux. Sachant qu'il y avait autant de dieux principaux que de nomes, soit quarante-deux, et que chacun était accompagné d'une triade, l'Égypte comptait au moins cent vingt-six divinités auxquelles il faut ajouter les dieux et les déesses adorés dans les sanctuaires secondaires des villages. Certaines de ces croyances trouvaient leur origine dans les divinités
relatives aux "forces vivantes" de la nature auxquelles étaient attachés les hommes de la fin de la Préhistoire.
Face à cette diversité des croyances, des théologiens, sur l'initiative d'AMENOPHIS III, (1391 - 1353 AJC), eurent le souci de trouver un dieu qui puisse rassembler tous les autres sans en éliminer aucun et être adoré tant par les Égyptiens que par les peuples du Proche-Orient. Ils en vinrent à l'idée qu'il
fallait privilégier la simple apparence du soleil, l'astre lui-même aux dépens des autres aspects : KHEPRI (soleil levant), RÉ (soleil de midi) et ATOUM (soleil couchant). Dès lors, le "disque solaire" devint le dieu ATON dont les rayons intégraient toutes les autres divinités, répandaient sur le monde leur force vivifiante et communiquaient à Pharaon, son fils, les millions de forces qui étaient en lui.
Pharaon, pour la gloire d'ATON,
ordonna la construction à Karnak d'un temple à ciel ouvert qui fut terminé par son épouse.
Le souverain, pour sa propre gloire, fit édifier son temple funéraire à Deir-el-Bahari, comportant la fameuse statue colossale de MEMNON, alors que sa tombe fut creusée dans la Vallée des Rois.
La plus ancienne clepsydre (pour mesurer le temps qui passe) fut découverte à Karnak, elle aurait été réalisée sous le règne d'Aménophis III.
A la mort de Pharaon, son fils étant trop jeune pour accéder au trône, sa veuve la grande épouse TIYI assura la régence. Fidèle au dieu ATON, le "Disque solaire", elle le vénéra plutôt qu'AMON, le dieu officiel de Thèbes. Dans la formation qu'elle donna au futur Pharaon, elle prôna avec tant de force le culte d'ATON qu'à peine couronné, le nouveau souverain se fit appelé AKHENATON, "celui qui est utile à ATON”. Son épouse, NEFERTITI, princesse
méditerranéenne qui partageait les mêmes idées religieuses, fut appelée la "perfection d'ATON" et joua un rôle important dans la réforme religieuse. Elle fut le symbole du "Soleil féminin" qui donnait la vie
.
AMENOPHIS IV (AKHENATON) (1353-1336 AJC), préoccupé, comme son père, de donner un lien idéologique aux divers pays de son
empire, chercha à leur imposer le culte du "disque solaire" ATON, comme source de toute vie, dont les
rayons intégraient toutes les autres divinités. Ce
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qui provoqua la révolte du puissant clergé d'AMON, ce dieu ancestral qui avait fait la grandeur de l'Égypte et avait protégé son peuple de ses ennemis.
A Karnak, il termina la construction du sanctuaire dédié à ATON, d'une conception originale : il était démuni de couverture afin que le soleil le baigne constamment de sa lumière.
OSIRIS, dieu de la mort, sans lequel les humains ne pouvaient connaître l'éternité, se trouva lui-même incorporé dans le "tout
solaire", ce que n'accepta pas le clergé osirien d'Abydos.
Sa mère TIYI, dans sa sagesse, fit remarquer à Pharaon qu'il était important d'imposer le culte d'ATON mais sans choquer la population qui ne manquerait pas d'être ébranlée par ce changement.
En dépit de l'opposition des clergés de Thèbes et d'Abydos et des recommandations de sa mère, Pharaon imposa sa conviction selon laq uelle le "disque solaire", dont il se
disait le fils, l'image et le lieutenant sur terre, était le dieu universel et unique englobant dans ses rayons toutes les autres divinités sans les annihiler, visible à l'humanité entière tant du Proche-Orient, de la Nubie que de l'Égypte, le seul capable, mieux que la violence, d'unir tous les peuples de son empire. Un papyrus résume cette conception du dieu ATON.
Tu as soulevé le ciel pour t'y lever, pour voir tout ce que tu as créé ; tu es l'unique mais des millions de vies sont en toi pour les animer... Tu crées des millions de formes à partir de toi, l'unique : villes et villages, champs, chemins et fleuves, le monde devient visible à ta lumière...
Dès lors, Pharaon-soleil, son épouse NEFERTITI et leurs filles se présentèrent comme l'exemple de la famille unie sous les rayons d'ATON, dieu omniprésent éclairant tous les instants de la vie, dispensateur de la lumière et de l'air, providence de tout être vivant.
La guerre ouverte que lui déclarèrent les prêtres d'AMON et d'OSIRIS obligea Pharaon à quitter Thèbes et à construire une nouvelle capitale dans la moyenne vallée du Nil, à Amarna, non loin d'Hermo-
polis, siège du collège des prêtres-savants les plus réputés qui ne furent certainement pas étrangers à l'élaboration de cette nouvelle théologie.
La Reine mère TIYI, restée à Thèbes, servit d'intermédiaire entre le clergé d'AMON et celui d'ATON, afin d'éviter tout débordement populaire.
A Amarna, la nouvelle capitale morale et politique de l'Égypte, Pharaon fit édifier deux palais, l'un pour lui, l'autre pour la Reine, et un grand temple à ciel ouvert
que venaient baigner les rayons du "disque solaire". Alors que
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précédemment, le "saint des saints", inaccessible au peuple où se trouvait la statue du dieu, était plongé dans l'ombre, AKHENATON pouvait affirmer : Le dieu que l'on vous cachait est là, bien visible au-dessus de vos têtes. Vous avez tous accès au divin qui baigne tout un chacun dans sa lumière
.
Le Roi et la Reine officiaient ensemble dans le temple à ciel ouvert, sous les rayons du "disque solaire", comme le rappelle une peinture murale de la tombe de Pharaon construite à Der-el-Melek, dans la montagne près de sa capitale, représentant le couple royal et divin accomplissant les rites sacrés : l'un et l'autre élèvent vers le ciel les noms liturgiques du "disque solaire" ; c'est l'émanation du dieu offert au créateur lui-même.
Près
de la tombe royale, on a retrouvé les hypogées de hauts fonctionnaires parmi lesquels on releva des noms sémitiques, syriens, ciliciens. Dans sa tombe, l'un d'entre eux, Doûdou, avait fait peindre des inscriptions relatant sa fonction d'intermédiaire entre le roi et ses congénères étrangers.
Entre temps, les Hittites (rassemblement des cités-états) avaient constitué une armée puissante. Ils battirent les Mitanni et fondèrent des états vassaux en Syrie. AKHENATON avait
envoyé au Proche-Orient le général HOREMHEB pour consolider ce qui restait de son empire, mais en 1336 AJC, Pharaon disparut vers le ciel et s'unit au soleil, en un mot décéda. Après sa mort, les prêtres de Thèbes s'empressèrent de reconstituer la puissance d'AMON et de tous les dieux traditionnels, ce qui ne fut pas difficile car le peuple leur était resté fidèle et n'avait pas adhéré réellement au prestige naissant d'ATON. Les petites idoles découvertes dans les
habitations des paysans de cette époque prouvent cette survie des habitudes polythéistes.
SEMENEKHARE (1336-1335 AJC), gendre et successeur du Roi hérétique, mourut très jeune, non sans avoir soutenu la réforme religieuse instaurée par son beau-père.
Face l’impopularité de la réforme :
TOUTANKHAMON (1335-1326 AJC), second gendre d'AKHE- NATON, bien qu'adorateur d'ATON, face à l'impopularité de la réforme qui constituait un trop grand bouleversement pour les consciences arrachées à leurs habitudes ancestrales et à leurs magies rassurantes, rendit au dieu thébain AMON et à sa ville leur prestige antérieur et aux autres dieux leurs cultes. Le roi et son administration abandonnèrent Amarna pour s'installer à Memphis. Pharaon ordonna la réfection des idoles
et des barques divines, la reconstitution du clergé et des moyens temporels dans tous les temples.
AMON retrouva sa prééminence. Mort à moins de vingt ans, sa
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sépulture inviolée fut retrouvée dans un hypogée de la "vallée des Rois ». Son successeur Aï (1326-1323 AJC) régna peu et sans gloire.
HOREMHEB (1323-1293 AJC), général qui avait maintenu la présence égyptienne au Proche-Orient, du fait de son prestige et d'un oracle d'AMON, à la mort d’AKHENATON, se proclama Pharaon et choisit Memphis comme résidence principale.
Il rétablit le culte d’AMON, restaura la hiérarchie gouvernementale et l'ordre intérieur. Il
favorisa le commerce, développa les chantiers navals, les ateliers d'armement et renouvela avec le Roi du Hatti un traité d'alliance. Il fit systématiquement démanteler le temple du "disque solaire", les palais et la ville d'Amarna. Le culte d'ATON définitivement aboli, le nom d'AKHENATON et ceux de trois successeurs immédiats furent retirés de la liste officielle des souverains d'Égypte.
Dans la falaise proche de Saqqarah, dite du Bubasteien, on
retrouva, datées de cette époque, les tombes de hauts fonctionnaires aux noms sémitiques prouvant la montée de l'influence des émigrés sémites dans la société égyptienne.
Pharaon se fit édifier, à Saqqarah, une sépulture grandiose mais fut inhumé dans la vallée des Rois
XIXème Dynastie (1293-1190 AJC)
RAMSES 1er (1293-1291 AJC), général né à Tanis, à l'Est du Delta, avait eu la confiance d'HOREMHEB. A ce titre, il devint Pharaon. Comme son prédécesseur, il fut fidèle à AMON mais aussi à SETH qui était, pour lui, l'égal du dieu sémite BAAL.
Il choisit Tanis, sa ville natale, comme capitale. A Karnak, il poursuivit l'aménagement de grands complexes religieux dédiés à AMON, OSIRIS, PTAH, OPET... Il termina le canal reliant la Mer Rouge au Nil, commencé par SESOSTRIS III
(page 81). Il réorganisa l'armée en trois corps, chacun placé sous la protection d'un dieu AMON, RÉ et PTAH. Il associa son fils au gouvernement.
SETHY 1er (1291-1279 AJC) dut faire face à diverses menaces : à l'Ouest, les Lybiens ; au Sud, les Nubiens ; à l'Est, les Bédouins du Sinaï. Puis, il entreprit la conquête de la Palestine où il se heurta à l'armée de MOURSIL, roi des Hittites, avec lequel il conclut un traité de paix lui accordant la Palestine et la partie
méditerranéenne de la Syrie jusqu'aux environs de Tyr.
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A Abydos, il édifia un temple à la gloire d'OSIRIS. A Karnak, aux temples déjà existants, il ajouta une grande salle hypostyle (à colonnes). A Héliopolis, il dressa une pyramide...A sa mort, l'Égypte était prospère et tranquille, ainsi que l'ensemble de l'empire. Il fut inhumé dans une tombe de la vallée des Rois, remarquable par ses dimensions et la finesse de ses reliefs en méplat.
RAMSES II (1279-1215 AJC), fils du précédent Roi, dès son accession au trône, dut
reprendre la lutte contre les Hittites. Une longue guerre s'en suivit.
Il associa son épouse NEFERTARI au pouvoir. Dans les cérémonies religieuses, elle se tenait près du souverain en qualité d'épouse du dieu.
Originaire du Delta, Pharaon fit construire, près d'Avaris, avec l'aide d'émigrés et de prisonniers sémites, une ville nouvelle, Piramsès, constituée d'un ensemble prestigieux de palais, de temples, de bâtiments administratifs, de
cantonnements pour ses forces armées, d'arsenaux pour sa flotte. C'était, en quelque sorte, une place forte pour contrôler les confins orientaux du Delta et, pour intervenir plus vite en Canaan et en Phénécie. La prospérité commerciale et militaire de Prames se fit au détriment de Memphis.
Par ailleurs, pour faire face aux menaces des Lybiens alliés aux Peuples de la Mer, Pharaon dut renforcer ses défenses dans les oasis de l'Ouest. Il dut aussi, par la présence de
troupes, maintenir la paix en Nubie dont le peuple était toujours prêt à se révolter. De cette colonie, l'Égypte tirait de nombreuses ressources : bétail, matières premières (bois, cuir...), mercenaires pour ses armées, sans oublier l'or qui enrichissait le trésor royal et le temple d'AMON mais servait aussi à acheter des alliances au Proche-Orient.
Après plusieurs expéditions malheureuses en l'an 18 de son règne, soit vers 1261 AJC, RAMSES II affronta l'armée hittite
devant la citadelle de Qadesch, sur l'Oronte. La bataille fut rude et se solda par un compromis ménageant l'honneur des deux parties. Considérant que la diplomatie était le meilleur moyen d'établir la paix, Pharaon et KHATTOUSIL 1er, roi hittite, mirent sur pied, vers 1255 AJC, le premier pacte de non-agression de l'histoire, lequel, s'imposant aux souverains d'Anatolie et d'Assyrie, assura une période de paix pour tous. Cette première “alliance” entre deux
grandes nations fut
scellée par un serment solennel au cours d'une cérémonie publique.
Nous avons établi une bonne paix et une bonne fraternité entre nos pays d'Égypte et de Hittites, pour toujours.
Au sud de la Vallée des Rois, dans les falaises d’un site connu sous le
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nom de Vallée des Reines, Pharaon fit aménager de véritables appartements funéraires somptueusement décorés, où fut inhumée son épouse NEFERTARI. Par la suite, ce lieu fut la nécropole des Reines et de leurs enfants.
En 1229 AJC, RAMSES II épousa la fille aînée du Roi hittite dont il fit sa grande épouse royale MAÂTHOR-NEFEROURE.
Pharaon, comme ses prédécesseurs, embellit l’Égypte de nouveaux monuments, principalement dans sa capitale, Piramsès. A Louqsor, il fit édifier
un grand portail à pylônes et, à Karnak, deux obélisques. A Memphis, il embellit le temple de PTAH ; à Héliopolis, celui de RÉ ; à Abydos, celui d’OSIRIS. A Thèbes, sur la rive occidentale du Nil, au pied de la montagne qui domine la ville, il fit édifier à sa gloire exclusive un monument d'éternité, le château de millions d’années, le Ramesseum. Dans une vaste enceinte de briques de 300 mètres de long sur 200 mètres de large, ce mémorial comprenait le sanctuaire proprement dit
destiné au culte royal et des annexes pour le clergé. Dans la première cour du temple, Pharaon fit édifier une colossale statue à son effigie qui, avec son piédestal, atteignait une hauteur de
17 mètres.
L’intérêt que le souverain portait à sa colonie de Nubie se traduisit par la construction, à Abou-Simbel, de deux magnifiques temples rupestres consacrés, l’un à la Reine NEFERTARI, sa première grande épouse ; l’autre, le plus grand, aux dieux AMON et RÉ, mais aussi à lui-même. Le
Roi s’y fit représenter sous la forme d’un dieu à tête de faucon pour lequel il accomplissait, en personne, tous les rites de l’offrande divine traditionnelle. Le Roi vivant devenait un dieu, orgueil d’un souverain enivré par ses conquêtes territoriales. Au fil du temps, RAMSES II s’identifia de plus en plus au dieu soleil RÉ.
Vers la fin de son règne, des symptômes de l’affaiblissement du
pouvoir royal apparurent :
- -Les temples, du fait de l’hérédité sacerdotale, acquirent une certaine
autonomie pour gérer leur domaine et rendre la justice.
- -Les Égyptiens recoururent de plus en plus aux méthodes théocratiques de
l’Ancien Empire : le dieu était censé régner sur terre à travers ses oracles (page
63) et Pharaon devait chercher auprès de lui l’indispensable caution de ses décisions politiques. Le Grand-Prêtre du temple d’AMON, à Karnak, avait acquis la réputation de Prophète- décodeur d’oracle et pouvait de la sorte
influencer les décisions du souverain.
-Le Roi, pour maintenir l’unité de l’armée, donna des terres à ses officiers de
carrière, ce qui créa une caste militaire.
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A l’extérieur, des menaces se précisaient
- Le Roi d’Assyrie, installé fermement sur l’Euphrate, avait défait les Hittites
et occupé Babylone.
- Le danger d’invasion par l'Est des “peuples de la mer” se précisait. En effet, les Doriens venus d’Europe avaient envahi la Grèce et s’étaient emparés du Péloponnèse, de la Crète, de Rhodes et des côtes de l’Anatolie, faisant fuir devant eux les populations qui cherchèrent une terre hospitalière au Proche- Orient. Certains s’embarquèrent pour la Palestine et la Lybie où ils se mêlèrent aux autochtones.
RAMSES II mourut après un règne de 78 ans et au moins 13 jubilés. Il avait eu plus de cent enfants. Son troisième fils lui succéda. Sa tombe avait été creusée dans la falaise de la Vallée des Rois et son temple funéraire, Ramesseum, à Thèbes (voir plus haut).
MERENPATH (1213-1204 AJC), en succédant à son père à l’âge de soixante ans, connut le déchaînement de la tourmente sur l’Égypte :
- Les “peuples de la mer”, alliés aux Lybiens, envahirent le Delta par l’Ouest et marchèrent sur Memphis alors que d’autres hordes s’infiltraient par l’Est. Ces envahisseurs furent arrêtés au prix de durs combats, en contrepartie, Pharaon se saisit d’un important butin en armes, prisonniers et bétail.
Une pierre plate porte le récit de la victoire de MERENPATH sur les Lybiens et atteste, pour la première fois, le nom “Israël” comme celui d’un peuple, d’où le nom de “Stèle d’Israël” donné à cette pierre.
- En Nubie, il dut réprimer une grave insurrection.
- Pour assurer la présence égyptienne en Palestine, il mena des actions en pays de Canaan (Ascalon, Geses et Yénoham).
En Égypte, le clergé de Thèbes, sous l’autorité du grand-prêtre HERIHOR, amplifia son emprise sur la Haute-Égypte et créa une milice armée en vue de se révolter contre Pharaon. A cela, s’ajouta le soulèvement de prisonniers que captura RAMSES II.
En 1204 AJC, le gouverneur de Nubie, seul territoire à avoir conservé un cadre administratif stable, marcha sur Thèbes, épousa la veuve de MERENPATH et se fit couronner Pharaon sous le nom de SETHY II (1204-
1198 AJC). Son successeur fut son
fils infirme SIPTAH (1198-1192 AJC); ensuite, la mère de celui-ci, la Reine-Pharaon TAOUSERT (1192-1190 AJC), puis l’Égypte passa sous le contrôle de dignitaires et chefs locaux. Les temples furent pillés. Ce fut à nouveau une période de révoltes et d’anarchie morale.
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XXème Dynastie (1190-1069 AJC)
SETHNAKHT (1190-1087 AJC), descendant de RAMSES II, mit fin à la guerre civile et restaura le pouvoir royal en créant une nouvelle dynastie sous le signe d’AMON.
Du fait des vicissitudes qu’avait connues le pays, la mentalité des Égyptiens avait évolué. Si Pharaon personnifiait encore une autorité totale : civile, religieuse et militaire, et si le mythe de son essence divine restait vivace, son caractère humain l’emporta sur son aspect sacré et ses subordonnés acquirent une autonomie
accrue dans l’exercice de leur fonction civile, religieuse ou militaire.
RAMSES III (1187-1156 AJC), fils du précédent Roi, dut, sur plusieurs fronts, s’opposer aux “peuples de la Mer”, à l’Ouest aux bandes venues de Lybie, au Nord à celles venues sur de grands navires, à l’Est aux tribus venues de Palestine. Il sortit vainqueur de ces affrontements et, poursuivant son offensive, il reprit possession de la Palestine.
Les documents qui d’écrivent l’invasion de l’Egypte par les peuples de la mer montrent les guerriers accompagnés par leurs familles, ce qui supposerait qu'il s'agit de migrations avec pour but l'implantation dans la région. Les combats se déroulèrent sur terre mais également sur des bateaux dans les chenaux du delta. Les assaillants arrivant en partie par voie maritime. Les conditions des affrontements sont donc difficiles. Les Égyptiens engageant des bateaux au combat et de nombreuses troupes au sol, finalement l'affrontement principal se serait joué au corps à corps uniquement dans la région du delta. D’où ils furent refoulés vers la Palestine par les soldats de Ramsès III. D’autres document, précisent, que parmi les survivants se trouvaient des Tjeker, les Philistins et les Shardanes, qui se sont réfugiés dans la région de Gaza longeant la Méditerranée.
Entre temps, du fait de la sécheresse, les récoltes ayant été mauvaises, les salaires en nature dus aux ouvriers qui travaillaient sur les chantiers royaux ne furent plus distribués. Ceux-ci cessèrent leur travail ; ils ne le reprirent qu’après avoir reçu leur ration. D’autres grèves suivirent. Ce qui démontre la faiblesse du pouvoir royal face à une revendication légitime et somme toute pacifique. Il ne s'agissait pas d’une révolte mais d’une grève au sens moderne du terme.
On
retiendra que, durant son règne, RAMSES III fit édifier près de Thèbes, au sud de Medinet-Habou, un immense temple-palais dans un style syrien, dont les inscriptions et les décors ont été conservés.
101
Pendant cette période et celle du règne suivant, de l’autre côté de la Mer Méditerranée, sous la poussée d’envahisseurs venus du Nord, les Grecs, les peuples des îles de la Mer Égée et de Crète, avaient émigré en Anatolie où, avec diverses tribus locales, ils constituèrent une masse de guerriers qui submergea et anéantit les empires hittites et syrien.
RAMSES IV (1156-1150 AJC) : sous son règne, la corruption des fonctionnaires à tous les niveaux rendit difficile l’administration des
nomes, d’autant plus que le pouvoir grandissant du Grand-Prêtre de Thèbes affaiblissait d’autant celui de Pharaon. Ce pouvoir religieux avait deux aspects
:
- -D’une part, théocratique : par l’obligation pour Pharaon de prendre ses décisions en fonction des oracles déchiffrés par le Grand-Prêtre de Thèbes.
- -D’autre part, économique : en effet, le temple d’AMON à Thèbes avait, à cette époque, une telle importance que plus de 80.000 personnes servaient le dieu qui possédait quelques 2.400 kilomètres carrés de champs et de fabuleuses richesses. Ce centre religieux constituait une puissance économique et sociale au sein de l’état.
RAMSES V : avec son règne commença une longue période (1150-
1069 AJC) pendant laquelle l’Égypte repliée sur elle-même connut des conspirations au sein du gouvernement, des troubles sociaux, des révoltes, des
grèves... Le Grand-Prêtre de Thèbes affirma son autonomie. Le peuple affamé pilla les tombes...
Cette situation se perpétua sous les règnes de RAMSES VI à RAMSES XI. Ce dernier souverain, en dépit d’une économie ralentie, relança le chantier du temple du dieu KHONSOU à Karnak
et proclama la renaissance de l’ordre cosmique.
.
3ème PÉRIODE INTERMÉDIAIRE (1069-664 AJC)
Après le temps obscur des derniers RAMSES, l’Égypte était divisée en
deux royaumes.
- En Haute-Égypte, régnèrent en quasi autonomie les Rois-Prêtres de Thèbes
dont les pouvoirs religieux, civil et militaire s’étendaient sur une sorte de
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principauté souveraine d’Hermopolis à la Nubie incluse.
Le Premier de ces Rois HERIHOR (1080-1064 AJC), déjà Grand- Prêtre à la fin du règne de MERENPATH, se disait fils d’AMON et officiait, habillé en Pharaon. Son successeur PIANKH (1064-1060 AJC) mourut en laissant la place à son fils PINODJEM (1060-1032 AJC), lequel embellit et restaura les temples de Karnak et de Medinet-Habou. Un de ses fils, PSOUSENNES 1er, devint roi du Delta (1043-993 AJC) où il institua une théocratie au service
d’AMON. Ce lien de sang rétablit des relations cordiales entre les deux Égyptes. Pharaon fit construire son tombeau et son temple funéraire à Tanis.
- Dans le Delta, la XXIème Dynastie (1069-945 AJC), inaugurée par SMENDES (1069-1043 AJC), eut pour capitale Tanis, à la fois siège du gouvernement et port important. Ce Roi rétablit la paix en Basse- Égypte et des relations commerciales avec les villes du Proche-Orient. Son successeur ne fut autre que PSOUSENNES 1er, fils du Pontife thébain. Après la mort de Pharaon, sous le règne de PSOUSENNES II, les tribus libyennes implantées à l’Ouest du Delta et aux abords du Fayoum, vers 945 AJC, sous la direction de leur chef CHECHANQ II (945-924 AJC), investirent le Delta et la Moyenne- Égypte. Selon le principe ancestral que le royaume ne pouvait rester sans souverain, ce chef Lybien, par la volonté d'AMON, devint Pharaon en qualité de successeur de PSOUSENNES II et fondateur de la XXIIème Dynastie.
103
DÉCLIN DE L'EMPIRE
Dynastie lybienne (945-730 AJC)
CHECHANQ II régna sur les deux Égyptes mais établit sa capitale à Bubastis, dans le Delta. Il nomma des compatriotes aux postes de hauts fonctionnaires : gouverneurs de nomes, grands-prêtres de Thèbes et de Memphis...
A la tête d’une armée lybienne complétée de Nubiens et d’Égyptiens, il entreprit une expédition en Philistie et en Israël, au cours de laquelle il pilla Jérusalem dont il emporta tous les trésors. Il rétablit les relations commerciales avec Byblos.
Il fit édifier un
temple à Tanis à la gloire d’AMON, dans lequel il sera inhumé alors que certains de ses successeurs le seront dans le complexe du Ramesseum transformé en nécropole.
Les princes qui lui succédèrent eurent des règnes perturbés par des compétitions. Vers 780 AJC, il s’en suivit une scission : les Rois de la XXIIIème Dynastie gouvernèrent la haute Vallée du Nil avec Thèbes pour capitale ; ceux de la XXIVème Dynastie (730-665 AJC) gouvernèrent le Delta et eurent Sais pour capitale.
Vers
715 AJC, les Nubiens s’emparèrent de Thèbes et de la Haute- Égypte mais, au Nord, se heurtèrent à la résistance du Roi de Sais, à la hauteur de Memphis.
Pour comprendre ce retour des Nubiens, sachez que :
Au temps de sa splendeur, l’Égypte avait créé en Nubie des écoles et des temples et avait incorporé des autochtones parmi le personnel de son administration coloniale. Les Rois locaux qui lui avaient juré allégeance avaient conservé une certaine autonomie.
Vers 1070 AJC, la faiblesse de l'Égypte ne lui permettant plus de conserver son hégémonie dans le Sud, la Nubie, sous l’autorité d’un chef, se constitua en un royaume indépendant organisé administrativement et militairement à l’image du modèle colonial de jadis. Napata devint la capitale de cet état Kouch.
En 715 AJC, PIANKHY, souverain kouch, à la tête d’une puissante armée, envahit l’Égypte et s’empara de Thèbes. Les prêtres d’AMON le couronnèrent roi fondateur de la XXVème Dynastie, dite éthiopienne par les historiens.
Entre temps, les Assyriens envahirent le Delta d’où ils détrônèrent le
104
Roi de Sais, puis cherchèrent à remonter le Nil, mais le Pharaon kouch SHABAKA (716-702 AJC), frère de PIANKHY, s’opposa avec succès à leur avance. Sous le règne de l’héritier du royaume kouch TAHARKA (690-664
AJC), l’armée d’ASSURBANIPAL, roi syrien, s’étant emparée de Memphis en 671 AJC, puis de Thèbes en 666 AJC, se heurta un temps à la résistance du nouveau roi kouch TANOUTAMON (604-556 AJC). Une ultime bataille se solda par le pillage de Thèbes en 663 AJC et le succès des Syriens qui
repoussèrent les Ochs au-delà de la première cataracte.
Les Pharaons de la dynastie éthiopienne se firent inhumer dans la nécropole de leurs ancêtres à Kurru, à 25 kilomètres de Napata
.
Après leur défaite, en 663 AJC, les Kouchs créèrent en Nubie, autour de Djebel-Barkal, le royaume de Napata puis, vers 300 AJC, celui de Méroé.
Ils y développèrent une civilisation originale empruntée à la fois de soudanais
et d’égyptien.
Les Assyriens, affaiblis dans leur empire par
des guerres incessantes, laissèrent le gouvernement de l’Égypte à TEFNAKHT, roi de Sais de la XXIVème Dynastie. Celui-ci réunifia les deux Égyptes et remis en faveur les dieux locaux. Lui-même se disait fils de NEITH, déesse de Sais. Il rétablit aussi le culte des animaux sacrés.
BOCCHORIS, fils de TEFNAKHT, précédent Roi de Sais, eut comme successeur NECHAO 1er, tué au combat, dont le fils PSAMMETIQUE 1er créa une nouvelle dynastie.
XXVIème Dynastie, dite Saïte (de Sais) (664-525 AJC)
PSAMMETIQUE 1er (664-610 AJC), ayant réunifié l’Égypte, se libéra de la tutelle des Assyriens et élimina du Delta les féodaux à la solde des anciens occupants. Il établit sa capitale à Sais et se concilia le Grand-Prêtre de Thèbes qui lui concéda le pouvoir civil sur la Haute Vallée. Il remit en ordre l’administration et l’économie du pays et rétablit Memphis dans son rôle de centre administratif et commercial du Delta.
L’Égypte en paix retrouva un peu de son éclat. On exhuma les vieux
textes, on recopia les formules religieuses et magiques des tombeaux. On remarque, à cette époque, des transformations dans le langage littéraire, dans les pratiques juridiques, dans les rapports sociaux et les convictions religieuses. Ainsi OSIRIS, le dieu du royaume des morts, devint le symbole de la nation égyptienne et SETH, qui avait été un grand dieu à l’époque ramesside, se trouva éliminé. A Thèbes, s’instaura une dynastie des “divines adoratrices d’AMON”. Dans chaque sanctuaire, le
clergé constitua une caste
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fermée où la fonction de prêtre était héréditaire. En inscrivant le nom d’OSIRIS sur le linceul ou sur le sarcophage d’un mort momifié, ou en plaçant la statuette de ce dieu dans la tombe, tout humain qui, durant sa vie, avait respecté la morale de MAAT, accédait après sa mort à la plénitude de la vie éternelle, même si, pour les plus modestes, les tombes n’étaient que des trous, au mieux des caveaux sommaires.
Vers les années 650 (avant notre ère) les égyptiens avaient appris à réduire le minerai de fer par le charbon de bois dans des fourneaux rudimentaires. Ce premier acier servit à produire des armes d'une dureté plus grande que celles en bronze. L’Égypte eut des échanges fructueux de marchandises et d’idées avec les villes de Grèce et celles du royaume de Juda. Elle s’ouvrit aux influences culturelles extérieures, par exemple à l’astrologie babylonienne, et accepta sur son sol l’implantation de populations étrangères. Ainsi, beaucoup d’Hébreux rejoignirent ceux de leurs congénères qui s’étaient précédemment enrôlés comme mercenaires dans l’armée de Pharaon ou qui avaient formé les communautés juives d’Éléphantine, de Thèbes, de Memphis...
NEKHAO II (610-595 AJC), fils du précédent, fit de l’Égypte, avec l’aide des Grecs, une puissance navale. Il commença la construction d’un nouveau canal de la Mer Rouge à la Méditerranée en faisant creuser le Ouadi- Tonmilat de Bubastis au lac Timsah qu’il envisagea relier au lac Amer et au Golfe de Suez. Il reconquit d’anciens comptoirs du Proche-Orient et battit le Roi de Juda à Meggido. Mais en 605, son armée fut écrasée par NABUCHODONOSOR
.
Le peuple égyptien, rongé par un
sentiment d’insécurité, en proie aux désastres économiques, perdit sa foi enthousiaste en, la vie, rendit les dieux
responsables de ses malheurs et se tourna vers un fétichisme animal. Datant
de cette époque, on a retrouvé, près de Memphis, non loin de la nécropole d’APIS, des centaines de milliers de momies d’ibis, de faucons, de babouins, de chats... enfermées dans des poteries coniques.
PSAMMETIQUE II (595-589 AJC), fils du précédent, fit une expédition contre les Nubiens
qu’il repoussa au-delà de la troisième cataracte, jusqu’à Napata.
APRIES (589-568 AJC), après une guerre désastreuse contre Cyrène, en Lybie, fut détrôné par le général AMASIS qui se proclama Roi (568-526
AJC), fils de NEITH, déesse de Sais. En 565 AJC, il fonda le port franc de
Naucratis, à l’usage des Grecs. Au cours de son règne, il améliora les administrations fiscale et douanière ; il entreprit de nombreux travaux à Sais (lac sacré et temple), à Mendès (chapelle).
106
Sa seule expédition fut la conquête de Chypre. Il eut la sagesse de ne pas intervenir contre les Perses qui avaient annexé l’Anatolie, ce qui valut à l’Egypte 40 ans de paix, ceci en dépit d’une tentative, en 570 AJC, de NABUCHODONOSOR, roi de Babylone, d’asservir le pays. Malheureusement, l’avenir s’assombrit assez vite avec le développement de l’Empire Perse sous le gouvernement de CYRUS II le Grand. Celui-ci décida, en 530 AJC, de laisser le pouvoir à son fils CAMBYSE II.
PSAMMETIQUE
III ne régna que six mois. Il fut vaincu à Peluse en
525 AJC, dans le Delta, par CAMBYSE II qui annexa l’Égypte et en fit une simple province (Satrapie) de l’Empire Perse.
XXVIIème Dynastie, période perse
CAMBYSE II, roi perse (525-522 AJC), fut intronisé Pharaon par le clergé de Sais. Les Égyptiens acceptèrent cette suzeraineté par force, mais aussi par résignation religieuse leur imposant, selon la tradition ancestrale, d’avoir un roi seul intermédiaire possible entre les dieux et les humains. De ce fait, le pays ne pouvait rester sans souverain. Des considérations commerciales furent peut-être aussi à l’origine de cette soumission. En effet, les Perses facilitèrent les échanges de
marchandises entre l’Égypte et le Proche-Orient.
Pour mener la guerre contre Mèdes, CAMBYSE II vida les trésors des temples égyptiens, ce qui exacerba les prêtres et la population. Son successeur DARIUS 1er (522-486 AJC) tenta d’apaiser ce mécontentement en procédant à l’unification des lois propres à l’Égypte et en intensifiant son commerce maritime par l’ouverture du canal de la Mer Rouge à la Méditerranée commencé par NEKHAO II (page 103
).
DARIUS 1er, en 490 AJC, fut battu à
Marathon, en Grèce, par le général athénien MILTIADE.
CAMBYSE et DARIUS ayant ouvert l’Égypte vers l’extérieur, des émigrants y affluèrent (Grecs, Cariens, Phéniciens, Hébreux...). Les uns servirent de main-d’œuvre ou renforcèrent les garnisons étrangères d’Eléphantine, les autres s’établirent marchands dans cette ville ou se mêlèrent à la communauté hébraïque établie précédemment sous le règne d’APRIES (589-568 AJC).
Datant du Vème siècle AJC, on retrouva, à Éléphantine, un lot
abondant de papyrus araméens témoignant qu’une colonie juive vivait dans cette île autour d’un temple consacré à YAHVÉ (YAHO) et à diverses divinités
107
féminines. La reconstruction de leur temple détruit en 410 AJC par les prêtres du dieu KNOUM de la ville donna lieu à un échange de papyrus entre le gouverneur de Samarie et le Satrape perse
.
XERXES 1er (486-465 AJC), en 480 AJC, fut à son tour écrasé à Salamine et, en 479 AJC, à Platées, par les Grecs. En 465 AJC, il mourut assassiné.
ARTAXERXES 1er (465-429 AJC) : sous le règne de ce roi perse, INAROS, d’origine lybienne, en coalition avec AMYRTÉE de Sais et l’aide des
Athéniens, réussit à battre le satrape (gouverneur perse) de Memphis. Lors de ces combats, INAROS fut tué mais AMYRTÉE de Sais (404-398 AJC) parvint à libérer l’Égypte de la domination perse. Il fonda la XXVIllème Dynastie dont il fut le seul représentant.
XXIXème Dynastie (398-378 AJC)
NEPHERITES 1er (398-392 AJC), ayant renversé AMYRTÉE, acheva la libération de l’Égypte. Il choisit Mendès, dans le Delta, comme capitale. Il conserva l’Égypte indépendante mais des luttes pour sa succession fragilisèrent cette autonomie. HAKORIS (390-373 AJC) se proclama “élu du Bélier”, seigneur de Mendès.
NEPHERITES II, en 378 AJC, fut à son tour renversé par le général
NECTANEBO 1er de Sebennytos qui fonda une nouvelle lignée de pharaons.
XXXème Dynastie
NECTANEBO 1er (375-360 AJC), en rompant les digues du Nil, réussit, en 373 AJC, avec l’aide de l’inondation, à mettre en fuite l’armée perse qui avait à nouveau envahi le pays et été parvenue à Memphis. Malgré une paix incertaine, Pharaon, comme ses prédécesseurs, contribua à enrichir Karnak de nouvelles constructions
.
THEOS (360-359 AJC), son fils, à l’aide d’une armée de mercenaires,
attaqua les Perses chez eux mais ceux-ci le firent prisonnier en 359 AJC. Il aurait été le
premier, en Égypte, à frapper monnaie.
Remarque : Lorsque le troc devint insuffisant, les souverains étrangers
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inventèrent la monnaie. Il semblerait que ce fut le cas, en Grèce, vers 650 AJC où, datées de cette époque, on retrouva des pièces d’or à l'effigie d’Athéna et d’une chouette. Crésus (561-546 AJC), roi Lydien, frappa des pièces marquées du couple lion et taureau. Darius 1er (522-486 AJC), roi de Perse, frappa une monnaie marquée de l’archer royal...
.
NECTANEBO II (359-341 AJC), en 351 AJC, repoussa une nouvelle
attaque perse mais, en 340 AJC, céda devant l’armée d’ARTAXERXES
II qui envahit le Delta. Seule la partie sud de la Vallée du Nil où s’était réfugié le
Roi, résista un certain temps à l’envahisseur. En 339 AJC, tout le pays passa aux mains des Perses.
La classification des dynasties des Rois d’Égypte réalisée par MANETHON s’arrête avec le nombre XXX car, dès lors, le pays sera gouverné par des étrangers. Ce sera aussi le déclin de sa civilisation et la décadence de son clergé.
2ème période perse (342-333 AJC)
ARTAXERXES III, ARSES et DARIUS III sont les rois perses qui firent plier les Égyptiens sous le joug d’une pénible occupation. Aussi, la défaite, en 333 AJC, de DARIUS III vaincu par ALEXANDRE le GRAND, roi de Macédoine, fut accueillie avec joie dans la vallée 'du Nil où, quelques mois plus tard, il fut reçu en libérateur. Et ceci d’autant plus qu’il se montra respectueux des dieux égyptiens au point de se faire reconnaître fils d’AMON par le clergé de Memphis.
Période hellénistique-ptolémaïque (323-30 AJC)
ALEXANDRE le Grand, en 332 AJC, mit en chantier le port d’Alexandrie et, peu avant sa mort à Babylone en 323 AJC, remit l’Égypte à PTOLÉMÉE 1er. De ce jour, l’histoire de ce pays devint une affaire de famille, celle des PTOLÉMÉE, qui eut comme objectif d’exploiter l’Égypte pour étendre son influence dans le monde de la Méditerranée et du Proche- Orient à l’aide d’une armée et d’une flotte puissantes.
PTOLÉMÉE 1er (323-282 AJC) avait été nommé gouverneur de l’Égypte par ALEXANDRE le Grand
mais, après la mort de celui-ci, il s’affranchit de l’administration grecque et se proclama roi d’Égypte. Alexandrie, sa capitale, connaissait une réputation grandissante. Ses
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installations portuaires recevaient des marchandises de tous les pays. Son palais royal couvrait le tiers de la ville. Son musée et sa bibliothèque attiraient les savants du monde méditerranéen et du Proche-Orient.
Le Roi mena des expéditions victorieuses qui lui permirent de reconquérir la Palestine, la Syrie et la Cyrénaïque (332 AJC), Chypre et la Crète (305 AJC). Il restaura de nombreux temples à Philae, Edfou, Dendéra. Dans l’Ile de Phil Aÿ, il édifia le temple dédié à ISIS ; dans la
région dépendant de Thèbes (la Thébaïde), il fit construire une nouvelle ville, Ptolémaïs.
PTOLÉMÉE II (282-246 AJC) : Ce roi, fils du précédent, à l’extérieur dut faire preuve de force pour conserver les territoires conquis par son père. A l’intérieur, selon la tradition ancestrale, il donna à l’Égypte une solide armature administrative centralisée. Le roi possédait tous les pouvoirs religieux, civils, juridiques, militaires ; tout partait de lui, tout lui revenait. Il était la loi
vivante
.
Ne pouvant être omniprésent, le roi se fit assister par des administrateurs hiérarchisés, les uns dépendant directement du souverain, les autres d’une administration régionale. Les premiers constituèrent à Alexandrie le centre nerveux du royaume ; les seconds exerçaient leur activité dans les provinces, sous la direction d’un délégué du pouvoir central.
Le Roi était entouré d’une cour influente composée de dignitaires hiérarchisés. En premier, la Reine dont le rôle
politique fut majeur ; puis la “parenté royale” et ses assimilés, les “Amis”, les capitaines des gardes de corps...
La cour formait en quelque sorte une grande famille où la fidélité malheureusement cédait souvent à la rivalité, à la haine et au crime qui se révélera parfois le meilleur moyen de succession.
Le règne de ce Roi fut marqué d’exploits militaires : victoire en Syrie (276-271 AJC), intervention de la flotte ptolémaïque contre la Macédoine (266-261 AJC), nouvelle expédition
en Syrie (252 AJC).
En Égypte, le Roi réorganisa l’économie, la justice, les finances et l’armée. Il modernisa l’agriculture dans le Fayoum. Il poursuivit la construction d’Alexandrie et, à 800 mètres au large, sur ile de Pharos, il édifia un phare. Il élargit le canal construit par NEKHAO (page 103) au gabarit de deux cirènes (navires à trois rangs de rameurs superposés). Ce Roi fut également un éminent intellectuel. Il protégea les arts et les lettres. Alexandrie,
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dont il développa le musée et la bibliothèque, devint la capitale intellectuelle des mondes hellénistes où se pressaient hommes de science, médecins et poètes. En réalité, la ville fut avant tout celle des colons de souche grecque qui parlaient leur langue et ignoraient l’égyptien. La politique, la législation, les mœurs, les sciences et la culture étaient grecs. Pour eux, la vallée du Nil fut principalement le grenier du monde hellénique.
PTOLÉMÉE III (246-221 AJC) : durant son règne,
l’Égypte connut son apogée et la bibliothèque d’Alexandrie compta jusqu’à quelque 490.000 rouleau. A l’extérieur, le Roi fit de glorieuses mais éphémères conquêtes.
PTOLÉMÉE IV (221-204 AJC) fut un modeste souverain qui, selon l’esprit de l’époque, n’hésita pas, pour affirmer son pouvoir, à assassiner ceux qui le gênaient : oncles, frères et mère. Pour sa sécurité, il réorganisa l’armée égyptienne dont le rôle allait lui être utile. En effet, en 217 AJC, ANTIOCHOS III, roi séleucide
(dynastie hellénistique) ayant envahi la Syrie, atteignit rapidement la vallée du Nil. PTOLÉMÉE IV ne put arrêter l’envahisseur qu’en détruisant les digues du fleuve. Une contre-attaque lui permit de dégager l’Égypte et de poursuivre l’ennemi jusqu’en Syrie. Toutefois, cette épreuve déclencha des troubles graves à l’intérieur de l’Égypte. Le peuple se révolta contre la fiscalité qui drainait vers Alexandrie toutes les ressources du pays. A partir de 208 AJC, la Haute Égypte (la Thébaïde),
sous l'autorité du clergé, échappa progressivement au contrôle du gouvernement alexandrin.
PTOLÉMÉE V (204-181 AJC) ne récupéra pas la région émancipée de
Thèbes et fit perdre définitivement à l’Égypte la Palestine et la Syrie.
PTOLÉMÉE VI (181-145 AJC) : son règne annonça le début de la décadence du royaume : affaiblissement du pouvoir royal, intrigues de cour, révolte du peuple égyptien, autonomie de la région de Thèbes.
En 170 AJC, ANTIOCHOS IV, roi de Syrie, ayant
envahi le Delta jusqu’à Alexandrie, PTOLÉMÉE VI se réfugia à Rome. Entre temps, les Syriens s'étant retirés d’Égypte en 164 AJC, il rentra à Alexandrie et, en 148
AJC, engagea une expédition en Syrie. Alors que son armée allait être
victorieuse, il mourut au cours d’une bataille (145 AJC).
PTOLÉMÉE VII, à peine monté sur le trône, fut assassiné par son oncle PTOLÉMÉE VIII (143-116 AJC), lequel, à la suite d’intrigues de cour et de la révolte du peuple, dut se réfugier à
Chypre (136 AJC).
En 129 AJC, il parvint à reconquérir Alexandrie et une partie de
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l’Égypte. En 118 AJC, il rétablit la paix dans un pays éprouvé par des années
de guerres civiles.
Pour sa seconde épouse CLEOPATRE III, il fit construire, dans l’île de
Philay, un temple dédié à APHRODITE.
Selon l’historien grec DIODORE, depuis 145 AJC, les reines auraient eu plus de pouvoir et étaient plus respectées que les Rois
Du fait que les fils devaient hériter de leur père mais que certains furent écartés par intrigue ou assassinat, ils n’en devaient pas moins être
intégrés dans le culte dynamique, aussi ne connaît-on pas le numéro d’ordre exacte de ceux qui exercèrent réellement le pouvoir.
PTOLÉMÉE X, endetté auprès des Romains, leur légua par testament
l’Égypte. A sa mort, du fait de cet engagement, son fils PTOLÉMÉE XI (80-
51 AJC) fut proclamé “Roi ami et obligé de la ville de Rome”. Alexandrie prit cette proclamation comme un affront et chassa son Roi, mais Rome le replaça dans ses droits qu’il conserva jusqu’à sa mort (51
AJC). Cela constitua le début du protectorat effectif de Rome sur le royaume ptolémaïque dont la situation économique était catastrophique, comme le moral de la population perpétuellement en révolte contre les gouverneurs et fonctionnaires locaux.
Avant de mourir, PTOLÉMÉE XI légua l’Égypte à l’aîné de ses fils âgé de 10 ans, PTOLÉMÉE XII (51-47 AJC) et à sa fille âgée de 17 ans, CLEOPATRE VII. Le frère et la sœur s’épousèrent.
Dans le pays, les difficultés étaient
innombrables : crues insuffisantes, disette, révoltes incessantes des populations, mauvais fonctionnement de l’administration... CLEOPATRE Du fait que les fils devaient hériter de leur père mais que certains furent écartés par intrigue ou assassinat, ils n’en devaient pas moins être intégrés dans le culte dynastique, aussi ne connaît-on pas le numéro d’ordre exact de ceux qui exercèrent réellement le pouvoir.
PTOLÉMÉE VII, reine intelligente, d’une grande érudition, parlant égyptien,
habile stratège, s’allia à Rome sans aliéner son royaume dont elle rêvait de ressusciter la grandeur.
En 48 AJC, le général romain POMPÉE, vaincu par Jules CESAR, se réfugia en Égypte où, sur ordre du jeune Pharaon, il fut assassiné.
Jules CESAR, venu rétablir le calme en Égypte, s’éprit de la Reine. Après avoir disposé des garnisons aux points stratégiques. Il invita CLEOPATRE à Rome. De leur union naquit un fils, CESARION. Après la mort de CESAR (44 AJC), la Reine d’Égypte rentra à
Alexandrie avec son
112
fils.
En 41 AJC, ANTOINE, qui aimait la Reine, envisagea avec elle de
restaurer le prestige de l’Égypte. En 37 AJC, ayant coupé tout lien avec Rome, il resta près de CLEOPATRE dont il eut deux enfants et reconnut CESARION comme son héritier. Après son échec contre les Parthes (34
AJC), ANTOINE, de retour à Alexandrie, fit proclamer CESARION Roi des
Rois sous le titre de PTOLÉMÉE XV et CLEOPATRE, Reine des Rois
.
OCTAVE, irrité comme tous les Romains par l’attitude
d’ANTOINE,
fit déclarer par le sénat la guerre à CLEOPATRE (32 AJC). En septembre 31
AJC, ANTOINE ayant perdu la bataille d'Actium, rentra en Égypte et s’y
suicida. La Reine lui fit de somptueuses funérailles et se donna la mort (30
AJC).
L’Égypte devint une province de l’empire romain. Ainsi se termina l'Histoire de ce pays qui, depuis l’émergence de l’humanité, évolua en un seul lieu, la Vallée du Nil, et selon un constant idéal, la théocratie.
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TRAVAUX INTELLECTUELS
L’ÉCRITURE ÉGYPTIENNE
Son évolution fut corrélative au développement intellectuel des habitants de la Vallée du Nil.
Aux environs de 3.300 AJC, l'écriture hiéroglyphique était uniquement pictographique ; chacun des signes représentait l'objet qu'il signifiait (arc, oie, sandale, ...) ou son symbole : par exemple, le disque solaire servait à écrire le mot "jour".
Sur la palette en schiste du Roi NARMER, datée d'environ 3.000 ans, on remarque (page 59) une
inscription explicative sous forme d'idéogramme
: une tête d'homme barbue (ennemi) fait suite à un ovale surmonté de six fleurs de lotus (6.000). De la bouche de l'homme sort un lien qu'un faucon (HORUS) tient dans l'une de ses serres, ce que l'on peut traduire par :
Horus, dieu protecteur du Roi, lui amène liés six mille prisonniers. Autrement dit, le Roi est redevable à HORUS de sa victoire sur ses ennemis.
Les hiéroglyphes n'étant pas aptes à exprimer tous les concepts du langage, les Égyptiens, dès l'Ancien Empire (2.900 AJC), mirent au point une technique additionnelle consistant à ne prendre en compte, dans certains dessins, que les consonnes du mot représenté. Par exemple, d'un "visage" qui se disait hor, ils ne retenaient que les deux consonnes (h + r), de sorte qu'en négligeant les voyelles, le même dessin leur servit à écrire hir (sur), har (se
préparer). De la même façon, les hiéroglyphes de la "bouche" (ro), du "pain" (ta), leur servirent de référence pour les consonnes (r) et (t).
Les scribes sélectionnèrent quelque vingt-quatre signes consonantiques qui leur permirent d'écrire des mots pour lesquels il leur aurait été difficile de trouver une image adéquate.
Mais ces signes consonantiques au milieu de multiples hiéroglyphes ne permettaient pas une lecture facile ;
progressivement, pour informer que tel dessin était un signe phonétique, il fut suivi d'un déterminant qui précisait, en plus, la catégorie d'idée à laquelle il appartenait.
L'écriture hiéroglyphique, avec ses quelque cinq cents signes usuels disposés sans intervalle de droite à gauche ou de haut en bas, bien que complexe, était l'une des plus claires et des mieux conçues du Proche-Orient et présentait de surcroît un élément décoratif largement exploité dans
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l'architecture égyptienne.
L'écriture hiéroglyphique fut utilisée pendant toute la durée de l'histoire égyptienne. Cependant, vers 2.000 ans AJC (Moyen Empire), les scribes inventèrent, pour leurs besoins journaliers, l'écriture hiératique ou cursive (document n° 12 A), forme simplifiée des hiéroglyphes. Aux environs du IXème siècle AJC, l'écriture hiératique progressivement se simplifia davantage pour prendre, vers le Vllème siècle AJC, la forme
dite démotique (document n° 12 B).
Sous toutes ses formes, l'écriture égyptienne se lit indifféremment en ligne, de gauche à droite ou de droite à gauche, en colonne de haut en bas.
Ceux qui voient dans les différents signes consonantiques utilisés par les Égyptiens une sorte d'alphabet se trompent car ces signes étaient eux-mêmes des hiéroglyphes. Pour le scribe, l'écriture ne se sépara
jamais de l'image même dans sa forme "hiératique". Il y avait un lien indissociable entre l'écriture et l'objet écrit.
Par ailleurs, les Égyptiens attribuèrent aux représentations graphiques une force d'action sur le monde. Écrire le nom d'une personne revenait à agir sur celle-ci.
Remarque grammaticale
De 3.000 ans AJC jusque vers 1650 ans AJC, la langue parlée et écrite ne comportait ni article, ni système verbal. Les verbes se confondaient avec
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les noms. Ce n'est que vers 1.500 ans AJC que furent progressivement utilisés les articles (définis et indéfinis) et les formes verbales (passé, présent, futur).
Les rouleaux de feuilles de papyrus furent utilisés jusqu'au Vllème siècle de notre ère, bien que l'usage des rouleaux de parchemin ou de cuivre remonte à deux ou trois siècles AJC. Les Romains utilisèrent aussi des tablettes de bois reliées entre elles ou des feuilles de parchemin assemblées en cahiers (codex) ou en
rouleaux (rotulus).
Le parchemin était une peau (mouton, agneau, chèvre...) tannée et lissée du côté du poil avec une pierre.
Conjointement à l’écriture, les Égyptiens conçurent une arithmétique élémentaire rendant possible l'arpentage des terres, l'évaluation des récoltes, le calcul des besoins alimentaires des populations. Ils observèrent le ciel et déterminèrent le mouvement de certains astres. Ils étudièrent l'anatomie et apprirent à traiter les maladies et l'accident.
ARITHMETIQUE.
La numération égyptienne comportait des symboles : Pour écrire un nombre, le scribe répétait plusieurs fois le signe correspondant
pou radditionner deux nombres, il comptait les signes de même espèces . S’il
en trouvait plus de dix il ajoutait un simbole de la valeur superrieur.
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117
L’étalon dessurfaces était, l’ariouro = carré d’une coudée de côté soit environ
0,275 m²
Les Egyptiens se servaient de nombreuses tables de multiplication, de
puissance, d’inverse, de résultats géométriques.
Mesure du temps
Dès 4.000 ans AJC, les Égyptiens élaborèrent un calendrier de 365 jours comportant douze mois de trente jours plus cinq jours épagomènes en fin d'année. Malheureusement, ce calendrier était trop court. Il aurait fallu lui ajouter un jour tous les quatre ans (année bissextile) de sorte que le jour du nouvel an se décalait d'un mois tous les 120 ans. Cela ne gêna pas les
paysans qui conservèrent l'année de trois saisons : inondation, émergence et
moissons (voir page 54) commençant le jour précis où l'étoile du Chien
(Sothis) apparaît de nouveau à l'horizon dans le crépuscule du matin.
En réalité, le calendrier de 365 jours n'était guère utilisé car, lors de son intronisation par le Grand Prêtre, le Roi était censé renouveler l'acte créateur du dieu et, de ce fait, inaugurait une nouvelle ère qui s'interrompait avec son décès. Au cours d'un règne, les événements étaient datés par rapport au premier jour de l'année d'accession au trône du Roi en place. La liste de tous ses
prédécesseurs permettait d'établir la chronologie d'un événement sur plusieurs générations. Ce mode de datation se perpétua chez les Perses, les Palestiniens, les Grecs, les Romains... et en Europe au-delà du Moyen-Age.
Pour mesurer le temps, les Égyptiens, sur le modèle des douze mois
de l'année, divisèrent le jour et la nuit en douze parties égales, mais variables selon les saisons. Pour ce faire, ils inventèrent l'horloge à eau (clepsydre),
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sorte de bol en pierre au fond percé d'un trou par lequel s'écoulait l'eau selon un débit constant. Le flanc du bol était gradué de façon à pouvoir lire l'heure aux différentes saisons. Pour mesurer les heures diurnes, ils se servaient de cadrans solaires.
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LES DIEUX ÉGYPTIENS
Vers 3000 AJC, même précédemment, les Égyptiens, principalement des classes dirigeantes : le roi, sa cour, ses dignitaires et son clergé, se posèrent deux questions : Quelle était l’origine du monde ? Quel sort attendait l’homme après la mort ?
COSMOLOGIE
Il y eut diverses versions de la création du monde ; plusieurs vous ont été révélées au cours du récit de l'Histoire de l'Égypte (pages 63, 80 et 92). Voici le résumé des divers autres textes :
1ère version : En crachant, ATOUM tira de sa propre substance le couple divin : SHOU (l'Atmosphère) et TEFNOUT (l'Humidité) qui enfanta GEB (la Terre) NOUT (le ciel) qui, à leur tour, mirent au monde deux autres couples : OSIRIS-ISIS et SETH-NEPHTYS.
L'Égypte aurait été divisée en deux royaumes : l'un au Sud, gouverné par SETH, l'autre au Nord, par OSIRIS. Dans un premier temps, les luttes entre royaumes se soldèrent par la victoire de SETH. Mais OSIRIS, aidé de son fils HORUS, aurait reconquis son royaume et envahi celui du Sud. SETH fut rejeté hors des frontières du pays et devint le dieu des déserts et des pays étrangers. HORUS fut l'ancêtre de tous les pharaons.
2ème version : Il y eut le chaos d'un océan liquide primitif, NOUN, duquel sortit, par sa propre volonté, le dieu solaire RÉ posé sur la colline primitive (Héliopolis) d'où il s'éleva jusqu'au sommet de la pierre Benben en forme d'obélisque. Le dieu solaire RÉ régna dorénavant en qualité de roi sur les hommes et les dieux. Nul ne porta atteinte à sa domination, tant qu'il se maintint en pleine possession de ses forces. Mais il ne resta pas toujours jeune. Lorsqu'il eut vieilli, ses sujets devinrent indociles, et spécialement l'habile déesse ISIS...
Les théologiens de divers autres temples (Hermopolis, Thèbes...) prétendirent que leur ville était le site de la colline primitive d'où s'était élevé leur propre dieu solaire créateur du monde.
Le clergé de Memphis affirma que le dieu PTAH, antérieurement à tous les autres, par le cœur (l'esprit) et la langue (la parole), créa toute chose sur Terre et donna la vie à tous les dieux et que lui-même se serait manifesté sous l'apparence d'ATO
120
Les Égyptiens des classes modestes et paysannes, quel que fut le récit relatif au dieu officiel de leur nome, croyaient tout simplement que le monde avait surgi du chaos des eaux primitives comme les points hauts de la vallée émergeaient tous les ans lors de la décrue du Nil. Quant au cycle solaire, ils imaginaient que la déesse Ciel (NOUT), le soir, avalait l'astre brillant qui voyageait dans son corps constellé et le rendait le matin
.
De toute façon, pour les Égyptiens, la
diversité des dieux était logique car ils étaient la vie et, comme celle-ci, multiforme, ils en rassemblaient les divers aspects conformément aux croyances ancestrales selon lesquelles un "Maître suprême" cumulait en lui toutes les "forces vivantes" de la nature. Par ailleurs, quel que fut le démiurge, celui-ci, pour les Égyptiens, fit sortir l'univers du chaos initial et lui donna une structure parfaite qui pouvait être
remise en cause si les hommes
ne respectaient pas la morale de MAÂT, déesse de la Justice, de l'Ordre et de la Vérité, toutes qualités infuses dans l'univers par dieu, à l'heure de la création.
La crainte des Égyptiens était le retour au chaos mais ils se rassuraient en pensant que Pharaon, fils de dieu et garant de MAÂT, était souverain de droit divin, maître des Deux Terres, prêtre unique et responsable de l'ordre. Sur les conseils du dieu son père, il gérait l'économie du pays en
concentrant puis distribuant, selon MAÂT, les produits de la terre afin d'éviter le pire de tous les malheurs, la famine, prélude du retour au chaos primordial.
Le peuple témoigna à toutes les époques un attachement fidèle à sa divinité familiale. Les petites gens ne priaient pas le dieu du temple. C’était l’affaire des prêtres. L’homme ordinaire préférait se concilier la bienveillance d’une divinité secondaire qui pouvait l’assister dans ses diverses occupations journalières ou lui
procurer une faveur, comme la guérison en cas de maladie.
De haut en bas de l'échelle sociale, tout Égyptien avait une mission sur terre et devait l’accomplir selon l'ordre cosmique établi par la déesse de la Justice, MAÂT. Pour l'y aider, il implorait son dieu. Mais si, malgré tout, il se rendait fautif tant envers MAÂT qu'envers les hommes, il devait en répondre à la justice de Pharaon et, plus tard, après sa mort, au tribunal d'OSIRIS qui pouvait le condamner à
être avalé par la "grande dévoreuse" et ainsi être privé de la vie éternelle.
Œuvrant pour MAÂT et selon MAÂT, le peuple égyptien enferma son histoire dans la conviction de sa responsabilité commune imposée par la crainte d’une rupture d'équilibre entraînant la catastrophe cosmique, de là son souci de se créer dans les temples un ciel sur terre, un lieu reproduisant à l’échelle humaine le point cosmique où, la première fois, l’énergie s’était
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manifestée en VIE. De ce fait, “les prêtres délégués de Pharaon avaient
conscience de représenter un peuple privilégié des dieux".
Pour les Égyptiens, les ennemis politiques, religieux ou personnels ne faisaient qu’un. En suscitant des troubles, ceux-ci perturbaient le monde tel qu’il avait été créé, favorisaient le mal aux dépens du bien lié à la notion de l’ordre, de justice et de vérité. Pour rétablir l’équilibre, il fallait faire appel aux rites religieux car seuls les dieux pouvaient agir contre les forces du mal. Aussi les prêtres délégués de Pharaon prodiguaient au dieu de leur temple tous les soins nécessaires pour qu’il maintienne l’ordre cosmique.
LE TEMPLE
L’endroit où les Égyptiens élevèrent un temple fut, le plus souvent, “Terre divine”, c’est-à-dire un lieu sur lequel un sanctuaire, un bâtiment primitif, une petite hutte en bois ou de clayonnage entouré d’un palis avaient existé avant d’être remplacés par une construction en briques crues, plus grande. Puis celle-ci, au cours des siècles, fut agrandie et restaurée. Les sanctuaires de l’Ancien Empire déjà importants, furent remplacés au Nouvel Empire par de grandioses édifices en pierre.
Ces
derniers monuments comportaient un quai sur le Nil d’où partait une allée conduisant à un pylône (sorte de portail monumental aux allures de bastion) aménagé dans l’enceinte de briques crues, entourant le te mple et ses annexes. Le pylône franchi, une cour, seule partie accessible au peuple, précédait une salle à colonnes (péristyle) qui s’ouvrait sur le saint des saints renfermant la statue du dieu, son trésor et sa barque. En plus du temple, l’enceinte contenait de nombreuses constructions
: logements des prêtres, bibliothèque, école et “maison de vie" où les scribes composaient ou recopiaient les textes religieux, magasins, entrepôts et ateliers ainsi qu’un lac sacré où les prêtres se purifiaient.
La vie matérielle du temple était assurée par les produits du domaine du dieu et les dotations de Pharaon. Par exemple, AMON, dieu de Thèbes, disposait de terres dans la région, dans d’autres nomes et au Proche-Orient, et de mines d’or en Nubie. Il possédait sa flotte et
ses rameurs, sa police, ses scribes, ses artisans spécialisés.
Le Grand Prêtre gestionnaire, autonome des biens du temple mais délégué de Pharaon pour célébrer le culte, disposait d’un important clergé composé de deux sortes de prêtres : ceux qui assuraient en permanence le service du dieu dans le saint des saints, et ceux d’un rang inférieur qui
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accomplissaient des tâches hors du lieu sacré. Ces derniers étaient divisés en quatre groupes présents à tour de rôle pendant un mois, de sorte que chaque prêtre subalterne n’était en fonction que trois mois par an et, entre temps, pouvait vaquer à des occupations civiles diverses.
Tous les prêtres devaient assurer la pureté de leur corps par deux ablutions le jour et deux autres la nuit. Ils devaient être circoncis et constamment entièrement rasés. Pendant leur période de service, les
relations sexuelles leur étaient interdites et ils étaient astreints à un régime alimentaire conforme au règlement religieux propre au dieu dont ils étaient les serviteurs.
Le temple était à l’image du monde ; le dieu qui l’habitait était le démiurge (le créateur) dont le culte journalier renouvelait l’acte primordial. A l’aube, les prêtres se proclamant envoyés de Pharaon ouvraient le temple, puis le tabernacle dans lequel se trouvait la statue du dieu, celle-ci était lavée, vêtue et
parfumée. Devant elle, les prêtres disposaient de la nourriture et des offrandes. Le rituel s’accompagnait de chants et de récitatifs. A midi, la statue était encensée. Le soir, au coucher du soleil, les prêtres renouvelaient les cérémonies du matin et replaçaient le dieu dans son tabernacle.
Le rituel avait pour but de maintenir le dieu en bonne santé afin de permettre à Pharaon, son représentant, d’accomplir sa mission sur terre, c’est- à-dire maintenir l’ordre universel conformément à
MAÂT, déesse de la vérité et de la justice
.
Les jours de grandes fêtes, comme l’anniversaire du couronnement du roi, la statue divine, placée sur une barque, portée par des prêtres, était présentée à la foule rassemblée dans la cour du temple, chacun pouvant poser des questions au dieu ou lui demander une faveur, sa réponse lui était donnée par la voix d’un prêtre.
Le culte, partout et en toutes circonstances, même hors de la présence de Pharaon, était célébré en son nom, ce qui
explique que la vacance du pouvoir au cours d’un interrègne était ressentie comme un risque de déséquilibre cosmique pouvant modifier la course du soleil ou la crue du Nil. Le couronnement d’un nouveau roi, même étranger replaçait le monde dans l’ordre de MAÂT.
Lors du sacre d’un Pharaon, le grand prêtre jouant le rôle du dieu créateur qui avait remis son pouvoir divin au premier HORUS (roi) transmettait au nouveau souverain les couronnes de la Haute et de la Basse- Égypte. Trente ans
après ce sacre, souvent moins, la fête du jubilé “Secf" était célébrée pour revivifier les forces de Pharaon qui s’étaient affaiblies au cours du règne. Cette célébration était renouvelée, par la suite, à intervalles plus courts. RAMSES II, par exemple, en soixante-dix-huit ans de règne, célébra
123
au moins treize jubilés.
Les plus grands sanctuaires égyptiens furent ceux d’Abydos où régna OSIRIS, Héliopolis domaine de RÉ, Hermopolis pour THOT ; Karnak pour AMON et Memphis pour PTAH. D’autres temples honoraient des divinités de moindre rang : à Denderah, HATHOR ; à Edfou, HORUS ; à El-Kab, NEKHBET ; à Esneh, KHNOUM ; à Philae, ISIS ; à Sais, NEITH...
Le peuple avait exceptionnellement accès aux grands dieux lors des fêtes, des jubilés ou des pèlerinages. Aussi eut-il recours à
des divinités locales ou familiales sous forme de statuettes dont certaines avaient le pouvoir de guérir. L’eau que l’on versait dessus s’imprégnait d’une force magique ; on la récoltait et, la buvant, on se protégeait des maladies, des piqûres du scorpion, des morsures du serpent...
Parmi les divinités populaires, on peut citer : SEKHMET, qui provoquait et guérissait les épidémies ; BÈS, qui écartait les mauvais esprits ; THOUERIS, déesse protectrice du peuple...
LA VIE APRÈS LA MORT
Vers les années 5000 AJC, les Égyptiens croyaient en la continuité entre le monde des vivants et celui, souterrain, d’outre-tombe. Au cours de la période prédynastique, les rois bénéficièrent de l’immortalité. Après la mort, leur Bâ (âme) rejoignait la vie glorieuse près du “dieu suprême”, les croyances se perpétuèrent jusqu’à la cinquième dynastie au cours de laquelle les théologiens, à partir du récit d’OSIRIS, tué par son frère SETH (page 188) et ressuscité par ISIS, révélèrent que
tout homme “bon”, après sa mort, accédait à la vie éternelle. Au début du Nouvel Empire (1500 AJC), les théologiens, par une ingénieuse synthèse des croyances, affirmèrent que tout humain qui avait vécu selon MAÂT, après sa mort, demeurait dans sa tombe durant le jour alors que son Bâ (âme-oiseau) pouvait visiter les vivants. Au crépuscule, il montait sur la “barque solaire” pour accompagner l’astre du jour dans son voyage souterrain. A l'aube, il regagnait sa tombe pour se
nourrir et se reposer.
Les prêtres égyptiens expliquaient ce mystère en précisant que le corps humain (Djef) était associé à plusieurs principes spirituels :
- Le Akh, représenté par un ibis, après la mort, devenait l’esprit, au sens de fantôme. A l’origine, seul le roi et les dieux le possédaient mais les prêtres d’OSIRIS l’attribuèrent au commun des mortels.
- Le Bâ, sorte d’âme représentée par un oiseau reprenant sa liberté après
la mort et pouvant retourner sur les lieux où le défunt avait vécu. C’était le plus
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indépendant des principes spirituels par rapport au support matériel qu’était le corps. Il concernait tant les dieux que Pharaon et les humains, comme le précisent différents textes :
-
L’Un unique (Démiurge), qui créa tout ce qui est, le Ba sublime des dieux et
des hommes.
- Le Ka, force de vie, résidait dans l’homme, auquel il conférait par sa présence, protection, durée, bonheur, santé et joie. Il n’était pas possible aux Égyptiens de se représenter un dieu ou un homme sans son Ka qui grandissait avec lui et ne le quittait jamais. Après la mort, il restait à proximité du cadavre. C’était au Ka du défunt qu’étaient
apportées les offrandes alimentaires. Mais, en plus de la nourriture, pour continuer à vivre dans le monde souterrain, pour se perpétuer, le Ka avait besoin d’un support : le cadavre momifié, la statue ou l’image peinte du mort, ou plus simplement l'inscription de son nom. En effet, dans la tradition égyptienne, il suffisait de prononcer le nom d’un mort, mieux encore, de l’écrire pour perpétuer l’existence de son Ka.
- Depuis les temps les plus reculés, on plaçait le nouveau-né sous la protection particulière d’une divinité ou du roi régnant lui-même fils de dieu. Ce lien s’exprimait directement (fils de MOUTH) ou indirectement en proclamant la louange du dieu ou du roi (Haremked = Horus est en fête), (Ptathour = Plath est grand). De cette façon, les Égyptiens, en prononçant le nom de leurs proches, honoraient le dieu qu’ils vénéraient. Cette pratique fut celle des Hébreux puis des Juifs (Emmanuel = Dieu est avec nous), (Maskal-el = semblable à Dieu) et se perpétua chez les chrétiens qui se placèrent sous le patronage d’un saint.
Les prêtres firent d’OSIRIS le dieu des morts et leur juge. Des textes
du Nouvel Empire (après 1550 AJC) précisent :
Après la période intermédiaire (limbe) au cours de laquelle les rites sacrés préparaient son cadavre, le mort se présentait devant le tribunal d’OSIRIS pour sa « confession négative » durant laquelle il devait énumérer tous les péchés qu’il n’avait pas commis. Puis venait l’heure décisive du jugement divin. Son cœur (sa conscience) était placé sur l ’un
des plateaux d’une balance et sur l’autre se trouvait MAÂT, la déesse symbole de l’ordre, de la vérité, de la rectitude et de la justice. Les deux plateaux devaient s’équilibrer. Le dieu THOT contrôlait la pesée. Près de la balance, se tenait AMMIT, la “grande dévorante”, monstre prêt à mettre en pièces le cœur du défunt si le fléau penchait en faveur de MAÂT, preuve qu'il avait menti. Dans le cas inverse, plus rien ne séparait le mort des innombrables félicités auxquelles il
avait espéré tout au long de sa vie.
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Pour être admis dans le royaume des morts, il convenait de pratiquer bonté et justice durant la vie terrestre. On a trouvé des textes précisant :
J’ai donné du pain à celui qui avait faim, de l’eau à celui qui avait soif, un vêtement à celui qui était nu ; j’ai protégé le faible de l’emprise du puissant,
...je n’ai pas fait le mal.
Il ne suffisait pas au défunt de mériter la vie éternelle, d’avoir son nom peint sur son sarcophage, il fallait aussi que le principe immatériel
de son Kâ ait un support permanent. De ce fait, il était nécessaire d’assurer au cadavre son état matériel. Ce souci donna naissance à la momification. Réservée d’abord à Pharaon et à ses proches, cette pratique s’étendit progressivement à toute la population à partir de la Vème Dynastie. Cette opération préliminaire au jugement était assurée par des prêtres qui redonnaient au corps, dépouillé des organes susceptibles de le corrompre, les formes de la vie1 puis
l’enveloppaient dans des bandelettes de lin imprégné de gomme. Pour finir, ils enroulaient le cadavre dans plusieurs linceuls. Au cours de ces opérations, la protection du corps était aussi assurée par la récitation de formules magiques.
Pour terminer, les prêtres posaient un masque à l’image du défunt à l’endroit de son visage et plaçaient la momie dans un sarcophage de forme rectangulaire, sans oublier d’y joindre un papyrus, le "Livre pour sortir le jour” dont les textes
étaient en effet des formules magiques permettant au mort, non seulement d’écarter les dangers qui le menaceraient dans l’Au-delà, mais aussi de retourner sur terre et de continuer à jouir de ses plaisirs. Car si son corps gisait, son Kâ pouvait se mouvoir, se joindre aux vivants, veiller sur sa famille. En revanche, les dangers qui guettaient l’homme sur terre le menaçaient toujours ; aussi, à chaque instant, le défunt avait besoin des formules du papyrus magique pour échapper
à ses ennemis et des incantations qu’il contenait pour obtenir la protection des divinités bienfaisantes.
Celui qui aura appris ce “livre” sortira le jour, ira sur terre parmi les vivants et son nom ne périra jamais. Ses organes étaient réservés dans des vases, canope
Apparus vers 1500 AJC, ces papyrus pour les morts furent d’abord réservés à Pharaon, à ses proches et aux dignitaires du royaume. Puis, ils se démocratisèrent et furent recopiés en série par des scribes pour être vendus au commun des mortels.
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Le défunt ainsi préparé était remis à la famille éplorée qui, en cortège, emportait le sarcophage jusqu’au tombeau, accompagnée de pleureuses patentées et de prêtres encerclant le cercueil et récitant des formules liturgiques.
Les riches étaient emmenés dans une nécropole du désert où ils avaient, de leur vivant, préparé leur tombe. Pour rejoindre ce lieu, le cortège funèbre devait, généralement, entreprendre sur des barques richement décorées, un trajet sur le Nil puis traverser
les sables. La procession trouvait son terme à la porte du tombeau. Au retour, les assistants étaient conviés à un banquet présidé par l'effigie du défunt. Par la suite, la famille du mort ou le clergé d’un temple doté à cet effet apportait régulièrement, durant un certain temps, dans la tombe, l’alimentation nécessaire à la survie du défunt.
Les petites gens, après leur mort, ne pouvaient espérer guère plus qu’un suaire d’étoffe comme cercueil, le repos dans un trou recouvert de
sable et quelques nourritures avec divers ustensiles usuels comme viatiques pour l’Au- delà.
LITTÉRATURE ÉGYPTIENNE
A titre d’exemple, voici quelques textes significatifs parmi ceux qui sont généralement cités comme ayant influencé la littérature hébraïque. Beaucoup sont extraits de “
HYMNES RELIGIEUX
1 AATON (vers 1330 AJC)
Les arbres et les plantes verdoient. Les oiseaux s’envolent. Les chevreaux
bondissent. Tout vit quand tu brilles sur eux
2- Salut à toi, dieu unique, qui t’es fait en Millions. Ta longueur, ta largeur sont sans limite.
Combien tes œuvres sont multiples. Elles échappent à l’Homme. O dieu
unique, à qui nul autre ne se peut comparer !
3 Selon ton vouloir, tu as créé la terre, les bêtes sauvages et domestiques, les hommes, tout ce qui marche sur le
sol, tout ce qui vole dans les airs...
4 Toi, ATON, tu as soulevé le ciel pour t’y lever, pour voir tout ce que tu avais créé, tu es l’Univers et des millions de vies sont en toi.
5 Tu n’es pas caché, tu es visible et unique puisqu’il n’y a qu’un soleil. Par
ailleurs, toutes vies humaines et divines dépendent de toi...
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6 Tu te lèves beau dans l’horizon. O vivant ATON, qui vis depuis l’origine.
Quand tu resplendis dans l’horizon de l’est, tu remplis chaque pays de ta beauté... Combien multiples sont tes œuvres, mystérieuses à nos yeux !...
Seul dieu, toi qui n’as pas de semblable, tu as créé la terre selon ton cœur...
7. Quand tu te couches à l’horizon occidental, la terre est dans les ténèbres...
Les lions sortent de leur antre... Puis la terre s'éclaire quand tu t’es levé à l’horizon...
Les hommes s’éveillent et se dressent sur leurs pieds... Puis la terre entière vaque à ses travaux.
Remarques : Parmi les 130 Psaumes du “Livre Saint”, de la Torah des Juifs, attribués au roi DAVID, beaucoup sont inspirés de ces hymnes religieux à ATON. Par exemple, le texte ci-dessous est quasiment identique au Psaume CIV-20 qui proclame :
Quand tu fais naître les ténèbres et que vient la nuit, alors se mettent en mouvement toutes les bêtes de la forêt. Les lionceaux
rugissent après la proie
. . . Le Soleil se lève... l’homme sort pour sa tâche et pour son travail jusqu’au
soir.
Et cet autre Psaume CIV-24
Qu’elles sont nombreuses les choses que tu as créées ô dieu unique qui n’a point son pareil
A AMON (Vers 1250 AJC
8 Amon, toi qui délies les maux, qui chasses les maladies, médecin qui
guérit l’œil sans en appeler aux remèdes. Toi qui ouvres les yeux, qui chasses la cécité
9 Toi qui écoutes les supplications de celui qui t’appelle, qui viens de loin
pour celui qui crie vers toi...
10 Unique pourtant est AMON qui se cache... sans que l'on connaisse son aspect... Aucune vie ne connaît sa véritable nature. Son image n’est pas étalée... Il est trop mystérieux pour que soit découverte sa
majesté. On tomberait à l’instant mort d’effroi si l’on prononçait son nom secret...
Texte des Pyramides (vers 2430-2260 AJC)
11 De l’océan primordial (le NOUN), jaillit une butte sur laquelle RE- ATOUM, prenant la forme de l’oiseau-phénix, se posa alors que le ciel n’était pas encore devenu, que la terre n’était pas encore devenue... avant que la mort ne soit advenue, avant que ne soit advenue la Querelle... la voix, la colère et la médisance...
12 Salut à toi, dieu grand ! Voici que je suis venu auprès de toi ! Je t’ai apporté
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ce qui est juste et j’ai chassé ce qui est mal ! Je n’ai pas fait le mal contre les hommes. Je n’ai pas commis de faute dans la Place de Vérité. Je n’ai pas appris ce qui ne doit pas l’être. Je n’ai pas appauvri le pauvre de ses biens. Je n’ai pas fait ce que détestent les dieux. Je n’ai pas accompli de massacre. Je n’ai pas ordonné de tuer. Je n’ai pas détruit les pains d’offrandes des dieux. Je n’ai pas faussé la balance...
Réflexions sur la mort (vers 1650 AJC)
13 Chant d’Antef : Aucun ne revient de là-bas, qui nous dise quel fut leur sort, qui nous conte ce dont il eut besoin... Que ton cœur donc s’apaise... Suis ton désir et ta facilité, remplis ton destin sur Terre.
14 Dialogue d’un désespéré avec son âme ; La mort est aujourd’hui devant moi, comme un chemin après la pluie... Comme une éclaircie dans un ciel de nuages, comme le désir d’une chose inconnue, comme le parfum de la myrthe
, comme on se tient sous le voile par
grand vent. En vérité celui qui es là-bas C’est un dieu vivant qui punit le péché. (Textes relevés dans la revue Le Monde de la Bible, n° 102,)
ÉDUCATION
Instruction à MERIKARE (2100AJC)
15 Tout homme survit à la mort et ses actes s’amoncellent à son côté car l’existence dans l’au-delà dure toute l’éternité... qui l’aborde sans avoir fait le mal sera pour toujours pareil aux dieux.
Sagesse de PTAHOTEP (vers 2400 AJC)
16. Ne donne pas d’importance aux richesses qui te sont venues comme un don du dieu.
17. Que l’amour que tu ressens passe dans le cœur de ceux qui t’aiment,
fais que les gens soient aimants et obéissants.
18. Ce ne sont pas les desseins des hommes qui se réalisent, mais bien le désir du dieu.
Du roi KHETI à son fils MERIKARE (2100 AJC)
19. Fais le bien tant que tu es sur terre. Soulage l’affligé, n’opprime pas la veuve. N’expulse personne du domaine de son père... Alors, cette Terre sera bien établie. Laisse la vengeance à Dieu.
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20. Le roi a été créé par la divinité comme un soutien pour l’échine des
faibles.
21. Plus précieuse au dieu est la vertu du juste que le bœuf du méchant.
22. Fais-toi un monument durable par l’amour qu’on te porte... Comme la
bière, la sagesse se prépare longuement.
23. Imite ton père et les ancêtres. Ne distingue pas le riche du pauvre.
LA sagesse d’AMENEMOE 5vrs 1200AJC
24. Tends l’oreille, écoute les paroles qui sont dites... Mets tout ton cœur à les comprendre, car c’est une chose profitable de les mettre dans ton cœur... Laisse les reposer dans le tréfonds de toi... elles serviront de garde-fou à tes pensées.
Les Sagesses d’AMENEMOPE étaient connues de tous les peuples de l’antiquité, de sorte que le texte ci-dessus se retrouve quasiment à l’identique dans le livre biblique des Proverbes XXII.17-18.
Prête l'oreille et écoute les paroles des sages ; applique ton cœur à mon enseignement. Car c'est (une chose) agréable, si tu les gardes en ton cœur ; puissent-elles, en temps voulu, se trouver prêtes sur tes lèvres !
POÉSIES
Chants d’amour (vers 1350 AJC)
25. Depuis sept jours pleins, ma sœur (ma bien-aimée) est restée cachée à mes yeux et une grande langueur m’a envahi. Mon corps s’est fait très lourd, oublieux de moi-même. Le chef des médecins a beau venir me voir. Mon cœur ne peut se satisfaire de ses remèdes ; nulle prière ne m’apportera de répits. Mon mal est indécelable.
26. S’en aller aux champs est délicieux pour celui qui est aimé... De ton amour
qui me retient, je ne puis me délivrer.
Chant du harpiste
Voici une seule ligne de ce long texte qui se trouve dans le temple funéraire du roi ANTEF (2085-2059 AJC) :
27. Suis ton cœur et du plaisir que tu souhaites. Fais un jour heureux.
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CONTES ET RECITS (vers 2500 AJC
28. Le roi KHEOPS qui s’ennuie écoute chacun de ses trois fils lui dire des histoires de magicien. L’un raconte : « Un héros fend en deux les éléments liquides d’une rivière pour la traverser à pied sec ».
Une autre fois, pour retrouver un bijou tombé dans les eaux d’un lac profond de douze coudées : « Un magicien prononça quelques paroles, puis posa une moitié de l’eau du lac sur l’autre moitié et retrouva la pendeloque, alla la chercher, la rendit à sa propriétaire, puis prononça quelques paroles et ramena les eaux du lac en leur état ».
29. Légende d’OSIRIS : SETH, le frère cadet d’OSIRIS, invite ce dernier à un banquet au cours duquel il réussit, par ruse, à enfermer OSIRIS dans un coffre qu’il fit jeter au fleuve. ISIS part aussitôt à la recherche de son mari. Elle retrouve le cadavre sur la côte où un sapin, en poussant autour du coffre, l’avait protégé. ISIS prend le cadavre d’OSIRIS et, grâce à sa magie, réussit à ranimer un moment le corps de son mari. De cette union posthume naîtra HORUS. ISIS se réfugie avec son nouveau-né et le cercueil d’OSIRIS dans le Delta. Mais SETH trouve la cachette, s’empare du corps d’OSIRIS, en l’absence d’ISIS, et le dépèce en quatorze morceaux qu’il disperse. ISIS reprend la recherche des membres de son époux, les retrouve un à un, à l’exception du phallus qui a été avalé par un poisson, et les ensevelit. Dès qu’HORUS, le fils posthume d’OSIRIS et d’ISIS, est en âge de combattre, il défie son oncle SETH et, après un long combat, il le vainc et reprend l’héritage de son père OSIRIS, c’est-à-dire la souveraineté de l’Égypte.
30. Histoire de Sinouhé (vers 2000 AJC) : Ce dignitaire raconte comment, provoqué en combat singulier par un “Colosse”, il put le vaincre grâce à Dieu. « Quand le jour parut, le “colosse” était déjà là. Il avait réuni ses tribus
; il ne pensait qu’à ce combat... Alors, il marcha sur moi qui attendais. Tous
les cœurs brûlaient pour moi... et tous les cœurs étaient malades pour moi tandis qu’ils disaient : « Y a-t-il un autre “homme fort" que toi pour lutter contre ce colosse ? » Alors, il brandit son bouclier, sa hache et sa brassée de javelots... Après que j’eus échappé à ses armes... Il s’élança sur moi, mais je tirai sur lui, et ma flèche se fixa dans son cou. Il cria, il tomba. Je l’abattis avec sa propre
hache. Tous les miens hurlèrent de joie. Je rendis des actions de grâce à MONTOU (Dieu de la guerre). »
Ce récit aurait inspiré le combat de DAVID contre GOLIATH
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...
Légende du dieu devenu vieux (2500 AJC)
31. ISIS savait aussi bien que RÉ lui-même ce qui existait dans le ciel et sur terre.
Il n'y avait qu'une seule chose qu'elle ne savait pas encore et dont l'ignorance restreignait son pouvoir : c'était le nom secret de RÉ. Car ce dieu tenait secret son nom véritable, le nom sur lequel son pouvoir était fondé et qui conférerait la puissance magique à celui qui le connaîtrait. Comme ISIS ne parvenait pas à connaître ce nom secret, elle eut recours à une ruse.
Le dieu devenait vieux et sa bouche bavait et sa salive tombait sur le sol. ISIS pétrit
celle-ci de sa main avec la terre qui y adhérait. Elle en forma un serpent qu'elle jeta à côté du chemin sur lequel le grand dieu cheminait pour se délasser dans ses deux terres. Le dieu vénérable apparut brillant et il se promena comme tous les jours. Alors, le serpent le piqua. Le dieu s'écria : "Qu'est-ce que signifie cela ?" Tous ses membres tremblaient ; Le venin s'emparait de sa chair comme le Nil s'empare de son domaine... ISIS vint ; elle dont la bouche
est souffle de vie... dont la parole ravive celui qui ne respire plus. Dieu ouvrit la bouche : "Je marchais sur le chemin, je me promenais dans les deux terres ; c'est alors que je me piquais à un serpent, sans le voir"... Alors ISIS dit à RÉ : "Dis-moi ton nom, père divin, car celui sur le nom duquel on prononce une conjuration demeure en vie". RÉ répondit : "Je suis celui qui fit ciel et terre, noua les montagnes et créa ce qui est dessus. Je suis celui qui fit
l'eau, qui fit le taureau pour la vache... sur l'ordre de qui le flot du Nil se répand". Le venin ne fut pas chassé ; le grand dieu n'était pas guéri. Alors ISIS dit à RÉ : "Ton nom n'est pas parmi ceux que tu m'as dits ! Dis-le-moi et alors le venin sortira. Alors RÉ, ne pouvant résister plus longtemps aux tourments dit à ISIS : "Prête-moi ton oreille, ma fille, afin que mon nom passe de mon sein dans ton sein". Et alors il dit son nom à ISIS, dont
les artifices magiques lui rendirent la santé. Mais malgré cette guérison, le dieu solaire vieilli n'avait plus d'autorité et les hommes se révoltèrent contre lui et ourdirent une conjuration. RÉ ayant pris conseil des autres dieux envoya contre eux la déesse HATHOR sous l'aspect d'une lionne qui commença à massacrer les rebelles. Quand RÉ jugea que la tuerie avait assez
Duré, il fit en sorte d'éloigner ATHOR. Toutefois, RÉ, dégoûté de l'humanité, refusa de s'occuper
de sa conduite et chargea SHOU ce cette tâche.
Sous le règne de PEPI 1ER (2287-2247 AJC)
32. Le général Uni s’immortalisa par ses campagnes contre les Sémites « qui vivaient dans le pays des sables » et dont il « dévasta les enclos, détruisit les huttes, abattit les figuiers et les vignes » avant de rentrer sain et sauf en
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Égypte.
Les Admonitions : exécrations des Égyptiens contre les nomades syro- Palestiniens qui envahirent le delta du Nil.
33. Des boucliers flottaient sur les marécages du Delta... Les étrangers étaient devenus les maîtres du pays... le pauvre possédait des trésors tandis que le riche n'avait plus quoi se fabriquer une paire de sandales.
34. Les femmes étaient sèches et ne pouvaient plus concevoir... De nombreux cadavres étaient jetés dans le Nil... La rivière était de sang...
Conte des deux frères :
35. Anubis et Bata : La femme du premier, amoureuse de second, est furieuse de voir ses avances repoussées et accuse Bata d’avoir voulu la séduire et réussit à le faire mettre en prison.
Ce texte inspira l’un des récits de Joseph en Égypte.
DIGNITAIRES D’ORIGINE SÉMITE
Les incursions de diverses tribus sémites dans le Delta du Nil sont mentionnées dès le milieu du lllème millénaire AJC par des papyrus (pages 75 à 79, 88 à 94 et 103).
D'autres documents nous révélèrent que des esclaves sémites ou leurs descendants, dès le llème millénaire AJC, occupèrent de hautes situations (pages 81-82, 89, 93 et 94) ; l’un d’entre eux, Yankhamon (vers 1800 AJC), était plénipotentiaire égyptien pour la province de Syrie. Un autre, nommé Doudou (page 93), fut un des
hommes les plus influents de la cour d’Égypte. Sur les inscriptions de son hypogée et sur des papyrus, il se raconte lui-même
:
36. J’étais la bouche suprême de tout le pays... Je portais les paroles des ambassadeurs de tous les pays étrangers au palais où je suis quotidiennement. J’en sortais et je revenais auprès d’eux, en qualité d’envoyé du roi, en possession de tous les ordres de Sa Majesté.
Un magnifique tableau ornant la paroi du tombeau de Doûdou montre le roi, entouré de nombreux fonctionnaires supérieurs, lui accordant le titre de “premier serviteur du Roi” et le faisant parer de chaîne d’or.
Dans sa tombe, une autre peinture représente Doûdou magnifiquement décoré de bijoux, sur un char traîné par deux coursiers pleins de feu, galopant à fond de train, tandis que la foule l’acclame avec allégresse.
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Dans différents autres textes, on constate que, parmi les fonctionnaires de la cour, il y avait des étrangers dont certains avaient été autrefois esclaves. Par exemple, sous le règne de MERENPTAH (page 97), la fonction de “premier héraut de Sa Majesté” était exercée par le Syrien BEN-EZNE, il est précisé dans le texte qu’à la cour, il portait un nom é
COMMERCE INTERNATIONNAL
Les Egyptiens produisait plus de nourriture qu'il n'en consommait et l'excédent de céréales, de lin, de papyrus et de poisson séché était exporté, ainsi que des vases en pierre et en céramique, du lin, du papyrus, des récipients en or, des peaux de bœufs, des cordes, des lentilles.
Parmi les marchandises importées, se retrouvaient notamment des matières premières et des articles de luxe prisés au sein de la haute société. Egalement : les chevaux, le bétail, le bois de cèdre, l'argent,
le cuivre et les minerais précieux étaient importés de Syrie et de Palestine. Quant à Chypre, elle fournissait le cuivre et l'ivoire. Les articles de luxe tels que les récipients à huile minoens et mycéniens provenaient de la mer Egée.
La Nubie, fournissait à l’Egypte de l’or, des pierres de construction, de l'ébène, de l’ivoire, des plumes, et des œufs d'autruches ainsi que du bétail. La myrrhe et d'encens
provenaient du pays de Pount.
En échange des céréales et des objets fabriqués en Égypte, il acquiert chez ses voisins les matières premières qui lui font défaut : le cèdre du Liban, le pin de Cilicie, l’étain et l’argent du Proche-Orient, les peaux de léopard, les défenses d'éléphant, les animaux exotiques du Sud.
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La Mésopotamie
Cette région comprend les territoires limités par la Mer Caspienne, le Caucase, la Mer Noire, la Mer Égée, la Méditerranée, la Mer Rouge, le Golfe d'Aden, la Mer d'Oman, les frontières de l'Est du Beloutchistan et de l'Afghanistan.
Les Homo habilis venus d'Afrique, il y a environ 2 MA avaient progressivement occupé les lieux. Puis par le développement de leur potentiel génétique et
intellectuel, devinrent des Néandertaliens. Lesquels, il y a
80.000 ans AJC, donnèrent naissance aux d'Homo sapiens.
Il y a environ 15.000 ans AJC, ces hommes trouvant à l'état sauvage blé et orge, bovins, ovins, caprins, porcins... en arrivèrent tout naturellement, au fil du temps, à la culture pour suppléer la cueillette, et à l'élevage pour
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compléter la chasse. Ces activités transformèrent leur vie nomade en celle de pasteurs semi-sédentaires. Les hommes construisirent des villages puis des villes, qui furent administrées selon un mode théocratique par un prince de droit divin, chef par la volonté d'un dieu pour lequel, seul ou aidé de prêtres, il célébrait le culte, principalement du taureau symbolisant la force vitale ; de même que, seul ou aidé de fonctionnaires, au nom du même dieu, il gouvernait ses sujets, parmi
lesquels, pour défendre son territoire, il choisissait des hommes forts pour en faire des soldats.
Les villes devinrent des cités-états ayant souveraineté sur la campagne d'alentour. Les plus fortes s'imposèrent aux autres pour former des sortes de royaumes fragiles face à de nouvelles rivalités.
Les populations du Moyen Orient, qui parlaient des langues sémites, connurent longtemps ces alliances entre cités-états avant que ne se créent de véritables nations.
PAYS ENTRE DEUX FLEUVES
La MÉSOPOTAMIE, le "pays entre les deux fleuves" : le Tigre et l'Euphrate qui prennent leurs sources dans les montagnes d'Arménie et coulent presque parallèlement dans la vaste dépression limitée, à l'Est, par les derniers contreforts du Zagros dont les rivières rejoignent le Tigre et, à l'Ouest, par les hautes terres des déserts de Syrie et d'Arabie avant de se jeter dans le Golfe Persique.
Il y a quelques 10.000 ans, en aval de Bagdad, en été, la végétation se desséchait sous l'ardeur du soleil et le sol devenait dur comme la pierre. L'hiver, des trombes d'eau transformaient la terre en bourbiers. Un court printemps faisait verdoyer la plaine, mais la fonte des neiges du Zagros grossissait les flots du Tigre dont les eaux recouvraient les plaines à perte de vue.
En revanche, bordant le cours sinueux de l'Euphrate et dominant la plaine, des levées d'alluvions
s'étaient formées, offrant aux cultures des surfaces faciles à drainer. A proximité de ces levées, s'étendaient d'innombrables marécages recouverts d’herbes aquatiques et de roseaux, très riches en poissons et fournissant, en toute saison, des points d'eau.
Les occupants les plus anciens de la basse Mésopotamie s'établirent, vers le Vllème millénaire AJC, dans la région d'El-dans la région d'El-Obéïd
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où on retrouva les premières traces d'irrigation. Leurs descendants, les Obéïdiens, furent d'excellents cultivateurs-éleveurs qui, au fil des siècles, essaimèrent dans les plaines entre le Tigre et l'Euphrate où ils construisirent de nombreuses agglomérations villageoises, comme à Eridu.
Ces populations nous laissèrent des céramiques peintes et nues, des outils agricoles en pierre (houes, faucilles et pilons), des objets et des figurines en terre cuite représentant des
bovidés, ce qui témoigne de l'importance alimentaire et cultuelle de ces animaux (Tell-el-Oueili). Du fait d'un climat sec, l'agriculture imposait un réseau d'irrigation important.
Au cours du Vème millénaire AJC, des hordes nomades sémites du désert de Syrie et de la péninsule arabique s'infiltrèrent dans la Basse Mésopotamie. L'intégration de ces populations "sémites" avec les résidents "obéïdiens", également de culture s sémitique, fut à l'origine
d'une civilisation prospère qui construisit des villages qui devinrent Ur, Erudi, Larsa, Uru…
Au début du IVème millénaire AJC, un peuple venu des rives Est de la Mer Caspienne envahit la Mésopotamie. Il parlait une langue d'origine mongole de type agglutinant, le culture sémérien. Ces envahisseurs trouvèrent une population aux techniques avancées qui avait remplacé la houe par l'araire et dont les potiers utilisaient le tour. Ses artisans fabriquaient du cuivre
et le travaillaient ainsi que l'or et l'argent. Ses agriculteurs irriguaient leurs champs. Ses princes de droit divin gouvernaient les villes au nom d'un dieu protecteur.
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Ces nouveaux venus, par leur dynamisme, dominèrent les premiers occupants sans cependant anéantir leurs techniques. Ils agrandirent les villes pour en faire des "cités-états" appelées ainsi parce qu'elles devinrent plus que des agglomérations, des lieux de pouvoir et de culte sous l'autorité d'un prince à la fois chef et représentant terrestre du dieu protecteur de la cité et des
populations d'alentour, lequel personnifiait l'une des "forces vivantes" de la nature : ENLIL, le vent ; AN, le ciel ; EN-KI, l'eau douce ; NANNA, la lune...
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Sous l'impulsion des Sumériens, Uruk devint le centre principal de la Mésopotamie. Des découvertes archéologiques y situent, dès 3.500 ans AJC, l'apparition de l'écriture, la naissance d'une architecture monumentale grâce à l'utilisation de la pierre et du mortier de gypse, et la création de céramiques gravées. Ces spécialités urukiennes furent exportées aux villes du Moyen Euphrate (Habuta, Kabira, Saïd, Djebel- Aruda, Tell-qannas...) et d'Anatolie
(Kassek-Hügük).
Datant de cette époque, on découvrit, à Uruk, des boules creuses en argile qui devaient accompagner des marchandises livrées ou stockées. Sur leur surface, elles portaient la marque du propriétaire et contenaient de petits jetons de tailles et de formes variées représentant diverses quantités. On suppose
qu’elles devaient être cassées pour contrôler leur contenu.
Dans une étape ultérieure, pour permettre des vérifications intermédiaires sur une tablette d’argile de l’époque, des marques imprimées avec la pointe d’un roseau (calame) indiquaient la quantité des produits tandis qu’un dessin en précisait la nature
Sur un vase retrouvé à Uruk, une peinture représente un cortège précédé du roi-prêtre pénétrant, pour y officier, dans le temple d'INANNA, dieu de la lune.
Les dieux sumériens étaient nombreux ; chaque cité-état possédait le sien, accompagné de divinités secondaires : NANNAR à Ur ; UTU-BABBA, le soleil, à Larsa ; NINGIRSU à Lagash ; NINGISHZIDA à Gudia... La renommée de ces dieux suivit le destin de la cité dont il était le patron. Si l'une dominait ses voisines, son dieu
s’imposait à celles-ci.
Comme le scribe MANETHON l'avait fait vers 240 AJC pour les dynasties égyptiennes, des écrivains babyloniens du XVIIIème siècle AJC énumérèrent sur des tablettes les rois qui se succédèrent en Mésopotamie, des origines à la fin de la dynastie d'ISIN (1000 AJC). Ces tablettes furent complétées par d'autres qui donnent les noms de certains rois antédiluviens (3.000 ans AJC). A partir de ces documents confirmés par la découverte archéologique, on
reconstitua l’histoire de la Mésopotamie.
139
La période d’Uruk (3400-3000 AJC)
La Mésopotamie était peuplée de Sumériens et de Sémites ; ces derniers descendaient des premiers occupants ou de groupes progressivement infiltrés par le Nord ou le centre du pays.
Entre les différentes cités, il se créa des rivalités donnant le pouvoir à la plus forte, laquelle, tôt ou tard, tombait sous le joug d'une autre. Les "rois- prêtres" se livraient à une suite perpétuelle de guerres
.
Dans divers textes relatifs à cette période, on relève entre
autres noms de cités : Umma, Nippua, Erudi, Larsa, Lagash, Ur, Uruk... Les fouilles sur ces sites ont révélé l'existence de plusieurs rois sans que l'on puisse préciser la
durée de leur règne : UBAR-TUTU et ZIUSUDRA, rois de Shuruppak, MESANNIPADDA d'Ur, LUGALZAGGISI d'Uruk. Certaines dynasties auraient eu leur siège hors de la zone géographique sumérienne en Enlun, à Mari...
Les temples des cités (Ur, Uruk) étaient décorés de peintures murales et de mosaïques de
terre cuite, de stèles et de figurines. Des artisans gravaient sur des cylindre-sceau une extraordinaire variété de sujets. L'administration, pour le contrôle des productions agricoles et artisanales, la tenue des stocks des greniers et des magasins, se servait de plaques ou de bouchons d'argile gravés de pictogrammes. Il est attesté que, dès 3400 AJC, l'écriture se présentait sous forme de dessins figuratifs conventionnels
Dynasties archaïques (3000-2325 AJC)
Des statues et des stèles perpétuèrent le souvenir des grands personnages et des victoires prestigieuses. Une stèle retrouvée à Tello représente le roi de Lagash, EANNATUM, victorieux de la cité d'Umma, défilant à la tête de ses soldats qui piétinent les vaincus. Sur l'autre face, le dieu NINGIROU capture les ennemis de Lagash dans un vaste filet.
Les rois-prêtres ne pouvant assurer l'administration civile et le service religieux se firent construire un palais à côté du
temple et laissèrent au clergé le soin d'assurer le culte, ce qui ne changea rien au régime théocratique en place.
Dans leur palais, les souverains installèrent les scribes pour gérer leurs possessions alors qu'ils se consacraient aux fonctions miliaires. Leur armée était constituée d'une infanterie de piqueurs et des unités de chars tirés par des
140
onagres (chevaux sauvages) ou des ânes.
L'accroissement de la prospérité des villes entraîna, alentour, l'agrandissement des fermes et des champs et, corrélativement, le développement des canaux et réservoirs indispensables à l'agriculture.
Cette organisation hydraulique nécessita un effort communautaire pour creuser de longs canaux, les curer, les réparer et en répartir les eaux équitablement entre les diverses surfaces cultivées.
Le suivi de ces travaux et le
contrôle des productions agricoles et artisanales furent facilités par l'écriture cunéiforme qui s'était généralisée dans toutes les villes du Bas-Pays. On a retrouvé, datant de cette époque, des tablettes mentionnant les travaux effectués pour les dieux, les offrandes pour les temples, les victoires remportées par le Roi.
GILGAMESH, cinquième roi de la 1ère dynastie d’Uruk
(vers 2500) a donné lieu à une légende.
A la mort d'EAMNATUM, la
cité de Lagash perdit de sa splendeur et LOUGAL-RAGGISI (2375-2325 AJC), roi d'Umma, la détruisit. Celui-ci, après une longue série d'heureuses campagnes, réussit à dominer un grand nombre de cités du pays de Sumer, y compris le centre religieux de Nippur. Puis il transféra sa capitale d'Umma à Erech et se déclara "Maître de tous les territoires de la Basse Mer (Golfe Persique) jusqu'à la Haute Mer (Méditerranée)".
Les fouilles des sépultures de la nécropole d'Ur,
datées du lllème millénaire AJC, révélèrent des richesses extraordinaires. Autour des défunts, on retrouva un matériel luxueux (bijoux en or, argent et lapis, des armes et de la vaisselle), ainsi que de nombreux serviteurs et animaux de trait exécutés pour accompagner leur maître dans la mort, afin de continuer à le servir dans l'au-delà.
Période akkadienne (2320-2193 AJC)
En 2375 AJC, SARGON, puissant roi sémite, en battant LOUGAL- RAGGISI, unifia le Sud et le Nord de la Mésopotamie en un seul royaume. Il y imposa l'akkadien d'origine sémitique comme langue parlée et écrite, à la place du sumérien, ce qui favorisa dans les textes l'apparition de signes phonétiques qui rendirent l'écriture cunéiforme plus facile à lire. Les inscriptions et les tablettes se multiplièrent rapidement.
SARGON, grand chef de guerre, fut aussi un bon
administrateur. Il sut protéger et accroître le commerce de toutes les cités mésopotamiennes et leur procurer les matières premières qui leur manquaient (bois et pierre de
141
construction, or, argent, cuivre, étain...).
Sous son règne, l'agriculture développa les réseaux de canaux d'irrigation grâce au chadouf, appareil à bascule permettant d'élever l'eau
jusqu'à 4 mètres. La métallurgie du bronze d'étain se généralisa. Le commerce maritime avec la Vallée de l'Indus s'intensifia, via le pays de Dilmoun (île de Bahrein). Les
temples s'ornèrent
de stèles et de grandes statues représentant le souverain victorieux ou priant les
dieux.
Sur le plan religieux, les Akkadiens adoptèrent l'essentiel du rituel sumérien dans sa langue originelle et le panthéon auquel ils fusionnèrent leurs propres divinités sémitiques.
SARGON fonda, en Basse Mésopotamie, une cité-état, Akkad (Agadi). Sans cesse en guerre, ce roi mena de multiples expéditions dont une navale contre Dilmoun (Ile de Bahrein). Il soumit les pays de Magan et de
Melouhka (en Arabie Septentrionale, riches de cuivre et de diorite). Le prince des Hourrites (Kurdistan), les peuples belliqueux du Zagros (Gouti, Loulloubi) et le roi du pays d'Elam le reconnurent comme suzerain. Il poussa ses campagnes jusqu'à Amanus (forêt de cèdres du Liban), à l'Est du Golfe d'Iskenderun, passa le Taurus et intervint sur le plateau central de l'Anatolie. Son empire devenant trop vaste, il ne put en assurer partout le contrôle et la vie de ce
prestigieux conquérant se termina au milieu de révoltes difficilement réprimées.
La même insécurité marqua le règne de ses successeurs : RIMOUSH, MAN- ISHTOUSHOU.
Seul HARAM-SIN (2254-2218 AJC), ayant rétabli provisoirement l'unité du royaume, se proclama roi des Quatre Régions (les quatre points
142
cardinaux) et "dieu d'Akkad". Son successeur, SHAR-KALI- SHARRI (2218-
2193 AJC), dut faire face à de nombreuses révoltes et aux attaques des Gouti
(du Zagros) et des Amorrites. Son assassinat en 2193 AJC fut suivi d'une
anarchie qui marqua la fin de l'empire akkadien.)
Précédemment le sceau-cylindre semble surtout avoir eu une fonction administrative. Il servait à sceller les jarres, dont l'ouverture était couverte par
de l'argile sur lequel on appliquait le sceau, et les portes, fermées à l'aide d'une corde attachée au mur et enroulée autour de la poignée, qui était recouverte
d'une couche d'argile sur laquelle on déroulait le sceau-cylindre. Mais c’est surtout vers 2.200 ans AJC que les Mésopotamiens et les peuples d‘alentour se servirent du sceau-cylindre pour sceller des bulles d'argile contenant des jetons décrivant la nature et la quantité des marchandises échangées au cours de transactions commerciales. Le sceau-cylindre était également utilisé pour
authentifier les tablettes de documents officiels, juridique, commerciaux, etc. Il avait la même fonction qu'une signature pour notre époque : authentifier un document administratif, montrer l'engagement du contractant, ou la présence d'un témoin, etc.
En Mésopotamie, à cette époque, on fabriquait une sorte de savon fait d'huile végétale, d'argile et de cendres et où l'argile jouait le rôle de décrassant, par frottement.
Domination des Gouti (2198-2130 AJC
Le roi Gudea“Gouti" (Zagros), après s'être comporté en Mésopotamie comme un barbare pillant la campagne, saccageant et incendiant les cités, s'installa comme successeur légitime du souverain d'Akkad, roi des Quatre Régions. Vingt et un Rois Gouti régnèrent sur la Mésopotamie.
143
Cette période connut des troubles favorables à la renaissance des Sumériens qui, durant toute l'époque akkadienne, avaient régné sans gloire sur la Basse Vallée avec Ur pour capitale, où le sumérien n'était plus que la langue de culture d'une élite sociale.
A cette époque les premiers vêtements étaient réservés à l’élite alors que les serviteurs restaient nus. La statue ci-contre montre le roi Goudéa de la cité-état de Lagash vêtu d’une seule pièce de tissu drapée, qui laisse l’épaule droite nue
La métallurgie du bronze d’étain se généralisa. Le commerce maritime avec la Vallée de l’Indus s’intensifia, via le pays de Dilmoun (Ile de Bahrein). Les temples s’ornèrent de stèles et de grandes statues représentant le souverain victorieux ou priant les dieux.
Illème Dynastie d'Ur (2130-2003 AJC)
ÜTU-HEGAL, roi sumérien d'Uruk vers 2130 AJC, écrasa les “Gouti” et fit prisonnier leur souverain TIRIQAN. A son tour, UTÜ-HEGAL fut déposé par son rival UR-NAMMU (2111-2094 AJC), roi d'Ur. Sous son règne, de grandes constructions furent réalisées, principalement la ziggourat d'Ur en l'honneur de SIN ou NANNAR, dieu de la lune.
Le roi était l'incarnation de Dieu et Dieu lui-même. A ce titre, il donna à son peuple le premier code des lois d'inspiration divine. Il
organisa une administration centralisée pour contrôler les temples et les villes. Il nomma, dans chaque cité, un "vicaire" (administrateur) révocable.
En dépit de leurs défaites successives, les Goutis ne cessèrent de harceler le pays. UR-NAMMU fut tué au cours de ces combats. Son fils, SHULGI (2093-2046 AJC), fut un brillant monarque. Sous son règne et ceux de ses successeurs, la Mésopotamie retrouva un empire aussi vaste que celui de SARGON.
Les autres rois furent
: AMAR-SUEN (2046-2037 AJC), SU-SIN (2036-2028 AJC). Le dernier roi de cette dynastie, IBBI-SIN (2027-2003
AJC), dut se battre sur deux fronts : à l'Est, contre les Elamites (habitants
d'Elam) ; à l'Ouest, contre les Amorrites, tribus sémites chassées du désert syro-arabique par une aridité climatique croissante.
En 2003 AJC, les Elamites s'emparèrent d'Ur. IBBI-SIN fut fait
144
prisonnier. Les Amorrites asservirent les autres cités. Durant le règne de cette dynastie, les rois-dieux reçurent un culte de leur vivant et un hypogée (tombe souterraine) pour leur “au-delà"
.
Pendant une longue période (2003-1894 AJC), la Mésopotamie se trouva morcelée. Les Hourrites contrôlèrent plus ou moins la Haute et Moyenne Vallée ; les Amorrites, la Basse Vallée, dont la cité de Larsa. La principauté d'Isin prétendit prolonger l'empire d'Ur. Partout dans le pays, entre les cités-états, il y eut des luttes au cours desquelles la suzeraineté passa rapidement de l'une à l'autre.
1ère Dynastie de Babylone (1894-1595 AJC)
A l’aube du Il ème millénaire AJC, Babylone, la “Cité des dieux”, était encore un chef-lieu de province. A cette époque, l’empire d’Akkad du roi SARGON 1er n’était plus qu’un beau souvenir, tout comme la troisième et dernière dynastie sumérienne d’Ur.
C’est alors que l'un des chefs amorrites SOUABOUM (1894- 1881
AJC), investit Babylone et s'y fit proclamer roi. La cité qui exploitait un vaste et riche terrain, devint vite florissante alors que, dans le reste de la Mésopotamie,
se perpétuaient les rivalités entre les cités-états. Babylone, entre
1816 et 1783 AJC, devint vassale de SHAMSHI- ABAD 1er, roi de la Haute
Mésopotamie, d’Assour à Mari.
HAMMOURABI (1782-1750 AJC), septième roi de la Dynastie des Amorrites, réunifia sous son autorité la Mésopotamie en s'emparant successivement de Larsa (1763 AJC), Mari (1759 AJC), Eshnounna (1755
AJC), Assour...
.
Pour assurer la gestion de son royaume, HAMMOURABI remplaça les princes des cités
conquises par des gouverneurs qui, sous l'autorité d'un "premier ministre" devait veiller au curage des canaux, à l'entretien des temples, à la collecte des impôts.
Le roi s'était réservé la justice et le législatif, ce qui l'amena à rédiger un code des lois. Une stèle le représente recevant du dieu soleil MARDOUK, le texte des lois qui se présente ici comme émanant de ce dieu qui l'offrait au roi. Le texte du code était destiné à compléter la coutume, à
trancher des cas particuliers, mais surtout à unifier la législation des diverses cités. Il nous fait connaître aussi le statut juridique des différentes catégories qui composaient la société : awiloum, notable ; moushkênoum, hommes de modeste condition ;
145
kardoums, esclave...
MARDOUK remet le code de loi à HAMMOURABI
Babylone était devenue la première ville du Moyen Orient par son activité commerciale et intellectuelle et par sa richesse. Bien que MARDOUK, son dieu, fut celui du roi, tous les dieux du panthéon sumérien continuaient d'être honorés dans les autres cités, selon les anciennes traditions mais sous des noms sémitiques. Les mythes et les légendes d'autrefois perduraient.
Après la mort d'HAMMOURABI, beaucoup de cités-états reprirent leur indépendance. Son fils SAMSOUILOUNA (1750-1712 AJC) ne régna que sur les cités de Babylonie et dut faire face aux Kassites, peuple du Zagros. Ces successeurs régnèrent sur un territoire réduit mais sans difficultés jusqu'à l'attaque du roi hittite MOURSHILISH 1er qui prit et pilla Babylone en 1595
AJC.
Les Hittites s'étant retirés, Babylone fut investi par les Kassites montagnards du Zagros qui occupaient déjà la région d'Harar sur l'Euphrate moyen.
Il faut savoir qu'à cette époque, les Aryens, des Européens venus du Nord de la Mer Caspienne, mêlés aux Hurrites du bassin du Khabür, formaient le Mittani, état puissant de l'Orient s'étendant du Zagros à l'Oronte, de l'Araxe (rivière au Nord de l'Iran) jusqu'au Moyen Euphrate.
Un autre groupe d’Aryens, en s'incorporant à des tribus du Zagros,
auraient été à l'origine des Kassites qui occupaient la partie centrale du Zagros.
Les Hittites, issus aussi d'Aryens venus par la Grèce du Nord de la Mer
Noire, constituaient un état en Anatolie Centrale.
146
La Dynastie kassite (1595-1153 AJC)
On ne connaît rien des premiers rois ; on sait seulement qu'en 1571
AJC, AGOUM II ramena dans leurs temples de Babylone les statues de MARDOUK, dieu de la cité, et de son épouse divine TSARPANITOUM, enlevées par les Hittites. Selon les textes retrouvés, AGOUM II est dit roi de Babylone du pays des Kassites et de certains peuples du Zagros.
Vers 1500 AJC, le royaume kassite annexa le Pays de Sumer dont la dynastie s'était éteinte. On donna dès lors à la Basse Mésopotamie le nom
de Babylonie dont la capitale étendit son influence sur la majeure partie du Moyen Orient et surtout sur l'Assyrie.
Les érudits de Babylone constituèrent une grande collection de textes religieux, littéraires, divinatoires et scientifiques. Les scribes, de leur côté, continuaient à tenir la comptabilité du palais et des temples et à rédiger d'innombrables contrats commerciaux, la correspondance avec les cours étrangères et des chroniques historiques.
La Babylonie,
après avoir accepté la protection de l'Assyrie (1356-1320
AJC), sous le règne de KOURIGALZOU III (1336-1315 AJC), annexa l'Elam. Ce fut le début d'un conflit qui opposa Babylone, Assour (Assyrie) et Elam.
Longtemps, l'Assyrie et la Babylonie se disputèrent les cités à l'Est du
Tigre
.KASHTILIASH IV, roi kassite, fut battu et fait prisonnier par
l'Assyrien TOUKOULTI-NINOURTA 1er (1246-1209 AJC), lequel se proclama roi de Sumer, d'Akkad et de Babylonie. Mais ADAD-SHOUM- NATSIR (1214-1185 AJC), roi kassite, en 1203 AJC, chassa les envahisseurs mais décéda en 1185 AJC sur un champ de bataille. Durant son règne, il fit du dieu ASSOUR, protecteur de la ville du même nom, le grand dieu de tout son royaume et se dit son vicaire.
147
En 1156 AJC, le roi assyrien ASSOUR-DAN 1er attaqua à nouveau la Babylonie sans succès, laissant le pays aux Elamites venus piller les riches cités de la basse Mésopotamie. Ces derniers, en 1153 AJC, renouvelèrent leur attaque, investirent Babylone, firent prisonnier son roi qu'ils emmenèrent en Elam avec nombre de ses dignitaires et les dieux du temple, dont MARDOUK.
MARDOUK.
La Dynastie d’Isin
Vers 1150, la dynastie d'Isin (en Sumer) s'installa à Babylone et tenta de soumettre le royaume assyrien. En 1136, elle parvint à se faire restituer les statues de MARDOUK et TSARPANITOUM, divinités babyloniennes, mais celles-ci, en 1129, furent à nouveau enlevées lors d'un raid des Elamites.
NABUCHODONOSOR 1er (1129-1106 AJC), troisième roi de la dynastie d'Isin, fit campagne dans le Zagros et en Assyrie. Après avoir vaincu et tué le roi d'Elam, il pilla le pays et en
ramena à Babylone les statues du couple divin.
Ces victoires valurent au roi une réputation de héros. Les scribes exaltèrent aussi le dieu MARDOUK qui, après son retour triomphal, éclipsa les divinités protectrices des autres cités et mérita le surnom de Bêl (seigneur).
148
Ce fut alors que le clergé de Babylone donna sa forme définitive au rituel de la grande fête du Nouvel-An, à l'équinoxe de printemps.
Comme les autres pays du Proche Orient, la Babylonie subit des attaques des Araméens, pasteurs nomades sortis du désert de Syrie (Pays d'Aram) pour piller les campagnes et les caravanes. Ces tribus parlaient un langage nord sémitique
.
Ne pouvant défendre leurs cités contre ces pilleurs, les souverains de Babylone leur concédèrent une large
autonomie sous le contrôle des clergés locaux. Mais certaines villes préférèrent acheter la protection des Araméens en leur abandonnant une partie de leurs terres. De nomades, ces populations devinrent sédentaires et formèrent une multitude de petits royaumes.
Le roi assyrien ADAD-NINARI II (912-890 AJC), pour protéger Babylone des Araméens, prit la ville sous sa protection. Cette attitude peu coutumière pour un guerrier s'explique par le prestige que possédait à ses yeux les dieux,
les prêtres et les scribes de la grande cité babylonienne. C'est aussi l'époque où l'Assyrie adopta le culte de MARDOUK et celui de NABOU, dieu de l'écriture et protecteur de la ville de Barsippa.
Les rois d'Assyrie allèrent périodiquement en Babylonie châtier les tribus araméennes rebelles. Ils terminaient l'expédition par un pèlerinage aux villes saintes de Basse Mésopotamie.
Les Rois assyriens
Pour mieux contrôler le pays, le roi assyrien TOUKOULTI-APIL- ESHARA III (746-726 AJC) détrôna le roi de Babylone et se fit proclamer souverain à sa place. Mais les turbulents araméens qui maintenant formaient la majorité de la population de la Basse Mésopotamie, mus par un véritable esprit national, se rebellèrent. L'Assyrien SARGON II (722-705 AJC) les mata. A sa mort, le désordre s'installa à nouveau dans le pays. Son fils SIN- AHE-CRIBA, en 689 AJC, entré dans Babylone en
vainqueur, fit détruire la ville et l'eau de l'Euphrate passa sur les ruines de ses temples.
Le nouveau roi d'Assyrie, ASSOUR-AH-IDDIN (681-669 AJC), fit reconstruire les temples de Babylone. Son successeur, ASSOUR- BANIPAL (669-633 AJC), confia le pouvoir à un vassal babylonien KANDALANOU (648-627 AJC) ...
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La Dynastie chaldéenne
A la mort de ce KANDANANOU, le trône fut saisi par le Chaldéen NABOU-APAL-OUSOUR (626-605 AJC) qui, après avoir éliminé les garnisons assyriennes, partit à l'attaque de l'Assyrie qui fut finalement détruite avec l'aide du roi Mède CYAXARE.
Malgré l'intervention de l'Égypte en faveur des Assyriens, ABOU- APAL-OUSOUR, roi de Babylone en 614 AJC, s'empara d'Assour et, en 612
AJC, de Ninive. Son fils NABUCHODONOSOR II (605-562 AJC), battit le pharaon NEKHAO à
Karkémich, +sur l'Euphrate, et le poursuivi jusqu'à Peluse, en Égypte. En 597 AJC, il attaqua avec succès le royaume de Juda dont il déporta à Babylone trois mille otages. En 587 AJC, il assiégea Jérusalem durant dix-huit mois au terme desquels la ville et le temple furent brûlés, le roi fait prisonnier et le royaume de Juda dompté.
Dès lors, Babylone, avec la paix, retrouva la prospérité. NABUCHODONOSOR Il employa les prisonniers de toutes ethnies (confusion des langues) pour
terminer la construction de la grande ziggourat (Tour de Babel) commencée par son père. Il restaura le temple de MARDOUK, agrandit, fortifia et décora son palais royal, créa les jardins suspendus et entoura sa capitale d'une enceinte de remparts de plus de quatre kilomètres.
Dans les autres cités de son royaume, il embellit les édifices d'or, d'argent, d'ivoire, de bois précieux... témoignant de la splendeur de l'art babylonien
.
En 578 AJC, NABUCHODONOSOR II
mena une campagne en Arabie jusqu'au royaume de Saba. En 573 AJC, il s'empara de Tyr et de son roi. En
568 AJC, pour éviter une agression des Égyptiens contre sa province de
Palestine, il occupa une partie du delta du Nil.
Le déclin de Babylone
NABUCHODONOSOR n'eut que de médiocres successeurs qui ne purent résister au souverain perse CYRUS II qui se proclama roi de Babylone en 539 AJC.
La Haute Mésopotamie fut réunie à la Syrie en une province (satrapie)
d'Assyrie. La Babylonie garda une certaine autonomie mais, en 482 AJC, KERXES 1er, roi perse, déporta la statue du dieu MARDOUK et détruisit les murailles de Babylone qui devint le chef-lieu d'une satrapie, laquelle, en 331
150
AJC, fut conquise par ALEXANDRE III le Grand, roi de Macédoine, qui choisit Babylone comme capitale.
ÉCRITURE CUNÉIFORME
Son évolution caractérisa le développement intellectuel du pays et de ses conceptions cultuelles.
Datant du IVème millénaire AJC, on découvrit, à Uruk, des boules creuses en argile qui devaient accompagner des marchandises livrées ou stockées. Sur leur surface, elles portaient la marque du propriétaire et contenaient de petits jetons de tailles et de formes variées représentant diverses quantités. On suppose qu'elles devaient être cassées pour contrôler leur contenu.
Dans une
étape ultérieure, pour permettre des vérifications intermédiaires sans devoir casser la balle, les jetons étaient enfoncés dans l'argile de la balle avant d'y être enfermés. A ce stade, les marques extérieures doublaient les jetons représentatifs.
Vers la fin du IVème millénaire AJC, sur une tablette d'argile, des marques imprimées avec la pointe d'un roseau (calame) indiquaient la quantité des produits tandis qu'un dessin en précisait la nature.
Il y eut, dès
lors, séparation entre les signes quantitatifs et ceux précisant la nature du produit. L'un et l'autre continuèrent indépendamment leur évolution vers les mathématiques d'un côté, et l'écriture de l’autre.
Sur le document qui suit, colonne 1, sont reproduits quelques exemples d’écritures pictographiques du début du IVe millénaire AJC : une étoile, un oiseau, un poisson, une tête de bœuf, de vache, un épi, une tête humaine, la même avec une bouche, l'eau... Les dessins
stylisés étaient formés de droites et de courbes. Ils ne représentaient pas une langue mais les mots correspondants à des objets. Les plus vieilles tablettes ne constituaient pas des textes mais des aide-mémoires.
151
- Écriture sumérienne
1 2 3 4 5
Ecriture Sumérienne
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Vers 3300 AJC, les scribes associèrent plusieurs dessins pour exprimer une action ou une idée complexe :
- Une tête humaine avec une bouche signifiait l'action de parler ;
- Une tête associée à l'eau correspondant au verbe boire ;
- Un pied pouvait correspondre à marcher ou se tenir debout ;
- Une montagne désignait aussi bien l'étranger, l'ennemi que l'esclave.
Vers 3300 AJC, les scribes associèrent plusieurs dessins pour exprimer une action ou une idée complexe :
La représentation verticale des objets entraînait l’écriture verticale de haut en bas, commençant à droite de la tablette. Ce système employé sur l’argile humide présentait un inconvénient : la main en se déplaçant vers gauche pour tracer un nouveau pictogramme, risquait d’effacer les précédents. Aussi les scribes, pour obtenir une écriture plus rapide et plus lisible, quelques siècles
plus tard, dessinaient les pictogrammes couchés et alignés de gauche à droite (colonnes 2 et 3). L'écriture, à la fin du IVème millénaire AJC, comportait plus de 2.000 pictogrammes isolés ou composés, ce qui explique que les scribes de cette époque aient constitué des listes de mots qui furent de véritables lexiques, sortes de dictionnaires succincts.
Au début du lllème millénaire AJC, les scribes avaient remplacé les courbes et les droites de leurs pictogrammes par les marques d'un
stylet à l'extrémité triangulaire. L'écriture cunéiforme était née. Mais ce procédé conduisit à une stylisation qui transforma les pictogrammes en signes arbitraires que l'on peut qualifier d'idéogrammes, comme on le constate dans les colonnes 4 et 5.
Vers 2500 AJC, l'écriture sumérienne connut une nouvelle évolution lorsque les scribes eurent l'idée d'utiliser les idéogrammes pour leur valeur phonétique de la chose symbolisée, suivant le principe du rébus.
Dès lors, le sumérien disposait d'une écriture composée :
- d'idéogrammes : pictogrammes avec un sens visible, suggéré ou arbitraire ;
- De phonogrammes : pictogrammes dont ils lisaient le mot correspondant pour n'en retenir que le son ; par exemple, pour écrire le mot "vie" qui, dans leur langue, se prononçait "ti", ils dessinaient une "flèche" qui se disait également "ti"
- Des déterminatifs : pictogrammes indiquant une catégorie d'êtres ou de choses qu'ils plaçaient devant les substantifs ; par exemple, une étoile placée devant un nom propre précisait qu'il s'agissait d'un dieu.
153
Ces inventions successives diminuèrent considérablement le nombre de pictogrammes utilisés : de plus de 2.000, ils passèrent à moins de 800. Ces aménagements permirent surtout à l'écriture de signifier non plus des objets mais une langue, c'est-à-dire toutes les nuances de la pensée.
A la fin du lllème millénaire AJC, les Akkadiens (Amorrites), qui s'étaient rendus maîtres de la Mésopotamie, imposèrent leur langue sémitique aux Sumériens et les symboles cunéiformes
servirent alors à l'écriture d'une langue dont elle ne rendait qu'approximativement la phonétique. C'est à cette époque que les lexiques sumériens furent doublés d'une colonne parallèle pour donner leur équivalent en akkadien. On retrouva également une sorte d'encyclopédie énumérant toutes les plantes, tous les animaux, toutes les pierres, tous les objets usuels... comportant plus de dix mille rubriques.
Au cours du Même millénaire AJC, la langue akkadienne
rayonna du pays des Elamites en Asie Mineure jusqu'en Égypte. On a retrouvé des tablettes cunéiformes dans toutes les cités du Moyen-Orient.
Pas moins de 20.000 tablettes d'argile trouvées dans les vestiges du palais du dernier roi de Mari (1775-1761 AJC) étaient écrites en langue sémitique mais en caractères cunéiformes syllabiques.
Comme chez les Égyptiens, les textes écrits pour les Babyloniens de la fin du même millénaire AJC avaient certaines vertus magiques. Des
tablettes dédiées aux dieux étaient scellées dans les fondations des palais et des temples, et de nombreuses personnes portaient des amulettes couvertes d'inscriptions et destinées à écarter les mauvais esprits. Les Babyloniens puis les Assyriens avaient un tel respect des mots écrits qu'ils en vinrent à croire que leur destin personnel en dépendait.
A Ugarit, capitale d'une cité-état de la côte phénicienne, les scribes s'accommodant mal du syllabaire cunéiforme,
simplifièrent et modifièrent les signes et en formèrent de nouveaux représentant un véritable alphabet de vingt-neuf lettres. Ce nouveau système se développa dans les pays d'Occident alors que les scribes de Mésopotamie restèrent fidèles à leur écriture cunéiforme syllabique et idéographique jusqu'à l'ère chrétienne.
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LA NUMERATION
Les mathématiques babyloniennes étaient pratiquées par les peuples de l'ancienne Mésopotamie depuis l'époque des Sumériens 3500 ans AJC jusqu'à la chute de Babylone en 539 AJC.
Les Chiffres
Dès le début du IIe siècle AJC un système numérique s'impose pour répondre aux besoins du commerce.
Les soixante chiffres du système sexagésimal Babylonien
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• Le 1 et le 10.
1 et 10
• 19 s'écrivait : 1 chevron + 9 clous.
L'écriture Babylonienne est positionnelle c'est à dire que l'emplacement d'un chiffre déterminait sa valeur. Cela résulte d'un raisonnement normal. Notre système décimale (10) qui comporte 9 unités et un zéro est lui-même positionnel : il faut imaginer que chaque chiffre d'un nombre est écrit dans une suite de colonnes ayant respectivement chacune une valeur : successivement de gauche à droite : 10.000, 1.000,100, 10 unités. Prenons l'exemple du nombre 7804 :
Le 7 indique combien de fois il y a (1000) unités dans 7804
Le 8 indique combien de fois il y a (100) unités dan 804
Le 0 indique qu'il n'y a pas d'unité dans la colonne des dizaines
Le 4 indique le nombre d'unités.
XXXXXXXXXXXXXXX
L'écriture Babylonienne des nombres comme la nôtre est positionnelle mais elle est sexagésimale.
Elle compte 60 unité de 1 à 59 (5 chevrons + 9 clous) plus un signe qui remplace un vide C’est le plus vieux zéro de l’histoire.
Chaque colonne a successivement les valeurs 3600 (60x60) unités, 60 unités, et les unités
3600 | 60 | U 3600 x 2 = 7200 7804 – 7200 = 10 x 60 + 4
7804 s'écrit
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3600 x 2 = 7200
7804 – 7200 = 10 x 60 + 4
9038 s'écrit | | | , soit 2[×3600] + 30[×60] + 38
Représente le nombre (12 x 60) + 3 = 723
La numérotation sexagésimale : les Sumériens avaient opté pour la base 60, groupant les choses par soixantaines et puissances de soixante, alors que les Chaldéos-assyriens utilisaient une numérotation décimale d'origine Akkadienne.
Des soixante chiffres du système sexagésimal, les Babyloniens en employaient 59 à l'exception du zéro. Ces chiffres étaient notés à l'aide d'un système additif décimal : un clou pour l'unité et un chevron pour la dizaine. Ainsi, tout chiffre de leur système sexagésimal pouvait s'écrire avec au plus cinq chevrons et neuf clous
Nous ne saurons probablement jamais pourquoi les sumériens ont choisi le nombre 60 comme base. Un avantage possible de ce système est que le nombre
60 est divisible par beaucoup de facteurs, en particulier 2, 3, 4, 5, 6 et 10. C’est
en fait le plus petit nombre divisible par tous les entiers de 1 à 6. Cette propriété pouvait fournir plus de flexibilité que la base 10 pour subdiviser des mesures en fractions égales. Ce système permet en tout cas d’exprimer de grands nombres en utilisant peu de symboles, ce qui aura facilité le développement des mesures et calculs.
Mathématiques :
Les premières traces d'écrits mathématiques remontent aux anciens Sumériens, qui développèrent la première civilisation de Mésopotamie. Ils mirent au point une métrologie élaborée dès 3000 AJC. À partir de 2600 AJC, ils dressent des tables de multiplication sur des tablettes d'argile] et mettent par écrit des énoncés de problèmes géométriques et de division. C'est aussi de cette période que datent les premiers témoignages de numération babylonienne
On remarque qu'ils avaient inventé le zéro, non dans leurs calculs, mais simplement pour exprimer l'absence d'une unité dans l'ordre des chiffres d'un nombre.
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Plus récemment vers 1800 à 1600 AJC, les Babyloniens utilisaient massivement les tables numériques pour le calcul et la résolution de problèmes d'arithmétique. Par exemple des tables de multiplications et des listes d’inverses des nombres, des listes des carrés d’entiers jusqu'à 59 et de cubes jusqu’à 32. Les Babyloniens s'en servaient pour effectuer les multiplications. Une tablette fournit une approximation de √2 précise à six décimales près.
Les Babyloniens ne posaient pas de division. Ce genre de calcul, se ramenait au produit du dividende par l’inverse du diviseur
Les Babyloniens résolvaient les équations algébriques du premier, second et troisième degré, les calculs d'hypoténuse. Peut-être, certaines lignes trigonométriques.
Géométrie
Il est possible que les Babyloniens aient disposé de règles générales pour calculer la surface et le volume de certaines figures géométriques. Ils calculaient la circonférence du cercle en prenant trois fois le diamètre, et la surface du cercle en prenant un douzième du carré de la circonférence. Le volume d'un cylindre était calculé en formant le produit de sa base par sa hauteur ; par contre, le calcul du volume du cône tronqué ou de la pyramide à base carrée était incorrect : les Babyloniens connaissaient le théorème de Pythagore en tant que formule, sans que l'on ait trace d'une démonstration en tant que telle. On a découvert récemment une tablette où l'on prend pour π la valeur 3 + 1/8.
Les Babyloniens mesuraient les distances en utilisant le mille babylonien, représentant environ 10 km. Cette unité de mesure avait un équivalent horaire, ce qui permettait de convertir les positions du Soleil dans le ciel en heure du jour.
Trigonométrie
Si les anciens Babyloniens connaissaient depuis des siècles l’égalité des rapports entre les côtés de triangles semblables, le concept d’angle leur était étranger : aussi se ramenaient-ils à des considérations sur les longueurs des côtés.
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LE CALENDRIER
Les pasteurs-agriculteurs primitifs vivaient au rythme des saisons. Pour eux, les “forces vivantes” prisonnières du sol pendant la période de sécheresse, au "printemps", remontaient des entrailles de la terre pour réactiver la nature. Cette renaissance qui marquait le premier temps d'un nouveau cycle de vie (l'année), était l'occasion de fêtes et de manifestations de reconnaissance envers les dieux. Les Sumériens célébraient le "printemps", fête du premier de l'An,
au mois de Nisan.
Du fait des travaux agricoles, les Sumériens divisèrent l'année en trois périodes : celle du renouveau, celle où les moissons commençaient à jaunir, celle de la récolte des céréales. Des fêtes terminaient cette dernière période ; d'autres marquaient différents rituels, comme la "tonte des moutons"...
Au cours du Même millénaire AJC, les Babyloniens fixèrent la date du Nouvel An à l'équinoxe du printemps et divisèrent l'année en 12
mois de 30 jours. Cette année de 360 jours étant trop courte, tous les six ans, ils y introduisaient un mois "intercalaire" alternativement à la fin du premier ou du second semestre, pour être en accord avec l'époque de la moisson. Ils avaient divisé le jour en 12 "bérou" ; le jour et la nuit avaient chacun 6 "bérou"
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LES DIEUX MÉSOPOTAMIENS
Beaucoup des textes cités sont extraits de L’Encyclopaedia Universalis ou de la Grande Encyclopédie Larousse et également du livre Le Berceau de la civilisation, Time Edition.
COSMOLOGIE
Pour les Sumériens, l’eau, élément liquide éternel, était source de toute chose. Elle se présentait comme étant la déesse NAMMON qui avait engendré l’univers (AN-KI), c’est-à-dire :
- Le ciel AN ou ANU comprenant les étoiles, le soleil et la lune ;
- La terre, la puissante déesse-mère NINHOURSAG ;
- Entre les deux, l’air (ENLIL) et les eaux profondes (ENKI ou EA).
Dès le début du 4e millénaire AJC, le peuple mésopotamien était entièrement dominé par la religion. Le roi de chaque cité-état était le mandataire terrestre d’un dieu protecteur dont il fallait respecter les lois. Le roi, chef d’état, était en même temps le plus haut dignitaire religieux. Les deux fonctions étant réunies dans la même personne, le palais, résidence royale, renfermait aussi le temple, maison de dieu. Cette superposition des pouvoirs civil et religieux
inspira une conception hiérarchisée du monde surnaturel : le dieu protecteur de la cité était entouré de sa famille et de divinités subalternes.
Lorsqu'une cité exerçait sa suprématie sur une autre, son dieu protecteur prenait en quelque sorte la tête du pouvoir surnaturel et regroupait autour de lui les autres dieux de moindre envergure. Le même processus se renouvela lors du rassemblement des cités en un royaume à l’avantage du dieu protecteur de la capitale.
Lors de la
prédominance de la cité d’Erech, ANU, son dieu protecteur,
devint le plus important des dieux.
En 2500 AJC, avec le déclin de sa ville, ANU perdit son prestige au profit d’ENLIL, dieu de l’air, protecteur de la cité de Nippour. Il représentait la force dynamique qui avait séparé le dieu ciel ANU de la mère terre NINHOURSAG, il était le père des dieux, le roi de l’univers, le roi de toutes les terres ; il fit surgir du sol les semences, il engendra
tout ce qui était nécessaire ; il inventa la houe et en fit don à l’homme.
Dans les cités, le Temple était conçu comme le palais du dieu sur terre. Tout autour, se trouvaient les chapelles des divinités secondaires. Chaque dieu habitait sa statue ; on l’habillait, on le nourrissait. Il avait un conjoint et des
160
enfants.
Le commun des mortels ne priait pas le dieu du temple ; c’était l’affaire
des prêtres. Chaque famille avait sa divinité protectrice.
Au moment de l’avènement de la première Dynastie de Babylone (1980
AJC), le dieu lune SIN ou BABBA était honoré à Ur et à Harran ; le dieu soleil
SHAMRSH, à Larsa et à Sippar ; le grand dieu céleste AN, à Uruk ; le maître de l’atmosphère ENLIL, à Nippour ; le dieu sur lequel reposait le monde EA ou ENKI, à Eridon.
Les Amorites,
vers 1894 AJC, en prenant possession de la Mésopotamie du Sud, s’imprégnèrent de l’ancienne civilisation suméro- akkadienne et y mêlèrent les divinités et les légendes propres aux populations du Nord. Il s’en suivit un renouveau littéraire et religieux (vers 1200 AJC).
Rapidement, les prêtres de Babylone s’employèrent à créer autour de MARDOUK, dieu protecteur de leur cité, une légende qui tendait à détruire les autres cultes, d'où un nouveau récit de la création du monde :
A
l’origine, tout était informe et n’avait pas encore de nom. Des eaux primordiales d’abord confondues, deux principes, l’eau douce représentée par APSU et l’eau salée, TIAMAT, donnèrent naissance à la “totalité d’en haut” et à la “totalité d’en bas”. De ces entités procédèrent les dieux du panthéon babylonien. Bientôt, les dieux intriguèrent contre leurs ancêtres et APSU décida de les anéantir. Mais le dieu EA, par la force de la magie, réussit à s’emparer du domaine d’APSU. TIAMAT crie
vengeance... Elle enfante des monstres et prend un nouvel époux, KINGU, à qui elle remet les “Tablettes des Destins”. Les dieux prennent peur et battent en retraite. Dans le conseil de guerre qu’ils tiennent, MARDOUK est le seul qui accepte d’affronter TIAMAT mais, avant, il tient à s’assurer de son pouvoir : les dieux mettent devant lui un vêtement ; ils lui disent de commander qu’il disparaisse et on ne le voit plus, qu’il reparaisse et il paraît. MARDOUK part, emportant comme armes :
l’arc, la foudre, l’ouragan, le filet et les “sept vents” et il monte sur le char des tempêtes, tiré par des dragons ailés crachant le feu.
MARDOUK engage le combat face aux monstres déchaînés par Tl AM AT : serpents énormes, chiens enragés, hommes scorpions remplis de venin. Il prend Tl AM AT dans son filet et s’empare des “Tablettes des Destins”, et devient le maître de toutes les destinées, puis commence la création proprement dite.
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En séparant Tl AM AT en deux, MARDOUK crée le ciel et la terre. Il organise le monde céleste. L’étoile de MARDOUK (Jupiter), celle qui s’écarte le moins de l’écliptique, va désormais régler la marche des astres
Après la création du Temple de l’univers où demeurent ANU, ENUL et EA, MARDOUK crée l’humanité. Il mêle le sang du dieu KINGU à de l’argile et lui donne la vie et l’apparence de l’homme.
L’œuvre créatrice de MARDOUK est achevée ; il lui reste à construire un
temple pour sa résidence terrestre. Lorsque la construction est terminée, les dieux se réunissent dans un banquet d’inauguration. MARDOUK y est glorifié. Chaque dieu lui donne un titre qui lui est propre. Ces noms, au nombre de cinquante, confèrent à MARDOUK un pouvoir absolu. Par ce nombre, tous les dieux sont réunis en lui. Il est le chef incontesté du panthéon. Ce fut l’habileté du clergé de Babylone qui, du fait de la symbolique du nombre cinquante, haussa triomphalement
MARDOUK à la première place, incluant en lui tous les autres dieux sans en contester aucun :
- Le dieu SIN, c'est MARDOUK qui illumine la nuit ;
- Le dieu SHAMASH, c’est MARDOUK de la justice ;
- Le dieu ADAD, c’est MARDOUK de la pluie ;
etc...
MARDOUK n’était pas le dieu unique, mais le plus grand, le roi des dieux incluant tous les autres dans sa personne unique. Les spécialistes disent qu’on est en présence de Thénothéisme”, sorte de polythéisme supérieur, à l’image d’ATON le disque solaire dont les rayons intégraient toutes les divinités égyptiennes sans en annihiler aucune. Certains voient dans ces dieux une sorte de monothéisme qui
aurait influencé le peuple d’Israël.
HAMMOURABI (1782-1750 AJC), s'était réservé la justice et le législatif, ce qui l'amena à rédiger un code des lois. Une stèle le représente recevant du dieu MARDOUK, le texte des lois qui se présente ici comme émanant de ce dieu qui l'offrait au roi.
MARDOUK remet le code de loi à HAMMOURABI
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CRÉATION DE L’HOMME
Au cours du 3e millénaire AJC, à propos de la création de l’homme, les prêtres mésopotamiens avaient émis différentes idées. Mais leurs récits commençaient généralement lorsque seule existait la société divine divisée en deux groupes : les chefs “princes divins”(ANNOUNAKIS) et leurs “ouvriers divins” (IGIGIS), dieux de rang inférieur voués au travail.
Les prêtres de Babylone, au début du 2e millénaire AJC, complétèrent ce
récit :
Excédés par leurs tâches épuisantes, les “ouvriers divins” (IGIGIS) se révoltèrent et s’en allèrent se plaindre auprès de leur chef, EA. Il y eut un grand émoi parmi les “princes divins” (ANNOUNAKIS), menacés de famine et de misère. MARDOUK réunit le conseil. EA, le dieu lucide, intelligent, subtil et inventif, y proposa la création de remplaçants assez doués pour œuvrer aussi bien que les “ouvriers divins" mais agencés de telle façon qu’ils ne pourraient jamais refuser de
travailler. Ce substitut fut l’homme : intelligent mais voué à une vie limitée. Ce projet, accepté avec enthousiasme par le conseil, fut mis à exécution et l’homme fut créé d’argile mêlée du sang du dieu KINGU pour en prendre les qualités propres à lui faire accomplir son travail aussi bien que ses divins prédécesseurs.
Aussitôt mis au monde par les sept premiers couples dérivés du prototype humain, les hommes s’adonnèrent avec tant d’entrain et de brio à leur besogne que leur
réussite fut complète. Malheureusement, ils se multiplièrent si rapidement que leur “rumeur” croissante empêcha MARDOUK de dormir. Celui-ci décida de décimer les hommes en leur expédiant divers fléaux : épidémie, sécheresse, famine. Mais EA, le prévoyant, veillait prudemment sans attirer l’attention de MARDOUK dont il ne pouvait ouvertement contrarier la volonté, et détourna les calamités.
MARDOUK, toujours agacé par les hommes, prit le parti de les anéantir par le plus redoutable des
fléaux : l’irrépressible inondation du Déluge. EA, qui avait juré avec les autres dieux de ne parler à personne du funeste projet, s’arrangea pour le faire savoir en songe à son protégé, UTNAPISHTIM, en même temps qu’il lui expliqua comment construire la fameuse “Arche”.
Ainsi averti et ayant obéi à son maître, UTNAPISHTIM, le Noé des Babyloniens, lorsqu’il remit, après la tourmente, le pied sur la terre déserte et vide, s’empressa, avec sa famille et les animaux qu’il avait emportés,
d’accomplir son devoir essentiel : nourrir les dieux affamés.
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Pour calmer MARDOUK irrité de voir son plan une nouvelle fois déjoué, EA prit les mesures propres à éviter, à l’avenir, une surpopulation importune : il introduisit la stérilité de certaines femmes, la mortalité infantile, raccourcit à moins de cent ans la durée de la vie humaine et multiplia les infirmités et les maladies. NAMTAR fut chargé par les dieux de répandre 60 maladies parmi les hommes.
CONCEPTS RELIGIEUX
Pour les Babyloniens, il résultait que les hommes avaient été créés avec une constitution calculée pour remplir vis-à-vis des dieux le rôle de serviteur. Leur vie n’avait de sens, de raison d’être et de finalité qu’au service des dieux et du souverain, leur représentant sur terre. On trouve partout dans la religion babylonienne, la même transposition du surnaturel et du politique, le premier renforçant le pouvoir du second.
Dans le temple, les dieux étaient nourris, habillés, comblés de
bijoux et de parfums. On les promenait avec pompe par la ville et à travers la campagne, soit à char, soit en bateau. Ils se rendaient visite d’un temple à l’autre. Pour plaire aux dieux, l’homme ne devait pas seulement les honorer, les servir, les combler de dons, il devait aussi se conformer à toutes les volontés qu’ils manifestaient par l’intermédiaire des proclamations royales. Les Babyloniens avaient acquis la conviction, partagée par tous les Sémites, que les contraintes de
justice sociale, de morale individuelle et familiale, de respect des convenances et du code des lois émanaient toutes de la volonté des dieux et que les enfreindre exposait les contrevenants à une action répressive de la part du souverain surnaturel offensé par la désobéissance. Tout comme les transgresseurs des lois et des obligations administratives devaient s’attendre, de la part du roi, à des sanctions.
Le châtiment divin n’était pas immédiat ; comme le roi, les dieux devaient punir,
mais ils ne punissaient pas toujours. Non que la faute leur échappât, comme aux autorités d’ici-bas, mais pour mille autres raisons mystérieuses dont ils étaient les seuls juges, en leur liberté souveraine et la profondeur de leur inaccessible dessein. En revanche, devant un malheur subit, une soudaine disgrâce ou maladie, une catastrophe inattendue, les hommes ne pouvaient les imputer qu’à la décision et à la volonté des dieux.
“Si je suis dans le malheur sans l’avoir provoqué moi-même,
c’est que les dieux m’y ont jeté. Et s’ils en ont ainsi décidé, c’est que j’ai dû les offenser en contrevenant à leur volonté, en désobéissant à l’un de leurs ordres, même sans le vouloir, même sans le savoir, car les dieux sont infaillibles. L’homme que je suis ne peut comprendre ; seuls les dieux savent. Si Je suis déconcerté
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par le tour que les dieux donnent à mes affaires, je dois admettre que les dieux n’ont pas de comptes à me rendre et qu’il faut accepter la vie telle qu’ils l’ont décidée. Tout cela fait partie du mystère des dieux”.
Les Babyloniens mentionnaient souvent les obligations des vivants mais nulle croyance ne faisait état que l’être humain, après la mort, eut à rendre compte de sa vie terrestre. Le corps du défunt retournait à l’argile, et son double ombreux, Etemmu, était introduit par
l’orifice de la tombe dans un nouvel habitacle, sous la terre, en Enfer où il rejoignait la cohorte infinie de ses prédécesseurs
L'Enfer était une triste caverne, ténébreuse et silencieuse, où tous menaient, à jamais, une existence morne et torpide. Certains, pourtant, pouvaient en sortir le temps d'épouvanter et de tourmenter les vivants oublieux qui ne leur fournissaient pas les offrandes indispensables.
On trouve fréquemment, dans les textes religieux, le concept du “mé” qu’il nous est difficile d’appréhender. Le “mé” était la présence de la volonté divine au fondement de toute chose. Le “mé” se référait aux dieux qui, seuls, le détenaient. C’était le plan assigné par eux à tous les êtres animés ou non. Parce qu’il était entre les seules mains des dieux, le “mé” désignait chacun de leur pouvoir dans un domaine particulier.
Le concept du “mé" attribué à
ENLIL, “seigneur du souffle”, fut repris par le christianisme sous le nom de “Saint-Esprit”.
Par ailleurs, nous constaterons que de nombreux mythes
Mésopotamiens inspirèrent les Hébreux.
La Fête du Nouvel An était déjà célébrée à l’époque mésopotamienne mais la célébration à Babylone prit un faste en rapport avec l’importance de la capitale et avec le culte de MARDOUK. Après le règne d’HAMMOURABI (1782-1750 AJC), la fête se célébrait vers l’équinoxe de printemps. Le temps
en était fixé par le lever (héliaque) de l’étoile hunga (du bélier). Elle durait douze jours et le roi y participait. Il était chargé de faire les gestes symboliques comme d’inviter le dieu MARDOUK à conduire la grande procession. Lors d’une calamité ou lorsque l’ennemi rôdait autour de la cité, la procession était supprimée ; le dieu ne sortait pas, la ville était en deuil.
Au cinquième jour de la fête, un prêtre tranchait la tête d’un agneau ou d’un bélier, récitait des
incantations pour que l’animal emportât toutes les souillures des hommes et jetait ensuite son cadavre dans le fleuve. Le Bouc- émissaire, coutume reprise par la Bible (Lévitique IV-24).
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On creusait une fosse dans la cour du temple, on la remplissait de roseaux, on y versait de l'huile et de la graisse et, après y avoir immolé un taureau blanc, le roi allumait le bûcher.
Le huitième jour, tous les dieux des autres villes venus honorer MARDOUK se rendaient dans la chapelle des “Destins” où se décrétaient les événements de l’année. Pendant cette cérémonie, les Babyloniens eux-mêmes se formulaient des vœux pour que le sort de chacun soit propice (coutume qui se
perpétua).
Puis, les dieux rentraient dans leur ville respective et MARDOUK était conduit à la “chambre du lit” pour un “mariage sacré” afin que, sur terre,
naissent et croissent les êtres vivants et les végétaux.
MYTHES ET LÉGENDES :
Parmi les textes reproduits ou résumés ci-après, un grand nombre proviennent de quelques 24.000 tablettes cunéiformes retrouvées à Mari, dans l’un des palais d’HAMMOURABI (1782-1750 AJC) ou de la bibliothèque rassemblée à Ninive par ASSOURBANIPAL (668-627 AJC) comprenant quelques trente mille tablettes dont beaucoup étaient des copies de récits antérieurs datés grâce à des fragments identifiés sur d’autres sites
.
On a cru longtemps que les textes des tablettes apportaient le
témoignage de l’authenticité de l’Ancien Testament. L’erreur fut de croire que le “Livre Saint” était antérieur aux récits babyloniens alors que ce fut le contraire. En effet, le peuple d’Israël se forma seulement aux environs de l’an
1300 AJC alors que les tablettes mésopotamiennes mentionnées ci-après furent généralement rédigées antérieurement à 1750 AJC. Celles de la
bibliothèque de Ninive reprirent
souvent des textes remontant à plus de 2000 ans AJC. Il y a lieu de préciser que cette remarque vaut pour les textes égyptiens. On peut donc affirmer :
Les textes mésopotamiens et égyptiens mentionnés dans ce livre sont généralement antérieurs à la formation du peuple d'Israël.
Le dieu de Nippour : ENKI ou EA, dieu de la cité d’Eridu, décida, une fois achevée sa demeure de la Mer, de se rendre au temple d’EKOUR, à Nippour, afin de solliciter la bénédiction d’ENLIL.
Un autre texte raconte le voyage de NANNAR, dieu de la lune et
166
protecteur de la cité d’Ur, qui, pour assurer à sa ville une prospérité permanente, se rendit à Nippour dans une barque chargée de présents et les offrit à ENLIL en échange de sa bénédiction
Hymne à ENLIL (lll ème millénaire)
1. ENLIL, dont la puissance s’étend au loin, dont la parole est solennelle et sacrée, dont les décisions sont sans recours et qui fixe les destins jusque dans les lointains avenirs, dont le regard perçant fouille la terre, dont le haut rayonnement éclaire jusqu’au cœur du pays. Quand ENLIL se carre sur l’estrade sacrée, quand il exerce ses prérogatives de seigneur et de prince, les dieux de la terre s’inclinent devant lui, les dieux du ciel se font humbles en sa présence...
A partir de 1894 AJC, lorsque Babylone devint capitale, son dieu patron de la cité MARDOUK détrôna ENLIL.
Le mythe de la résurrection (1200 AJC)
2. Mes muscles malades ont mis le magicien à la torture ; l’incantation n’a pas guéri ma maladie. La tombe est ouverte... MARDOUK m’a saisi... Il m’a rendu vivant. Comme la mort me traînait sur le chemin du monde infernal, MARDOUK me saisit la main ! Comme l’ennemi me frappait, MARDOUK a soulevé ma tête, il a brisé le poing de mon adversaire, pulvérisé son arme.
3. On avait préparé ma chambre funéraire. Ils étaient assis au banquet. Qui,
sinon MARDOUK, m’a ramené, de la mort à la vie ?...
4. Je suis obéissant à ton nom, MARDOUK, le plus puissant des dieux, prince du ciel et de la terre, qui est né bon, le seul Très-Haut !
5. Dieu miséricordieux, celui qui fait revivre les mourants, qui ressuscite les morts !
L’Histoire d’un Sage (1500 AJC)
Un homme riche, sage, que les deux avaient pourvu d’une importante famille et de nombreux amis, un jour se découvrit seul et malade. Entouré de tortionnaires, il implore le secours de son dieu protecteur :
6. « Ma parole la plus véridique a été déformée en mensonge... Une
Fièvre malique torture mon corps... Mon dieu... m’abandonnerez- vous longtemps encore ? »
Ayant entendu ses plaintes, son dieu protecteur mit un terme à ses
épreuves et elles cessèrent aussi brusquement qu’elles avaient commencé.
L’Ancien Testament, dans le “Livre de JOB”, traite ce problème de la
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souffrance humaine et ses rapports avec la providence, dans un récit similaire à celui-ci.
Livre de JOB, XIX-2 : Jusques à quand affligerez-vous mon âme ?
XXIX-2 : Qui me rendra tel qu’aux mois d'autrefois, comme aux jours où Dieu
me gardait... Quand le tout puissant était encore avec moi...
Épilogue : YAHVÉ accrut au double tous les biens de JOB. Alors tous ses frères, toutes ses sœurs et tous ses anciens amis vinrent le trouver et manger avec lui... Ils le plaignirent et le consolèrent... YAHVÉ bénit les derniers jours de JOB...
L’Épopée de GILGAMESH, cinquième roi (vers 2500 AJC) de la 1ère
Dynastie d’Uruk
Dès l’époque mésopotamienne, les poètes ont chanté les hauts faits de ce héros. Ce fut au début du llème millénaire que le récit prit sa forme, mais le texte le plus achevé a été trouvé à Ninive, dans la bibliothèque d’ASSOURBANIPAL (668-627 AJC). En voici un résumé.
Pour contrer GILGAMESH, les dieux, touchés par les plaintes des habitants d’Uruk, créèrent un personnage d’une nature toute opposée à GILGAMESH : ENKIDOU, au corps entièrement velu qui ignorait tout de
la
civilisation, vivait dans la compagnie des animaux, broutait l’herbe et buvait
avec eux.
Le premier épisode raconte la transformation d’ENKIDOU en homme civilisé qui, arrivé à Uruk, devient l’ami et le complément de GILGAMESH.
Ensemble, ils se lancent dans l’accomplissement de leur destin : devenir des surhommes.
Ils partent en guerre contre HOUMBABA, le gardien de la forêt des
cèdres. L’adversaire est redoutable, sa clameur est celle des eaux déchaînées, sa bouche
crache le feu et son haleine tue. Après bien des péripéties (contées sur cinq tablettes), les deux héros tuent le monstre.
Grisé par cette victoire, GILGAMESH, de retour à Uruk, s’attaque à ISHTAR, la grande déesse de la cité, dont il est rituellement l’époux en qualité de souverain... Mais celle-ci lance contre Uruk le taureau céleste qui transforme les pâtures en désert et dessèche le fleuve en quelques lampées ; son souffle ouvre des crevasses qui engloutissent des centaines
d’habitants d’Uruk. GILGAMESH frappe le monstre et le tue. C’est l’apothéose de l’homme contre la force du monstre de la déesse ISHTAR.
ENKIDOU meurt en maudissant la civilisation et GILGAMESH, hanté par la mort, part en quête d’une vie sans fin. Pour découvrir le secret de l’immortalité, il se met à la recherche d’UFNAPISHTIM, héros rescapé du déluge (voir ci-contre) à qui les dieux ont concédé une vie éternelle. Il le
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trouve et celui-ci lui raconte le déluge... puis lui suggère de s’entraîner à l’immortalité en restant sans sommeil six jours et sept nuits. Mais, à peine GILGAMESH est-il assis qu'il s’endort... Après d’autres conseils aussi négatifs, enfin apitoyé sur le sort de GILGAMESH, UTNAPISHTIM lui révèle la Plante de vie et lui indique comment se la procurer. GILGAMESH s’en empare mais, sur le chemin du retour, harassé par la route, tandis qu’il se baigne dans une claire fontaine, le serpent s’empare de la plante et l’emporte au loin, privant pour toujours GILGAMESH et l’humanité de la Plante de vie. Conclusion : l’homme est grand mais les dieux sont maîtres de la vie.
Le déluge raconté dans l’épopée de GILGAMESH (2500 AJC)
7. Les dieux décident d’anéantir le genre humain mais le dieu EA prévient UTNAPISHTIM et lui conseille de construire un bateau pour sauver sa famille et un certain nombre d’animaux. Le déluge est provoqué par une pluie torrentielle qui dure sept jours. Le huitième, UTNAPISHTIM lâche une colombe et, peu après, une hirondelle, mais les oiseaux reviennent. Finalement, il lâche un corbeau qui ne revient plus. Alors, UTNAPISHTIM débarque sur le mont Nishir et offre un sacrifice aux dieux. Ceux-ci découvrent avec surprise que le genre humain n’a pas été anéanti. Ils décident pourtant que, désormais, UTNAPISHTIM sera immortel et le transportent, avec sa femme, dans un pays fabuleux et inaccessible.
Origine de SARGON (vers 2375 AJC)
8. SARGON, le roi puissant, le roi d’Akkad, je suis ; ma mère était une prêtresse
; mon père, je ne l’ai pas connu ; le père de mon père habitait la montagne ; ma cité est Azoupiranon, sise au bord de l’Euphrate ; ma mère, la prêtresse, m’a conçu et m’a enfanté dans le secret ; elle m’a placé dans une corbeille de
roseau, avec du bitume elle en a jointoyé les interstices ; elle m’a confié au fleuve qui ne m’a pas submergé ; le fleuve m’a soulevé ; il m’a amené à AQQI, l’irrigateur ; AQQI, l’irrigateur, avec joie a jubilé, il m’a fait remonter ; AQQI, l’irrigateur, pour son fils m’a adopté, il m’a élevé ; AQQI, l’irrigateur, comme son jardinier m’a établi...
Ce récit avait pour but de légitimer la prise du pouvoir, vers 2375 AJC, de SARGON sur la Mésopotamie par le fait que le dieu jardinier AQQI lui- même l’installa comme responsable de son jardin, donc comme Roi.
La Palestine
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PÉRIODE DE 3000 À 2000 AJC
On a peu de renseignements sur l'activité des tribus nomades de cueilleurs-chasseurs-pasteurs qui, au temps de la préhistoire, parcouraient la Palestine, dont certains se sédentarisèrent dès avant le 3e millénaire AJC pour devenir des agriculteurs-éleveurs. Mais on y releva en divers sites datés de quelque 3.000 ans AJC, des preuves de relations commerciales importantes avec les Égyptiens qui, par mer, débarquaient à Byblos. A Tell-Gath, on retrouva de nombreux
vases égyptiens de cette époque. Parallèlement, des vases palestiniens ayant servi au transport d'huiles ou de parfums furent retrouvés dans les tombes de la première dynastie égyptienne (-3000, -2700
AJC).
Selon des textes en hiéroglyphes, les populations de Palestine, au cours du 3e millénaire AJC, se groupèrent en villages en conservant leur esprit tribal.
Des vestiges des sanctuaires d'Aï, datés d'environ 2.800 ans AJC, témoignent d'une
technique de construction d'inspiration égyptienne. Un site, à l'Est de la Mer Rouge, de la même époque, témoigne d'un culte des morts voisin de celui de la Vallée du Nil
.
Dès 2.500 ans AJC, aux endroits faciles à défendre et proches d'une
source, s’affirma une civilisation préurbaine révélée par des vestiges de
villages retrouvés :
- Dans les collines bordant l'Ouest des Monts de Judée : Gezer, Tell-ad- Durwein, Tell-Gath...
- Dans la montagne de Jérusalem : Tell-Aï, Ophel.
Dans le Nord du pays : Tell-el-Farah, Beth-Shéan, Affouleh, Megiddo, Miser, Tell-esh-Shuneh. Au sortir du III ème millénaire AJC, des populations semi-nomades franchissent le Jourdain et pénètrent en Palestine. Aucune de ces tribus n’avaient parcouru le même itinéraire ni vécu les mêmes événements, mais leurs chemins se croisèrent en Palestine où elles formèrent de grandes communautés Israélites. Celles-ci conservèrent l'habitude, qui se perpétuera des siècles encore, d'ignorer l'écriture en confiant à leur prodigieuse mémoire le souvenir de leur passé qui s'était transmis oralement, de génération en génération, perpétuellement modifié, par des concepts venus des deux grands voisins les Egyptiens et les Mésopotamiens. Comme par exemple leur rassemblement en Palestine qui, progressivement leur
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sembla avoir été guidé par leur dieu YAHVE jusqu’à cette terre qui leur avait promise.
Les scribes d’Ugarit du 2e millénaire AJC nous ont laissé des tablettes relatant leur mythologie et celle des pays de Canaan et des Amorites. On y trouve un panthéon inspiré des “forces vivantes” de la nature : la déesse-mère ATHIRAT, le dieu-taureau EL (symbole de la virilité), à l’origine représenté par un crâne cornu d’auroch mâle, le dieu de l’orage et de la pluie ADAD (HADDU), le seigneur de la fertilité BAAL (désigné aussi Roi des dieux), le dieu de la guerre et
des épidémie APSHOU, la déesse solaire, ASTARTE, le dieu de la mer TIRMAT ou YAM, le dieu de la mort, MOT Dans la région du Sinaï, les nomades honoraient, selon ces mêmes tablettes, YO ou YAHVÉ, dieu cosmique manipulateur de l’éclair. Cette divinité aurait été adorée aussi par les Phéniciens et les Ugarites.
Après une période de relations pacifiques, l'Égypte se révéla de plus en plus belliqueuse. Les villages de Canaan devenus des villes, s'entourèrent
de remparts mais conservèrent leur esprit tribal.
Cette situation de guerre fut aggravée par la présence des Hyksos, et diverses autres peuplades. Devant cette situation, les cités-états cananéennes indépendantes les unes des autres, chacune sous l'autorité d'un chef, durent s'entourer de grands murs, aux soubassements massifs comme à Sichem, Gezet, Jéricho, Megiddo, Haso. Leurs armées étaient constituées d'archers à pied ou montés sur des chars tirés par des
chevaux.
En réalité, les Hyksos furent principalement attirés par les riches terres de l'embouchure du Nil dont ils occupèrent la partie orientale pour y constituer leur royaume avec Avaris comme capitale (1650 AJC).
On voit se répandre en Palestine une poterie noire, lustrée et incrustée de pâte de calcaire blanche, ainsi que des travaux sur ivoire de grande qualité, ou encore la réputation acquise par les Cananéens dans la teinture en pourpre.
La cité état d’Ascalon (Ashquelon) est un port très actif sur la mer Méditerranée qui exporte les produits de l’arrière-pays. Elle est ceinte d’un mur de 2 km de circonférence, haut de 25 mètres, et la cité devait compter près de 15 000 habitants.
Les cités-états cananéennes comportaient des demeures avec étages pour les chefs (roitelets) et leurs proches, des masures
pour la population. Dans les tombeaux familiaux des dignitaires creusés dans le roc, les défunts étaient accompagnés d'armes, de bijoux, de vases en céramique, d'objets en ivoire
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La date exacte de l’emploi de l’écriture consonantique reste très approximative. Elle remonte au moins au 17e siècle et suppose un contact, avec la culture égyptienne.
Le Pharaon AMOSIS (1539-1514 AJC) chassa les Hyksos, s'empara d'Avaris et les poursuivit jusqu'en Assyrie. Son successeur AMENOPHIS III (1391-1353 AJC) donna une certaine indépendance à la Palestine qui tomba sous la domination des Hittites
Vers -1350 : le bas pays est contrôlé par des cités-États dans lesquelles se trouvent des garnisons égyptiennes. Les hautes terres sont partagées en territoires peu peuplés. Les dirigeants cananéens se plaignent des méfaits sur leurs territoires des Shasous (pasteurs nomades) et des Apirous (terme socio-
économique employé pour qualifier les populations vivant en dehors ou à la marge des villes). Ils réclament de l’aide à l’Égypte. À ce moment, la présence égyptienne se fait peu sentir, au désespoir des dirigeants qui appellent à l'aide.
Les raids des Apirous et les conflits entre cités provoquent alors le déclin progressif de la civilisation cananéenne. Au cours du XIIIe siècle, de
nombreuses villes sont détruites, ainsi Hazor décline progressivement jusqu'à la destruction de la dernière strate cananéenne.
Le Pharaon Séti I rétablit un pouvoir fort en Égypte, et sera plus présent en Palestine. Il réprime une rébellion cananéenne dirigée par les villes de Hanath et Pella. Il se bat ensuite en Syrie et contre le royaume d'Amourou. Son
successeur Ramsès II mène également des campagnes en Palestine.
Le pharaon Akhénaton, avait un échange de tablette avec les grandes cours étrangères. Dans l’une, il décrit Canaan, vers 1350 AJC : le bas pays est contrôlé par des cités-États dans lesquelles se trouvent des garnisons égyptiennes. Les hautes terres sont partagées en territoires peu peuplés. Les dirigeants cananéens se plaignent des méfaits sur leurs territoires des Shasous (pasteurs nomades) et des Apirous (terme pour qualifier les populations vivant en dehors ou à la marge des villes). Ils réclament de l’aide à l’Égypte. À ce moment, la présence égyptienne se fait peu sentir, au désespoir des dirigeants qui appellent à l'aide.
A la même époque vers 1350 av. J.-C.. Jérusalem est décrite comme une petite ville dirigée par un gouverneur vassal du pharaon.
Les raids des Apirous et les conflits entre cités provoquent alors le déclin progressif de la civilisation cananéenne. Au cours du XIIIe siècle, de nombreuses villes sont détruites, ainsi Hazor décline progressivement jusqu'à la destruction de la dernière strate cananéenne.
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Le pharaon SETI 1er (1292-1279 AJC) battit les Hittites et signa avec eux un traité de paix, renouvelé après de nouveaux combats par le pharaon RAMSES II (1279-1213 AJC).
En Egypte la stèle de Mérenptah (1207 AJC) atteste de l'existence d'Israël comme un peuple distinct en Canaan. Le fait que la mention d'Israël soit marquée d'un hiéroglyphe caractérisant un peuple et non un lieu-ville montre que les égyptiens percevaient ce peuple comme un groupe nomade
.
Durant les campagnes militaires que les Égyptiens livrèrent contre les Hittites, les armées de Pharaon pillèrent et même détruisirent des cités-états en Canaan et déportèrent ou rançonnèrent leurs habitants. Après cette période de trouble, on constata cependant, dans les cités, de notables progrès relatif à diverses techniques : stockage des eaux et leur distribution, évacuation, hors la ville, des eaux usées, comme sur le site de Béthel ;
PÉRIODE PRÉ-MONARCHIQUE (1200-1000 AJC)
Certains éléments des Peuples de la Mer, repoussés d’Egypte par RAMSES III réussirent, sous le nom de Philistins, à s’établir dans la région côtière entre Gaza et le Mont Carmel. Poursuivant sa campagne militaire, Pharaon reprit possession de la Palestine pour peu de temps car, dès le début du règne de RAMSES III (1187-1156) AJC en 1150 AJC, l'Égypte dut se replier sur elle-même et abandonner tout espoir de reconquérir son empire.
Les Philistins étendirent rapidement
leur territoire : en s'emparant de la plaine de Séphéla ils constituèrent un état comprenant cinq grandes cités, chef-lieu de provinces : Gath, Equon, Ashdod, Ascalon et Gaza. Dans cette dernière ville était célébrée la grande fête en l’honneur de DAGON, dieu connu à Ugarit et en Syrie où il était considéré comme le père de BAA.
A cette époque, chaque ville et royaume avait son dieu “protecteur” : à Sidon (ESHMOUN), à Tyr (MELQART), à Damas (BAAL), au royaume de Moab (KAMOSH). La
Palestine ressemblait alors à une mosaïque de peuples et de religions. Dans cet imbroglio, les dieux du trône étaient de nature "atmosphérique" tel YAHVE, le manipulateur de l’Eclair. En revanche le peuple implorait toutes sortes de “protecteurs” matérialisés dans des stèles, des sources, des arbres... dotés de facultés particulières : le pouvoir de soigner les maladies, de protéger les troupeaux, d’assurer la fécondité des femmes...
Selon une coutume qui remontait au temps où
elles étaient nomades,
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les tribus israélites, sans se mêler aux autochtones palestiniens, se groupaient en ensembles autonomes, sous la protection de YAHVE.
Les Israélites, pour leur sécurité, habitaient des cités fortifiées, mais les paysans hors des murs, vivaient le plus souvent dans la campagne avec leur troupeau. Seuls les artisans, les marchands, les soldats demeuraient constamment dans les villes ; En cas de guerre, les tribus élisaient un "juge" pour mener les hommes mobilisés au
combat.
PÉRIODE DES DEUX ROYAUMES
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Royaume d’Israël
Vers 900 AJC, alors que les cités israélites étaient tour à tour en guerre les unes contre les autres Le roi Omri fonde le royaume d’Israël, royaume centralisé dans lequel les anciennes cités-États et les chefferies des hautes terres se trouvent administrées dans une nouvelle capitale unique, Samarie, que fonde Omri. La dynastie des Omrides existera pendant environ 200 ans, de la fin du X au VIII siècle AJCC. (environ 930-720 AJC)
Les Omrides règnent désormais, non plus sur une chefferie ou une cité- État, mais sur un territoire qui déborde très largement les hautes terres et les vallées centrales, s'approchant de Damas et incluant le Jourdain ainsi qu'une partie de Moab. Le palais omride de Samarie, en pierre parfaitement taillée, fait près de (2.500 mètres carrés).
Sous les Omrides, le royaume d'Israël se développe considérablement, les modes de production s'industrialisent (les jarres dans lesquelles l'huile d'olive et le vin sont commercialisés ont désormais une taille standardisée), l'alphabétisation se répand (ces jarres portent des indications de provenance, destinées à être lues, le nombre d'ostraca retrouvés augmente rapidement) et une administration centralisée est en place (Samarie est un centre administratif important). Elle gère une population composite dont une partie est de culture israélite (d'origine nomade sédentarisés sur les hautes terres) et une partie de culture cananéenne (d'origine citadine). La population du royaume d'Israël sera estimée à 350 000 habitants vers 800AJC.
À l'époque des Omrides, Jérusalem n'est encore qu'un petit village de montagne sans fonction administrative, sans ostraca, sans jarres. L'absence d'ostraca montre qu'on n'écrit pas à Jérusalem
La population totale du royaume d’Israël sera estimée à 35 000 habitants vers 800 AJC.
A cette époque, l'ancienne langue sémitique de Canaan, affinée et policée, était devenue l'Hébreu qui permit la naissance d'une littérature fortement influencée par l'Égypte
ACHAD, descendant des Omrides, sous la pression de son épouse, fille du roi de Tir, introduisit le culte de BAAL dans le temple de Samarie.
En 854 AJC, ACHAD, à la tête d’une armée puissante affronta et repoussa les troupes du roi assyrien. Mais fut tué en 853 AJC lors d’une bataille en Galaad. Des
tablettes assyriennes retracent ces événements.
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Des fouilles effectuées à Mégiddo attribuent à ACHAR des constructions hydrauliques permettant le ravitaillement en eau de Samarie en cas de siège.
L’Assyrien TOUKOUL III (746-727 AJC) s'empare de la Galilée en 732
AJC et en déporte les habitants.
En 722 AJC SARGON II roi d’Akkad, investit Samarie, déporte en Assyrie l’élite de la population qu’il remplaça par des colons babyloniens qui introduisirent leur dieu ASSOUR dans le pays tout en autorisant BAAL et YAHVE les
considérant comme des divinités secondaires locales.
.
Ce fut la fin du royaume d’Israël.
Remarque : les descendants des colons babyloniens ne se mêlèrent pas aux autochtones et formèrent des communautés dont les descendants, appelés Samaritains, se retrouvèrent tout au long des histoires juives
ROYAUME DE JUDA
ROBOAM (931-913 AJC devint roi de Judée. La cinquième année de son règne, le pharaon SHESHONQ Ier attaque et pille de nombreuses villes. Des traces archéologiques de destruction, en particulier à Megiddo ou Tel Rehov, permettent de dater cette conquête aux environs de 925.AJC. Le roi devint le vassal de SHESHONQ à qui il versa une rançon.
Les premiers successeurs de ROBOAN de 913 à 722 AJC ne créèrent pas d’événements majeurs. Mais la ruine de Samarie en 722 AJC obligea EZECHIAS (716-687 AJC) à entreprendre une campagne contre les Assyriens qui occupaient le nord du pays et à engager une profonde réforme pour rétablir le culte de YAHVE sur l’ensemble du territoire
Selon Wikipédia : En 722 AJC, le royaume d'Israël disparaît après la prise de sa capitale Samarie par les Assyriens. Le royaume de Juda a alors le champ libre pour son développement. Des habitants du royaume d'Israël affluent vers le Sud, à Jérusalem, capitale du petit royaume de Juda. Le développement de la ville est alors foudroyant et sa population passe à 12.000 habitants sur une superficie de soixante-quinze hectares.
À la fin du VIIIe siècle AJC, tous les signes archéologiques d'un royaume centralisé (sceaux, ostraca, poids marqués, poterie standardisée) sont présents. Si cette évolution a laissé peu de traces à Jérusalem, elle est
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particulièrement remarquable dans les cités fortifiées et centres administratifs que sont Bersheeba, Tel Arad et Lakish.
En 701 AJC, le roi Ézéchias fit creuser à Jérusalem un tunnel pour amener l'eau de la source du Gihon dans la ville, ce qui assure l'approvisionnement en eau en cas de siège. En forme en S, il a été creusé à partir des deux bouts. À l'endroit de la rencontre, en commémoration de l'exploit technique, Ézéchias fait graver une stèle Il s'agit d'une des plus anciennes inscriptions connues en hébreu archaïque. Par ailleurs, dès le début du VIIe siècle AJ.C., des gens sachant lire et écrire se trouvent dans toutes les classes sociales : graveurs de pierres tombales, officiers, ouvriers.
On constate que, à partir de cette époque où l'écriture se généralise, les récits bibliques se mettent en correspondance avec l'histoire telle qu'on la reconstitue à travers l'archéologie.
Sous Josias, avec l'effondrement de la puissance assyrienne, les ambitions de Juda sur le royaume du nord
semblent pouvoir se concrétiser. En centralisant le culte à Jérusalem et en éradiquant les cultes concurrents, Josias organise une nation qui adore un dieu unique dans un temple unique. Ainsi, il participe à l'élaboration du Deutéronome qui attribue une histoire commune au nord et au sud et qui proclame un culte exclusivement monothéiste.
Période babylonienne
En 587 av. J.-C., Nabuchodonosor prend Jérusalem , pille le temple et déporte le roi Yehoïakîn (Joaquin) et les notables à Babylone. Les Babyloniens établissent Tsidquya (Sédécias) gouverneur de Jérusalem. Celui-ci se révolte, ce qui entraîne un nouveau siège, temporairement levé par l'intervention d'une force égyptienne. Nebouzarradan, général de Nabuchodonosor, revient et prend définitivement la ville. Mais cette fois, le Temple est complètement détruit, les murailles de la ville aussi, l'incendie semble avoir été général. La ville perd environ 90 % de sa population et Juda environ 60 %. Cependant, un gouvernement autonome semble avoir existé à Mitzpah (à 13 km au nord de Jérusalem)
Période perse :
Les Perses battent les Babyloniens et créent un vaste empire allant de la Perse à l'Anatolie et à l'Égypte. Cyrus le Grand applique une large tolérance religieuse dans toute la région, qui prend un nouvel essor. Après une captivité de 70 ans, les Juifs sont autorisés par Cyrus le Grand à regagner (sous la conduite d'Ezra. La Judée, est devenue sous le nom de Yehoud une simple
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province de l'empire Perse. Ils retournent à Jérusalem, y ramenant les trésors du temple. Sous le gouverneur Zorobabel, le Temple est reconstruit. Si les villes côtières phéniciennes de la Via Maris connaissent alors un bel essor45, ce n'est pas totalement le cas de la Judée, qui est en dehors des voies de communications. Des familles exilées à Babylone rentrent à Jérusalem mais en petit nombre. Malgré de nombreuses fouilles dans la région, aucune construction massive de cette époque n'a été retrouvée
Enfin, durant le règne d'Artaxerxes Ier (465-424), Néhémie reconstruit les murailles de Jérusalem.
À la fin du IX siècle AJC, l'expansion d'Israël est contrecarrée par la politique expansionniste du royaume araméen de Damas.
Les campagnes militaires de Damas affaiblissent le royaume d'Israël et les cités philistines. La destruction de la ville philistine de Gath à l'ouest de Juda offre de nouvelles opportunités au royaume pour se développer. L'affaiblissement de Gath favorise Juda qui étend son territoire dans la Shéphélah, voir dans la vallée de Beer-Shev’a. Le retrait d'Israël et des cités philistines autorise l'expansion du royaume et lui permet d'accéder au statut de puissance régionale. Près de la source de Gihon, on a retrouvé des sceaux et des bulles indiquant des liens avec les Phéniciens. Une administration se
met en place, sous l'influence directe ou indirecte des Omrides et de leurs contacts avec la côté phénicienne9
La ruine de Samarie en 722 AJC obligea EZECHIAS (716- 687 AJC) à entreprendre une campagne contre les Assyriens qui occupaient le Nord du pays.
Malheureusement, en 701 AJC, SENNACHERIB (705-687 AJC), souverain assyrien, mit le siège devant Jérusalem et EZECHIAS ne s'en tira qu'en
payant un lourd tribut.
Sous le règne du roi de Juda, MANASSE (687-642 AJC), l'influence de l'Assyrie fut si forte que ce souverain fut obligé d’installer le culte des dieux des vainqueurs dans le temple de YAHVE.
Lorsque JOSIAS (640-609 AJC) monta sur le trône de Juda, l'étreinte de l'Assyrie s'étant desserrée, celui-ci, non seulement élimina de son royaume l'occupant, mais y rétablit le culte de YAHVE puis s'empara de la province de Samarie ainsi que d'une
portion du pays philistin.
En 609 AJC, JOSIAS s'étant opposé au passage de l'armée égyptienne fut battu et tué à Megiddo. A cette époque, de gré ou de force, beaucoup
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d’Israélites s’expatrièrent en Égypte.
Son successeur JOIAQUIM (609-598 AJC), sous le contrôle de
Pharaon NEKHAO (610-595 AJC), monta sur le trône de Jérusalem. Mais en
605 AJC, NABUCHODONOSOR II (605-562 AJC), roi de Babylone, écrasa les Égyptiens sur l'Oronte et, en 597 AJC, investit une première fois Jérusalem dont il déporta à Babylone les notables et le roi JOIAQUIM.
En 587 AJC, après un long siège, Jérusalem tomba aux mains de NABUCHODONOSOR II. La ville fut pillée,
le temple détruit, l'élite de la population déportée à Babylone. Le roi SEDECIAS (597-587 AJC), en ce temps-là sur le trône, eut les yeux crevés.
Après 587 AJC, il ne resta en Juda qu'une population misérable principalement rurale, sous l’autorité de GODOLIAS, ministre du roi déchu, établi par le vainqueur gouverneur de Judée. Une partie de la population se révolta, assassina GODOLIAS et, avec lui, la garnison babylonienne. Par peur de représailles, de nombreux Judéens se
réfugièrent en Égypte. Le territoire de Juda fut dès lors rattaché à la préfecture de Samarie et repeuplé par les peuples voisins (Edomites, Ammonites et des tribus d'Arabie) qui se mêlèrent aux Israélites des campagnes restés sur place.
EXIL ET PÉRIODE PERSE (587-333 AJC)
Les archives de Babylone de cette époque font état de quelques cinquante mille déportés israélites et précisent que seuls les grands furent emprisonnés et nourris alors que ceux de moindre rang durent cultiver les terres du roi ou travailler sur ses chantiers dont la construction de la grande ziggourat qui nécessita la participation de dix mille prisonniers de diverses ethnies parlant des langues différentes.
Lorsqu'ils rentrèrent en Palestine, les exilés (ou leurs
descendants), qui avaient travaillé à cette construction, en firent un tel récit que les générations suivantes en gardèrent l'image d'une tour montant vers le ciel, édifiée par des hommes dont le langage avait été brouillé par YAHVE.
Les réfugiés à Babylone écrivent la bible composée : de leur propre histoire, des légendes d’un passé glorieux d’un grand royaume, de légendes babyloniennes comme celle du roi Sargon sauvé des eaux. La nouvelle religion reprend le principe d’un dieu unique
Lors de leur exil, progressivement, certains Israélites ayant acquis une aisance relative rétablirent entre eux une vie communautaire et le culte de
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YAHVE. Des documents babyloniens précisent que beaucoup étaient devenus fermiers, propriétaires ou fonctionnaires.
Cette élite manifesta une intense activité religieuse et intellectuelle inspirée à la fois par ses propres traditions et par la mythologie, les lois, les coutumes et la littérature babylonienne.
Par ailleurs, dans tout le Moyen-Orient, la renommée du dieu babylonien MARDOUK comme étant le plus puissant des dieux, renforça chez les Israélites l’idée que YAHVÉ, parce qu’il
était unique et singulier, devait, lui être supérieur. Forts de cette foi, ils renouvelèrent l’alliance que leurs ancêtres avaient conclue avec ce dieu. Quant aux emprunts effectués par les Israélites à la civilisation et à la religion babylonienne, Jean Bottera précise : chaque fois que les auteurs de la Torah prirent à des étrange rs un thème mythique ou légendaire, ils l’ont totalement refondu en l’adaptant à leur propre sentiment monothéisme.
CYRIUS II, en 539 AJC, s'étant
proclamé roi de Babylone autorisa les Israélites à retourner dans leur pays. Autour de Jérusalem, les terres abandonnées furent remises en culture et des maisons reconstruites. Les Juifs du Retour proclamèrent la loi de YAHVE, loi de l'état sous l’autorité du Grand Prêtre assisté par une assemblée de notables. Le nouveau temple fut édifié ; sa construction dura cinq ans (520-515 AJC). Les autorités religieuses reconstituèrent une collection du “Livre Saint” en fonction des
diverses réflexions et emprunts qu’ils avaient élaborés et choisis lors de leur séjour en Babylonie. Cette version comportait déjà l’essentiel des textes du Deutéronome et fut achevée au cours des deux siècles suivants.
ESDRAS, prêtre juif, nommé par le roi perse ARTAXERES (405- 424
AJC) fit restaurer les remparts de Jérusalem et joua un rôle important dans la réforme des lois du Judaïsme. Le pays fut dorénavant appelé Judée et il s’y établit en divers centres urbains, non des
temples mais des “lieux de prière”, des “synagogues” au seul usage de la parole, de la prière et de l’enseignement. Le “sacrifice" y était exclu car réservé à l’unique temple de Jérusalem.
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PÉRIODE HELLÉNISTIQUE (333-63 AJC)
Très vite après la fondation d'Alexandrie par Alexandre le Grand ; la diaspora juive s'y développa fortement, en particulier autour du Palais royal ; à tel point que deux des cinq quartiers de la cité sont réservés aux Juifs continuant à y parler la langue hébraïque et à étudier les textes de l'Ancien Testament.
. Ptolémée II proposa à 72 juifs érudits, de 250 à 150 AJC, la traduction en grec de
tous les livres israélites, textes sacrés et narrations profanes. C’est ce qu’ils firent et fut appelé « Bibles des Septantes »
En 333 AJC, la Judée se soumit paisiblement à l'autorité d'Alexandre le Grand. Après la mort de celui-ci, en 323 AJC, le pays tomba sous le joug des PTOLÉMÉE d'Égypte qui le gouvernèrent jusqu'en 198 AJC.
En 198 AJC, la victoire d'ANTIOCHUS III (223-187 AJC), près des sources du Jourdain, sur PTOLÉMÉE
V (204-181 AJC), fit perdre aux Grecs d'Égypte la Palestine au profit des Grecs séleucides.
ANTIOCHUS IV (175-164 AJC), pour unifier ses états, par édit, leur imposa la culture et la religion grecques. Le temple de Jérusalem fut consacré à ZEUS et la pratique du judaïsme devint passible de mort. Une persécution religieuse s'abattit sur les couches populaires rétives à l'hellénisme.
En 168 AJC, éclata une révolte menée par des prêtres. Cette insurrection dura vingt ans
durant lesquels se créèrent quatre sectes fidèles à YAHVE et hostiles à l'occupant : les Pharisiens, les Sadducéens, les Esséniens et les Zélotes.
Les Esséniens croyaient que leur fondateur, le “maître de justice” ou le ”messie de l'Esprit, avait eu la révélation par YAHVE des mystères cachés dans les Écritures Saintes et qu'à son tour, il les avait transmis aux membres de la secte. Ces mystères portaient sur la fin des temps et sur le plan
de Dieu pour le monde.
La “fin des temps” était, pour les Esséniens, l'avènement du règne de Dieu et sa prise de possession du monde. Pour eux, cette fin était au premier acte de sa réalisation. Eux seuls le savaient et devaient vivre en conséquence.
Le “plan de Dieu” se présentait sous deux formes : l'une de lumière et de vérité, l'autre de ténèbres et de perversion. A la “fin du temps”, la première l'emporterait sur la seconde
Puisque la fin était imminente, les Esséniens devaient vivre dans cette perspective et, dès maintenant, mener une vie de justice, de sainteté, de pauvreté, de pénitence et de purification grâce à de multiples ablutions
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journalières et à des réunions liturgiques quotidiennes accompagnées de repas sacrés, lesquels devaient assurer la participation des Esséniens à la vie de Dieu et des anges.
Les Sadducéens (noblesse sacerdotale), maîtres du temple, étaient attachés exclusivement à la “Loi écrite” interprétée avec rigueur. Ils refusaient les croyances populaires (existence des anges et des esprits, la résurrection et l'immortalité de l'âme dans l'Au-Delà.
Les Pharisiens,
au contraire, admettaient la “Loi orale” et, s'ils étaient stricts dans leurs pratiques des préceptes, ils n'en admettaient pas moins les coutumes et traditions populaires et particulièrement l'attente messianique et la certitude de la résurrection.
En 145 AJC, avec l'appui de Rome, le roi de Syrie reconnut l'indépendance de la Judée, Jérusalem fut libérée, son temple purifié et rendu au culte de YAHVE. SIMON (140-135 AJC), de la dynastie des MACCABÉE, proclamé
roi de Judée, frappa sa propre monnaie et entreprit la conquête de la Transjordanie. Ses successeurs furent HYRCAN 1er (135-104
AJC), Juda ANTIGONE (104-103 AJC).
Alexandre JANNÉE (103-76 AJC), ayant pris le titre de roi de Judée, annexa la Galilée, l'Idumée et le littoral méditerranéen avec Jaffa et Alep. Il imposa le judaïsme à toutes les cités de son obédience. Il prit position en faveur des Sadducéens contre les Pharisiens qui avaient avec eux une grande partie du peuple et l'appui
du roi de Séleucie. Ce dernier envahit la Palestine et, avec le concours des Juifs rebelles, battit JANNÉE près de Sichem puis se retira sans poursuivre le combat. Dès lors, le roi de Judée exerça une sanglante répression contre les rebelles, faisant crucifier huit cents d'entre eux et égorger leurs femmes et leurs enfants.
A la mort du roi, sa veuve lui succéda sur le trône (76-67 AJC) et choisit son fils HYRCAN II pour exercer le souverain pontificat. Contrairement à son époux,
elle s'entoura de conseillers pharisiens. Dès lors, leurs partisans animèrent seuls, tant à Jérusalem que dans les villages et villes de Judée, les synagogues qui étaient des assemblées de prière et d'études.
PÉRIODE ROMAINE (63 AJC-324 de notre ère)
A la mort de la reine, en 67 AJC, HYRCAN II devint roi mais, sous la menace, céda à son frère ARISTOBULE II (67-63 AJC) ses pouvoirs de roi et
de Grand Prêtre. En 63 AJC, POMPÉE, général romain, s'empara de Jérusalem et transforma la Judée en province romaine, sous l’autorité religieuse du Grand Prêtre.
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En 48 AJC, CESAR confirma HYRCAN II dans ses fonctions de Grand Prêtre et nomma ANTIPATER procureur de Judée alors que ses deux fils devinrent l'un, PHASAEL, gouverneur de Jérusalem, l'autre HERODE, gouverneur de Galilée
LE TEMPS DES INSURRECTION
En 41 AJC, ANTOINE nomma PHASAEL, Tétrarque de Judée, et HERODE, Tétrarque de Galilée et Samarie, mais en 40 AJC, les Parthes envahirent le pays, se saisirent d'HYRCAN et de PHASAEL, et nommèrent ANTIGONE (40-37 AJC) Grand Prêtre. PHASAEL se suicida ; HYRCAN fut mutilé et emmené en Parthyène. Quant à HERODE, qui avait fui à Rome, avec l'aide des légions romaines, en 37 AJC, s'empara de Jérusalem. Devenu roi, HERODE (22-4 AJC) nomma Grand Prêtre son beau-frère MARIMME mais, croyant
être victime de complots, le fit assassiner ainsi que les membres de sa famille et le vieil HYRCAN.
Bien que dépendant de Rome, HERODE posséda une réelle autonomie de décision. Du fait de ses qualités de général et de diplomate à la fin de sa vie, il régnait sur un royaume comprenant toute la Palestine et de vastes territoires en Transjordanie. Au cours de son règne, il édifia à Jérusalem : tours, forteresses, murailles et un palais d'un luxe incomparable et redonna au temple son
éclat. Sur ses terres, pour améliorer les récoltes, il construisit des aqueducs et des systèmes d'irrigation. Dans de nombreuses villes, il créa : gymnases, théâtres et stade ; dans certaines d'entre elles, des temples à la gloire de l'empereur romain. Il dut réprimer de nombreux soulèvements de Juifs que les Romains écrasaient d’impôts.
A la mort d'HERODE, en 4 AJC, ses trois fils reçurent : ARCHELAUS (4 AJC-6 après JC), la Judée, la Samarie et l’Idumée ; ANTIPAS (4
AJC-39 après JC), la Galilée et la Pérée ; PHILIPPE (4 AJC-39 après JC), les territoires au Nord de la Décapode
En 6 ans après JC, ACHELAUS fut destitué et remplacé par un procurateur romain, COPONIUS (6 à 9 de notre ère), pourvu d'un commandement militaire et d'une juridiction autonome. Celui-ci résidait ordinairement à Césarée et ne séjournait à Jérusalem que pendant les fêtes juives afin de veiller à ce qu'elles ne dégénèrent pas en émeutes. Mais une garnison
romaine y stationnait en permanence.
Le procurateur, comme avant lui HERODE, avait autorité pour nommer ou déposséder le Grand Prêtre. Par ailleurs les tribunaux juifs, en particulier le conseil sacerdotal (sanhédrin), continuaient à rendre la justice selon leur droit propre, sous réserve que toute condamnation à mort fut ratifiée
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par le procurateur avant de devenir exécutoire. Quant aux impôts directs, ils étaient perçus par les Romains eux-mêmes, alors que les indirects étaient affermés à des particuliers juifs qui en assumaient la perception. Selon FLAVIUS JOSEPHE, afin d'organiser la perception des impôts directs, il aurait été procédé à un recensement en Judée, lors de leur constitution.
La tension entre Juifs et Romains ne cessa de grandir. La volonté de chasser Rome culmina lorsque se soulevèrent
et proclamèrent une République juive sous l’autorité de JUDAS le Galiléen.
ANTIPAS, après la mort de son frère ARCHELAUS (6 ans après JC), prit le nom dynastique d'HERODE-ANTIPAS. Grand constructeur comme son père, il bâtit notamment la ville de Tibériade. Durant son règne, il dut mâter les agitateurs zélotes et esséniens dont certains furent exécutés. Selon FLAVIUS-JOSEPHE, un ascète juif, connu sous le nom de JEAN- BAPTISTE, fut décapité en 28 après JC. HERODE- ANTIPAS, en 39 après
JC, fut déchu de son titre et exilé en Gaule.
L'un des procurateurs, PONCE-PILATE (26-36 de notre ère), est connu pour ses actes provocateurs à l'égard des sentiments religieux des Juifs de Jérusalem. Un massacre de Samaritains (descendants de colons assyriens, qu'il avait ordonné lui valut d'être suspendu et de rentrer à Rome pour en rendre compte.
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AGRIPPA 1er (37-44 de notre ère), petit-fils d'HERODE, reçut de
l’empereur romain CALIGULA, en l’an 37, le territoire de PHILIPPE ainsi que l'Abilène, avec le titre de roi ; en l’an 39, le territoire d'ANTIPAS qui venait d'être exilé, puis en l’an 41, de l’empereur CLAUDE, les territoires d'ARCHELAUS. Dès lors, AGRIPPA 1er régna sur un territoire égal à celui de son grand-père HERODE. l
A la mort d'AGRIPPA 1er, l'empereur CLAUDE fit du royaume du défunt une
province romaine administrée par un procurateur, CUSPIUS FAVUS (44-46 de notre ère). En l’an 49, il nomma AGRIPPA, fils du
précédent, inspecteur du Temple de Jérusalem, avec droit de nommer le Grand
Prêtre et, en 53, lui remit une partie de son héritage, avec le titre de roi.
Bientôt, des incidents se multiplièrent en Palestine entre Juifs et Romains. Les Zélotes (zélés serviteurs de la loi juive et de Dieu) excitèrent la population contre l'occupant. Des soi-disant
messies enflammèrent les foules par leurs prophéties et oracles. Le pays sombra peu à peu dans l'anarchie.
Sous le gouvernement du dernier procurateur GESSIUS- FLAURUS (64-66), une émeute éclata à Jérusalem ; le soulèvement s'étendant à tout le pays, commença ce qui fut appelée "la Première Révolte" juive. Le Grand
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Prêtre fut tué par les émeutiers ; les garnisons romaines de Massada et de Jérusalem furent massacrées et les insurgés proclamèrent l'indépendance de l'État juif.
En l’an 67 de notre ère, VESPASIEN, chargé par l'empereur NERON d'écraser la révolte, s'empara de la Galilée. A la mort de NERON, en 69, VESPASIEN proclamé empereur confia à son fils TITUS la mission de mâter la Palestine. En 70, Jérusalem fut prise, son temple incendié ; les Juifs en masse furent vendus
comme esclaves. Le pays devint une province gouvernée par un légat romain. Mais la répression dura jusqu'à la prise de la dernière forteresse (Massada), en 73 de notre ère...
Le temple ayant été détruit, la fonction de Grand Prêtre et le sanhédrin supprimés, les Juifs survivants se regroupèrent peu à peu autour des docteurs de la Loi d'obédience pharisienne. La ville de Jamnia devint le centre du judaïsme intellectuel et doctrinal. Progressivement, après une période de
ruines et de reconstruction, le pays d'Israël fut à nouveau couvert de villes et de bourgades prospères.
En 130, l'empereur HADRIEN, en interdisant la circoncision au même titre que la castration, provoqua un nouveau soulèvement appelé la "Seconde Révolte juive" (132-135). Les insurgés juifs, sous la conduite de BAR- KOKHBA, harcelèrent les Romains avant de les affronter en combat rangé et de s'emparer de Jérusalem où leur chef fut proclamé "Roi-Messie". Avec
de nouvelles troupes, les Romains, en 134, reprirent Jérusalem et réduisirent une à une les forteresses israélites. Dans celle de Békar, au cours des combats, BAR-KOKHBA trouva la mort ; la répression fut terrible ; les déportations de Juifs réduits en esclavage, s'ajoutèrent aux massacres. Jérusalem devint une colonie romaine dédiée à Jupiter ; la Judée une "province de Syrie-Palestine".
Vers la fin du 1er siècle de notre ère, une œuvre considérable fut accomplie à Jamnia.
C'est là que le texte des ÉCRITS, selon le canon hébraïque, fut établi une fois pour toutes. La Torah fut à jamais, pour les Juifs, l’élément fixe dans un monde instable et destructeur.
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LE CHRISTIANISME.
Le peuple juif, au cours de son histoire, vécut sous la menace de ses ennemis ou sous leur joug, lors de l’occupation d’Israël. Durant les cinq derniers siècles AJC, il subit la présence sur son sol, successivement, des Assyriens, des Perses, des Grecs (d’Égypte ou de Madédoine) puis des Romains.
Si les Juifs, au cours de cette période, se résignèrent par force, ils n’en furent pas moins souvent prompts à se révolter contre l’occupant, par conviction nationaliste mais surtout religieuse.
En effet, ils croyaient ardemment en YAHVÉ qui, à travers la Torah qu’ils connaissaient par cœur, leur avait promis “la venue d'un Messie (oint de Dieu) descendant de DAVID, en vue de les délivrer du joug des païens, et de rétablir sur terre le "royaume de Dieu”.
Au fur et à mesure que les années s’écoulaient, les Juifs savaient que le retour de Dieu sur terre était plus proche. Aussi, en 168 AJC, ils se révoltèrent contre ANTIOCHUS IV qui avait offert un sacrifice à ZEUS
sur l’autel du temple de Jérusalem et voulait leur imposer, par la force, les mœurs, la culture et la religion grecs. Il s’en suivit une guerre qui dura vingt ans, au terme de laquelle Jérusalem fut libérée, le temple purifié et rendu au culte de YAHVÉ. SIMON (140-135 AJC), de la dynastie des MACCHABÉES, obtint l’indépendance d’Israël et fut reconnu chef, grand prêtre et ethnarque (gouverneur) de la nation juive.
Cette période de liberté fut aussi celle d’une grande ferveur religieuse et
d’une certitude renouvelée du prochain rétablissement du royaume de Dieu sur terre.
Vers l’an 100 AJC, un prêtre sadducéen du temple de Jérusalem se sentit investi par Dieu d’une mission réformatrice. Avec quelques disciples, il forma un groupe connu sous le nom d’Esséniens. Ceux-ci s'établirent sur le site de Qumrân, au-dessus de la Mer Morte, où furent retrouvés, en 1947, 800 manuscrits dont 12 à peu près complets. Ces documents furent divisés en trois catégories : des textes
conformes à ceux de la Torah, les livres apocryphes, non reconnus par le judaïsme rabbinique, et les ouvrages précisant la doctrine essénienne, dont Les Hymnes, la Règle et l’Écrit de Damas.
La doctrine essénienne : Le fondateur de la communauté, le “Messie de l’Esprit" ou “Maître de Justice" se disant avoir reçu en dépôt la révélation des mystères cachés dans les Écritures Saintes. Le Maître, à son tour, aurait transmis à ses disciples
ces révélations concernant :La fin des temps : Pour
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les rabbis juifs d'alors, il existait deux temps - présent et à venir - du Royaume : celui du présent où Dieu régnait de jure (De droit) ,et celui de la fin des temps, où Israël sera libéré de l'occupation et Dieu régnerait de fac », révélant le royaume à tous.
- . Cette fin est proche ; nous sommes au premier acte du drame final. Seuls, nous, les Esséniens le savons et devons vivre en conséquence.
- Le plan de Dieu : l’univers et les hommes ont été créés selon un plan divin prédéterminé comprenant deux fractions opposées : l’une de vérité, l’autre de perversion. La première s’identifie au Prince des Lumières et la seconde à L’Ange des Ténèbres. A chaque génération, une partie des hommes se range derrière l’Ange des Ténèbres, tandis que l’autre suit le Prince des Lumières. A la fin des temps, les Fils de lumières doivent l’emporter sur les Anges des Ténèbres.
- Conclusion : puisque la “fin” est imminente, il faut, tout de suite, vivre dans cette perspective. Les “élus”, quand Dieu aura triomphé, seront comme les Princes des Lumières. Pour parvenir à la sainteté, les membres de la communauté doivent faire un effort de “séparation refus de l’argent et des plaisirs, abstention du mariage, observance d’une vie austère, avec repas communautaires, des rites religieux (psaumes et hymnes), des règles de pureté (purification par l'eau) et respect à la lettre de la Loi de MOÏSE.
Certains manuscrits de Qumrân évoquent l’usage du châtiment par
crucifixion :
“S’il arrive que quelqu’un espionne contre son peuple, livre son peuple à une nation étrangère et fasse du mal à son peuple, vous le suspendrez sur le bois et il mourra...”
“S’il arrive qu’un homme coupable de meurtre s’enfuie... vous le suspendrez lui aussi sur le bois et il mourra, et son cadavre ne passera pas la nuit sur le bois, mais vous l’ensevelirez le jour-même car sont maudits de Dieu et des
hommes ceux qui sont suspendus sur le bois...”
Le fondateur de la communauté, le Messie de l’Esprit, le Maître de Justice, choisi par Dieu pour révéler aux “Élus” le message de la Nouvelle Alliance, décéda en 63 AJC. Dès lors, la communauté quitta Qumrân et se retira à Damas.
Vers l’an 4 AJC, commença, en Palestine, une période de troubles due à l’attente du Messie et à la haine des Romains qui punissaient de mort tous ceux qui incitaient le peuple à la
révolte. Aussi, la communauté essénienne regagna son refuge de Qumrân. Celle- ci, augmentée de jeunes disciples, restaura les bâtiments, vénéra son fondateur, le Maître de Justice, et attendit son retour à la “fin des temps”...
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La nouvelle communauté prit un caractère paramilitaire, comme en témoigne l’un de leurs récits “La Règle de la guerre des Fils de Lumières contre les Fils des Ténèbres”. Il semblerait que certains membres soient allés dans le peuple annoncer l’arrivée imminente du Messie qui devait préparer le rétablissement du royaume de Dieu sur terre. Ils auraient aussi incité les Juifs à se révolter contre les Romains.
En représailles à leurs activités subversives, les Romains traquèrent
les Esséniens. Beaucoup quittèrent Qumrân. Dans l’été 68 de notre ère, les troupes auxiliaires romaines détruisirent ce site en tant que repaire de maquisards et massacrèrent les membres qui y étaient restés.
Des textes mentionnent la participation active des Esséniens à la première révolution juive de 64 à 70 de notre ère. Cette dernière date est celle du contrôle de Jérusalem par les troupes romaines qui incendièrent le temple et déportèrent en masse les Juifs.
Dès lors, la
Palestine devint une province romaine gouvernée par un légat. La seconde révolte juive (132 à 135 de notre ère) fut réprimée plus violente encore que la précédente.
En suivant les témoignages des seuls documents authentifiés je suis arrivé à la seconde révolte juive (132 à 135 de notre ère) sans avoir rencontré de textes, relatant les faits de JÉSUS et de ses apôtres durant les 30 premières années du calendrier Grégorien.
Pourtant de nombreux historiens en cherchèrent : Les
uns, ayant constaté que les légats responsables de la Palestine et les procurateurs de Jérusalem envoyaient régulièrement des rapports à l’Empereur, dépouillèrent scrupuleusement, en vain, les archives romaines entre les années 14 à 150 de notre ère.
D’autres, sachant que de grands écrivains romains dont nous possédons les œuvres, comme Tite-Live, Sénèque, Virgile, Plutarque, Tacite, furent les témoins de cette époque, cherchèrent, en vain, dans leurs manuscrits, une quelconque allusion
à cet événement. Seuls des récits (Pline le jeune, Tacite, Suétone...), datés entre (110 et 130, de notre ère) relatent des événements ou des réflexions relatifs aux premières communautés chrétiennes sans préciser comment elles se créèrent.
Philon (20 AJC-45 de notre ère), philosophe juif d’Alexandrie, laissa de nombreux commentaires de la Torah mais ne mentionna pas un événement relatif à JÉSUS
.
190
Les Esséniens de Qumrân, qui croyaient en l’imminence de l’arrivée du messie, n’ont laissé dans leurs manuscrits aucune allusion quant à cet événement, alors qu’ils auraient été les premiers à le signaler s’ils en avaient eu connaissance. Emile Puech, dans un article, confirme : “A Qumran, il n’y a nul témoignage des faits relatifs à JÉSUS”.
Bultmann Rudolf, en 1921, soutient que les Évangiles, seule source dont nous disposons pour connaître JÉSUS, ne témoignent pas
de sa présence. Nous devons loyalement reconnaître que nous ne possédons pas encore un fragment de texte de témoins oculaires de JÉSUS.
Voilà qui met fin à toute polémique : JÉSUS n’était pas, à son époque, un personnage exceptionnel, encore moins historique. Il n’a pas retenu l’attention des autorités politiques ni des chroniqueurs de son époque.
Si JÉSUS ne fut pas connu de ses contemporains, qui donc, pour la première fois, fit le récit de sa vie et de ses messages ?
On
prétend que l’écrivain juif Flavius-Josèphe (38-100) mentionna dans ses écrits JEAN-BAPTISTE, JÉSUS et son frère JACQUES. Mais de nombreux critiques considèrent ces allusions introduites par fraude par des mains chrétiennes dans des manuscrits maintes fois copiés.
LES ÉVANGILES
La bible rapporte que Dieu revêtit les prophètes de son autorité, pour communiquer sa volonté aux hommes, pour les garder dans le droit chemin et parfois les informer de l’avenir. Parmi ces prophéties on trouve celles relatives au Messie fils de Dieu. Selon chaque prophète.
Epoque de la venue du Messie :
Daniel prédit la venue du Messie : Depuis l'ordre qui sera donné pour rebâtir Jérusalem, jusqu'à la venue du Christ, chef du peuple, il s'écoulera
70 semaines d'années (490 ans).
Aggée prédit que le Messie honorerait de sa présence le temple reconstruit après la captivité. Encore un peu de temps, et j'ébranlerai le ciel et la terre, et le Désiré de toutes les nations viendra ... La gloire de cette dernière maison sera plus grande que celle de la première…et c’est dans ce lieu que je donnerai la paix
191
Lorsque David songeait à bâtir un temple, le Seigneur lui dit : Je mettrai sur ton trône un fils qui naîtra de toi ; j'établirai son trône pour l'éternité ; je serai son père et il sera mon fils.
Naissance et enfance du Messie : Mission de Jean-Baptiste :
Michée prédit la naissance du Messie à Bethléem : Et toi, Bethléem d'Ephrata, tu es très petite entre les villes de Juda ; mais c'est de toi que sortira celui qui doit être le Dominateur d'Israël.
Isaïe prédit la miraculeuse virginité de la mère du Messie : Voilà qu'une Vierge concevra et enfantera un fils, qui sera appelé Emmanuel (Dieu au milieu de nous
David prédit l'adoration des mages : Des rois de l'Arabie et de Saba lui apporteront des présents.
Osée prédit le retour d'Egypte : J'ai rappelé mon Fils de l'Egypte
Jérémie prédit le massacre des Innocents : On a entendu de grands cris dans
Rama, parce que Rachel pleure la perte de ses enfants.
Malachie prédit la mission de saint Jean-Baptiste : Je vais vous envoyer mon ange qui préparera ma voie devant ma face, et aussitôt viendra dans son temple le Dominateur que vous cherchez.
Vie publique du Messie, sa Passion et sa mort :
Isaïe prédit les miracles de Jésus : En ce temps-là, les aveugles verront, les sourds entendront, les boiteux marcheront droit, et la langue des muets sera déliée
David prédit ses vertus : Je suis pauvre et dans les travaux dès ma jeunesse
... J'accomplirai votre volonté, ô mon Dieu
Zacharie prédit son entrée triomphante à Jérusalem : Réjouis-toi, fille de Sion, car voici ton roi qui vient à toi, monté sur une ânesse et sur le poulain de l'ânesse.
David prédit la trahison de Judas : Celui qui m'était si uni, en qui j'avais tant de confiance, et qui mangeait de mon pain, a fait éclater contre moi sa
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trahison.
Zacharie dit quelle somme d'argent sera donnée au traître : Ils pèseront ma récompense trente pièces d'argent
David prédit la Passion du Sauveur : Ils m'ont donné pour nourriture du fiel, et dans ma soif ils m'ont abreuvé de vinaigre. Tous ceux qui m'ont vu se sont moqués de moi ..., ils ont secoué la tête en disant : Il a espéré au Seigneur, que le Seigneur le délivre et qu'il le sauve, s'il est vrai qu'il l'aime. Ils ont
jeté les yeux sur moi qu'ils avaient couvert de plaies. Ils ont percé mes mains et mes pieds ... Ils ont partagé mes vêtements, et jeté ma robe au sort partagé mes vêtements, et jeté ma robe au sort.
Isaïe prédit aussi la Passion du Sauveur : Il nous a paru un objet de mépris, un homme de douleur. Nous l'avons considéré comme un lépreux, comme un homme frappé de Dieu : il a été blessé à cause de nos iniquités, et nous avons été guéris par ses meurtrissures .... Dieu l'a changé lui seul de l'iniquité de tous.
Amos prédit les ténèbres qui arrivèrent à la mort du Sauveur : Le soleil se cachera en plein midi, et le Seigneur couvrira la terre de ténèbres.
Résurrection et ascension de Jésus-Christ :
Osée prédit la résurrection : Le troisième jour il ressuscitera, et nous vivrons en sa présence. O mort, je serai ta mort. Isaïe ajoute : Son sépulcre sera glorieux.
David prédit l'Ascension : Elevez-vous, portes éternelles, et le Roi de gloire entrera. Dieu est monté au milieu des acclamations de joie
XXXXXXXXXXXX
Ces, premiers textes décrivant JÉSUS à partir des prophéties de la bible seraient les épîtres que PAUL écrivit entre les années 50 et 60.
PAUL (15-67), fils d’une vieille famille juive de Tarse en Cilicie, fut élevé dans la stricte observance de la Torah, il aurait été instruit, dès son jeune âge, à Jérusalem pour y apprendre la loi avec Gamaliel (Docteur de la loi) né vers 20 avant JC et décédé en 53 après JC. De sorte qu’il passa sa vie sous le règne d’HÉRODE 1er et ses proches successeurs dont il garda le souvenir des principaux événements te que : le recensement à fin d’organiser la perception des impôts. Par ailleurs il se souvenait d’un procurateur qui avait autorité
193
pour nommer ou déposer le Gand Prêtre. Il se rappelait du conseil sacerdotal juif qui avait autorisation de rendre la justice sous réserve que le procurateur donne son accord pour exécuter les condamnés à mort.
JÉSUS ne s’étant pas fait connaître, Gamaliel se le décrivit en mêlant les événement politiques et religieux qui s’était déroulés dans la région, aux prophéties de la bible (voir ci-dessus). Lorsque Paul lui fut confié, Il lui conta l’histoire de JÉSUS. L’enfant troublé aurait dit « j’irai proclamer partout que JÉSUS fut crucifié et ressuscité pour sauver le monde ».
Plus tard PAUL s’est totalement mis au service de Jésus. Et son ami LUC médecin écrivit le premier évangile complété par Matthieu, qui rédigea son évangile en se référant aux seules Prophéties de la bible. A dix reprises il précise dans son livre : « C’est pour que s'accomplissent, en plénitude les paroles des prophètes ». L’évangile de Matthieu fut repris par Marc et Jean qui y ajoutèrent des faits qu’ils avaient vu ou dont ils avaient entendu parler et qu’ils attribuèrent à JÉSUS.
Quant aux dates où les évangiles furent écrits et celles où ils furent accessibles au public le débat n’est pas clos.
Il y a lieu de remarquer qu’aucun des évangélistes ne revendiqua d’être un apôtre de JÉSUS, Nous savons maintenant que c’est au deuxième siècle que le nom des supposés apôtres furent donnés aux évangiles
Les versions quasi définitives des divers écrits pour constituer le Nouveau Testament furent établies en 325 de notre ère, par le Concile de
Nicée. Les éditions suivantes devaient être conformes à ceux des différents codex (cahier) du IVème siècle, conservés au British Muséum, au Vatican et à la Bibliothèque Nationale de Paris. Lesquels servent de référence aux éditions actuelles.
QUELQUES DATES HISTORIQUES
L’Empereur Constantin 1er (280-370), sans changer la religion officielle de l’état dont il demeurait le pontife suprême, adhéra, en 311, aux conceptions chrétiennes et proclama la liberté d’en exercer le culte. Il fut sentimentalement chrétien mais ne fut baptisé que sur son lit de mort.
Sous la protection de la loi romaine, l’évêque de Rome s’installa au Palais du Latran ; des édifices de culte furent édifiés dans les grandes villes de l’Empire. L’organisation ecclésiastique se modela
sur celle de l’administration impériale ; chaque cité eut son évêque, secondé par des prêtres. En chaque province, l’évêque de la cité principale eut prééminence
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sur les autres.
Au cours des trois premiers siècles, il s’était créé des diversités théologiques entre les chrétiens d’Orient et ceux d’Occident. Le Concile
œcuménique, réuni à Nicée en 325 sur l’initiative de Constantin, adopta la
“règle de foi" (le Credo) qui fait toujours autorité.
“Je crois en Dieu, le Père Tout Puissant, créateur du ciel et de la terre. Et en Jésus-Christ, son fils unique, Notre Seigneur, qui a été conçu du Saint-Esprit, est né de la Vierge
Marie ; a souffert sous Ponce-Pilate, a été crucifié, est mort, a été enseveli, est descendu aux enfers ; le troisième jour, est ressuscité des morts, est monté aux deux ; il est assis à la droite de Dieu, le Père Tout Puissant, d’où il viendra juger les vivants et les morts.
Je crois au Saint-Esprit, à la Sainte Église catholique, à la communion des Saints, à la rémission des péchés, à la résurrection de la chair et à la vie éternelle"
Sous le règne de Constantin 1er, l’Empire était divisé en deux “diocèses” : l’Occident, avec Rome pour capitale, et l’Orient, avec Constantinople. La chute de Rome, en 476, investie par les Germains, n’entraîna pas la fin de l’Empire qui se perpétua en Orient jusqu’en 1453 sous le nom d’Empire byzantin.
CLOVIS (465-511) reconstitua l’unité de la Gaule. Vers les années
496, en se convertissant au christianisme, il obtint le soutien des évêques, seule force agissante dans ce pays livré
à l’anarchie. Dès lors, ses campagnes contre
les barbares idolâtres prirent l’allure de croisades en faveur du christianisme qui, en plus d’une force morale, devint un moyen de gouvernement parce que le roi, tenant son pouvoir de Dieu, gouverna en son nom.
Sous le règne de Charlemagne (747-814), à part les Iles Britanniques peuplées de païens celtes, à part aussi l’Afrique du Nord et une partie de l’Espagne sous la domination de l’Islam, l’Occident était entièrement catholique.
Différents
événements, dont le Traité de Verdun (813), l’invasion des Vikings (824-911) dans la Neustrie (région qui devint la Normandie), des Hongrois en Germanie, en Italie et dans l’Est de la France (917) furent à l’origine du partage de l’Occident et de l’instauration de la féodalité.
Durant le Moyen Age, l’Occident fut un monde morcelé, rural et frustre. En revanche, l’Orient et une partie de l’Europe de l’Est constitua une zone où la civilisation, sous l’influence asiatique, resta brillante
bien que menacée par l’Islam
195
Partout, le peuple chrétien, prisonnier des croyances et des obligations de sa religion, s’il voulait accéder après la mort au Royaume de Dieu et à la vie éternelle, était astreint à respecter les commandements, réciter les prières, assister aux offices du dimanche et des jours de fêtes obligatoires, respecter le jeûne du vendredi et du Carême, satisfaire aux sacrements : Baptême - Confirmation - Mariage - Pénitence et Communion pascales - Extrême- Onction...
Louis VI (1108-1137), avec
l’appui de l’Église dont la puissance morale et l’organisation matérielle étaient restées considérables, réussit à relever le prestige et l’autorité de la monarchie de droit divin. L’Occident se réveilla de sa léthargie. L’agriculture et le commerce retrouvèrent une certaine prospérité. Les populations des villes et des campagnes s’accrurent. Les paroisses se multiplièrent et encadrèrent fermement le commun des mortels, dans une religion toujours plus rigoureuse, brandissant à tout moment la
menace de la “damnation” envers qui ferait le mal et promettant aux fidèles respectueux des commandements, l’immortalité dans le Royaume de Dieu.
A cette époque, la légende de JÉSUS s'était, depuis si longtemps, glissée dans l'histoire de l'humanité qu'elle était enseignée et commentée comme une authentique biographie. Lors des offices religieux, les prêtres, au fil des dimanches et des jours fériés, dans leurs sermons, en déroulaient, chaque année, les principaux
événements de sorte que la vie des chrétiens en était tout imprégnée et que ceux-ci n'avaient d'autre objectif que de respecter les commandements, afin de ressusciter dans le Royaume de Dieu. Mais comment, en ce temps-là, les chrétiens percevaient-ils ce mystère ?
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Péninsule du Sinaï
ARABIE SAOUDITE
Il y a 15.000 ans AJC, époque où l'Europe était encore sous les glaces, l'Arabie connaissait d'abondantes pluies favorables au développement des savanes et des pâturages. Elle était habitée de nomades sémites cueilleurs et chasseurs qui utilisaient des outils de pierre taillée.
A partir de 5.000 ans AJC, la sécheresse progressant, les peuples de l'Arabie se divisèrent en deux blocs : ceux du Sud-Ouest, Yémen, connurent un climat relativement humide et développèrent
progressivement une
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civilisation d'agriculteurs sédentaires. Ceux du Nord récupérèrent les territoires des steppes arides et des déserts parsemés de quelques oasis et restèrent des nomades vivant de leurs troupeaux ou du pillage de provinces agricoles voisines.
Datant du 3e millénaire AJC, on a retrouvé un peu partout des tumuli abritant des chambres funéraires (Fizan, île de Bahreïn). Dans cette île et sur la côte du Golfe Persique, des vestiges (Même millénaire AJC) ont révélé
une culture semblable à celle de la Vallée de l'Indus. Des textes akkadiens font en effet état de liaisons commerciales entre l'Indus et la Mésopotamie via le pays de Dilmoun identifié comme étant la région de la côte arabique du Golfe Persique incluant l'île de Bahreïn. D'autres textes cunéiformes mentionnent des importations de diorite et de cuivre en Mésopotamie, provenant d'Arabie Orientale (Maguan et Melouha).
Dès la plus haute antiquité, des peintures et des
papyrus évoquent la présence en Égypte de tribus venues du Sinaï, dont certaines, selon leur description, venaient d'Arabie. Par ailleurs, le pays de Pount, souvent cité dans les textes égyptiens comme producteur d'encens et jamais précisément situé géographiquement, pourrait correspondre à la fois à l'Arabie Occidentale et à l'Afrique Orientale dont les côtes sont proches l'une de l’autre.
Des fouilles réalisées dans le Sud-Ouest de l'Arabie ont mis au jour des
vestiges datés d'environ 1.100 ans AJC de Maryab, capitale du royaume de Saba, dont l’économie très développée reposait sur l'agriculture (céréales, myrrhe, encens et autres épices et aromates).
La plus ancienne mention écrite indiscutable faisant état d'un peuple organisé vivant en Arabie remonte seulement à 853 AJC. A cette date, des tablettes rapportent que le roi assyrien SALMANASAR III (859- 824 AJC) vainquit le roi de Damas dont les troupes comportaient mille
chameliers, bédouins du pays d'Arbâe. D'autres textes cunéiformes narrent les luttes de monarques assyriens contre des Arabes montés à dos de chameau. Ces textes précisent aussi que ces peuples étaient gouvernés par des reines qui étaient en même temps prêtresses ou prophétesses.
TAGLATPHALASAR III (745-727 AJC), roi assyrien, selon des tablettes, reçut des gens de Saba "toutes sortes de plantes odoriférantes". En
715 et en 685 AJC, ses successeurs sont mentionnés
comme réceptionnaires de pierres précieuses et aromates de la même provenance.
En plus du royaume de Saba, sur la côte Ouest de l’Arabie, furent mentionnés des états voisins : Mâ'in (capitale Qarnaw), Qatabân (capitale Timna), Hadramont (capitale Shabwa). Des luttes, des coalitions divisèrent ou
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unirent alternativement ces royaumes.
A l'intérieur de l'Arabie, les zones plus arides étaient les domaines des Bédouins. Ces nomades vivaient sous la tente, élevaient des dromadaires, parfois des chèvres et des moutons, et de rares et précieux chevaux. Au printemps, la pluie faisait reverdir l'herbe ; les tribus se dispersaient pour se regrouper autour des points d'eau à la saison sèche. Dans les oasis, des agriculteurs cultivaient le palmier- dattier. Les Bédouins, pour
se nourrir, avaient souvent recours aux razzias des zones agricoles.
Vers 750 AJC et certainement très antérieurement, les peuples adoraient des idoles. Les morts devenaient des fantômes. Les arbres et les pierres de forme curieuse étaient identifiés aux astres. Déjà, semble -t-il, ils invoquaient ALLAH (le dieu, la divinité), personnification du monde divin sous sa forme la plus haute, créateur de l'univers et gardien de la foi jurée. Ils honoraient aussi la grande déesse "ALLAT"
personnifiant Vénus, l'étoile du Matin, et MANAT, déesse du sort.
De nombreux sanctuaires parsemaient le désert. Certains étaient des lieux de pèlerinages marqués par un objet, souvent une pierre, autour duquel les pèlerins tournaient en ronde et dont des familles sacerdotales avaient la garde. Celles-ci pratiquaient aussi la divination et la magie.
Dès le 7e siècle AJC, des colonies sabéennes (habitant Saba) converties au judaïsme, émigrèrent en
Éthiopie. Des Minéens (habitant de Mâtin) établirent des colonies sur les routes caravanières qui allaient en Palestine.
Dès la fin du premier siècle de notre ère, des habitants du Sud- Ouest de l'Arabie se convertirent au christianisme mais le roi juif de main les persécuta. Les Éthiopiens qui, à cette époque, honoraient JÉSUS, saisirent cette occasion pour venger les chrétiens et s'emparèrent du Yémen.
En 575, les Perses chassèrent les Éthiopiens de l'Arabie méridionale
et réduisirent cette contrée à l'état de satrapie (province).
Quelques années plus tard, les Perses, en évacuant l'Arabie, laissèrent un pays sur le déclin. La société était divisée en tribus fondées sur les liens du sang dont les membres devaient se prêter une assistance mutuelle. A la tête de la tribu, le cheikh commandait au nom des ancêtres. Toutes les tribus parlaient la même langue, l'arabe. Elles professaient la même religion, le paganisme ancestral des objets
sacrés...
La Mekke était une ville caravanière blottie dans une vallée aride impropre à l'agriculture. Les habitants, principalement les bourgeois de la tribu
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de Quraysh, vivaient du transport, du trafic des marchandises de l'Inde en route vers l'Occident par l'Océan Indien, Aden puis le désert. Le peuple, en plus des autochtones, comptait de nombreux Éthiopiens et Perses.
La Mekke était célèbre par ses foires, sa source (Zemgen), son pèlerinage au sanctuaire de la "Kaaba", petit temple cubique comportant, dans
un angle, une pierre noire enchâssée.
Yathrib (Médine), située au milieu d'une
vaste oasis, abritait principalement des ruraux arabes païens ou judaïsés.
La religion chrétienne, à cette époque, avait en Arabie de nombreux adeptes, particulièrement à Nadjran.
Vers 579, dans une riche famille de La Mekke, naquit MUHAMMAD. A cette époque, certains Arabes avaient été convertis au christianisme, alors que plusieurs oasis étaient en partie occupées par des tribus juives. Au contact de ces deux communautés, qui prêchaient l'amour de Dieu et du prochain, MUHAMMAD,
devenu adulte, se révolta face à l'arrogance des riches marchands qui ne respectaient plus l'ancienne loi du désert selon laquelle tous les biens étaient partagés entre les membres de la tribu. Il fut vite convaincu qu’il fallait enseigner la foi monothéiste et rétablir les lois tribales d'égalité entre les hommes.
Marié à une riche veuve, fuyant l'agitation de la ville, il se retirait souvent pour méditer dans une caverne proche, au flanc de la montagne Hira. Dès 610, au
cours de ces retraites, il eut des révélations. En 613, au nom de Dieu, il transmit des messages sacrés à ses concitoyens. Il enseigna qu'ALLAH n'était pas un dieu parmi les dieux, mais le Seigneur unique et éternel de l'Univers. Il prêcha que tous les croyants (Musulmans en arabe) étaient égaux devant Dieu et que les riches devaient partager leurs biens avec les pauvres. Il proclama l'Islam : soumission et abandon à Dieu. Il déclara que le destin de l'homme
était entre les mains de Dieu et qu'il y aurait un jugement dernier pour tous les hommes.
Islam a pour racine "salama" (se soumettre à Dieu), alors que Muslim signifie "celui qui se soumet à Dieu" et le pluriel Muslimin (musulmans), les croyants, "ceux qui se sont soumis à Dieu".
Dans La Mekke aux multiples dieux, les habitants, à cette époque, croyaient que la mort mettait un terme à la vie. Maintenant, ceux qui acceptaient Dieu et MUHAMMAD comme son Messager pouvaient espérer une justice en ce monde et une vie glorieuse après la mort, mais ceux qui refusaient de se soumettre subiraient le feu de l'Enfer et de terribles souffrances. Bien évidemment, les premiers à se convertir, dans l'espoir d'un
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meilleur avenir, furent les petites gens, les pauvres, les opprimés. En revanche, les riches reçurent ce message comme une provocation sociale et infligèrent de sérieux châtiments corporels aux nouveaux convertis.
Les actes de violence prirent une telle ampleur que MUHAMMAD, craignant pour sa vie, accepta, en 622, la proposition des autorités d'Yathrib de venir dans leur ville pour y rétablir la paix entre deux tribus rivales. Le calme revenu, Yathrib, cœur de la nouvelle communauté
de l'Islam, fut désignée comme "Madinat an Nabi", la ville du Prophète, ou Médine (la Ville), nom qu'elle porte aujourd'hui.
A partir de cette époque, MUHAMMAD devint le chef politique, militaire et religieux de Médine. Il organisa la communauté musulmane sur les bases d'un pacte. La "constitution de Médine" substitua à l'ancien lien du clan et de la race celui de la "nouvelle alliance". Les tribus qui y adhérèrent formaient une
confédération (umma) dont les membres se devaient une protection mutuelle et la garantie d'une sécurité réciproque.
Dans leur vie civique, les musulmans suivirent les directives inspirées au Maître par ses révélations. Pour asseoir sa position, MUHAMMAD donna à l'Islam ses coutumes religieuses propres : au lieu du bruit des crécelles ou du son des cornes utilisés par les Chrétiens et les Juifs de la ville pour rassembler les fidèles, ce fut la voix sonore de Bidal, jeune
converti, qui appelait les croyants. Le carême d'expiation fut remplacé par le Ramadan. Au lieu de prier en direction de Jérusalem, les Musulmans reçurent l'ordre de se prosterner vers la Kaaba, le sanctuaire d'Allah, à La Mekke. Au lieu du samedi, jour du Sabbat des Juifs, ou du dimanche pour les Chrétiens, l'Islam imposa le vendredi comme jour de repos et d'adoration d'ALLAH.
Pour assurer leur ravitaillement, les habitants de Médine engageaient des
coups de main contre les caravanes qui traversaient le territoire autour de la ville. Les marchands de La Mekke ripostèrent à ces razzias mais leur armée, pourtant forte d'un millier d'hommes, fut battue par une centaine de partisans de MUHAMMAD. Cette victoire fut considérée comme un signe de Dieu en faveur de la cause du Prophète. Des tribus voisines commencèrent à rejoindre l'Islam et à combattre sous sa bannière. Victorieux, les hommes recevaient une part du butin ; s'ils
étaient tués au combat, ils avaient l'assurance d'aller au Paradis.
Les habitants de La Mekke n'avaient pas accepté leur défaite. Durant plusieurs années, ils menèrent des attaques de grande envergure contre Médine, mais ne parvinrent jamais à démoraliser les partisans du Prophète. Celui-ci, après des revers suivis de pactes toujours remis en cause par ses
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adversaires, en 630, à la tête d'une armée de dix mille hommes, s'empara de La Mekke. MUHAMMAD fit une entrée triomphale dans la ville et détruisit les idoles païennes qui s'y trouvaient.
A La Mekke, la Kaaba purifiée était devenue le centre spirituel de l'Islam, tout comme Médine était sa capitale politique. Le Prophète conquérant, clément et généreux, réunit à sa cause ses plus violents adversaires. Bientôt, presque toutes les tribus de la péninsule d'Arabie
se convertirent à l'Islam.
Devenu chef d'un puissant état, MUHAMMAD développa chez son peuple le sens de la justice sociale. Vers 634, alors âgé d'environ 63 ans, le Prophète tomba malade et mourut. ABOU-BAKR, son disciple et ami, cria aux adeptes bouleversés :
"MUHAMMAD est mort, mais ceux d'entre vous qui adorent Dieu, qu'ils sachent que Dieu est vivant et qu'il est éternel".
Peu après la mort du Prophète, ABOU-BAKR, qui avait pris la tête de l'Islam,
ordonna que fut rassemblé tout ce qui avait été dit par le Prophète et tout ce que ses compagnons retenaient en leur mémoire. Ainsi, furent réunis en un texte unique les différents éléments des Révélations. Vingt ans après la mort de MUHAMMAD, OTHMAN, son troisième successeur, établit le texte définitif du Livre saint. Cette version du Coran, depuis cette époque, est la seule officielle.
Durant les vingt-deux années de sa prophétie, en se désignant comme "le Sceau des
Prophètes", couronnant la série des envoyés porteurs de législation : Adam, Noé, Abraham, Moïse et Jésus, MUHAMMAD avait réalisé une synthèse de la tradition judéo-chrétienne monothéiste et du nationalisme arabe. Par ses messages, il donna à son peuple une raison de s'unir, de combattre et de vaincre.
ABOU-BAKR régna de 632 à 634 comme calife, successeur de l'envoyé de Dieu. OMAR (634-644) s'attribua le titre de commandeur des croyants. Il entama les grandes chevauchées
à la tête des cavaliers d'ALLAH, soldats-prédicateurs qui recoururent au Coran autant qu'à l’épée. Il mourut assassiné, comme ses deux successeurs : OTHMAN (644-656) et ALI (656-
661).
En un siècle, l'Islam se constitua un des plus vastes empires du monde, du Tage à l'Indus, de l'Océan Atlantique à la Mer d'Aral, des Pyrénées au Sahara. Repoussés à Poitiers en 732, les Maures (troupes de Berbères islamisés) occupèrent l'Andalousie et la Sicile.
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L’ISLAM
MUHAMMAD vécut dans le contexte que nous avons décrit pages (Ci- dessus). Selon ses dires, l’ange Gabriel, durant vingt-trois ans, lui transmit les messages d’ALLAH. Durant cette période, ses disciples assuraient, sous sa dictée, l’écriture de chaque “révélation” sur des peaux, des tablettes, voire des os. Puis, apprises par cœur, elles étaient détruites car seule la parole était sacrée.
Le message divin aurait pu traverser les siècles par le simple exercice de la parole, mais vers 644,
ABOU-BAR rassembla tout ce qui avait été dit par le prophète et le calife Uthman prit l’initiative d’en faire copier le texte sur parchemin ; Cinq “vulgates”, versions définitives, furent écrites, dont un exemplaire est aujourd'hui conservé à la Mosquée de Tachkent, en Ouzbékistan. Tous les Corans copiés depuis sont, dans leur contenu, conformes à ce manuscrit. Car les Musulmans n’ont fait subir aucune modification à leur texte sacré qui comprend 114 sourates (chapitres) et
de
6.236 ayat (versets).
Le Coran, message divin, a été dicté à MUHAMMAD, conformément à l’original qui est au ciel. Son autorité est donc suprême puisqu’il s’agit de la parole de Dieu. Il dépasse et englobe les révélations antérieures.
Fondé également sur la manière de vivre du Prophète rapportée par la tradition (sunna), l’Islam est religion, foi, loi, morale, style de vie, culture et civilisation.
Le Coran (récitation), livre de l’Islam, aujourd’hui considéré
comme ayant été révélé en arabe (langue sacrée) au Prophète, inspiré par Dieu, est une succession de messages brefs et répétitifs où alternent récits relatifs aux prophètes juifs et aux peuples du temps passé, exhortations, admonestations, rappel de la grandeur et de la toute-puissance de Dieu, de la magnificence de
sa création, de la multitude de ses bienfaits. Dieu est tout puissant, les cieux et la terre lui sont soumis ; il est le roi, le seigneur du monde, le vainqueur, le
dominateur à qui nul ne saurait s'opposer. Maître des destinées, il est celui qui fait vivre et fait mourir, procure biens et maux, donne et retient, sauve et perd, car il guide et égare qui il veut, il pardonne à qui il veut et châtie qui il veut ; il peut, pour une faute identique, châtier l’un et pardonner l’autre. Il conduit la destinée des hommes sur la terre et leur mort dans l’au-delà, les uns au paradis, les autres en enfer. Il est le patient qui ne se hâte pas de châtier.
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Dieu est omniprésent ; il est capable de prodiges, il est le “bien informé”, le témoin de toutes choses, le vigilant sans somnolence ni sommeil. Rien ne lui échappe, pas même la pensée de l’homme. Dieu est juste dans le sens où, n’étant soumis à aucune règle, tout ce qu’il fait est juste parce qu’il le fait.
ALLAH, à l’image de YAHVÉ étant unique, est naturellement pourvu de toutes les perfections. Il est à la fois très saint, très haut, protecteur, donateur... Il est le dieu
vivant qui ne meurt pas, qui ne cessera pas d’être ; toutes choses périront excepté sa face. En revanche, le Cora n affirme qu’il était antérieurement à toute autre existence, que matériellement il n’a pas de forme.
ALLAH est au ciel, assis sur un trône... Le jour de la résurrection, les
croyants le verront... A la fin du monde, quand l’heure sera venue, tous les morts ressuscités comparaîtront devant Dieu pour être jugés, ce sera le jour de la reddition des comptes...
En plus du
Coran, les autres “Livres Saints” de la tradition islamique
sont :
La Sunna (Voie) qui relate les enseignements du Prophète et les débuts
des premières communautés musulmanes de Médine présentées comme un modèle à suivre.
La Charia, loi religieuse comprenant l’ensemble des obligations
procédant du Coran et de la Sunna.
Le Fiqh (dogme), droit jurisprudentiel de l’Islam, interprétation et
application de la Charia.
Aujourd’hui comme hier, les croyances, le rituel et les valeurs morales de l’Islam sont demeurées identiques et reposent sur “cinq piliers” que sont :
- La profession de foi (Shahâda) : il n’y a pas d’autre divinité qu’ALLAH et MUHAMMAD est son prophète. (Celui-ci) est semblable à ceux qui l’ont précédé dont ABRAHAM, MOÏSE et JÉSUS. Cet acte de foi suffit à tout homme pour se dire musulman. On le fait prononcer par les
mourants.
Dieu existe de toute éternité. Il a 99 attributs (miséricordieux, nourricier, omniscient...) dont le nom d’ALLAH est le centième. Tout puissant, il peut ressusciter les morts et anéantir les incroyants.
Il faut se soumettre à Dieu et lui obéir.
Le Jugement Dernier récompensera infiniment les bons et punira cruellement les méchants.
- La Prière (çalât) doit être dite à cinq moments de la journée : aube, midi, après-midi, coucher du
soleil, soir. Elle est précédée des ablutions rituelles de
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purification, puis récitée en direction de La Mekke par le croyant qui est, tour à tour, debout, incliné, prosterné.
- L’aumône légale (zakât) : le Musulman, en distribuant une part de ce qu’il
possède, purifie le reste de ses biens.
- Le jeûne (Cawn) : le mois de Ramadan commémore à la fois les premières Révélations faites au Prophète par Dieu et la première victoire de l’Islam sur ses ennemis de La Mekke. Par le jeûne, l’homme se rapproche de Dieu et lui rappelle qu’au-delà de la vie matérielle et physique, il y a la vie spirituelle. Le jeûne n’est que diurne, la tombée de la nuit marque la fin des privations.
- Le
pèlerinage à La Mekke (hadj) est une obligation pour le Musulman qui aura la force et les moyens de s’y rendre au moins une fois dans sa vie, du 7 au 13 du dernier mois de l’année lunaire musulmane. L’islam n’a pas fait de MUHAMMAD un dieu mais le dernier des prophètes “inspirés” à la suite d’ADAM, NOÉ, ABRAHAM, MOÏSE et JÉSUS.
La vie dans l’au-delà pour l’Islam
Après la mort, l’âme du défunt est interrogée. Si elle ne peut réciter la Shahâda (la profession de foi), elle est maltraitée. Les parois du tombeau l’écrasent. Dans le cas contraire, l’âme des croyants rejoint ALLAH dans le ciel.
A la fin du monde, au son de la trompette, tous les hommes ressuscités se rassembleront sur une immense esplanade où chacun sera jugé par ALLAH, après consultation du livret individuel et après l’épreuve de la balance (légende égyptienne, page 182). Sur un
plateau, on disposera tous les manuscrits où furent consignés les péchés ; sur l’autre, un simple morceau de parchemin où est écrite la Shahâda. Selon que la balance penchera d’un côté
ou de l’autre, ALLAH décidera du temps que durera le séjour en enfer avant l’accession au Paradis.
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L'Inde
Les descendants des tribus d'Homo erectus qui, du Moyen- Orient, migrèrent voilà environ 1.700 ans AJC en direction de l’Inde, y arrivèrent longtemps après. Les plus anciennes traces connues de l'activité humaine sont des galets taillés par les Néandertaliens-dravidiens retrouvés sur les rives de la Narmada et datés de quelques 400.000 ans.
Vers 10.000 ans AJC, apparut une industrie de microlithes retrouvés sur de nombreux sites entre les Monts Vindhya et la Basse Vallée de
l'Indus, attribués aux populations dravidiennes.
Sur le site de Mehrgarh (Pakistan), furent mis à jour des vestiges témoignant d'une occupation remontant à 7.000 ans AJC. Il y existait une proto-agriculture de l'orge et une activité de chasse et d'élevage. L'originalité de la civilisation dravidienne se marque par des constructions de silos à caissons et par des pratiques funéraires. Sur le même site, une nécropole datée du Vlème millénaire AJC montre des tombes
individuelles délimitées par des murets où l'on a découvert des céréales et des figurines animalières ou humaines, souvent de femmes nues.
Du pied de l'Himalaya à la Mer d'Oman, on a retrouvé les vestiges, remontant à quelque 3.500 ans AJC, de villages sur les rives de l’Indus, particulièrement à Amri.
Datés du Lillemer millénaire AJC, dans la même région, on retrouva les sites de nombreux villages et bourgs ainsi que ceux de trois villes importantes : Harappa, Mehrgarh
et Mohenjo-Daro, qui comptaient plusieurs dizaines de milliers d'habitants. Leurs vestiges témoignent d'un urbanisme évolué et de multiples activités commerciales et artisanales prospères, en étroite liaison avec des pasteurs semi-sédentaires des environs immédiats ou lointains. L'alimentation en eau y était assurée par des puits publics ou privés. Les eaux usagées étaient évacuées par des caniveaux se déversant dans des égouts voûtés. A Mohenjo-Daro, on a dénombré plus de 700
puits circulaires en brique qu'aucune autre civilisation de l'époque n'aurait été capable de construire.
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Malgré ces marques de civilisation avancée, aucun bâtiment ne ressemble à un palais ni à un temple ; aucune des tombes ne se distingue des autres ; aucune sculpture, aucun bas-relief ne porte le témoignage de la puissance de rois. On y a seulement découvert des statuettes en stéatite cuite pouvant représenter un dignitaire, peut-être un prêtre, des figurines féminines en terre cuite, d'autres en bronze, des
fragments de poterie et de nombreux cachets rectangulaires en stéatite blanche portant de courtes inscriptions d'une écriture pictographique jamais décryptée, comprenant quelque quatre cents signes (dont 200 seraient des signes de base) sans ressemblance avec les autres écritures contemporaines de Mésopotamie et d'Égypte. En l'absence de documents écrits déchiffrables, on ne sait rien de cette civilisation "dravidienne" primitive. On pense que les villages et les
cités formaient des centres indépendants dont l'administration était confiée à une assemblée de
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notables.
Des sceaux d'argile gravés de personnages et de scènes laissent entrevoir un passé religieux. On y découvre le culte du figuier qui reste, dans l'Inde actuelle, le plus sacré de tous les arbres. On y voit également des animaux tels que le taureau, la vache, le serpent, le paon... Les thèmes se retrouvent sur des poteries découvertes dans une nécropole d'Harappa.
A Mohenjo-Daro, parmi les
restes laissés par les artisans, on découvrit des coquillages, des perles d'agate, de jade et de lapis, des poteries, des ornements de céramique, de faïence. On y trouva également des vestiges de fours et des objets semi-finis en cuivre et en bronze.
Lothal, ville au fond d'un golfe, est considérée comme le port qui aurait tenu une place importante dans les échanges commerciaux entre l'Inde,
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l'Arabie (Bahrein) et la Mésopotamie au cours du 3e millénaire AJC
Au 2e millénaire AJC, faute d'un pouvoir centralisé qui aurait pu organiser la défense des régions, les villages et les cités des Dravidiens furent pillés et détruits par des vagues de nomades belliqueux. Les populations des villes se réfugièrent dans les campagnes où elles augmentèrent le nombre des paysans qui cultivaient et élevaient ce qui leur était
nécessaire et troquaient le surplus contre quelques ustensiles et outils fabriqués par des artisans ruraux ou apportés par des marchands nomades.
Ces pilleurs étaient des hordes de guerriers aryens équipés de chars attelés à des chevaux emmenant avec eux femmes, enfants et troupeaux de bovins dont ils tiraient nourriture et habillement.
Ces peuples venus de l'Est européen avaient traversé le Turkménistan, jusqdza et Kaboul d'où, par le passage de Khaibar, ils avaient rejoint
Peshawar et le Pendjab. Ils parlaient l’aryen qui, en se mêlant au dravidien, au cours des siècles, deviendra le Sanskrit d’où seront issues les différentes langues parlées par 78 % de la population actuelle de l'Inde. Ces langues sont dites indo- européennes, ce qui est exact si l'on admet que cette classification ne vaut que pour l'Inde.
Ce peuple amena avec lui ses traditions tribales et ses croyances, assemblées sous le nom de "Veda" (le savoir) et
transmises oralement de génération en génération. Certains historiens pensent qu'il en existait des versions écrites servant de référence.
Cette religion primitive reposait sur de nombreuses idoles représentant la fertilité, le soleil, la guerre... les éléments de la nature : montagnes, rivières, sources... Les Aryens concevaient le monde divin comme rassemblant toutes les "forces vivantes" de la nature sous l'autorité de "Maîtres suprêmes".
Les
membres des tribus aryennes étaient divisés en classes : les "nobles" (guerriers) qui élisaient l'un d'entre eux comme chef ; les "prêtres" responsables de l'observance des pratiques religieuses, et les "Bouviers".
Les tribus aryennes, par vagues successives, se répandirent dans la région du Punjad, puis se dispersèrent le long des affluents du Gange. De proche en proche, ils envahirent toute l'Inde de l'Himalaya aux
Monts Vindhya.
Vers la fin du Même millénaire AJC, les Aryens abandonnèrent leur vie pastorale au profit de l'agriculture. Avec les Dravidiens, les tribus aryennes se groupèrent en villages et ceux-ci en royaume. De cette organisation surgirent deux grandes cités, Hastinapura et Achèchera, qui furent à l'origine de monarchies assises sur des territoires fertiles où poussait déjà le riz.
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Selon les concepts aryens, les diverses divinités avaient, pour représentant terrestre, le roi et, pour serviteur, le clergé. Les prêtres accomplissaient les sacrifices rituels sur des autels simples, à ciel ouvert, où un feu sacré (Agni) emportait au ciel pour les dieux la propre nourriture des hommes.
Dès le début du 1er millénaire AJC, les croyances aryennes "védiques", au contact des traditions autochtones "dravidiennes", sans perdre leur originalité, évoluèrent
progressivement vers le "Brahmanisme". Ainsi naquit la doctrine du "Rita", l'ordre cosmique qui gouvernait l'alternance du jour et de la nuit, comme le retour des saisons, qui réglait la conduite des hommes, déterminait les relations de l'homme avec les dieux et des hommes entre eux.
Ces conceptions religieuses donnèrent lieu à une tradition orale qui se perpétua dans quelques textes écrits, les "Véda", mais principalement
par la mémoire qui fut longtemps quasiment le seul support des œuvres transmises par la parole. Grâce à un exercice constant dès l'enfance, les hommes connaissaient par cœur des séquences d'une longueur incroyable.
Aux 7e et 6e siècles AJC, dans sa constante évolution le Brahmanisme
engendra l’hindouisme.
Dans la hiérarchie de la société aryenne primitive, le clergé venait après les nobles. Mais progressivement, en s'appuyant
sur l'idée que les rites mal réglés pouvaient bouleverser l'ordre universel et provoquer le chaos, les prêtres (Brahmanes) devinrent les gardiens du "Rita" (l’ordre cosmique) et furent déclarés les personnages les plus importants du royaume terrestre et divin. Sous l'emprise de l'Hindouisme, les souverains consentirent à la glorification de la caste sacerdotale et lui reconnurent la prééminence sur les nobles mais conservèrent pour leur personne royale, au
nom du principe qu'elles incarnaient les dieux, la soumission respectueuse des nobles et du peuple.
Au 6e siècle AJC, CYRUS, roi des Perses, puis DARIUS 1er annexèrent une partie du bassin de l'Indus. A la même époque, le roi aryen de la province de Magadha contrôlait la partie méridionale de la vallée du Gange. Au IVème siècle AJC, les souverains successifs de ce royaume étendirent leur empire du Punjab au Nord jusqu'au
Gujarat au Sud. En 326 AJC, ALEXANDRE le Grand, roi de Macédoine, vainqueur des Perses, s'empara de la Bactriane, partie nord de l'Afghanistan et de la région du Punjab. Il y laissa des garnisons sous l'autorité de gouverneurs.
Au cours du 4e siècle AJC, BOUDDHA développa de nouvelles conceptions religieuses permettant au peuple de mériter une heureuse réincarnation.
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En 321 AJC, le trône de Magadha fut usurpé par un aventurier d'ascendance aborigène, MAURYA, qui étendit son royaume vers le Sud jusqu'au fleuve Narmada et reprit aux Macédoniens les territoires conquis par ALEXANDRE le Grand. Sous le règne de son fils ASOKA, l'Inde, pour la première fois de son Histoire, obéissait quasiment dans sa totalité à un pouvoir unique.
Le souverain, pour gouverner cet empire dont la capitale était Pataliputra, ou Patna, sur le Gange, avait organisé
un corps de fonctionnaires hiérarchisé selon un système pyramidal et une armée forte de sept cent mille hommes commandés par la classe noble des guerriers. Pour entretenir cette lourde organisation civile et militaire, les cultivateurs abandonnaient à l'État le quart de leur production, les commerçants et les artisans acquittaient de lourdes taxes.
L'Histoire de l'Inde ne s'arrêta pas à la fin du 3e siècle AJC mais les révoltes des provinces et
les invasions diverses démantelèrent le vaste empire en de multiples royaumes distincts, unis cependant par l'essor du commerce qui, en plus des castes marchandes, entraîna la prospérité des castes artisanales. A travers les échanges commerciaux, les relations diplomatiques entre les cours princières et les religions inspirées de concepts communs, l'Inde conserva une certaine unité nationale qui lui permettra ultérieurement de retrouver une partie de son unité territoriale.
LES RELIGIONS DE L’INDE
LE VÉDISME
Les dieux védiques innombrables étaient organisés sur le modèle de la société humaine selon trois fonctions : les sacerdotes (clergé), les guerriers (noblesse), les producteurs (tiers-état).
Chacune de ces fonctions, tant au niveau humain que divin, était nécessaire aux deux autres et ne pouvait exister que par et pour les deux autres. Ces trois niveaux étaient parfaitement structurés, chacun à sa place (dhaman).
Au niveau des dieux :
1. L’autorité spirituelle et sacerdotale qui, dans le Veda, correspondait à la garde de l’ordre cosmique et rituel, le Rita (rta), par lequel le monde existe et se maintient, était assurée par les dieux :
. MITRA symbolisait l’alliance entre les hommes et le monde divin. Il était
l’ami des hommes et de toute la création ; il veillait sur la bonne marche du
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soleil.
. VARUNA représentait le châtiment pour qui rompait l’alliance. Il inspirait l’effroi, la crainte, punissait. Il présidait la nuit.
2. La fonction guerrière était attribuée à INDRA, le combattant infatigable dont le rôle était de maintenir l’ordre cosmique en éliminant par la force les ennemis du “Rita”.
A l’origine du monde, un dragon avait retenu les eaux du ciel, ce qui avait empêché l’Univers de naître. INDRA, élu champion des dieux, l’avait tué et libéré les eaux qui avaient entraîné avec elles les “forces vivantes” : “Agni", le feu, et “Soma”, la vie. C’est alors que tout fut mis en place : le ciel, la terre, le monde, et que se développèrent les êtres vivants.
Depuis, divers dieux aidèrent INDRA : les Marut (jeunes guerriers), Vayu (le
vent) et Visnu (sauveur de l’ordre cosmique).
3. La fonction de production des richesses, de la prospérité sous toutes ses
formes, était assurée par les “Arvin”, cavaliers du ciel.
Les dieux de la troisième fonction paraissaient peu dans les rituels officiels. En revanche, leur rôle était primordial pour le peuple : fêtes des saisons, rites de fécondité, déesses de la beauté, du plaisir, de l’amour...
Au niveau de l’individu
L’Aryen védique était voué par sa naissance à un clan patrilinéaire et à des croyances transmises de père en fils depuis leur révélation première à l’ancêtre mythique dont le patronyme était conservé comme une sorte de talisman social.
Parmi les multiples divinités du panthéon védique, chaque famille ne portait sa dévotion qu’à une seule, considérée comme suprême. A l’occasion, elle exaltait telle ou telle divinité mineure à laquelle elle avait recours dans un but précis.
Outre les
rites de naissance, mariage et funérailles, la religion védique dans son aspect domestique comportait certaines obligations.
- Libation de lait frais, avant le lever du soleil, répétée le soir. Ce rite mettait en œuvre les “forces universelles” qui maintenaient en place l’univers suivant l’ordre cosmique (Rita).
- L’élixir de vie étamait était consommé lors de réunions secrètes. Cette boisson (drogue hallucinante) était l’essence, le suc de l’ordre cosmique, le brahman.
- Lors des sacrifices, les offrandes versées ou jetées dans le feu étaient
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dévorées par “Agni” au nom de Dieu auquel était dédiée la cérémonie.
- “Agni”, le feu, veillait en permanence au foyer de chaque aryen.
- A sa mort, l’Aryen déposé dans le feu était conduit par “Agni” dans l’au-delà, pour se réincarner ultérieurement.
Au niveau du roi
Chaque fois que le souverain devait agir en engageant le destin de la collectivité, il présentait aux dieux de fastueux sacrifices pour leur demander leur aide. Des victimes animales, parfois humaines, étaient mises à mort et leurs chairs cuites rituellement, sanctifiées par le feu “Agni”, étaient consommées par les fidèles. Conjointement les prêtres offraient aux dieux des céréales préparées en bouillie, en gâteau, ou grillées. Toute erreur dans le rituel, dans l’accentuation des paroles sacrificielles, pouvait déclencher des catastrophes atmosphériques ou politiques qui ne manqueraient pas d’entraver le projet envisagé.
Le feu “Agni”, pour les Aryens, était l’instrument privilégié des
relations entre les hommes et les dieux.
Soma perpétuait la vie ; il était la “force vivante” des eaux, des plantes, des êtres.
Le Soleil procédait à la fois d'“Agni”, car sa lumière est feu et de
“Soma" car sa lumière fait germer la vie.
Le BRAHMANISME
Le brahmanisme, héritier du védisme, en conserva la plupart des
divinités, en y ajoutant d’autres sorties des traditions primitives dravidiennes.
Brahmâ, notion issue de la conception originelle de “force vivante”, reprise par l’idée védique de « force universelle », devint dès lors l’esprit qui engendre la réalité naturelle des choses et des êtres...
Brahmâ était l’essence profonde, spirituelle et verbale de toute chose, en quelque sorte la réplique du « mé »
mésopotamien (page 198). Il ne fut jamais l’objet de culte mais une entité abstraite.
Visnu qui, dans le culte védique, était une divinité secondaire, passa au rang de divinité majeure.
Siva était déjà vénéré dans l’antique Mohenjo-Daro.
Conceptions brahmaniques
Le Samsara (couler avec) évoque le courant perpétuel et circulaire qui
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entraîne l’âme individuelle à travers des réincarnations en chaîne dont le “Karman" (résidu d’actes des existences antérieures) détermine les renaissances des hommes et leurs conditions.
On ne sait préciser l'origine de cette conception qui conditionne la vie religieuse brahmanique ; elle rejoindrait la tradition des apparitions et disparitions alternées de l’univers. La perfection originelle s’use peu à peu, à la manière d’une énergie qui se perd, pour aboutir à l’époque
imparfaite où nous sommes actuellement qui doit disparaître dans un embrasement général auquel succédera le calme des eaux primordiales. Puis, après des millions de millions d’années, la création resurgira avec des dieux et avec le premier homme, Manu.
Le Dharma, ce nouveau terme, comme le “Rita" védique, désignait la loi qui structurait l’univers mais, de plus, chaque être, chaque objet, possédait son Dharma particulier et devait vivre en accord avec sa loi, toute action l’entravant pouvait conduire au désastre.
L’activité sociale était régie par le code complexe de droits et d’interdictions. Ce code définissait, pour chaque corps de métier, une zone dans le village, une façon de s’habiller, un mode de nourriture, des temps de prières, la catégorie de femmes à épouser. Chacun devait vivre, de la naissance à la mort, selon un canevas précis, conformément aux règles de sa caste fondées sur un mode de vie à la fois idéal et réel en accord avec son propre “Dharma”.
Un recueil définissait les
quatre classes de la société : au sommet, les Brâhmanes, être sacrés, seuls qualifiés pour appliquer le “Veda” aux sacrifices et en commenter la tradition ; puis, le roi et les nobles (guerriers) en-dessous les “producteurs” : fermiers, artisans et marchands ; tout en bas, les serviteurs et les esclaves. Pour les prêtres, les nobles et les producteurs, ce recueil décrivait les rites, les tâches, et les actes que chaque individu devait accomplir en fonction de son âge. Le petit peuple
des trava illeurs acceptait l’inégalité sociale des classes car elle était la loi de l’univers, dans l’ordre du “Dharma”.
Dans chaque classe de la société, il y eut des subdivisions liées à la profession. Personne ne pouvait, selon son “Dharma”, exercer un autre métier que celui de son père. Des groupes se formèrent, indépendants les uns des autres, chaque clan ayant son mode de vie. Cette ségrégation entraîna progressivement la notion de “caste” et l’entraide entre les
membres d’une même caste. Les rites familiaux et officiels brahmaniques étaient identiques à ceux du Védisme.
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Le BOUDDHISME
Les récits qui racontent la vie de BOUDDHA furent écrits trois siècles après sa naissance. Ils sont le plus souvent agrémentés d’éléments légendaires. Pour les bouddhistes, ces légendes parlent avec éloquence de la vérité spirituelle qu’a vécue le fondateur du Bouddhisme. Pour eux, la légende est plus vraie que la vérité “historique” et certainement très digne de vénération, mais moins importante que le message qu’il a laissé à l’humanité. On ne connaît pas la date de naissance de BOUDDHA ;
pour les uns, il est né en 624
AJC ; pour les autres, en 566 AJC, ou encore en 448 AJC.
Siddhârtha-Gantama (nom de BOUDDHA) est né dans une famille aristocratique installée près du village de Kapilavastu, au royaume de Kosovo, au pied de l’Himalaya. Il bénéficia d’une brillante éducation. A seize ans, il se maria. A vingt-neuf ans, il quitta clandestinement sa maison et sa famille. Après une longue période au cours de laquelle il médita sur la condition humaine, une nuit, sous un figuier, Gon Tama devint BOUDDHA, celui qui s’est éveillé de la torpeur spirituelle habituelle aux hommes, qui a découvert la vraie réalité et qui est maintenant capable de voir les choses telles qu’e lles sont.
Puis BOUDDHA partagea cette vérité, pendant quarante-cinq ans, avec tous ceux qui voulurent l’entendre. Un certain nombre de disciples se rassemblèrent autour de lui, constituant la première communauté bouddhique.
Pour BOUDDHA, comme pour tous ses contemporains, chaque mort était suivie d’une renaissance. Ceux qui, au cours de leur vie, avaient accompli de bonnes actions, selon la loi (dharma), renaissaient sous d’heureux auspices
; les autres étaient condamnés à un état plus pénible
que le précédent. Dans
cette perspective, ses méditations lui avaient révélé le moyen d’enrichir de
nouvelles existences sans accomplir la moindre mauvaise action, afin d’accéder progressivement, après plusieurs transmigrations, à l’ultime Délivrance : l’extinction du désir, le “Nirvana”, le lieu de sécurité absolue.
Dans ses sermons, il enseigna aux autres ce qu’il avait lui-même
découvert : les “Quatre Nobles Vérités” :
- La Vérité
de la douleur : la vie ne suit pas le cours normal des choses, voilà
pourquoi l’homme est condamné à souffrir.
- La Vérité de l’origine de la douleur : tant que l’homme lutte pour son propre avenir, il reste séparé de l’Univers. Il est condamné à souffrir. Le soi n’existant pas, la recherche du désir pour soi est donc vaine, d’où la souffrance.
- La Vérité de la cessation de la douleur : l’homme doit
surpasser la réalisation
de sa propre vie. Puisque le désir est mauvais, il faut supprimer le désir.
- La Vérité de la Voie qui mène à la cessation de la douleur
(Nirvana) : le moyen d’y parvenir est de suivre I ’Octuple Chemin. Celui- ci
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est un code qu’il faut respecter dans un ordre ascendant, comprenant huit étapes conduisant à la perfection de l'Opinion, de la Volonté, du Langage, de l’Activité, des Moyens d’Existence, de l'Effort, de l’Attention et de la Méditation.
BOUDDHA exerça une influence étonnante sur l’Inde de son temps car il s’exprimait dans la langue du peuple au lieu du sanskrit que le clergé officiel continuait à pratiquer, et il exposait aux
masses des idées religieuses simples, sans rituels complexes.
Mais sa doctrine exigeait une discipline sévère incompatible avec la vie courante des castes, des affaires, de la famille... Les vrais disciples de BOUDDHA durent, comme leur maître, quitter leur foyer pour mener la vie austère d’ascète errant, de moine “mendiant”, et se plier aux nombreuses règles fixées par le Bienheureux. Ils devaient voyager sans cesse pour répandre la doctrine salvatrice des “Quatre Nobles
Vérités”.
Le Maître, qui avait découvert et révélé la voie de la libération, mourut
à l’âge de quatre-vingts ans, à Kusinagara.
A l’origine, il n’exista aucun culte. Les saints disciples de BOUDDHA recevaient seulement les hommages et les offrandes que l’usage indien obligeait à présenter à toutes les personnes vénérables. Le respect des laïcs envers les moines bouddhistes était empreint d’une certaine crainte due au pouvoir surhumain attribué aux ascètes, mais aussi de
vénération envers la mémoire de leur “maître” dont la légende, depuis sa mort, avait considérablement magnifié sa personne. Dès la fin du IVème siècle AJC, ses disciples élevèrent leur maître au rang suprême, au-dessus des dieux.
Le culte rendu à BOUDDHA prit d’abord pour objet les tumuli censés contenir son corps et les endroits où il se serait arrêté, d’où le culte des reliques et les pèlerinages aux lieux saints. Ce fut seulement au début de notre ère que des statues et des
bas-reliefs représentèrent BOUDDHA. Les cérémonies bouddhistes s’inspirèrent très largement du culte rendu aux divinités brahmaniques. Sous l’impulsion de l’Empereur ASOKA (264-227 AJC), le bouddhisme devint une grande religion à vocation universelle, grâce aux missionnaires qu’il envoya dans les royaumes limitrophes puis dans les contrées plus lointaines.
Le Bouddhisme atteignit son apogée au début de notre ère. Ceci, principalement, parce que les prêtres Brâhmanes qui, depuis plus de
mille ans, dirigeaient la vie sociale, religieuse et intellectuelle de l’Inde, surent concilier en un même culte les dieux populaires ancestraux, les textes des Véda et la doctrine bouddhiste. Mais cette combinaison de la dévotion des dieux primitifs et de la philosophie du comportement moral donna naissance à
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l'Hindouisme et au déclin du bouddhisme. Si celui-ci s’étiola dans son pays d’origine, en revanche, dès le lexème siècle AJC, il franchit les frontières de l’Inde pour s’étendre, non sans se modifier, sur une grande partie de l’Asie jusqu’en Chine puis en Corée et au Japon.
L’HINDOUISME
Entre le Vème et le IVème siècles AJC, dans un élan de ferveur religieuse, il y eut une modification profonde des conceptions religieuses : le Brahmanisme se transforma en Hindouisme. Par une transformation dans la continuité, l’Hindouisme se développa à partir de l’adoration des “forces vivantes” de la nature et de la philosophie des Véda, toutes deux teintées de conceptions bouddhiques. Sous cet étrange assemblage de dieux et d’idées, se fonda l’Hindouisme, croyance
qui unifia l’Inde.
Au lllème siècle AJC, cette religion était quasiment ce qu’elle est aujourd’hui. Riche d’une multitude de dieux, elle avait développé une dévotion populaire réconfortante et rédigé une littérature qui nourrissait et instruisait le peuple. Les Hindous n’ont qu’un seul article de foi :
“L’Homme forge sa destinée par interaction du ‘Karman’, du
‘Dharma’ et de la réincarnation”.
- Le Karman, c'est la loi de cause à effet qui détermine la position de l’homme dans la vie, non seulement en fonction des actes de sa vie présente mais de la somme des actes de ses vies antérieures.
- Le Dharma, ce sont les lois et les devoirs imposés à l’homme selon sa condition. Il doit respecter les coutumes du groupe dans lequel il est né. D’une façon générale, l’univers constitue un tout harmonieux seulement
lorsque la nature, les dieux et les hommes se conduisent correctement, remplissant leur Dharma. Ce mot désigne à la fois l’ordre cosmique, social, moral et religieux. En conséquence, il est aussi le devoir et la vertu de chacun.
- La réincarnation : renaissance dans une autre vie. Selon cette conception, la personnalité de l’homme est absorbée dans l’univers où son âme n’a rien à voir avec le corps dans lequel elle réside momentanément. Ce corps
n’est qu’un vêtement qui porte l’âme. Comme on jette un costume usagé, l’âme se débarrasse d’un corps usé, pour en retrouver un neuf. Habiter un corps nouveau, l’abandonner ensuite pour un autre de meilleure condition constitue, pour l’homme, un espoir inépuisable d’amélioration personnelle. Si bas soit- il, l’homme, du fait de la loi du Karma, peut porter son regard vers un sort meilleur au cours d’une prochaine vie, à condition de se bien comporter au cours de la présente,
c’est-à-dire agir selon son Dharma, selon les lois et les
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devoirs que lui impose sa condition humaine, sa caste. En revanche, l’âme du méchant se retrouvera dans un état inférieur, même dans le corps d’un animal
: d’un oiseau, d'un insecte, d’un ver de terre...
Parmi les multiples dieux qui peuplent leur panthéon, les Hindous, individuellement, n’en adorent qu’un seul auquel ils se confient. Ils considèrent les autres comme d'innombrables manifestions de celui qu’ils ont choisi. Chaque divinité incarne en elle Brahma, dont la
toute-puissance est omniprésente ; c’est un dieu sans apparence humaine.
Brahma est celui qui règle le processus du renouveau cosmique, alors que Shiva détruit la création comme la vieillesse détruit la jeunesse et l’automne l’œuvre du printemps. Quant à Vichnou, il préserve l’univers que Brahma a créé ; il garde la vie dans la graine, il fait éclore la semence dans la terre. Bien que Shiva et Vichnou exercent des fonctions abstraites, ils possèdent des attributs humains qui les rendent populaires.
L’homme, pour accomplir son Dharma, à la fin de sa vie, ayant vu naître et prospérer les fils de ses fils, doit quitter le monde actif pour se faire ermite, “Renonçant". Il vit dès lors dans une hutte, ne mangeant que des baies et des fruits de la forêt et méditant le Veda. Après une période d’introspection et de méditation, l’ermite parvenu à se détacher du monde, ne désirant plus que la perfection spirituelle, entreprend la dernière étape de sa vie, celle du
vagabond et mendiant, sans abri et sans bien. Ayant purgé son âme de tout désir, celle-ci peut atteindre le cycle de renaissance et de réincarnation, à moins que ce soit la suprême “libération”. Dans ce cas, elle accède à l'ineffable félicité de l’anéantissement, la délivrance, le Nirvana. Seuls des individus exceptionnels peuvent espérer cette libération.
Les “maîtres spirituels” fondèrent des ordres monastiques où, sous l’autorité d’un “guru", chef
religieux héréditaire ou régulièrement désigné, se rassemblent des “Renonçants". Ces communautés forment le noyau de sectes comprenant une vaste périphérie de laïcs unis, à l’intérieur de l’Hindouisme, par une dévotion particulière pour tel dieu ou telle conception originale des voies du Salut.
L’Hindouisme ne se réfère pas à un fondateur unique. Il n’a pas de clergé, ni aucune institution qui ait autorité sur l’ensemble des sectes mais, en revanche, il conserve une structure
sociale qui, en terme religieux, divise les hindous en “castes” selon les principes du Dharma qui impose à chacun de tenir sa place pour assurer l’équilibre du Cosmos. Il existe une hiérarchie des “castes" qui règle les rapports sociaux.
Aujourd’hui, les Indiens seraient à 75 % hindouistes, 0,7 %
bouddhistes, 13 % musulmans, 5 % chrétiens...
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Pour les Indiens, les dieux créèrent l’Univers et en contrôlent l’équilibre ainsi que celui de la vie sociale et religieuse. Chaque famille peut choisir sa divinité protectrice, l’implorer en cas de besoin et la remercier de ses bienfaits. Chaque individu doit mener sa vie selon les lois de sa caste. Après la mort, le défunt n'a pas à craindre un juge car il est assuré de la réincarnation, non pas en tenant compte de ses actes en tant que tels mais du désir dont il était animé au moment
d’agir. Chacun doit agir pour exécuter scrupuleusement tous ses devoirs conformément aux lois de sa castre.
Il en résulte que our75% des indiens qui pratiquent aujourd’hui l’hindouisme, les Dieux sont issus des divinités qui, dès l’origine de l’humanité, furent imaginés par l’homme pour personnaliser es forces vivantes de la nature : source, rivière, vent, orage, lesquels n’eurent jamais d’influence sur le destin post-mortel des individus qui pour mériter des réincarnations
successives, devaient pratiquer un mode de vie imposé par leur Dharma, selon des préceptes imaginés par l’homme
:
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La Chine.
Voilà quelque 2 MA, des Homo erectus migrèrent d'Égypte vers le Moyen-Orient. Certains traversèrent le Caucase, contournèrent la Mer Caspienne par l'Est puis le Sud de la Mer d'Aral et du Lac.Balkhach, et franchirent la Dzoungarie pour s'établir en Mongolie et en Chine, dans les plaines du Huangdi (fleuve Jaune) et du Yangzi Jiang (fleuve Bleu). Leurs descendants, vers 0,5 MA, étaient devenus des Néandertaliens Sinusiens parlant le Néando-sinisien ayant conservé
de leurs lointains ancêtres la dévotion innée aux "Forces vivantes" de la nature.
Dès le 10e millénaire AJC, des tribus accédèrent aux pratiques sédentaires des pasteurs-cultivateurs parmi lesquels se distinguèrent d'habiles artisans qui fabriquaient des outils et des armes en pierre et en os ainsi que des poteries.
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Au cours du 5e millénaire AJC, des paysans, pour se défendre des tribus errantes, se groupèrent en villages entourés de murs épais et hauts en terre battue. Ils habitaient des maisons semi-souterraines circulaires ou rectangulaires avec un foyer central. Ils conservaient leurs céréales dans des fosses creusées dans le sol. Au milieu du village se dressait une grande bâtisse de 200 à 300 m2 qui servait aux réunions politiques ou rituelles de
la communauté. Hors de l'agglomération, se trouvaient les fours de potiers, les ateliers de divers artisans et les cimetières. Les sites les plus remarquables sont ceux de Yangshao, de Banpo et de Miaodigou.
Les paysans cultivaient le riz (site de Hemudu), le sorgho et le chanvre, élevaient des porcs, des chiens et des vers à soie, pratiquaient la chasse et la pêche. Les artisans fabriquaient des vanneries, des outils et des armes en pierre polie, des haches, des couteaux et des
ornements en jade, et diverses amulettes en os taillé.
Vers la fin du 4 millénaire AJC, ils produisaient une céramique rouge montée à la main et finie à la "tournette", peinte avec soin. Sur certaines pièces, on peut distinguer des signes gravés qui pourraient être à l'origine des caractères de l'écriture chinoise. Ils tissaient le chanvre et la soie. Le mot "céramique" est un terme générique qui englobe : la poterie en terre cuite à
800°C, fragile et
poreuse, le grès cuit vitrifié à 1.100°C, solide et imperméable, la porcelaine qu'une cuisson à 1.300°C vitrifie davantage. Ici, il s'agit d'une céramique archaïque faiblement cuite
Dans les vestiges d'un village sur pilotis daté du 4e millénaire AJC, situé à Hemudu, dans la province de Zhejiang, on a retrouvé des poteries, des nattes, des cordes, des herminettes (hachette) en pierre, des outils agricoles en bois et en
os, des outils de menuiserie et de constructions navales, des pagaies, des sortes de fuseaux archaïques pour le tissage. Le millet était cultivé dans le bassin du Fleuve Jaune.
Au cours du 3e millénaire AJC, les artisans, en plus des productions précédentes, fabriquaient des ustensiles en terre cuite et réalisaient des céramiques au tour. Certaines pièces de formes particulières, notamment des "vases tripodes", des plats, des coupes... étaient moulés
et cuits à très haute température.
Les Chinois crurent longtemps que leurs empereurs descendaient des
divinités. La tradition orale situait l’accession de YU le Grand au trône vers
2200 AJC. Il fut le premier maillon de la lignée des XIA (HIA) (du nom de la terre dont il était déjà le prince), dont l'autorité fut acceptée par les chefs de nombreux villages de la vallée du Fleuve Jaune.
Dans des sites (provinces du Qinghai et du Gausu), datés des années
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2000 AJC, furent retrouvés de petits couteaux de bronze caractérisant une étape primitive de l'art métallurgique.
La Dynastie SHANG (1800-1100 AJC) établit un contrôle plus ou moins organisé sur les tribus de la vallée du Fleuve Jaune, dont les chefs devinrent des "nobles". Dans leur capitale (Anyang), les souverains successifs édifièrent de vastes palais, des entrepôts et des greniers. Dans les plaines, ils entreprirent des travaux d'irrigation. C'est à cette
époque qu'apparurent les premiers réels pictogrammes. Les Chamanes, à l'aide de cette écriture, notaient sur des os divinatoires les questions qu'ils posaient aux ancêtres et aux divinités.
Alors que le souverain assumait, avec ses conseillers, les fonctions relatives au royaume, à la fois politiques, administratives, militaires et religieuses, les "nobles" menaient près du roi ou dans leur fief une vie consacrée à la chasse et à la guerre. L'armée, à
cette époque, utilisait des chars attelés de deux chevaux, et des arcs puissants.
La vie religieuse était dominée par le culte des ancêtres royaux qui furent l'objet de sacrifices fastueux exigeant de nombreuses victimes animales (bœufs, moutons et porc), parfois humaines.
La nourriture et le confort du roi et de sa cour, des nobles et de leurs familles, étaient assurés par les paysans, les artisans et les artistes asservis au pouvoir. Précisons qu'à cette époque, les
éleveurs, en plus du porc et du chien, avaient domestiqué le bœuf, la chèvre, le mouton et divers volatiles. Certains artisans avaient acquis les techniques nécessaires à la fabrication des objets en bronze ; d’autres sculptaient la pierre et l'ivoire ; d'autres encore utilisaient le jade, pierre noble, pour en faire des couteaux, des poignards. On a découvert, sur les sites d'Erlitou et d'Erligang, datant du même millénaire AJC, des pièces de bois recouvertes de laque, des
objets en bronze : vases, cloches, pointes de flèches, hameçons, haches et poignards. Les pièces en bronze réservées au roi, au culte et aux nobles, étaient incrustées de turquoises et de malachites.
L'écriture s'organisa : les pictogrammes primitifs furent progressivement remplacés par des symboles correspondant à des mots. Les
scribes, qui développèrent cette forme d'écriture logographique, laissèrent des textes connus par des écrits ultérieurs : légendes, descriptions
de danses rituelles, listes de souverains...
Depuis les temps primitifs, les hommes avaient le culte des ancêtres et honoraient les "forces vivantes" de la nature, symbolisées par des dieux dont les chefs de tribus se disaient les intermédiaires terrestres, alors que le souverain était honoré comme étant le "fils du ciel", garant sur terre de l'ordre cosmique, incarnation des dieux dont les nobles du royaume étaient les
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serviteurs. Ceux-ci présentaient aux dieux des offrandes dans de magnifiques vases rituels coulés en bronze et gravés de symboles. Ils procédaient également aux sacrifices. Leur religion, avant tout, s'inscrivait dans les rythmes terrestres et célestes. Les sacrifices s'adressaient directement aux divinités des "forces vivantes" : fleuve, montagne, vent, terre. A ce culte, s'ajoutait celui des ancêtres.
Vers 1100 AJC, la dynastie SHANG fut renversée et remplacée par
celle des ZHOU (1100-600 AJC) dont les scribes laissèrent des textes qui, plus tard, furent réunis dans trois ouvrages : le Livre des Odes, le Livre des Histoires et un Code juridique. Sous le règne des ZHOU, l'astronomie et l'astrologie se développèrent. Les artisans maîtrisèrent les processus de la métallurgie du fer et fabriquèrent avec ce métal des objets tant pour l'agriculture que pour l'armée, laquelle développa l'usage du char et fit preuve de grandes qualités
guerrières.
La technique de la fonte du fer permit la fabrication massive d'outils utilisés pour le défrichement et les travaux d'irrigation ; l'emploi de la charrue attelée améliora les rendements agricoles. Cette modernisation permit aux seigneurs des "unités régionales" de constituer des royaumes puissants et autonomes dans lesquels les anciens fiefs furent annexés et devinrent des circonscriptions administrées par des fonctionnaires révocables. Chaque royaume
émit aussi sa propre monnaie fondue en bronze. Cette prospérité multiplia les rivalités des seigneurs et les luttes qui les opposaient aboutirent à des divisions, à des usurpations et à des changements de lignées princières. Dans cette confusion, l'empereur, fils du ciel, perdit de son prestige. A côté du culte public des ancêtres impériaux, apparut celui rendu, en grand apparat, par les seigneurs régionaux à leurs propres ascendants.
En 771 AJC, les souverains ZHOU, tributaires du
soutien des principautés, furent contraints, sous la pression des tribus du Nord- Ouest, de transférer leur capitale dans la région du Henan. Plus tard, des unités régionales se formèrent dans les pays de Qi, Jin, Qin, Chu... etc. La nature des relations entre le pouvoir royal et les princes des régions devint fonction de la puissance militaire de chacun et des alliances qui s'en suivirent. Dans cette confusion, seul l'esprit religieux conserva tous ses droits et le souverain unique
représentant terrestre des dieux, grâce à cette légitimité suprême, garda un certain pouvoir sur son empire.
CONFUCIUS (551-479 AJC) fut un "sage" parmi beaucoup d'autres. Parcourant le pays, il prêcha le respect de la tradition, de la morale et du devoir, en quelque sorte le retour aux institutions instaurées par les Sages-Rois de l'Age d'Or. Il eut de nombreux disciples qui transmirent ses paroles aux générations suivantes.
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LAO-ZI, autre sage, prêcha, sensiblement à la même époque, la soumission à la "voie" de la nature, c'est-à-dire à l'état moral qui précédait toute civilisation. Son discours allait quelque peu dans le même sens que les codes de la doctrine de BOUDDHA.
CONFUCIUS et LAO-ZI se situaient dans la tradition des sages et des savants errants qui contribuèrent à répandre la culture à l'ensemble du monde chinois, depuis les princes jusqu'à l'homme du commun. Les
scribes, les devins, les légistes fixaient par écrit les paroles solennelles des rois, des "nobles", serviteurs des dieux, mais aussi des légendes, des odes, des traditions populaires et les discours des sages et des savants. Ces textes furent repris ultérieurement dans les recueils dits "classiques".
Vers 433 AJC, commença une période de guerres acharnées entre les divers royaumes. Chacun, pour se protéger de son voisin, construisit des murailles aux confins de son
territoire et des remparts autour de ses villes.
En 256 AJC, les ZHOU furent battus par le royaume de Qin.
En 221 AJC, le roi de Qin, SHI-HOUANG-DI ayant écrasé ses rivaux, se proclama empereur. Il constitua une administration centralisée. Il détruisit les murailles entre les principautés réunifiées mais conserva les tronçons construits sur les confins septentrionaux et même les prolongea afin de créer une ligne de défense continue sur plus de trois mille kilomètres. Il découpa son
royaume en circonscriptions administrées par un corps de fonctionnaires qui remplacèrent l'ancienne noblesse. Il organisa la responsabilité collective de la paysannerie à laquelle il imposa un système pénal rigoureux, condamnant particulièrement les oisifs et les parasites. Il unifia, dans tout le pays, les unités de mesure, la monnaie, l'écriture, le langage, le code des lois pénales et administratives, l'écartement des essieux de voiture. Il institua un réseau de 7.000 km de
routes avec des relais de poste pour assurer les communications administratives de l'empire. Dictateur anti-intellectualisme, en 213 AJC, il mit fin à la libre pensée et fit brûler tous les textes anciens à l'exception de ceux traitant de la religion, de la médecine et de l'agriculture.
A sa mort, en 210 AJC, son fils (ER-HYANGDI) ne sut pas contenir les rébellions qui entraînèrent la chute de l'empire et la reconstitution des petits royaumes.
En 206 AJC, LIU-BANG
(GAOZU) parvint à faire accepter son autorité et devint le premier empereur de la dynastie HAN. Il renforça le pouvoir central et la rigueur des lois. Il restreignit davantage les libertés intellectuelles, créa des colonies militaires dans les régions exposées aux invasions nomades, rénova les murailles, les routes et les canaux... Il mit en valeur de nouvelles terres sur lesquelles il établit des colons. Son œuvre
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principale fut peut-être la création d'une “religion d'état”, le Confucianisme qui consistait à accomplir son destin conformément aux lois de l'ordre universel dont le roi était le garant.
En 195 AJC, à sa mort, son fils HUI lui succéda. En réalité, celui- ci laissa le pouvoir à sa mère, l’impératrice LU qui, à la mort de son fils, s'imposa pour conserver le trône. Elle décéda en 180 AJC.
WENDI, fils survivant de LIU-BANG, fut nommé empereur. A sa mort, en 141
AJC, son fils TINGDI lui succéda. Celui-ci entreprit de vastes campagnes militaires vers la Mongolie, l'Asie Centrale, la Corée et les régions barbares de la Chine du Sud. Pendant son règne, l'empire connut une période d'essor économique, métallurgique et commercial. Les exportations furent importantes : fer, sel, soieries, laques, céréales...
Après sa mort, en 87 AJC, ses successeurs perpétuèrent la dynastie des
HAN jusqu'en 220 de notre ère.
L'ÉCRITURE
On ne sait rien de la langue correspondant aux pictogrammes gravés sur les os divinatoires du Même millénaire AJC, mais leur interprétation est souvent des plus simples : la silhouette d'un cheval, le dessin d'une jarre se traduisent d'eux-mêmes... Le "soleil", par déduction, correspond aussi au mot "clarté"... Quelques 4.000 caractères différents ont été dénombrés sur les inscriptions divinatoires exhumées du site de XIAOTUN, près de la ville d'Anyang.
Seulement un millier d'entre eux sont aujourd'hui traduits. A ce fond primitif s'est progressivement ajouté une écriture logographique dans laquelle un symbole représente un mot.
Vers les années 600 AJC, les scribes, les devins, les analystes, les spécialistes des rites et du calendrier uniformisèrent le chox de leurs caractères calligraphiques (objets, partie d'objets, gestes...).
La langue chinoise fut, de tout temps, monosyllabique ; de ce fait, l'écriture fut
elle-même syllabique, c'est-à-dire que chaque signe écrit ou "graphème" notait un mot d'une seule syllabe mais n'en précisait pas la prononciation. Un système de rébus syllabique fut également introduit dans l'écriture, comme le firent les Sumériens et les Égyptiens.
A partir des années 200 AJC, de nouvelles règles calligraphiques
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permirent un alignement parfait des caractères. Au lieu des baguettes de bambou ou des plaquettes de bois, les scribes purent calligraphier les mots sur des rouleaux de soie sans pour autant abandonner les supports précédents, moins onéreux.
Bien que les sons de la langue parlée aient subi des modifications considérables, les Chinois d'aujourd'hui peuvent encore lire les œuvres du Vème siècle AJC en les prononçant à leur façon.
En effet, si, d'une province à l’autre, les
Chinois ne se comprennent pas
oralement entre eux, tous peuvent lire les mêmes textes.
L'apprentissage de l'écriture chinoise exige un gros effort car il s'agit de retenir plusieurs milliers de signes pour comprendre la littérature classique et, au moins, plusieurs centaines pour lire tes textes les plus élémentaires. C'est en partie grâce à cette forme d'écriture comprise par tout un peuple que s'est maintenue l'unité culturelle de la Chine et peut-être
aussi son unité politique, à travers tant de siècles et de si vastes espaces
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RELIGIONS CHINOISES
Les habitants de la Chine conservent de leurs lointains ancêtres la dévotion innée aux “forces vivantes” de la nature qui leur prodiguaient tout ce dont ils avaient besoin et auxquelles ils rendaient hommage dans ses divers aspects : les montagnes, les fleuves, les sources...
Les anciens Chinois étaient respectueux de ces puissances invisibles qui ramenaient le jour et la nuit, l’hiver et l’été, la sécheresse et la pluie... Ils croyaient en la présence universelle de cette “force vivante”
indéfinissable. Ils croyaient que toute chose, même la matière inerte, en était dépositaire.
Les éléments de la nature, nantis de cette “force vivante”, peu à peu, en devinrent les dieux des collines, de la terre, de la rivière, du ciel, du vent, du tonnerre... Avec le temps, ces divinités se multiplièrent. Le plus ancien et le plus grand parmi ces dieux était T’IEU, dieu du ciel. Au second rang, se trouvait le dieu du “Fleuve Jaune” auquel des victimes humaines étaient sacrifiées. Dans
les campagnes, le plus populaire était le dieu du sol, SHE, matérialisé par un tertre, un arbre, une pierre dressée...
Le monde de l’au-delà comptait une autre catégorie de puissances, les mânes des rois et des héros antiques et aussi les âmes bienveillantes des ancêtres de la famille. Celles-ci, douées d’un pouvoir mystérieux, exerçaient une grande influence sur le destin des vivants. Elles s’identifiaient souvent aux divinités de la nature du fait qu’elles pouvaient devenir les
protectrices des champs, des bosquets, des ruisseaux... dont les ascendants avaient été propriétaires ou exploitants à l’époque de leur vie.
Le paysan, avant d’aller travailler aux champs, le roi en méditant un plan, chacun, du plus humble au plus puisant, devait honorer et questionner les dieux et les ancêtres et tenir compte de leur bon vouloir. Pour les grands projets royaux, le contact terrestre avec le monde surnaturel s’établissait par l’intermédiaire du “Chamane”, femme ou
homme habité par les divinités, descendues du ciel sur Terre.
Les pratiques divinatoires destinées à cautionner les décisions royales remontaient loin dans le passé. Les devins, les “Chamanes”, soumettaient à l’épreuve du feu des omoplates de mouton ou de bœuf, ou des parties ventrales des carapaces de tortues dans lesquelles ils avaient creusé de petites cavités. La forme des craquelures obtenues leur permettait d’interpréter, dans le sens de la volonté royale, les réponses des
divinités ou des ancêtres interrogés. Dès le llème millénaire AJC, certaines de ces pièces divinatoires portaient des pictogrammes précisant la question posée et, parfois, la réponse correspondante. Parmi ces inscriptions, les plus longues comptaient une centaine de caractères mais, sur l’ensemble des pièces découvertes, on
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dénombra quelques quatre mille symboles différents.
Par ailleurs, la violence de certaines pratiques religieuses témoignent de la terreur qu’inspirait aux hommes l’action des “forces vivantes” invisibles touchant aux sources de la vie et à la mort. Le sang des animaux et des serviteurs sacrifiés sur le tombeau de leur seigneur était offert à ces “forces” pour qu’elles infusent au défunt la vie dans l’au- delà. Un serment féodal devenait inviolable si les lèvres des
assermentés avaient été badigeonnées de sang.
Quel que fut leur rang, quels que fussent leurs dieux, les hommes de la Chine ancienne se considéraient comme les acteurs jouant un rôle sur la scène de l’univers composée de plates-formes terrestres parcourues par la “force vivante” des eaux et surmontée par la voûte céleste. L’origine du monde visible ne les préoccupa pas ; le monde était là ainsi que les dieux en avaient décidé : le ciel était rond, la terre carrée. L’espace formé de
carrés emboîtés comptait quatre portes ouvertes aux quatre orients. A l’Est, le bois ; au Sud, le feu ; à l’Ouest, le métal ; au Nord, l’eau et, au centre de l’ensemble, la terre. Les montagnes étaient à la fois les supports du ciel et des voies pour y accéder.
Le ciel était la résidence du premier empereur, puissance mâle dont l’épouse était la terre. A ce couple céleste correspondait ici-bas le roi et la reine. Des penseurs élaborèrent divers concepts cosmiques :
- Le
Dao (le chemin, la voie) était le principe d’ordre qui gouvernait l’univers et en assurait son unité. Le roi en était l’incarnation terrestre.
- Le De était le pouvoir qui se manifestait dans des réalisations particulières.
Sur terre, le De était l’action des ministres qui gouvernaient, alors que le roi régnait. Tout désordre dans le royaume provoquait la réaction du ciel dont la “colère” se manifestait par des catastrophes.
- Le Yin et le Yang sont deux aspects antithétiques et complémentaires du Dao,
inséparables l’un de l’autre :
. Le Yin, c’était l’obscurité, le froid, la passivité, la terre, la lune, l’automne, l’hiver...
. Le Yang, c’était la lumière, la chaleur, l’activité, le ciel, le soleil, le printemps, l’été...
Dans la société : l’homme est Yang, la femme Yin, le seigneur Yang, l’inférieur
Yin. Ces deux principes n’impliquaient pas de jugement de valeur morale. Ils n’avaient rien à voir avec le bien et le mal, au contraire ; les alternances de leurs influences étaient indispensables à la bonne marche des choses. La terre contenant tous les éléments était neutre et son centre était la capitale de l’Empire chinois. Au-delà des frontières du royaume, le monde se diluait dans l’informe.
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L’âme humaine recelait deux forces : le souffle (Hun) provenant du ciel et y retournant après la mort, une âme corporelle (Po) destinée à retourner à la terre, le pays des morts, où la croyance populaire situait aussi la source de la vie comme celle des rivières.
La morale familiale était fondée sur l’autorité du père en qui le fils devait voir un futur ancêtre. Le fils pieux devait naturellement prendre soin de son père et de sa mère et ne pas oublier qu’il tenait son corps de ses
parents et de ses ancêtres, et qu’il se devait d’avoir au moins un fils pour assurer le culte. Le principe de piété filiale étendu à tous les rapports entre supérieurs et inférieurs était le fondement de toute morale privée et publique. Par ailleurs, il y avait corrélation entre la société et la nature. La première devait aider la seconde à suivre son cours normal, notamment le monde paysan devait veiller à la bonne marche des travaux agricoles pour que la nature lui accorde de bonnes
récoltes ; c’était, en quelque sorte, le principe : “Aide-toi, le ciel t’aidera".
En réalité, le paysan se souciait peu des considérations philosophiques et cosmologiques ; sa morale découlait des droits et des devoirs familiaux et sa religion était celle de la nature. Il honorait ses ancêtres et glorifiait le dieu du sol. Chaque groupe de paysans possédait sur son territoire un “lieu saint” où se tenaient les fêtes des saisons et les marchés au cours desquels se
rencontraient les jeunes gens et les jeunes filles...
Quant à la relation harmonieuse entre les hommes et le Cosmos, c’était l’affaire du roi et de son administration. Cette harmonie entre le ciel et la terre devait tendre à la perfection afin que puisse se réaliser, un jour, cette “Grande Justice” qui était l’aspiration utopique du peuple chinois.
Au-delà de la famille, la vie religieuse était dominée par le culte des ancêtres royaux qui étaient l’objet de cérémonies et de
sacrifices fastueux. Les grandes tombes, du site de Ngan-Yang de la fin du blême millénaire AJC, témoignent de l’importance attachée à la vie d’outre-tombe des souverains enterrés avec leurs bijoux, leurs armes serties de pierres précieuses, leur char d’apparat et leurs serviteurs.
Vers les années 200 AJC, le premier souverain de la dynastie des HAN organisa une religion d’état fondée sur le culte traditionnel des “Forces vivantes” de la nature et des mânes des ancêtres, mais auquel il
associa un ensemble de doctrines morales supposées avoir été conçues par CONFUCIUS. En réalité, les “Classiques” Confucéens étaient des textes compilés longtemps après la mort du “maître” par les disciples de ses disciples et mis au point et interprétés par les scribes du régime. Cette religion d’état n'était confucéenne que dans la mesure où elle se conformait à la pensée des ouvrages associés au nom de CONFUCIUS et non parce que le “maître en fut le fondateur et en
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devint la principale divinité. Cette religion, organisée et soutenue par les HAN, devait détrôner les anciennes croyances. Les temples des dieux locaux non conformes à la nouvelle doctrine furent détruits mais le peuple secrète- ment continua à vénérer les divinités de sa mythologie ancestrale.
De son vivant, CONFUCIUS (551-479 AJC) avait été un sage parmi beaucoup d’autres. Sous les HAN, il fut considéré comme une autorité en matière de coutumes et de morale. Ultérieurement, il fut même
déifié. Au premier siècle de notre ère, il était considéré comme un être divin dont la venue sur Terre avait été annoncée par des prodiges. A partir du Vème siècle de notre ère, on lui éleva des temples.
LE CONFUCIANISME
Cette “religion” prêchait le retour aux institutions des dieux créateurs qui étaient censés avoir fondé la civilisation. Elle avait le culte des livres par lesquels se transmettait la tradition civilisée. Les vertus morales des confucianistes : bonté, rectitude, sagesse, courage et pureté, furent symbolisées par les qualités du jade, pierre noble, pure et magique. Ses normes étaient essentiellement :
- Le “Ren”, bienveillance faite de respect des
droits et devoirs de chacun suivant son rang et sa fonction.
- Le “Yi”, "Li", rectitude et humilité fondées sur le sens de la dignité personnelle, ordre rituel assurant le bon exercice du “Ren”.
- Le "Shu", pardon et tolérance.
- Le “Xiao", structure des relations humaines sur le modèle de l'ordre familial : obéissance du fils au père, de la
femme au mari, des cadets aux aînés, des sujets à leur souverain. Ce dernier lui-même exerçait le pouvoir en vertu de sa soumission au ciel auquel il était seul à offrir le sacrifice.
-
L'empereur WU (ou WUDI) (140 à 87 AJC), reprenant les vieilles conceptions attribuées à LAO-ZI (page 171), développa l'idée que le ciel, par- delà sa diversité, était foncièrement un, ceci en fonction d’un principe d’ordre d’unité mystérieuse, à la fois transcendent et immanent le Tao (Dao), la Voie, celle de la réalité suprême en laquelle toutes les contradictions apparentes se résorbent.
WU fit construire un sanctuaire en pleine harmonie avec les théories
cosmologiques pour y sacrifier au dieu TAIYI qui, dans des temps plus anciens, matérialisait le mystère de la “grande unité”.
Le règne de l’Empereur WU marqua l’intégration du pouvoir impérial
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dans l’ordre cosmique. L’Empereur “fils du ciel”, consacré par un mandat
céleste, était le garant de l'harmonie entre le ciel et la terre.
LE TAOÏSME
Le Taoïsme, dont la base était le Tao, dérivait de la même source traditionnelle que le confucianisme. Son idéal était de se conformer à l’ordre de la nature, celui qui régnait avant toute civilisation, alors que la religion confucéenne avait introduit la notion de discipline imposée par l’État dans le respect de la civilisation créée par les dieux, les premiers empereurs.
Les Taoïstes développèrent des techniques d’extase devant leur permettre d’accéder à l’union mystique avec le
Tao et d’atteindre à l’immortalité en gardant leur âme dans leur corps sublimé. L’espoir d’immortalité fit gagner des adeptes au Taoïsme. Les recettes de longé vité plus matérielles se développèrent ; par exemple : l’absorption de la poudre de jade.
Au second siècle de notre ère, les Taoïstes prêchèrent une doctrine égalitariste et l’avènement d’un nouvel ordre social et religieux qui remporta un succès foudroyant dans les masses paysannes dont la vie était rude. Cette religion
proposait une place et un rôle à chacun, hommes et femmes, riches et pauvres. Elle comportait de nombreuses cérémonies collectives exaltantes qui s’adressaient à des divinités suprêmes individualisées assurant la rémission des péchés et promettant un salut personnel.
Pour le Taoïste, le ciel, la terre et les hommes dépendent du Li, l'ordre
rituel.
Le BOUDDHISME
Introduit en Chine au llème siècle AJC, le bouddhisme resta, jusqu’au début de notre ère, la religion de petites communautés isolées. Ce fut seulement vers le Vème siècle de notre ère que se multiplièrent ses adeptes qui construisirent des temples et des monastères. A partir du Xlème siècle, la corruption des moines bouddhistes et leur persécution par l'État furent à l’origine du déclin de cette religion qui ne laissa subsister que quelques moines dispersés.
231
LE SYNCRÉTISME
Progressivement, les Chinois construisirent une religion à partir des trois doctrines fondamentales : le Confucianisme, le Taoïsme et le Bouddhisme ; trois religions en un seul Tao dans lequel prédominait le culte des divinités, particulièrement les dieux du Sol et du Foyer et la vénération des ancêtres. Cette religion composite, “universisme”, ne comptait ni prêtres, ni textes sacrés. Mais dans diverses circonstances, les Chinois consultaient en qualité de techniciens, les sages
taoïstes, les moines bouddhistes, les devins, les exorcistes... la vie religieuse collective, les temples, les fêtes étaient gérées par un conseil désigné par la communauté locale. Les défilés costumés, le théâtre étaient des manifestations religieuses importantes car ils mettaient en scène les dieux et les faisaient participer à la fête.
En 1919, les révolutionnaires accusèrent la religion d’être à l’origine de tous les maux qui accablaient l’Empire du Milieu ; cette idée, quelques
années plus tard, fut reprise par l’idéologie marxiste-léniniste- maoïste.
Aujourd’hui, compte tenu de la politique gouvernementale et du syncrétisme religieux des Chinois, il est quasiment impossible de connaître leur allégeance religieuse. Il est cependant probable que les générations âgées gardent un attachement aux croyances et aux pratiques d’antan et que beaucoup d’autres, même parmi les jeunes conservent nombre de superstitions auxquelles croyaient leurs ancêtres.
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ALPHABET
La Grèce
Ougarit fut la plus importante citée sur la côte de la Méditerranée, s'étendant sur plus de 50 hectares. Elle acquit toute son importance vers les années 2.000 av. J-C, lorsqu'elle constituait un carrefour commercial pour l'Egypte, la mer Egée, Chypre, la Syrie et la Mésopotamie.
En 1929, les fouilles ont mis au jour les vestiges de la cité antique, avec son palais royal, ses temples et plusieurs quartiers d'habitations palais qui ont livré des dépôts d'archives et des textes littéraires, attestant une étonnante diversité de langues et cinq systèmes d'écriture. Les tablettes cunéiformes que l'on a découvertes n'étaient pas transcrites dans l'écriture sumérienne traditionnelle. Il s'agit bien pourtant d'une écriture cunéiforme, en ce sens qu'elle était tracée en enfonçant la pointe d'un roseau taillé en biseau sur des tablettes d'argile fraîche.
L'alphabet d'Ugarit (XV°- début XIII° avant JC) se caractérise par la forme, simplifiée, presque stylisée, et le nombre (entre vingt-deux et trente signes) de ses caractères et surtout par le fait qu'il est - à une exception près - une écriture consonantique, c'est à dire ne transcrivant pas les voyelles. C'est historiquement le premier "abjad" (alphabet écrivant surtout les consonnes) complet connu, après les écritures sinaïtiques. Il atteste pour la première fois de l'ordre des lettres, encore utilisé de nos jours dans la plupart des alphabets modernes (latin, grec, étrusque) et des alphabets sémitiques (phénicien, hébreu), l'ordre levantin.
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La cité d'Ougarit fut détruite vers 1200 avant JC par les Peuples de la mer. Mais les phéniciens qui avaient résisté à cette invasion utilisaient leur alphabet copié sur celui d'Ougarit
L'alphabet phénicien est à proprement parler consonantique. Cependant, vers le IXe siècle AJC, y apparurent certaines voyelles, surtout des voyelles finales. La majorité des spécialistes estime aujourd'hui que l'alphabet phénicien fut adopté par les Grecs au début du VIIIe siècle AJC.
Alphabet Grec Les Grecs ont conservé les mots désignant les lettres phéniciennes, même s'ils ont remanié leurs formes et leurs appellations. Ainsi, le A phénicien, représentant un bœuf, était nommé « aleph » par ceux-ci. Le A grec, bien qu'ayant varié dans sa transcription, est appelé « alpha » ce qui indique son origine, « alpha » ne signifiant rien de particulier en grec. La plupart des noms de lettres grecques peuvent être expliqués d'une manière similaire. La perte du sens du nom accentua d'ailleurs la modification du mot lui-même.
Un autre indice de l'origine phénicienne est l'ordre des lettres, l'ordre levantin, qui fut conservé entre l'alphabet phénicien et l'alphabet grec. Les plus anciens textes grecs connus sont écrits de droite à gauche, comme tous les abjads sémitiques.
Le plus important changement que les grecques apportèrent à l'alphabet phénicien consiste à donner à certaines consonnes dont ils n'avaient pas
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l'utilisation la valeur d'une voyelle : (alpha), (epsilon), (iota), (omicron) et
(upsilon),
LES CHIFFRES
Les Mathématiques
Les mathématiques grecques résultent des apports mésopotamiens et égyptiens, mais leur grande nouveauté c'est qu'elles quittent le domaine de l'utilitaire pour rentrer dans celui de l'abstraction. Les mathématiques grecques deviennent une branche de la philosophie. De l'argumentation philosophique découle l'argumentation mathématique. Il ne suffit plus d'appliquer, il faut prouver et convaincre : c'est la naissance de la démonstration. L'autre aspect de ces nouvelles mathématiques concerne leur objet d'étude. Au lieu de travailler sur des méthodes, les mathématiques étudient des objets, des représentations imparfaites d'objets parfaits, on ne travaille pas sur un cercle mais sur l'idée d'un cercle.
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Les chiffres :
Dès le Ve siècle AJC, en Attique, région d'Athènes, apparaissent des chiffres dont chaque signe (à l'exception de celui pour 1) n'est autre que la première lettre du nom du nombre, tracé dans l'alphabet local athénien, à savoir :
Il existait des signes notant des valeurs intermédiaires, représentés par une ligature des deux chiffres fondamentaux pour :
Chacun de ces nombres est composé du signe de valeur 5 auquel on a souscrit celui du multiplicateur.
Presque exclusivement épigraphique, ce système numéral fut surtout utilisé pour indiquer des prix et des mesures. Bien que s'étant étendu, en raison du rayonnement d'Athènes, à d'autres cités grecques (avec de nombreuses variantes locales, selon les alphabets (épichoriques), il fut détrôné par le système alphabétique.
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Numération alphabétique
Les Grecs se sont servis de ces vingt-quatre lettres de l'alphabet pour noter aussi les nombres. Ils signalisaient au moyen d'un accent placé en haut à droite qu'il ne s'agissait plus d'une lettre mais d'un chiffre, et le tour était joué. On gardait l'ordre alphabétique, mais on ajoutait trois signes :
On pouvait aller ainsi jusqu'à 999. Au-delà, on reprenait le même code, mais en mettant un accent (ou un iota souscrit) en bas à gauche. Ainsi (,a) vaut 1000 (,b) vaut 2000 (,p) vaut 80000, et ainsi de suite.
Ces écritures engendraient de nombreuses ambiguïtés que le contexte était censé lever. Pour effectuer des calculs commerciaux, ils utilisaient des abaques.
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FORMATION DU PAYS
Vers 2.000 ans AJC, les populations qui formeront la Grèce sont les Pélasges, ils vivent en Thrace, Béotie (Thèbes), Phocide (Delphes), Attique (Athènes), Argonide et Corinthe et, en dépit de faibles ressources minérales, travaillent le bronze. Le rempart de Laine en Argonide, montre un souci de se protéger des voisins. Dans les îles de la mer Egée, des sociétés commerçantes et maritimes prennent place, par exemple dans les Cyclades (les îles Andros, Dèlos, Växjö, Paros …).
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La Thessalie, grande productrice de chevaux est seule à disposer d'une cavalerie jouant un rôle significatif à la guerre. C'est la classe aristocratique dans chaque état qui constitue la cavalerie. Le char et le cavalier porteur de lance sont les pièces essentielles des armées, l'infanterie d'origine
modeste, voire esclave, est médiocrement équipée et joue un rôle secondaire dans la bataille. Toutefois les plaines étroites limitent la taille des forces de cavalerie. L'épée est longue et fine et le bouclier en bois rond ou plus rarement en "huit. La guerre sur mer débute au VIIIe siècle mais le navire est surtout un
transport de troupes, et d'un usage mixte (guerre et commerce). Le premier conflit connu oppose Corinthe et Corcyre vers 660.AJC. Les trières font leur apparition, rapides, effilées c'est un navire autour de l'éperon, peu apte à la navigation en haute mer. C'est le navire de combat le plus efficace. Il faut 170 rameurs pour le mouvoir. 20 soldats sont à bord, les épibates. Il faut beaucoup de temps pour que ce navire cesse d'être une simple plate-forme de combat et utilise des tactiques navales.
En se basant sur les fondations des entrepôts navals grecs retrouvées au Pirée, on estime les dimensions d'une trière à 36 mètres sur 5. Le tirant d'eau ne dépassait pas un mètre. Légère et maniable, la trière était adaptée au paysage maritime grec, à ses îles, ses criques et ses passes étroites. En revanche, ne possédant pas de quille, la trière était peu stable et chavirait
facilement par gros temps. Le fond plat facilitait le halage du bateau sur terre ferme, la proue tournée vers la mer.
Athènes fut fondée vers l’an 800 avant J-C par la fusion de plusieurs villages de Grèce. Elle devient alors une grande cité. À cette époque, Athènes fut qualifiée de « capitale de la Grèce » ; située sur les terres les plus fertiles de la région et assez proche des voies maritimes, Athènes deviendra rapidement une cité très puissante, au grand désarroi de sa cité ennemie, Sparte. Athènes fut le centre culturel, intellectuel et artistique de toute la Grèce, mais aussi une inspiration pour les Romains, qui copièrent plus tard les œuvres grecques.
Vers la fin du VIème siècle AJC, un événement extraordinaire se produit à Athènes, en Grèce, avec la naissance d'un nouveau mode de gouvernement : la Démocratie. Alors que le reste du monde vit sous la domination d'empereurs
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et de Rois tous puissants, le peuple athénien se gouverne lui-même. Tous les citoyens peuvent prendre la parole et voter à l'agora, où siège l'Assemblée de la cité. Cependant, les esclaves, les métèques (étrangers) et les femmes ne sont pas considérés comme des citoyens.
L'agriculture est le fondement de la vie économique en Grèce. Par la mise en valeur intensive d'un terroir restreint, malgré un outillage et une terre généralement de qualité médiocre l'agriculture a permis d'assurer la subsistance d'une population importante, en s'orientant essentiellement vers la production végétale. Cependant, si les céréales, l'olivier et la vigne y tiennent une place prépondérante, la production agricole est plus variée qu'on ne l'a longtemps présentée, grâce notamment à la culture de légumes et légumineuses et à l'élevage d'ovin et caprin.
L'agriculture tient une place prépondérante dans le circuit économique grec : elle occupe près de 80 % de la population (en partie servile) et elle est, du fait de l'équilibre précaire entre sa production et les besoins de la population, l'objet de l'attention permanente du pouvoir politique. Mais la propriété et l'exploitation de la terre, sont interdites aux non citoyens. L'agriculture est par excellence le domaine d'activité du citoyen, et elle a donné naissance en Grèce à un idéal de vie et de mœurs qui perdura tout au long de l'Antiquité.
En Grèce où l'on tisse la laine depuis le néolithique, puis le lin. L'artisanat est une activité économique importante. Il correspond à toutes les activités de transformation de matières premières, agricoles ou non, en produit fini, aussi bien dans le cadre de la famille que dans celui d'ateliers de taille importante réunissant plusieurs dizaines de salariés et d'esclaves.
La boulange et le tissage sont le fait des femmes ou des esclaves. Seuls les tissus teints raffinés, comme ceux teints à la pourpre de Tyr, sont réalisés en atelier. Le travail du métal, du cuir, du bois ou encore de l'argile (poterie) sont en revanche des activités réalisées dans les ateliers, où travaillent des ouvriers et des esclaves, comme dans la fabrique de boucliers de Lysias, les tanneries, les fabriques de lyres et de poteries qui regroupent un maître, des salariés et des esclaves.
Les travailleurs salariés sont payés à la tâche. Dans les chantiers d'État, à Athènes, tous sont payés une drachme par jour, quel que soit le métier accompli. Généralement, la journée de travail commence au lever du soleil, et s'achève en milieu de l'après-midi. Il faut savoir que les grecs, dès le VIème siècle AJC, avaient des pièces de monnaie en bronze, or ou argent, avec des personnages et des monogrammes.
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En Grèce, l'extraction du minerai, son traitement et le travail des métaux constituent une activité importante. Les gisements de minerai sont nombreux. Les plus connus sont les mines d'argent du Laurion, de Chypre et de Siphnos
; les mines d'or : Siphnos et Thassos ; les mines de fer : Eubée, Rhodes et
Chypre ; les mines de cuivre : Eubée, Chalcis.
Très tôt, le monde grec dut recourir au commerce maritime pour se développer, en raison de la nécessité d'importer le blé, papyrus, épices, tissus, métaux, mais aussi des matériaux de construction des navires comme le bois, la toile de lin et de la poix. Les zones d'approvisionnement sont la Cyrénaïque, l'Égypte, l'Italie et la Sicile ou encore le Pont-Euxin.
De leur côté, les cités grecques exportent du vin, des céramiques et de l'huile d'olive. Athènes vend également le marbre tiré du Pentélique, renommé dans tout le monde grec, ou encore des monnaies d'argent, dont la fabrication est particulièrement soignée et qui possèdent un fort taux d'argent. Ces dernières servent en effet non seulement de moyen d'échange, mais aussi de ressource métallique : dans les pays comme l'Egypte qui n'ont pas de monnaie.
Le commerce de détail est assez mal connu. Si le paysan ou l'artisan vendent souvent eux-mêmes leur production, il existe des marchands au détail regroupés en corporations, ils vendent qui du poisson, qui de l'huile, qui des légumes. Les poids sont régulièrement vérifiés par les métronomes.
Parallèlement aux marchands « professionnels » se trouvent ceux qui vendent le surplus de leur production domestique, que ce soit des légumes, de l'huile ou du pain. C'est le cas de nombreux petits paysans.
L’esclavage a été une composante essentielle du développement du monde grec pendant toute son histoire. Il est considéré non seulement comme indispensable, mais encore comme naturel.
Les soldats, de la phalange, portent un casque à cimier en crins de cheval sont habillés d’une cuirasse de bronze, protégés par un bouclier rond bombé et armés d’une lance à pointe de bronze.
La phalange, sur le terrain, est appuyée par des cavaliers, qui n'ont encore à l'époque qu'un rôle secondaire et des éléments légers de harcèlement, équipés d'arcs, de javelots ou de frondes.
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RELIGION GRECQUE
La religion tient une place importante dans la Grèce antique. Les divinités sont nombreuses et interviennent régulièrement dans la vie des hommes et des cités.
La religion grecque est polythéiste, elle comporte de nombreux dieux. Ils ont des pouvoirs différents et en possèdent les attributs (le roi des dieux, Zeus, avec la foudre ; Poséidon, dieu de la Mer, le trident). Ils ont une apparence humaine ainsi que les qualités et les défauts des humains (l'orgueil, la jalousie, la
colère irraisonnée, etc.). Ils se querellent souvent et les histoires à leur sujet sont très nombreuses. Elles constituent la mythologie que l'on connaît
essentiellement grâce à Homère et à Hésiode.
Le mythe de la naissance d'Athéna illustre les caractéristiques de la mythologie :
Volage, Zeus, trompe son épouse. Pour éviter sa vengeance, il dévore sa maîtresse et l'enfant qu'elle porte. Il ressent bientôt une vive douleur au crâne. Le mal devient
insupportable. Zeus demande alors à Héphaïstos, le dieu
forgeron et boiteux, de lui briser la tête afin de le libérer de cette douleur. Du crâne de Zeus, sort une jeune fille, portant un casque et des armes. Ainsi naît la déesse Athéna.
Chaque dieu est ainsi affublé d'un trait particulier : Zeus est infidèle, Héra jalouse, Héphaïstos boite. Chacun est attaché à un domaine particulier de la vie des Grecs : Héra protège les mariages légitimes, Athéna la cité en guerre. Enfin, le
mythe d'Athéna illustre la supériorité de certains dieux.
Le panthéon
• Zeus règne sur les dieux depuis l'Olympe, la plus haute montagne de Grèce. Mais il a dû conquérir sa place. Kronos, roi des dieux, mange ses enfants pour qu'ils ne prennent sa place. Sa femme remplace l'un des nouveau-nés par une pierre et confie le petit Zeus ainsi sauvé à la chèvre Amalthée. Zeus grandit. Il revient pour libérer ses frères et sœurs : Poséidon (dieu de la Mer), Hadès (dieu des Enfers), Déméter (déesse de la Fertilité et des céréales) et Héra, qui devient sa femme. Zeus chasse Kronos, devient à son tour roi des dieux et récompense la chèvre Amalthée en lui donnant une corne magique, d'où sortent richesses et victuailles (la corne d'abondance). En plus des frères et sœurs de Zeus, les dieux importants sont Apollon (dieu des poètes), Aphrodite (déesse de l'Amour et de la Beauté), Hermès (messager des dieux).
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3. Le héros, mi- dieu mi-homme
• Les mythes évoquent aussi les héros, c'est-à-dire des hommes dont l'un des parents est un dieu, comme Achille (fils d'une nymphe), ou dont les actions sont extraordinaires, comme Ulysse
. Les cultes familiaux
• Chaque famille grecque a un contact quotidien avec les divinités à travers des cultes familiaux. La maison elle-même est habitée par un « bon génie », représenté parfois par un serpent. Avant chaque repas, la
famille offre à ce serpent une libation, quelques gouttes de vin versées à terre. Dans le foyer, où l'on fait le feu, se tient la déesse Hestia. C'est là et donc sous la protection de la déesse que l'on accueille les nouveaux membres de la famille. Une jeune mariée, par exemple, fait le tour du foyer, reçoit sur la tête des figues sèches, des noix et des graines en signe de bienvenue et de richesses à venir. Elle mange aussi un gâteau de sésame et de miel, un coing et une
datte.
Le dieu protecteur de la cité
• Dans une même cité, on se retrouve pour un culte commun : celui du dieu protecteur. À Argos, on fête la déesse Héra ; à Athènes Athéna. Tous les quatre ans sont organisés de grandes fêtes en l'honneur de la déesse, les panathénées. Des courses aux flambeaux ont lieu la nuit, ainsi que des danses et des chants interprétés par les jeunes Athéniens. Le lendemain matin, le peuple de la cité défile jusqu'à l'Acropole. Il apporte à la statue de la déesse un grand vêtement brodé par de jeunes Athéniennes. Le soir, on sacrifie cent bœufs dont la viande est partagée lors d'un grand banquet. Cette fête est à la fois celle de la déesse et celle de la cité.
Constatations :
Dans le chapitre qui suit nous ne mentionnerons que les philosophes scientifiques, mais il faut savoir que les grecs développèrent la sculpture et
l’architecture, ainsi que des formes d’arts comme la fabrication de monnaie,
de poterie, de joaillerie.
Leurs artisans confectionnaient des armes et des objets d’usage courant
conformément aux traditions.
Les paysans assuraient leur propre subsistance et celle des habitants des villes. Les travailleurs des différentes mines produisaient assez de matière première
pour satisfaire les besoins du peuple...
Quant aux conditions matérielles de vie des Grecs, elles n’avaient
pratiquement pas évolué durant les cinq derniers siècles.
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LES PHILOSOPHES
En plus d’un nouveau mode de gouvernement : la Démocratie. Il s’était créé en Grèce une nouvelle classe sociale, celle des philosophes. Ceux-ci, à côté des administrations civiles et religieuses, avaient la mission de préparer les jeunes à la vie de citoyens responsables, d’où la création d’écoles.
En plus de la grammaire, de la rhétorique, des mathématiques et des sciences, les philosophes enseignaient à leurs élèves : la maîtrise de soi, le respect des lois. Ils leur expliquaient que le but de l’homme est le bonheur, et que les vertus sont les moyens de l’atteindre. La vertu est le juste milieu entre excès et un défaut : ainsi le courage s’oppose à la lâcheté aussi bien qu’à la témérité.
Dans ce livre nous n’évoquerons pas cette mission éducative des philosophes grecs, nous décrirons seulement les recherches que certains d’entre eux entreprirent pour comprendre les manifestations de la nature
Les premiers philosophes qui s’adonnèrent à la science furent Thalès (625.547AJC), Pythagore (570.480AJC) et Platon (427.348 AJC), qui rapportèrent de leurs voyages en Egypte et Babylonie les principes de l’arithmétique de la géométrie, et des cartes du ciel.
Thalès de Milet (625 - 547AJC) est reconnu comme ayant été le premier philosophe, scientifique et mathématicien grec.
Il considéra que l'eau est le principe de toutes choses : la Terre n'est que de l'eau condensée, l'air de l'eau raréfiée. La Terre flotte comme un disque de bois, sur l'eau ; et dans l'univers rempli de matière liquide raréfiée, flottent les étoiles et le Soleil.
On prétend que Thalès fut influencé par l'idée égyptienne de l'océan primordiale, d'où sortirent les Dieux. A moins que ce fut par les anciens Babyloniens qui considéraient l'eau comme liquide éternel, source de toutes choses.
Son intérêt pour l'astronomie le poussa à faire de nombreuses observations sur les constellations. A propos de la Grande Ourse il conseilla aux marins de s'en servir pour se guider. Il aurait été le premier à noter le voyage du soleil entre les deux Tropiques. Il en déduisit que l'année ne comptait pas 365 jours, mais
365 et un quart.
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Il constata que certaines étoiles n'étaient pas toutes fixes par rapport aux autres et les baptisa « Planètes », ce qui signifie corps errant. On dit même qu'il parvint à en répertorier les éphémérides.
En mathématique : il affirma que des droites parallèles découpent sur deux droites des segments proportionnels.
Par les Egyptiens, il connaissait la propriété de l'ambre jaune d'attirer les corps légers grâce à « l'âme vivante » qu'elle possède.
En son temps on avait observé que deux pierres de magnésie face à face s'attirent ou se repoussent.:
Thalès de Milet (625 - 547AJC) tenait des Babyloniens et des Égyptiens ses connaissances en mathématique et géométrie mais posa les premiers jalons du raisonnement. Cette dénomination fait référence à une anecdote, selon laquelle le pharaon Amasis aurait dit que personne n'était en mesure de savoir quelle était la hauteur de la Grande Pyramide et Thalès aurait relevé le défi en calculant le rapport entre leur ombre et celle d'un corps.
Il est possible que Thalès ait attendu que l'ombre portée par un corps debout soit de même longueur que la hauteur de ce corps, puis ait déduit qu'il devait en être de même pour la pyramide. Si ce moment coïncide avec l'alignement du Soleil avec un côté de la base, ce qui arrive deux fois par an, il suffit alors d'ajouter la longueur de l'ombre au sol avec la moitié de la longueur du côté de la pyramide pour obtenir la hauteur du bâtiment.
En astronomie L’intérêt que Thalès avait pour l'astronomie le poussa à faire de nombreuses observations sur les constellations. Il aurait été le premier à noter le voyage du soleil entre les deux Tropiques. Il établit aussi que certaines étoiles n'étaient pas toutes fixes par rapport aux autres et il les baptisa
« Planètes », ce qui signifie corps errant. On dit même qu'il parvint à en répertorier les éphémérides. Il fut aussi le premier à constater que l'année ne comptait pas 365 jours, mais 365 et un quart.
Anaximandre (611 - 547 AJC) fut l'auteur du premier ouvrage en prose sur l'Univers et les Origines de la Vie, mais uniquement connu par les citations qu'en donnèrent les philosophes des générations suivantes. II aurait dessiné les premières cartes de géographie et la première carte du ciel. Il aurait introduit en Grèce le gnomon (cadran solaire). Il aurait repéré les intervalles des équinoxes et les solstices.
Il aurait imaginé une substance Apeiron originelle éternelle (infinie) et indestructible qui ne serait rien de déterminé mais riche de contraires qui se
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sont déjà séparés pour construire ce qui est, et se sépareront éternellement pour construire ce qui sera. Ainsi le chaud se sépara du froid, le sec de l'humide, le dense du léger, le lumineux de l'obscure. Toute chose qui meure et retourne à l'Apeiron dont elle est issue.
Anaximandre, en observant le ciel constate que la Terre est en équilibre dans l'espace et en déduit qu'elle flotte immobile au centre de l'infini, sans être soutenue par quoique ce soit.
En observant le Soleil il constate que c'est un feu et en déduit que ce feu est caché par une sphère opaque percée d'un trou par lequel il se montre. L'éclipse se manifeste lorsque le trou par où sort la chaleur du feu est clos. La lune est un cercle plein de feu, comme celui du Soleil.
Anaximandre expliquait les phénomènes, tels que le tonnerre, la foudre et les éclairs, par l'intervention des éléments et non par des causes divines « Tout cela se fait par le vent, lorsqu'il advient qu'il est enfermé dedans une nuée épaisse, et que lors d'une rupture, par sa subtilité et légèreté il crée le bruit. Une forte divulsion engendre la lumière.
Le tonnerre serait le son produit par le choc de nuages sous l'action du vent, la force du son étant proportionnelle à celle du choc. S'il tonne sans qu'il éclaire, c'est parce que le vent est trop faible pour produire une flamme, mais assez fort pour produire un son. L'éclair, quant à lui, serait une secousse d'air qui se disperse et tombe en permettant à un feu peu actif de se dégager et la foudre, le résultat d'un courant d'air plus violent et dense.
Pythagore (570 - 480 AJC) après être allé en Egypte s'installa à Crotone, en
Italie du sud, où il fonda son école.
En mathématique : il n'inventa pas le triangle rectangle que les Babyloniens et le Egyptiens connaissaient. Mais il en donna l'énoncé :
Dans un triangle rectangle, le carré de l'hypoténuse est égal à la somme des carrés des deux autres côtés.
On lui doit la table de multiplication qui porte son nom
En astronomie : Pythagore fut le premier à appeler le ciel cosmos (ordre) et à déclarer la sphéricité de la Terre, celle du Soleil et de la Lune et d'en conclure
:
Dans un triangle rectangle246
En musique il découvrit qu'il existe une relation entre la longueur d'une corde vibrante et la hauteur du son émis et découvrit les lois de l'harmonique
Anaximène (556 - 480 AJC), suivait ses prédécesseurs en concevant la Terre en suspension. Il la concevait plate et circulaire, recouverte d'un dôme céleste. Le Soleil et la Lune étaient aussi des disques plats qui tournaient autour de la terre. Il refusait toutefois le fait que le Soleil passe sous la Terre. La nuit, selon lui, il se dissimulait derrière l'horizon pour retourner à son point de départ matinal.
Anaximène croyait que les étoiles étaient clouées à la voûte céleste, ce qui en faisait les éléments les plus éloignés de la Terre. Un peu plus près se trouvaient les planètes, puis le Soleil
Anaxagore de Clazoméne (500-428 av. J.-C.), déduit de ses observations : la Lune, le Soleil et les planètes tournent sur des sphères solides et transparentes centrées sur la Terre, alors que les étoiles sont immobiles sur la sphère qui limite l'espace céleste et ne serait être dépassée
Empédocle (490 - 435 AJC), imagina l'Univers composé de quatre éléments originaux dont tous les corps sont une combinaison : la Terre, l'Eau, l'Air, le Feu, qui, à l'origine, existaient sur des sphères séparées : La Terre au centre, puis l'Eau, l'Air, et enfin le Feu le plus à l'extérieur. Empédocle, utilisa le mot éther pour désigner l'air atmosphérique, par opposition au brouillard...
Philolaos de Crotone (470 - 390 AJC) déduit de ses observations : la Terre n'est pas au centre de l'Univers, mais elle tourne sur sa sphère en un jour autour d'un Feu central, demeure de Zeus, différent du Soleil et placé au centre de l'Univers.
Leucippe (v. 460 – 370 av. J.-C.) enseignait que l'agencement des atomes forme toute chose de l'univers.
Démocrite (460 - 370 AJC), déduit de ses observations la nature est composée dans son ensemble de deux principes : les atomes (ce qui est plein) et le vide.
Platon (-427 — -348 AJC) imagine que le démiurge (créateur de monde) ne produit pas les corps directement, mais délègue à des dieux subalternes qui les fabriquent, tels des potiers. En revanche, l'âme du monde est produite directement, de toute pièce, par le démiurge.
Eudoxe de Cnide (408. 355 AJC) est principalement connu pour avoir complété la théorie dite des sphères homocentriques : Le Soleil, la Lune et toutes les planètes alors connues (Mercure, Vénus, Mars, Jupiter et Saturne)
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tournent sur des sphères solides et transparentes, autour de la Terre qui est immobile.
Héraclide du Pont (388 - 310 av. J.-C.) exposa la thèse d'un système géocentrique où Vénus et à Mercure tournent autour du Soleil. Par ailleurs, il aurait émis l'hypothèse de la rotation de la Terre autour d'elle-même, afin d'expliquer le mouvement apparent des étoiles au cours de la nuit.
Aristote (384. 322 AJC) remarque :
• une pierre, qui est d'essence terrestre tombe, car elle retourne à sa sphère d'origine qui est la Terre.
• la fumée, la vapeur, monte à sa sphère d'origine qui est le feu.
• l'eau des pluies et de l'écoulement des fleuves (de la montagne à la mer) retourne à sa sphère d'origine l'eau de la mer et des océans qui est juste au-dessus de la Terre.
• le mouvement des météorites, ces flammèches dans le ciel, est du feu piégé sur terre qui retourne vers sa sphère au-dessus de l'air. Ce feu est ainsi obligé de traverser l'air et créer ces flammes dans le ciel que nous identifions à des météorites qui brûlent en traversant l'atmosphère.
• Aristote tente d'expliquer l'effet d'accélération des corps qui tombent, par un principe de retour à l'écurie : de même qu'un cheval qui s'approche de son écurie a tendance à accélérer le pas parce qu'il revient chez lui, de même les corps accélèrent leur mouvement quand ils s'approchent de leur sphère d'origine.
• Aristote énonce un premier principe de dynamique, fondée sur l'observation. Pour expliquer la vitesse acquise par un corps que l'on tire ou que l'on pousse, il disait que la vitesse d'un corps est proportionnelle à la force qu'on lui applique (v = kF) : une charrue va deux fois plus vite si on la tire deux fois plus fort, de plus, la charrue s'arrête si on ne la pousse plus.
• Dans son Traité du Ciel il mentionne une estimation du périmètre de la Terre, qu'il établit à 400 000 stades (olympiques), et insiste sur la petitesse de cette longueur par rapport aux distances des corps cosmiques.
Pythéas fut un explorateur originaire de Massalia (l'antique Marseille). Il effectua vers 340 - 325 avant J.-C. un voyage dans les mers du nord de l'Europe.
Il rapporta de son voyage la preuve de la sphéricité de la terre, il confina
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notamment par la mesure des durées diurnes et nocturnes. Il expliqua le phénomène des marées, avec les phases de la lune. Aristarque de Samos (-320 – 230 AJC), démontre que la distance Terre- Soleil est environ 19 fois plus grande que la distance Terre -Lune. Malheureusement, sa mesure est fausse
Pour Aristarque : La terre décrit une orbite circulaire autour du Soleil, qui devient le centre de tous les mouvements. Cela explique l’alternance des saisons et simplifie le système des sphères Il suspecte que les étoiles qui brillent dans la nuit sont en fait des Soleil lointains
Archimède (-287.-212), en mathématique : initia les premiers travaux de géométrie infinitésimale, perfectionna le système de symboles algébriques et calcula la valeur de (π).
En physique, il fut à l'origine des lois de l'hydraulique dont le principe des corps plongés dans un liquide. Il est l'auteur du célèbre principe :
Tout corps plongé dans un liquide subit, de la part de celui-ci, une poussée exercée du bas vers le haut et égale, en intensité, au poids du volume de liquide déplacé.
De ces lois il tira diverses applications dont la vis pour remonter de l'eau
Il travailla sur l'optique, inventa la vis, l'écrou, et la roue dentée grâce à laquelle il construisit un planétaire représentant l'Univers. On le dit aussi le créateur de la came (disque non circulaire à saillie ou encoche) et le ressort.
Il mit en pratique ses connaissances théoriques dans un gra nd nombre de créations. On lui doit, par exemple, les poulies, les palans et les leviers, qui permettent à l'homme de soulever bien plus que son poids.
Donnez-moi un point d'appui, et je soulèverai le monde".
Dans le domaine de la guerre il crée la meurtrière, les catapultes, les bras mécaniques utilisés dans le combat naval.
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LA RÉVOLTE
En Grèce l’égalité politique n’avait pas guéri l’inégalité sociale ; elle en avait seulement rendu plus sensible l’inévitable amertume ; et la lutte, assoupie entre la noblesse effacée et le peuple vainqueur, elle s’était réveillée entre les riches et les pauvres ; c’est-à-dire entre ceux qui, possédant quelque chose, voulaient le garder ; et ceux qui ne possédant rien, voulaient tout prendre.
Cette lutte sociale allait entrer dans la période de sa plus vive intensité par l’intervention
des Romains dans les affaires de la Grèce. Par un enchaînement singulier des événements, cette intervention se produisit pour la première fois au plus fort de la lutte engagée entre Rome et les Carthaginois.
Rome connaissait désormais l’état social de la Grèce et sa faiblesse. Il avait suffi qu’une flotte romaine parût dans les eaux grecques pour que la querelle sociale cesse d’être seulement intérieure et domestique chaque faction ve ut se fortifier par l’appui qu’offrent les Romains.
En l'an 146 avant notre ère, les Romains, en occupant la Grèce, y réduisirent l'activité intellectuelle au profit d'Alexandrie
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Les Romains
LES ÉTRUSQUES
Les Étrusques sont un peuple qui vivait depuis l'âge du fer en Étrurie, territoire correspondant à peu près à l'actuelle Toscane et au nord du Latium, soit le centre de la péninsule italienne.
Leur langue n'a jusqu'à présent pas pu être rattachée de façon satisfaisante à un groupe identifié. En revanche on constate que leur 'alphabet est dérivé d'un alphabet grec et a inspiré l'alphabet latin, comme leur système de numération à base 10, fut utilisé, plus
simplifié, par les Romains.
La numération romaine avec les sept symboles : I, (V= 5), (X=10), (L= 50), (C=100) (D=50), (M=1000), surent exprimer tous les nombres jusqu'à quelques milliers.
La numération romaine ne permettait pas d'effectuer des opérations arithmétiques. Pour compter, les Romains, comme les Grecs et les Étrusques, ne firent pas usage de leurs chiffres, mais d’abaques.
Les Étrusques furent de très habiles artisans et eurent de grands artistes, peintres de
fresques dans les tombes, comme celles de Tarquinia par exemple, sur vases, sculpteurs qui réalisèrent de véritables chefs-d'œuvre tant en bronze qu'en terre cuite. Ils furent également d'excellents joailliers, d'habiles.
L'apogée de la puissance étrusque se situe au VIIe siècles AJC période pendant laquelle l'alliance avec Carthage leur assure la maîtrise de la Méditerranée occidentale.et l’occupation de Rome. En 509 AJC, Rome se libère et peu à peu, l'Etrurie
tombe sous la domination romaine, mais sa civilisation ne meurt pas pour autant ; elle continue d'exercer son influence sur Rome de sorte qu’à l'époque d'Auguste, la langue étrusque est encore parlée.
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LES ROMAINS
Dès les années 500AJC les romains dont les conditions matérielles de vie étaient celles des peuples du sud-est de l’Europe, d’Asie Mineur et d’Egypte, avaient développé un pays prospère. Leurs artistes et architectes s’inspirèrent des grecs et des étrusques. De ces derniers ils copièrent en particulier la voûte en berceau.
Les urbanistes romains créèrent des villes aux nombreux monuments publics :
temples, théâtres, forum, thermes, latrines.
L’eau directe des sources ou emmenée par aqueduc coulait, en abondance, tant
dans les lieux et fontaines publiques que les demeures privées.
Les palais des dignitaires et les luxueuses demeures des gens aisés ainsi que les thermes publiques ou privées disposaient d’un foyer central alimenté par du bois ou du charbon de bois. Il servait à la fois à chauffer l'air et l'eau des piscines. L'air chaud fourni par le foyer circulait entre les murs et sous les planchers.
Les Romains pour s'éclairer utilisaient la torche, la chandelle ou la lampe à huile en terre cuite simple, sur pied ou suspendue.
Les armées romaines étaient équipées de lances, d’épées, de casques, de cuirasses, de jambières de métal et de clipeus (bouclier rond en bronze), ainsi que différentes armes lourdes comme les catapultes inventées par Archimède
Les Romains furent de grands guerriers, mais de piètres mathématiciens et scientifiques. Ils étaient trop occupés à conquérir le monde pour s'attarder aux choses de l'esprit...
Les armées romaines occupèrent successivement l’Italie, la Grèce, l’Afrique du nord (Carthage), l’Asie Mineur, l’Espagne et la Gaule.
En l'an 146 avant notre ère, les Romains, en occupant la Grèce, y réduisirent l'activité intellectuelle au profit d'Alexandrie.
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DES PHILOSOPHES
Ménélaüs ou Ménélaos d'Alexandrie (vers 70 – vers 140) mathématicien et astronome grec.
Héron d'Alexandrie (100 - ? de notre ère) Ses recherches mathématiques visaient principalement l'aspect pratique de la mesure des objets. Et en physique : à propos de la lumière et ses réflexions, à partir des lois d'Archimède, il inventa les pompes aspirantes, les siphons et les fontaines.
Héron à l’aide de cordes, de poulies et d'engrenages, créa des automates mus
par l'eau, il s'intéressa également à la vapeur et à l'air comprimé.
Connu pour les machineries décrites dans son Traité des pneumatiques, on lui doit par ailleurs un projet de machine destinée à ouvrir automatiquement les portes d'un temple.
Ptolémée Claude (100 - 170 de notre ère) est l'auteur de deux livres : l'un intitulé almageste dans lequel, à côté d'un traité de trigonométrie plane et sphérique, il donne la liste de 1022 étoiles, et les mouvements des astres (Soleil, Lune, planètes) en se référant, souvent, à Hipparque. Un autre traité concerne la Géographie.
Ptolémée Claude d’Alexandrie (100 - 170 de notre ère) est l'auteur d'un traité de trigonométrie plane et sphérique. En astronomie : il complète la théorie de la rotation excentrée du Soleil, de la Lune et des planètes autour de la Terre.
Bien que Rome soit surtout connue comme cité militaire, il est vraisemblable que dès les temps les plus reculés une grande partie de la population romaine vivait du commerce.
Dès que la période de conquête fut terminée, les choses se régularisèrent conformément aux lois économiques ;
COMMERCE
Le commerce très actif qui se faisait entre les différentes provinces de l'empire portait principalement sur les produits alimentaires, les esclaves et divers articles précieux manufacturés dans l'Orient
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Les importations d’Afrique et d’Arabie passaient par l’Egypte ou la Syrie pour arriver à la côte, où ils étaient en partie réexportés avec ceux de ces contrées. Ce commerce se fit surtout par l'intermédiaire des populations syriennes qui depuis des siècles vivaient en grande partie de l'industrie commerciale. Le siècle après les conquêtes d'Alexandre, fut suivie d'une diffusion des marchands syriens dans tous les ports de la Méditerranée orientale.
Ce qui fut favorable au commerce c’est aussi la sécurité des voies de communication.
Mais on se tromperait si l'on croyait que les marchandises circulaient librement d'une extrémité à l'autre de l'empire
; chaque province avait ses droits de péage, de passage et de douane. Non seulement on conservait ceux qui existaient avant la conquête, mais fréquemment on en créait de nouveaux. Le taux du tarif des douanes romaines variait selon la valeur des objets, il était plus fort sur les objets de luxe.
On pense que les échanges commercions furent favorables à l’expansion du
christianisme dont le siège était à Rome
De toute façon il semble établi qu’il y eut des inégalités : En 312 dans Rome, la ville la plus christianisée d’Italie, il y aurait eu moins de 10 % de chrétiens. L’étude des papyrus permet le chiffre 20 % de chrétiens en Égypte6. En Asie Mineure, il y aurait eu 30 % de chrétiens et 10 à 20 % en Gaule et en Espagne.
LA CHUTE DE ROME
L'Empire romain est devenu trop grand et trop malmené pour être gouverné
er
efficacement par un seul homme. Théodose I
le Grand décida d'une
corégence en confiant à ses deux fils Honorius et Arcadius les deux parts de
l'Empire l’une occidentale l’autre orientale.
Quant aux barbares pour tout Romain, n'étaient pas des êtres sauvages et assoiffés de sang mais des hommes qui parlaient un langage qui lui était incompréhensible et dont la civilisation lui apparaissait primitive. Il serait inexact de se représenter des mondes romains et barbares comme deux mondes.
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A toutes les époques, Rome a su accepter l'installation de peuples barbares à l'intérieur de ses frontières. Dès la fin du IIIe siècle, les empereurs romains ont accueilli de plus en plus de mercenaires barbares comme soldats : Francs, Goths, Saxons, Alamans viennent grossir les rangs de l'armée tandis que les Romains d'origine se désintéressent de la guerre. Ces soldats barbares offrent évidemment une faible barrière de protection contre les incursions des autres tribus barbares, qui pénètrent de plus en plus dans l'Empire.
En outre, Rome concède de plus en plus de territoires à des Germains alliés à des fins de colonisation. Mais graduellement, ces derniers fondent des royaumes souverains sur le sol de l'Empire.
Ces deux mondes s'opposent. Il y a, d'un côté, le citoyen romain, vivant libre dans un Etat policé, sous l'autorité d'un prince conscient de son rôle d'organisateur, dans un certain confort matériel et intellectuel. De l'autre, on trouve des sujets vivant en tribus, soumis aux caprices d'un chef tout-puissant, sans lois écrites ni idéal commun, et de surcroît illettrés. Mais ces deux civilisations n'apparaissent comme irréductiblement séparées que pour une élite minoritaire : pour le reste de la population, rurale et inculte, la différence est-elle si claire ? Les informations manquent quant aux couches populaires, mais nul doute que le nœud du problème réside dans cette masse de la population de l'Occident romain, inconsciente de son appartenance à une romanité qu'elle pourrait défendre.
Il n'y a pas eu "invasion" mais plutôt "installation" des Barbares. Néanmoins, au IVe et Ve siècles, l'avancée a pris la forme d'attaques qui sont allées en s'intensifiant. Après la mort de Théodose en 395, l'Empire romain est réparti entre ses deux fils, Honorius et Arcadius, et laissé à la régence des généralissimes barbares Stilicon et Rufin. Dans le même temps, le Wisigoth Alaric mène une guerre personnelle contre l'empire romain d'Orient. Il parvient à obtenir le commandement de l'Illyrie (actuels Balkans) en 397. Véritable seigneur de la guerre, il prélève l'impôt sur le territoire romain pour son propre compte. En 401, il décide d'attaquer l'Occident, et notamment l'Italie. Stilicon contient ses assauts, mais après l'assassinat du généralissime, en 408, Alaric a la voie libre. En 410, à sa troisième tentative de siège, il pille Rome. Le sac de la "Ville éternelle" a un immense retentissement.
Ces guerres dans la péninsule italienne obligent l'Empire à dégarnir la frontière du Rhin pour obtenir des renforts. En conséquence, en décembre 406, le Rhin est franchi par des bandes de Vandales, de Suèves et d'Alains qui dévastent la Gaule avant d'occuper l'Espagne. Derrière eux, les Francs et les Burgondes envahissent la Gaule.
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Vers 412, Athaulf, successeur d'Alaric, se réconcilie avec l'empereur d'Occident Honorius, dont il épouse la sœur, après l'avoir prise en otage, et s'institue protecteur des Romains. Installé en Gaule Narbonnaise puis en Aquitaine, il fonde un royaume wisigothique au cœur de l'Empire romain. Après sa mort, en 415, le gouvernement impérial romain choisit d'intégrer les Barbares à ses propres troupes. Contre les agressions extérieures, l'Empire utilise des cavaliers huns et installe de nouveaux fédérés, Francs saliens mais aussi Burgondes, en Gaule.
Lorsqu'en 451, Attila, roi des Huns, investit la Gaule, le généralissime Aétius unit les communautés barbares installées en Gaule aux dernières troupes régulières. Après la victoire contre Attila, les fédérés mènent une politique indépendante de l'Empire. Les terres qu'ils ont reçues en protection deviennent des principautés barbares. L'Empire d'Occident se délite de l'intérieur. Les Francs confirment leur installation sur le territoire de la Belgique et des Pays-Bas actuels, puis s’étendent jusqu'à la Somme. Quant aux Burgondes, longtemps cantonnés autour du Lac de Genève, ils étendent leur territoire jusqu'à Lyon et Langres dès 457. Enfin, les Wisigoths s'assurent la domination de toute la Méditerranée occidentale.
Rome est encore pillée deux fois en 20 ans. L'empereur n'est bientôt plus qu'un fantoche entre les mains des rois barbares. En 476, le dernier empereur romain d’Occident, Romulus Augustule, qui porte, ironie de l'Histoire, le nom du fondateur mythique de Rome, est déposé à Ravenne par Odoacre, Barbare et chef de l’armée d’Italie du nord. L’empire romain d’Occident cesse d’exister et laisse la place à une mosaïque de royaumes barbares.
Les civilisations perdues se reconstitueront.
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